Apparition

18h30. Un tourbillon s'amorça pour se condenser et prendre forme humain : Minst Adem était de nouveau là, prêt. Il était Otneiv, maintenant ; l'air personnifié. Minst regarda par dessus le parapet et ne vit que du vide avec, au fond, un mince trait qui signifiait une rue. Il fut prit d'une nausée qui faillit le faire basculer dans le vide ; les effluves de carbone des pots d'échappement, en-bas, lui donner envie de vomir. et à défaut de ne pouvoir car il n'avais rien avalé ces 3 dernières années, il eut une crise d'asthme... La pollution ne lui valait vraiment rien. Minst se dirigea vers la porte de service de l'immeuble pour descendre par l'intérieur mais fut arrêté par une présence... Car comme l'arrivée d'un nouveau mutant ne passait jamais inaperçue, surtout lorsqu'elle était aussi visible qu'une matérialisation...

- Qui est-là ?, demanda Mi sans se retourner. Montrez-vous.

Il savait déjà que c'était une personne d'apparence humaine, car l'air autour en avait la forme...

- Tu n'es pas très discret, fit la silhouette de Mako Hena.

Iké sortit de l'ombre et présenta son joli visage au ciel, le laissant la fouetter de ses gouttes de pluie. Elle regarda le garçon ; il avait l'air plus jeune qu'elle. Une lueur avide dans les yeux, elle se pourlêcha la lèvre inférieure. Les jeunes étaient si faciles à pousser à bout. Mais il fallait se méfier, y aller comme sur des oeufs ; car celui-ci était-un mutant. Ami ? Ennemi ? Sans doute était-il avec la Confrérie, après tout. Mais sa bouille de bon enfant donnait envie de vomir à Iké.

- C'est sympa, ce que tu as fait, là. C'était quoi ?

*Viens à moi*, pensait-elle. *Viens, et brûle-toi les ailes...*

Minst examina la nouvelle venue. Le ton enfantin qu'elle avait utilisé contrastait étonnament avec le fait qu'elle ne devait pas être si innocente que cela, étant donné qu'elle était mutante, elle aussi. Car si celle-ci avait réagi ainsi, c'était forcément qu'elle était mutante ; un humain normal l'aurait traité de monstre. À moins que les choses ici n'eussent beaucoup changé mais il en doutait.

- Je ne fais qu'un avec l'air, répondit-il. Mon corps et mon âme lui sont liés et je peux disparaître selon ma volonté ; si tant est que j'en aie... Qui es-tu donc ? Es-tu une mutante, toi aussi ?

- Pas vraiment, non, mentit Mako (après tout, elle pouvait se le permettre car le garçon avait l'air de débarquer d'on ne savait où et était complètement paumé). En fait je suis une humaine.

Mako avait failli se retenir de le dire. Bwark ! Elle ? Une humaine ? Elle n'avait décidément aucune fierté, strictement aucune...

*Sonde, sonde, ma petite*, pensa-t-elle. *Oh, je vois...*

- En fait, reprit-elle. Pouvoir disparaître, c'est un don de défense, non ? Tu ne peux que fuir, c'est un peu un don fait pour les faibles... Ca ne te gênes pas trop ?

Minst baissa les yeux vers la circulation en contre-bas. Un élan de nausée le prit encore et il répliqua.

- Sans doute... mais telle est ma nature. Détaché de la réalité, objectif et insensible. C'est pour cela que je suis ici. Pour prendre part à la bataille que se livrent les bons et les Mauvais... Quels sont leurs noms, dis-moi ?

Il avait beaucoup à rattraper. Bizarrement, il ne savais pas s'il pouvait faire confiance à cette fille. Elle lui dirait la vérité, certes, mais elle lui cachait quelque chose. Mais quoi ? Elle avait des projets, sans doutes. Etaient-ils bons pour lui, ou étaient-ils mauvais ? Il ne pouvait le dire. Le paradis noir des yeux de la jeune femme avait pourtant l'air si sincère... et en air il s'y connaissais.

- Que faisais-tu, ici ?, demanda-t-il, voyant qu'elle n'avait rien à faire sur un toit.

Mako eut un véritable sourire sadique, qu'elle n'essaya même pas de cacher. Iké entrait en scène, maintenant.

- Tu ne fais que fuir ? La réalité serait-elle trop dérangeante, ou trop cruelle avec toi pour que tu veuilles te fondre avec l'air et ne plus exister en tant qu'être ? Qu'est-ce qui te fais fuir ? Le passé ? Les Autres ? Ou tout simplement... toi ?

Le visage d'Iké s'éclaira, offrant un sourire rayonnant alors qu'elle s'était approchée du jeune homme, lui caressant le menton.

- Oh, c'était donc ça... Pauvre de toi, je vois pourquoi tu cherches à oublier ; je ferais pareil à ta place.

La mutante montra ses sacs au sol et dit :

- Comme toi, j'ai voulu fuir de l'endroit où j'habitais... Un bordel.