Minuit, heure de crime [PV Lénore] [[SUJET TERMINÉ]]

[[24 heures après la rencontre « au gré des couloirs »]]


Roween arriva dans le Hall et consulta sa montre – peine perdue, car celle-ci était devenue spectrale, tout comme elle, et n’affichait non plus l’heure correcte, mais celle à laquelle la jeune fille s’était séparée de son corps. Ce fut donc plus par habitude que par intérêt que Roween y jeta un regard et peut-être ferait-elle ainsi comprendre à Lénore qu’elle s’impatientait. D’ailleurs, elle se demandait si la timide petite Lénore allait venir ou si elle était restée dans son lit, la couverture tirée jusqu’au menton.

Il devait être minuit passé. Roween s’assit dans un fauteuil – et passa à travers, se retrouvant par terre. « Et merde ! », chuchota-t-elle, se remit debout et répéta l’opération en se concentrant *FAUTUEIL*, songea-t-elle et parvint cette fois à s’asseoir dessus. Durant un instant, elle avait oublié qu’elle ne possédait plus de corps et qu’elle ne pouvait donc pas techniquement s’asseoir sur quelque chose. C’était flippant quand cela arrivait et Roween se jura de se concentrer un peu plus la prochaine fois.
La jeune fille croisa les jambes et agita le bout de sa botte droite en s’amusant de la rendre quasi transparente avant de la faire redevenir parfaitement matérielle. Roween adorait faire ça. Son pouvoir, c’était aussi ce genre d’effets spéciaux, ce qui lui fit penser qu’il fallait qu’elle repasse à la vidéothèque pour louer quelques fils d’horreurs truffés de fantômes.
Il fallait bien s’inspirer quelque part.

PP: "Au gré des couloirs"



Lénore avait hésité. Longtemps, très longtemps. Elle était même revenue en arrière alors qu’elle avait déjà quitté son dortoir, mais finalement, elle avait saisi son manteau et était venue…la tentation avait été trop forte. Lénore avait mis également longtemps à choisir quoi prendre avec elle et quoi mettre sur elle. Finalement, elle n’avait pas changé grand-chose, abordant l’une de ses habituelles jupes longues et une blouse à col montant, qui la faisait ressembler à l’un de ces héroïnes maladives à la Charles Dickens. Le peu d’argent qu’elle possédait se trouvait dans la poche droite de son manteau, roulé dans un mouchoir.

Sur la pointe des pieds, Lénore descendit les marches qui la menaient vers le grand Hall d’entrée. Quelque chose en elle la suppliait de faire demi-tour et, au fond d’elle-même, Lénore était convaincue que ce qu’elle faisait était mal, qu’elle n’avait pas le droit de faire ce qu’elle était entrain de faire et que, tôt ou tard, elle allait devoir en payer le prix. Pourtant, elle était également convaincue que ce que Roween lui avait fait miroiter valait le prix qu’elle allait devoir payer. L’espoir de pouvoir un jour non seulement accepter, mais dominer son pouvoir valait à ses yeux toutes les punitions qu’on infligeait aux élèves récalcitrants.

Lénore arriva dans le Hall et regarda autour d’elle. Pas de Roween. Ce n’est qu’au deuxième coup d’œil qu’elle aperçu sa camarade, confortablement installée dans un fauteuil. Lénore se mordit la lèvre inférieure. Dernière chance de partir, dernière chance de revenir en arrière et faire comme si rien ne s’était passé… – et pourtant, Lénore continua à avancer. Arrivée à la hauteur de Roween, elle serra une main contre l’autre et regarda la fille qui lui faisait face: elles n’avaient strictement rien en commun. L’une brune, l’autre blonde, l’une sombre, l’autre claire, l’une visiblement à l’aise, l’autre apeurée. Et pourtant, Lénore avait fini par suivre cette fille qui était pourtant si différente d’elle. Peut-être étais-ce justement pour cette raison que Lénore avait décidé de tenter le coup.
« Je…je suis désolée…j’ai…un peu de retard… » Bien. Magnifique. Elle a du remarquer, songea Lénore et en aurait presque secoué la tête. Second essai. « Et…euh…maintenant? Qu’est-ce qu’on fait? » Mieux. Beaucoup mieux. Question pertinente à laquelle Roween allait forcément pouvoir répondre, et après, Lénore saurait enfin à quoi s’attendre…enfin, c’est ce qu’elle espérait.

