Le beau & la pauvre chose [pv]

Pv Colossus

Je ne sais plus quoi penser, quoi dire, quoi faire. Je reste là, planter bêtement devant mon reflet, a me demander ce que l’on peut penser de moi. Je suis si sale, si laide, si faible, si meurtrie… Je ne peux enlever son image de mon esprit, il me hante a un point que je ne peux imaginer. Il a blessé mon âme et cette blessure béante saigne toujours aussi abondamment.

Ses yeux se posaient tout autour d’elle sans chercher quelque chose en particulier, on aurait dit que son corps était dénué d’âme et de vie, et qu’il ne faisait qu’avancer, machinalement dans les rues sombres et vides de New York. Ce n’était pas le coin le plus fréquenté a cette heure si, c’est pourquoi elle était là, à observer les seuls passants du moment, des hommes pour la plus part, qui la fixait d’un œil lubrique. Très souvent, elle avait l’impression que ces personnes arrivaient à la voir nue, a la déshabiller d’un regard, de voir a travers ces vêtements les blessures qu’elle avait subit, ce qu’elle voulait a tout prix cacher. Bien sur, il n’en était rien, sauf si un mutant qui voyait à travers les habits se trouvait parmi l’un d’eux.

Ces regards l’obsédaient, elle en souffrait encore plus. Comment pouvaient-ils la comprendre ? Comment pouvaient-ils savoir que le fait qu’ils posent leurs yeux sur elle l’inquiétait encore plus ? Elle ne savait pas en qui avoir confiance aujourd’hui, et ceux depuis neuf ans maintenant et ses lèvres étaient restés hermétiquement closes. Ces gens, autour, ne devaient même pas s’en soucier, trop occupé à boire et à noyer leurs pseudos-malheurs dans l’alcool. Des rires échappaient aux plus malhonnêtes, tandis qu’elle traçait sa route sans lever les yeux pour éviter d’avoir a leurs adresser la parole. Officiellement, ce n’était pas loin. Selon ses souvenirs, aussi clairs qu’ils pouvaient l’être, son viol s’était fait à quelques lieux de là, dans une rue adjacente alors qu’elle rentrait chez elle.

En ce temps, son père n’habitait pas si loin, le coin était mal famé, mais l’appartement était plutôt coquet et douillet et les gens du quartier n’osaient pas s’en prendre a Rory pour la simple et bonne raison qu’ils respectaient tous son père. Comment pouvait-on s’en prendre a la jolie Rory ? Comment pouvait-on oser ? L’homme qui l’avait violé pourrait peut être répondre… Quoiqu’il en soit, actuellement, il était 21h passé et la belle mutante avancé toujours dans ce quartier dans l’espoir d’en apprendre plus. Elle voulait savoir qui s’était, lui demander pourquoi est ce qu’il avait fait ça, qu’il réponde enfin a ces questions : pourquoi elle, pourquoi ?

« Et bien ma jolie, on est perdu ? »

Rory fit volte-face, apercevant alors un homme entouré de deux de ces amis qui lui souriaient de façon si malsaine. Reculant légèrement et leurs faisant un sourire qui se voulait aimable, elle hochait la tête pour leurs signaler que non, elle n’était pas perdue.

« Oh, ne t’inquiète pas, on ne te veut pas de mal, suis-nous, ajouta l’homme
- Je… Non, je n’ai pas besoin de vous, merci quand même, bégayât-elle
- cherche pas à discuter, viens là ma jolie ! »

Se saisissant du bras de Rory, il la tira vers lui de façon violente. En temps normal, elle aurait sentit son étreinte, mais la douleur ne se faisait pas sortir et rapidement, Rory repoussa l’homme aussi brusquement qu’il l’avait attiré a lui. Vexé, les faits s’enchainèrent très rapidement, sans qu’elle n’eut le temps de comprendre quoique ce soit : Il la gifla, se fit mal a la main en heurtant le métal sur la peau de Rory qui venait de se former, l’insulta, attrapa près d’une poubelle une barre en fer et poussa violemment sa victime sur le sol pour la faire tomber. Rory tomba en arrière et tenta vainement de s’échapper, mais étant seule, elle était maintenant incapable de faire quoique ce soit, et la peur de blesser et d’être de nouveau agresser lui saisissait le ventre, l’empêchant de faire quoique ce soit. Une boule a l’estomac se faisait sentir et lui faisait très mal… et pour la seconde fois de sa vie, elle espérait que quelqu’un viendrait l’aider…

Un bruit, un cri et puis, une voix.

