Visite dans les Ruines [libre]

Spoiler:

Un paysage de mort. Un paysage tel que l'on voit parfois lors de films catastrophes, au cinéma, et encore, cela paraissait bien peu face à l'étendu des dégâts. Les croyants auraient pu dire que le Tout-Puissant lui même avait déversé sa rage là où l'on n'est pas prêt à la voir, à l'accepter. Et pourtant, la dite rage était bien là, bien visible. Visible, mais pourtant il n'y avait plus rien à voir. La cité balnéaire était devenue une ville fantôme.

La moitié de la ville d'Atlantic City avait été réduite à néant. Malgré les efforts des équipes de secours, des cadavres gisaient encore sous les décombres des bâtiments détruits, attendant patiemment, dans leur silence infini, qu'on les nomme, les étiquette, les emballe, et les enterre. Sur presque 10 000 morts ou disparus, seulement 4104 cadavres purent être identifiés, les autres n'étant pas encore trouvé ou dans un trop mauvais état pour qu'on leur attribue une identité digne de ce nom. Les trois quart des bâtiments administratifs de la ville avaient été détruits, ainsi qu'un nombre considérable de cliniques, tous les hopitaux de la ville, quelques casernes de pompiers et le commissariat central. L'onde de choc ne dévasta pas que la ville elle-même, on comptait des victimes et des dégâts jusque sur la plage, voire en mer.

L'Amérique avait été touchée plus que jamais. Le nombre de civil tués lors d'une attaque sur le sol Américain était inégalé dans l'histoire du pays, sans compter le nombre de ressortissants étrangers ayant été tués lors de la catastrophe.

Le Président Norman O'Brian, qui avait commencé son mandat en apprenant la catastrophe, embarqua à bord de l'Air Force One à destination de la base militaire de Falkland, dans le New Jersey, qu'il connaissait bien. De là, il se rendit sur les lieux de la catastrophe dans un camion de l'armée, pour ne pas attirer l'attention. Le Président ne voulait pas prendre de risque et ne voulais pas non plus faire de cette visite une campagne publicitaire. Les médias relayaient déjà assez les informations comme cela, inutile d'en ajouter, selon lui. Le but de sa visite était d'aller au contact des survivants, écouter, parler avec eux. Leur montrer qu'il essayait malgré tout d'être l'homme de la situation, de faire de son mieux, même si cela semblait désespéré.

Escorté par quelques militaires Norman O'Brian rencontra des sinistrés qui avaient tout perdu : famille, boulot, maison, loisirs, statut. Leur goût de vivre avait disparu. Ils n'étaient plus que des fantômes, habitant un champ de ruines blanches. Déjà 39 survivants avaient décidé d'en finir avec cette vie qui n'en était dorénavant plus une.

Espérant rencontré quelques citoyens en meilleur état, le Président rendit visite au secours qui fouillaient sous les décombres afin de trouver d'autres cadavres, toujours plus de cadavres.

Lui-même ému, Norman et son escorte de Marins erraient dans ce qu'il restait des rues d'Atlantic City, cherchant des citoyens à soutenir. En marchant, il prononça quelques mots en fixant l'horizon vide.

" Qu'a-t-on fait...qu'avons nous laissé faire...le méritions-nous ? "

Le président marchait d'un pas lent et disgracieux dans cette rue où certains cadavres jonchaient encore les trottoirs, cachés derrière quelques voitures totalement détruites. Saluant toujours sur son passage les rescapés, les secours et les citoyens venus l'applaudir, Norman essayait toujours de comprendre. Lui qui voulait œuvrer pour la paix, la justice, la démocratie s'était retrouvé avec l'une des attaques les plus emblématiques de l'histoire. Sept ans après les attentats du 11 Septembre 2001, l'Amérique allait devoir relever un nouveau défi. Mais hors de question de reproduire les erreurs du passé. Tous ces soldats, partout, tout le temps, ça n'était pas une guerre, mais une mesure de prévention. Tout en y réfléchissant, Norman observait la foule, et ne semblait pas porter plus d'optimisme qu'eux. Pourtant, il était là, et quoi qu'un peu éteint, il pensait que le peuple américain pouvait compter sur lui.

En s'avançant dans la rue, il aperçu un homme, assis sur les marches de ce qui restait du City Hall d'Atlantic City. L'homme observait le ciel et semblait calme. Il n'avait pas l'air d'un rescapé, et pourtant, comme tout le monde ici, ses vêtements semblaient être couverts de poussière. Norman s'avança vers l'homme, entouré par ses soldats. Photographié de toute part, Norman s'engagea sur les marches en ruine et s'approcha de l'homme. Lui tendant la main, il lui prononça quelques mots.

" Bonjour, monsieur. Je suppose que vous me reconnaissez. Êtes-vous un rescapé ? Un riverain ? "

Un attroupement de journalistes s'était alors ruée sur le Président O'Brian. Leur rappelant qu'il s'agissait de l'attentat le plus dévastateur qu'aient connu les Etats-Unis et non de l'ouverture des J.O., il se retourna vers le jeune homme et prononça quelques phrases sur un ton quelque peu rassurant, mêlé à de la tristesse :

- Sachez que, le Gouvernement et moi-même avons d’ores et déjà lancé un programme de restauration de la ville d'Atlantic City.

Se retournant vers les caméras et les appareils photos, il se laissa prendre en photo en serrant la main de David.

- Ce jeune homme est un citoyen exemplaire, comme il y en existe de nombreux autres aujourd'hui.

Lachant la main de David, il se retourna vers lui et lui adressa discrètement quelques mots à l'oreille.

- Je vous félicite, Monsieur. Grâce aux gens comme vous, tout le monde ne perdra pas l'espoir. Vous contribuez à nous sauvez d'une grave dépression.

Il descendit alors les marches de ce qu'il restait du City Hall d'Atlantic City et continua sa visite, escorté d'une dixaine de militaires et suivit par les hordes de journalistes.