Roween l’avait vu venir depuis un bon moment, à croire que cette fille sentait la peur à une lieue, mais elle resta là ou elle était, sans bouger, jusqu’à ce que Lénore soit arrivée quasi à sa hauteur. Lorsqu’elle l’eut en face d’elle, Roween aurait volontiers secoué la tête : mais c’était quoi, ce look de grand-mère ? Sûrement que Lénore était fringuée exactement comme il le fallait…si elle voulait jouer dans Un Conte de Noël, mais pas vraiment pour le programme de ce soir. Roween se promis d’arranger ça une fois sortie de là, car sans vouloir changer Lénore en reine de la nuit, il fallait vraiment faire quelque chose.

Lénore annonça qu’elle avait du retard et Roween haussa simplement les épaules. Une minute plus tôt, elle était encore entrain de consulter inutilement sa montre, mais maintenant, elle était simplement surprise que Lénore soit vraiment venue, car dans son fort intérieur, Roween n’avait plus été vraiment sûre de la voir débarquer. Pari gagné, elle avait réussi à sortir la blondinette de son lit douillet.
La seconde question de Lénore méritait une réponse un poil plus développée. Roween se mit debout, brossa quelques grains de poussière imaginaires de son pantalon noir et jeta un coup d’œil à la porte. « Eh bien, on va aller s’amuser un peu. » Elle décrocha un large sourire à Lénore, qui ne paraissait pas trop rassurée, mais au lieu de s’approcher de la porte d’entrée, elle alla se placer devant la fenêtre.
« D’habitude, lorsque je vais me balader, je prends la porte, mais avec toi, il vaut mieux éviter, il y a malheureusement trop de chances de te faire remarquer. On va donc improviser… »
Sur ses mots, Roween disparu, pour réapparaître sur l’appui de la fenêtre. La jeune fille ouvrit la fenêtre en grand, attrapa la main de Lénore et l’aida à passer à travers. Le hall se trouvant au rez-de-chaussée, il n’y avait que peu de risques de sortir par là. Une fois Lénore passée, Roween referma la fenêtre depuis l’intérieur et passa tout simplement à travers la vitre. Décidément, elle ADORAIT son pouvoir.

« Bon, ça, c’est fait. Maintenant, on se tire et on va se prendre un peu de bon temps. » Sans en dire plus sur la suite du programme, Roween se mit en marche. Lénore étant avec elle, Canterville n’avait pas d’autre choix que de marcher, mis elle le faisait avec un certain plaisir, imaginant déjà la soirée qu’elle allait passer. Décidément, la blondinette avait encore rien vu.

[[OCC: Désolé du retard!]]


Lénore se sentait toisée et elle n’était pas sans savoir qu’elle-même et son style ne correspondaient pas vraiment à ce que Roween semblait apprécier. Oh, bien sur, elle ne connaissait pas vraiment bien cette fille, mais sa manière de s’habiller et de la regarder en disait long sur ce qu’elle pensait. Lénore avait toujours eu un certain chic pour deviner ce que d’autres gens pouvaient penser d’elle, rien qu’en regardant l’expression de leur visage. La plupart des expressions étaient parlante, peut-être bien plus encore que ce que voulaient les gens, et Lénore ne demandait qu’à pouvoir y voir de la satisfaction. Elle voulait plaire, elle voulait faire plaisir aux gens qu’elle rencontrait, mais elle n’y parvenait pas. Ce qu’elle avait pu voir la plupart du temps avait été au mieux de l’indifférence, au pire du dégoût pur et simple.