« Amène ton copain avec toi et que je ne vous revois plus dans cette partie de la ville, sinon la prochaine fois, je serais bien moins enclin à la charité... »

C’était ce qu’elle garderait comme premières impressions : tout d’abord, un sauvetage remarquable et impressionnant, jamais elle n’aurait espéré que son vœu le plus chère du moment soit exaucé immédiatement, et puis, la vision d’une carrure imposante et protectrice, suivit d’un regard et d’un sourire doux, qui se voulaient rassurant, le tout accompagné d’un corps entièrement métallique. Comme le sien.

« Vous... enfin... »

Elle ne pouvait s’empêcher de bégayé en l’observant, en le détaillant de haut en bas avec un air coi et hébété. Qui était-il ? Comment faisait-il pour être aussi beau, fort et rassurant tout en étant invulnérable, sans faiblesse. Il lui tendit la main pour l’aider a ce relever, ajoutant alors :

« Ne craignez plus rien, ils sont partis et ils ne reviendront plus »

Et qu’ils soient fous s’il s’avérait qu’ils reviendraient ! Qu’ils soient même châtié pour cette stupidité, car sous cette âme charitable se cachait sûrement un valeureux combattant. Un ange gardien ? Ne nous emballons pas, il avait peut être un physique d’ange mais restait avant tout un homme, et les hommes étaient réputés pour n’être qu’abjectes et répugnants. Ou alors était-il simplement une lueur d’espoir. Une belle lueur d’espoir. Rory se saisit de la main de l’inconnu, redevenu normal, touchant sa peau, elle se leva avec difficulté, ses jambes tremblaient et elle titubait généralement. Sûrement l’adrénaline se rassura t’elle en essayant de rester debout, mais très vite, le sol se déroba et la belle blonde retomba dans les bras de son sauveur. Elle se transforma entièrement, son corps se recouvrit de ce métal si particulier qui faisait sa force et sa faiblesse en ce moment même. Elle n’osait rien dire, ou du moins, aucune question ne franchissait la barrière de ses lèvres. Qui était-il ? Et soudainement prise d’une colère folle, contre elle-même et contre ses agresseurs, Rory frappa nerveusement sur le torse de l’homme, en douceur malgré tout, pestant contre tout ce qu’elle pouvait…

« C’est toujours pareil, hein ? On agresse ce qui le mérite le plus ! Je l’ai sûrement mérité, vu que je suis une aberration, je suis monstrueuse et dangereuse en faite !... je ne mérite pas… Je…, sa voix se faisait tremblante, comme si elle sanglotait. Et puis d’abord, qui sommes-nous ? Et qui vous êtes, vous ?! ...»

Se surprenant elle même, Rory s'excusa auprès de son sauveur, dont elle ne connaissait toujours pas le nom, confuse... elle ne se savait pas aussi... sensible.

Elle était troublée, il n’y avait pas à dire. De toute façon, comment ne pas être troublé en étant ce qu’elle était ? Parfois, elle se considérait comme un monstre, et l’idée de ce regarder dans le miroir sous sa forme métallique la troublait tout particulièrement. Ça n’avait aucun sens. De plus, ce qui la perturbait encore plus, était le fait qu’il était comme elle. Un mutant, certes, mais ayant le pouvoir qu’elle. Depuis plus longtemps certainement, puisqu’il le maîtrisait parfaitement. Elle était si… troublée. Et lui n’avait pas l’air de savoir comment faire avec l’hystérique qu’elle était a présent. Il lui demanda de ce calmer et l’amena jusqu'à trois petites marches ou il l’installa, s’assaillant a ses côtés pour ensuite passait son bras musclé autour de ses épaules. Ce geste, aussi simple soit il, était fort agréable. Rory ferma les yeux un instant, respirant longuement pour se calmer. Son cœur battait si fort dans sa cage thoracique, il poussait ses poumons, ses côtes, s’en était douloureux. Qu’est ce qui était pire, qu’est ce qui causait ça ? Le garçon lui parlait doucement et lui expliqua des choses compliquées dont elle se fichait en faite. Il se présenta aussi. Piotr, un nom qui n’est pas d’ici, de toute évidence. Il devait venir d’un pays comme la Russie.

« Si je n’étais pas monstrueuse alors pourquoi m’auraient ils attaqués ?... Je ne contrôle rien, rien du tout. »

Elle dit ça a travers un murmure, a peine audible. Seul lui aurait pu l’entendre de toute façon. Elle leva les yeux vers lui et observa son sourire, qui avait l’air si chaleureux et amical. Rory avait oublié a quel point ces sourires lui réchauffaient le cœur et l’aidaient a aller mieux. Ses joues se teintèrent de rouges. Pourquoi ? Elle ne le savait pas, ça lui faisait un drôle d’effet a présent. C’était logique, dans un sens. Elle qui était si pâle après son agression et voila que son valeureux chevalier lui souriait.

« Et vous ? Que faites vous ici ? Comment vous appelez vous ? »

Et elle ? A rester là a fixé les yeux de cet homme, elle en avait oublié des choses. Elle se perdit dans un océan de pensées, des pensées si sombres…

« Ce que je fais ici ? Je… Je cherchai quelqu’un. »

Quelqu’un en particulier. Celui qui lui avait fait tellement de mal. Elle n’avait aucune chance de le retrouver ici, pour sur, elle ne pourrait peut être jamais savoir qui est-ce que c’était. Il empestait tellement l’alcool, il ne devait même pas être conscience de ses actes.

« Mais a cette heure ci, il doit être parti maintenant… enfin, bref. Je m’appelle Rory Quinn… Piotr, ce n’est pas un prénom d’ici, n’est ce pas ? Vous êtes d’ici ?... Oh, excusez moi, je sais que ça ne me regarde pas, mais… J’ai besoin de parler d’autre chose… »

« Il faut que vous arrêtiez de vous croire responsable de tout,… »

Comment ne pas se sentir responsable en faite ? Elle s’était souvent sentie coupable de tout, lorsqu’elle faisait quelque chose, et même lorsque ce n’était pas elle. Ça a commencé très tôt, avec sa mère, elle a longtemps cru que sa mère était partie par sa faute, qu’elle n’avait jamais voulu d’elle et que son père avait été abandonné avec sa fille. Et puis, plus tard, lors de son agression, elle avait cru que s’était de sa faute si elle s’était faite attaqué. Bien sur que non, ce n’était pas de sa faute, ça ne l’avait jamais été, mais il lui fallait un responsable. Et comme elle n’était pas du genre a s’en prendre aux autres pour rien, Rory s’en tenait pour responsable. Elle lui fit un maigre sourire, passant ses longs cheveux blonds derrière l’oreille, découvrant alors un lobe percé, avec des boucles et des bijoux. L’un d’eux avait été arrachés durant sa chute et une goute de sang perlait le long de son oreille. Elle l’essaya d’un revers de main, s’excusant encore sans savoir pourquoi cette fois. Le bijou était d’ailleurs partie et elle ne pourrait plus porter de piercing avant un petit moment, le temps que la blessure cicatrise en faite. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas saigné. Elle posa sa main sur le bras de l’homme sans comprendre pourquoi est ce qu’elle faisait ça, puis dit en Russe :

« Je vous remercie pour votre aide, Piotr. »

Elle avait un bel accent Russe, assez prononcé. Rory avait étudié la langue durant sa scolarité, elle parlait aussi l’Espagnol et le Français, et elle avait toujours espéré pouvoir partir d’Amérique pour visiter l’un de ses pays. Moscou était une destination de rêve, elle qui avait toujours adoré les pays froids, mais elle n’avait jamais eut l’occasion de partir. Elle le regrettait.