Pourtant, même si Roween n’appréciait décidemment pas vraiment ni son look, ni sa façon de se tenir, elle ne se moquait pas d’elle, du moins pas ouvertement, ce qui était déjà beaucoup. Au lieu de cela, elle répondit qu’elles allaient maintenant s’amuser un peu mais qu’elles devraient changer de tactique de sortie, et alors que Lénore voulaient déjà rappeler à Roween qu’elle ne serait pas capable de traverser un mur ou une porte, sa camarade avait soudainement disparu, avant de réapparaître sur le bord de la fenêtre, le sourire aux lèvres, et de tendre la main vers Lénore. Celle-ci hésita, puis attrapa de sa min gantée celle qui lui tendait sa camarade et grimpa sur le bord de la fenêtre, avant de sauter par terre. Il n’y avait pas beaucoup de hauteur. Un mètre et demi peut-être, mais Lénore atterrit lourdement et sentit l’air s’échapper de ses poumons. Elle avait peur et, de plus, elle n’était pas sûre de pouvoir assumer ses actes plus tard.

Lorsque Lénore releva la tête, elle vit Roween fermer la fenêtre de l’intérieur et passer à travers la vitre, et alors qu’elle avait déjà vu le pouvoir de Roween en action, elle ne pu réprimer un hoquet de surprise. Décidément, elle allait devoir s’habituer à se balader avec une fille qui traversait les murs, les portes et les fenêtres.
« Bon, ça, c’est fait. Maintenant, on se tire et on va se prendre un peu de bon temps », lui révéla Roween, après avoir atterri à côté d’elle en souplesse, et sans laisser le temps à Lénore de poser plus de questions, elle se mit en marche. N’ayant pas d’autre choix que de suivre sa camarade, Lénore accéléra pour la rattraper. Elle devait marcher vite pour rester à sa hauteur.
« Attends…et qu’est-ce que tu appelles prendre un peu de bon temps ? », demanda-t-elle à Roween, tout en tentant de rester à la même hauteur qu’elle. « Parce que…ce n’est pas que je ne veuille pas m’amuser…je sais m’amuser…c’est pas ça, mais…mais je ne peux passer par les murs, moi! »

[HJ: Voila, ENFIN une réponse…encore pardon ^^]


Décidément, cette fille amusait beaucoup Roween. Elle était si inquiète, si peureuse, au point que Roween se demandait si Lénore, à chaque fois qu’elle pénétrait dans une pièce peuplée de gens, demandait à chacun la permission de respirer le même oxygène qu’eux. Vu la candidate, elle en aurait encore été capable. Roween sourit intérieurement: elle allait lui montrer ce que c’était de vivre, de s’amuser et de faire un pied de nez à tout règlement. Jusqu’à maintenant, elle ne savait pas si Lénore aurait suffisamment de cran pour la suivre, mais le fait qu’elle se soit présentée à leur rendez-vous encourageait cet espoir. Peut-être que Roween aurait pu trouver dans cet institut d’autres filles qui l’auraient suivie beaucoup plus facilement, mais la brune était blasée par les midinettes qui ne pensaient qu’à se tartiner de maquillage pour aller faire les yeux doux aux garçons, tout en baissant les yeux lorsqu’elles se faisaient prendre par le gardien de nuit. Lénore était différente, et malgré sa timidité, Roween avait su instinctivement que cette fille en voulait, qu’elle n’attendait que la petite poussée de l’extérieur pour se jeter à l’eau.

Lénore la rattrapa, trottant presque à côté d’elle comme un petit chien surexcité partant pour sa promenade. Elle demandait ce que Roween comptait faire, et celle-ci répondit par un grand sourire dont le but était de ne surtout pas rassurer Lénore.
« Oh, mais je ne doute pas que tu sais t’amuser! », répondit Roween, toujours avec le même sourire. « Et ne t’inquiètes pas, tu n’aura pas besoin de passer à travers les murs. Les portes, ça peut être très pratique aussi. »

Soudain, Roween s’arrête et se retourna vers Lénore. « Tu sais, j’avais prévu d’aller traîner un peu en ville, mais ça ne va pas être possible de te prendre avec moi. Pas comme ça, du moins. » Joignant le geste à la parole, Roween fronça les sourcils en examinant la tenue totalement démodée de sa camarade. C’est alors qu’elle eut une idée…
« Allez, suis-moi, je vais te montrer quelque chose que tu vas adorer. »
Au lieu de continuer tout droit, Roween bifurqua sur la gauche et se mit à descendre la rue.


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