« La Russie est un beau pays, je crois, répondit elle machinalement, les yeux dans le vague. Un très beau pays que j’aimerais visiter un jour. Je suis née a New York et je n’ai jamais quitté la ville, ce que je regrette vraiment. Il y a tellement d’autre chose a voir, ailleurs. Vous devez vous dire que ‘Quinn’, ça ne fait pas très Américain, n’est ce pas ? Ma mère vient d’Angleterre, c’est normal ! »

Elle marqua une pause, tenant toujours le bras de l’homme. Puis, elle ajouta :

« Maintenant que vous m’avez sauvé et que je suis encore vivante, que vous connaissez mon secret au sujet de ma mutation, pouvons nous nous tutoyer ? »

Rory essaya de faire de l’humour pour détendre l’atmosphère. Le déni, il ne s’était rien passé, il fallait qu’elle oublie et qu’elle se remette vite de ses émotions. Son cœur battait plus régulièrement, sa peau retrouvait progressivement de la couleur. Il fallait oublier, murmura t’elle pour elle-même en essayant de retrouver le sourire.

« Enfin euh… vous avez peut être d’autres choses a faire que de rester ici, non ? Enfin, je veux dire que vous, vous aviez sûrement d’autres raisons de vous trouver ici… et si vous n’avez rien a faire, est-ce que ça vous dérangerez de me… raccompagner jusqu’à chez moi… ou ailleurs, hein, juste me raccompagner. Je ne tiens pas à rester seule. Et vous avez le droit de refuser naturellement ! Vous n’êtes obligé de rien… »

La jolie blonde n’arrêtait pas de parler, elle disait ses mots sans cesse, sans se soucier du fait qu’elle pouvait être énervante. Mais lorsqu’elle était mal a l’aise, elle ne pouvait s’empêcher de parler, parler, et parler encore.

C'est cette vague d'espoir qui nous submerge. Lorsqu'on a frôlé la mort, tout nos doutes s'effacent soudainement, laissant alors un paix incroyable et si agréable. Lorsque notre excitation retombe, lorsqu'il n'y a plus rien qui compte, que l'on a cru tout perdre. L'on se sent près a n'importe quoi, a n'importe quelle folie.

Sa présence calmait ses ardeurs, sans qu'elle ne comprenne pourquoi. Il était une personne qui avait le don de la rassurer certainement. Il balayait ses doutes d'un revers de main et avec un sourire confiant. Il était radieux, ainsi. Elle eut un sourire, tout en lui parlant. a cet instant, elle aurait pu lui confier n'importe quoi s'il lui avait demandé. Et puis, ce calme soudain. Dans la rue, il n'y avait plus personne, pas un bruit. L'on entendait au loin le bruit des voitures qui circulaient encore dans New York City, sûrement des taxis, mais la circulation était a présent moins dense que dans la journée. Il y avait une douce lumière tamisé, offerte par un lampadaire non loin de l'escalier ou ils étaient. Il y avait aussi une étrange ambiance, un peu tendu certes, mais très douce.

- Très bien, je te suis jusqu'au bout du monde.

Une pointe de sérieux dans la voix, elle se surprit elle même a avoir dit ça. Bien sur, elle ne le connaissait pas et elle disait ce genre de chose ? Un peu étrange ! Mais c'était cette sensation qu'elle avait a présent qui lui faisait cet effet. Du moins, elle l'espérait. Parce que si elle pensait vraiment ce qu'elle disait, alors ils étaient mal barrés ! Enfin, elle lui fit un sourire avant d'ajouter

- Mah, désolé d'avoir dit ça, je sais pas ce qu'il m'a prit. Je crois que j'ai craqué, ou un truc du même genre.

Elle lui fit un sourire, observant la main du jeune homme qui lui tendait. Elle l'attrapa, posant alors sa petite main de femme dans celle du colosse qui lui faisait face. elle ne la lâcha pas en se relevant, la tenant a présent fermement. Elle tremblait légèrement, son taux d'adrénaline redescendait progressivement, tandis qu'elle tenait toujours la main de Piotr. Elle lui fit un sourire et lui propose de se mettre en route vers ou il le désirait. Ils n'allaient quand même pas rester ici jusqu'au petit matin ? Quelle heure pouvait-il bien être ? La belle blonde n'avait plus la notion du temps a force de rester ici a fixer les yeux de son sauveur. Elle se décida enfin a prendre la parole :

- Ou veux-tu aller ? Un endroit en particulier ?

Elle marqua une pause.

- Je sais, je suis pénible avec mes questions, mais tu peux me faire taire si tu veux, hein , dis... tu vis ou ?

- Je connais un bon endroit pas loin, il doit être encore ouvert. Après tu viendras avec moi, je te montrerais où je vis onze mois dans l'année.

Rory posa les yeux sur lui, elle qui regardait fixement en face d’elle fut surprise par sa réponse. Ou il habite ? Carrément ! Si ça, ce n’était pas complètement dingue de sa part. Il avait confiance en tout cas, ou peut être avait il tout simplement dit ça pour la rassurer et pour continuer la conversation. Ou peut être allait il réellement lui montrer ou il habitait ! Bon, ça ne servait a rien d’imaginer la chose, mieux valait la découvrir en temps voulu. Il était ainsi décidé a l’amener manger un morceau dans un restaurant du coin, et c’était une bien bonne idée, vu que l’incident avait carrément creusé l’estomac de la belle blonde qui se trouvait a présent stupide de ne pas l’avoir invité lui plus tôt. C’est vrai, quoi ! Elle aurait pu y penser ! Comme quoi, Rory ne s’en était pas sortie indemne : ses fonctions cérébrales étaient atteintes… comme d’habitude me direz-vous ! Enfin, ils arrivèrent tout les deux devant un restaurant ou une enseigne clignotait. « Chez les frères Fuego ». A n’en pas douter, un restaurant espagnol ou mexicain se dit Rory sans pour autant lâcher la main du géant, franchissant les portes en manquant un peu d’assurance.

- Piotr !! Mon ami !!

Surement une personne qu’il connaissait en déduit la petite blonde en observant l’homme avec un petit sourire discret et gêné. En tout cas, ce garçon l’avait remarqué et leurs proposa de s’asseoir a une place que Piotr avait l’habitude d’utiliser. Le dénommé Miguel repartie en cuisine après avoir positionné la table. Et puis, un autre homme apparut, suivit de Miguel, sautant presqu’au coup du Colosse, apparemment ravi de le revoir. Il avait un franc succès ici, n’est-ce pas ? Et cette fois ci, lorsque Paolo et Miguel dirent que Piotr avait sauvé leur restaurant, Rory eut un petit rire. Ce dernier était un véritable héro pour ces personnes, qui n’avaient de cesse de le remercier et de lui montrer leur gratitude. Si, ça, ce n’était pas une belle récompense pour le travail qu’il avait fourni ? Ils s’installèrent tout les deux, l’un en face de l’autre, tandis qu’on débarrassait les menus pour apporter les plats. Il y avait encore du monde a cette heure ci, ce qui était particulièrement étonnant en faite. Normalement, les hommes dormaient, non ?

- Ne t'inquiète pas, Miguel et Paolo savent que je suis un mutant, se sont de très bons amis. Et leurs pâtes sont excellentes. Dis moi, au fait, tu sais que tu es mutante depuis quand ?

Rory reporta son attention sur le monstre d’acier, le détaillant un instant. C’était fou comme il était doué pour passer d’un sujet a un autre tout en semblant aussi imperturbable. C’était une qualité parmi tans d’autre qui avait le don de déstabiliser un peu la jeune blonde qui ne répondit pas immédiatement. Par quoi commencer pour parler de ça ? Il y avait tellement de chose à dire là-dessus, non ? Elle qui n’en avait jamais parlé avant de savait pas comment réagir vis-à-vis de ça. Pour dire, même son propre père n’était pas au courant de la mutation qu’elle avait subi… C’était un véritable enfer pour elle de pouvoir communiquer avec les autres. C’était en faite une chose qu’elle n’avait plus fait depuis près de huit ans à présent.

- Euh… et bien… Je sais que je suis une mutante depuis que j’ai seize ans, a peu près. Disons que c’est approximatif, vu que je me suis transformée entièrement la première fois a mes seize ans. Pour tout te dire, c’était un 26 aout vers 17h30, lorsque je me suis faite percuter par un camion et que je m’en suis sortie sans aucun problème. C’était effrayant et étrangement bizarre, et depuis, je suis un danger public, pour moi, ma famille et surtout mes voisins du dessous car a chaque fois je manque de traverser mon plancher quand je me transforme sans le vouloir.

Elle était, soudainement, en train de parler beaucoup trop. Reprenant son souffle, elle ajouta pour changer de sujet :

- Qu’as-tu fais pour sauver leur restaurant ?

Et puis, c’est sur ces mots que Paolo revint avec deux plats de pâtes.

Ils étaient tout les deux assis a une table dans un restaurant plutôt coquet et bien tenue. Les gérants y étaient fort sympathiques et amusant et vouaient une sorte de culte a Piotr, le remerciant et vantant ses mérites à Rory. Elle souriait, un petit sourire sincère qui se dessinait doucement sur ses fines lèvres de jeune fille. Le choc étant un peu passé, elle se permettait alors d’avoir un regard un peu plus doux, ou du moins, elle essayait, car elle sentait encore cette tension palpable et présente. Elle se disait que si elle fermait les yeux, elle les verrait encore, auprès d’elle, l’amener dans ses pires cauchemars. Ce soir, elle ne fermerait pas l’œil. Elle n’en aurait de toute façon pas le courage. La jeune fille se mit a parler de la découverte de son don a Piotr, comme il lui avait demandé, lui passant tout les détails de sa toute première transformation, qui fut bien originale et qui aurait pu être vraiment très dangereuse. Cela le fit sourire, oui, elle remarqua que les lèvres du colosse s’étirèrent lorsqu’elle parla de ça avec autant de précisions. Et puis, quand il ajouta qu’elle était un danger public, il perdit rapidement son sourire, qui se transforma plus en une sorte de rictus agaçé. Oups.

- Déjà, tu n'es pas un danger. Si tu considères que le fait de se transformer sans le vouloir sur un plancher, c'est être un danger, alors je l'ai été moi aussi.

C’était exactement de ça qu’elle parlait. Traverser un plancher, c’était déjà dur a faire, mais si en plus, on tombe trois étages plus bas, en traversant tout les appartements a la suite, en dévoilant a tout ses voisins sont pouvoirs, c’était la galère assuré. Surtout que bon nombre de ses voisins ne l’appréciaient pas plus que ça ! Alors là, s’ils avaient une bonne raison pour la mettre dehors, elle se retrouverait bien vite a la rue et sans logement, puis sans travail et sans nulle part ou aller. C’était ça, qui lui faisait le plus peur : se retrouver seule, sans rien, au milieu de rien. Piotr lui continua a parler, lui parlant alors de ses premiers exploits en tans que Mutant. Il avait sauvé sa petite sœur. Un bien beau geste. Rory n’en avait jamais fait autant avec ses capacités.

- La différence entre nous, c’est que toi, tu contrôles ton pouvoir a présent, alors que moi, il agit a sa guise. J’ai libéré une fois un conducteur coincé dans sa voiture accidenté. Accident que j’avais moi-même causé. Je suis d’autant plus dangereuse car je suis maladroite et impulsive, et a la merci de mes sentiments a chaque instant ! Nous n’avons pas la même vision des choses par rapport à ça, peut être parce que nous n’avons pas vécu pareil. Mais si tu vivais avec moi tu constaterais bien vite que je suis bien trop empoté pour avoir de telles capacités. Ça me hante tout les jours de pouvoir faire du mal a quelqu’un…

Elle se tut un instant. Piotr répondit a sa seconde question, qui était de savoir qu’est-ce qu’il avait fait pour sauver ce restaurant. Il lui répondit qu’il avait empêché un braquage. Comme si c’était une chose normale dans la vie que d’empêcher un braquage. Comme s’il faisait ça a chaque fois qu’il se promenait en ville d’ailleurs ! Normal quoi !

- Tu dis ça… si naturellement !... ça ne te fait pas plus d’effet ? Tu sauves la vie a deux de tes amis, tu sauves leurs restaurants et puis… et puis rien d’ailleurs ! On a l’impression que tu fais ça tout les temps, que c’est ton travail. Tu es peut être une sorte d’héro, que l’on ne voit plus que dans les bandes dessinés pour enfant…

Là voilà encore qui divaguait. Elle préféra attraper sa fourchette et manger plutôt que de continuer a dire n’importe quoi. A force, il allait s’énerver de la voir débiter autant de bêtises ! Et en réalité, elle n’avait pas très faim. En fixant son plat, elle se demandait pourquoi est-ce qu’elle faisait ça. Cela l’avait creusé, toutes ces émotions, mais pas a ce point, et l’espace d’un instant, elle n’avait aucune envie d’avaler quoique ce soit. Elle hésita a reposer sa fourchette, mais se dit que c’était impoli de refuser une aussi belle invitation, surtout de la part de quelqu’un qui l’avait sauver. Elle ne savait que faire en faite….

- Un pouvoir, au début, est toujours difficile à contrôler, mais je vais t'apprendre, fais moi confiance. Après manger, je te montrerais où je vis et tu verras, tu auras tout ce qu'il faut pour y arriver.

Il lui en demandait beaucoup, vraiment. De lui faire confiance ? Elle ne savait même pas si elle pourrait y arriver. Mais il fallait bien, non ?

- Tu vis… loin d’ici ? Je n’aime pas aller quelque part sans y être préparé ou invité. Alors, peux-tu me décrire ? et est-ce que je ne risque pas de déranger ?

Et quel agréable son. C’était le son de la pluie battante contre les carreaux de cette grande baie vitré ou était écrit en lettres capitales le nom du restaurant. La vue extérieur était alors troublé par de l’eau. Cette eau qui faisait un bruit reposant, un bruit qui avait le don de faire penser Rory peut importait comment. Ses yeux se posèrent alors vers cette baie vitrée, et elle observait, le regard dans le vide, l’eau ruisselante. C’était si agréable. Elle adorait encore plus être sous la pluie lorsqu’elle en avait l’occasion. Sans vraiment savoir pourquoi d’ailleurs, mais elle avait l’impression que chaque contact, sous la pluie, prenait plus d’ampleur et d’importance, que chaque souffle devenait alors soudainement source de plus de vie et que chaque regard, aussi simple soit il, était de ce fait plus pénétrant qu’à l’origine. Matty, son meilleur, et elle-même passaient souvent du temps dehors, même par temps de pluie. Qu’était il devenu, son Matty ?

Au point où elle en était, elle n’en avait absolument aucune idée, vraiment. Il était sûrement parti en science, vu comment il était doué en math. Peu importait. Elle reposa les yeux sur Piotr lorsqu’il commença a lui parler du fait que lui aussi était dangereux au début, mais qu’il avait appris a gérer sa force et que tout les mutants passaient par la.
Et puis plus tard encore il ajouta qu’en effet, il sauvait des vies et que c’était son travail en partie de faire cela. Il sauvait des gens de toutes situations possibles comme il disait, ce qu’elle trouvait particulièrement courageux. Le regard de Rory se perdit dans un océan de pensées, aussi étranges étaient elles. S’il avait les capacités de faire cela, alors peut être qu’elle aussi en serait elle capable, un jour ? Oui, dans un sens, elle pourrait essayer, s’entraîner et essayer. C’était un objectif parmi tans d’autres…

- Je ne suis pas loin d'ici. Une fois que tu auras fini de manger, on ira là-bas…

Sur ce coup, il venait de la ramener a la réalité. Lui avait déjà fini son assiette alors qu’elle n’avait presque rien mangé. Et ça ne lui faisait justement pas vraiment envie. Non pas que le plat n’avait pas l’air délicieux, loin de là même, tout était bien présenté, c’était bon aussi d’ailleurs, mais l’appétit n’y était pas du tout.

- … Tu verras, tu pourras te rendre compte que tu es loin d'être seule ici.

Elle n’en doutait pas vraiment, de ne pas être la seule. C’était normal, vu le phénomène mutant. Oui, elle regardait les informations, c’était normal, de regarder les informations. Mais voilà, d’autres avaient plus de chance d’être tomber sur un pouvoir un peu moins… imposant. Oh ! il y avait plus a plaindre, ça s’était sur ! Mais pour l’instant, elle s’estimait dangereuse, et tans qu’elle ne contrôlerait rien, elle le serait.

- Je n’ai pas très faim, pouvons nous y aller ?

Elle lui fit un sourire et se leva, remettant alors la veste de l’homme sur ses épaules, car bien qu’à l’intérieur, Rory était toujours pâle et pas vraiment réchauffé. Elle n’arrivait jamais a se réchauffer pleinement, étant très frileuse en plus. Enfin, bon. Elle se leva et incita Piotr a faire pareil, puisque de toute façon, elle ne finirait pas son plat et elle était assez impatiente de découvrir ce lieu ou elle verrait qu’elle n’était pas la seule.

- Alors ? On y va ?