Galas, cocktails et envies de meurtre [PV Alice]

Invité

Encore un gala de charité. Dans quel but? Chris n'en avait franchement aucune idée, et ne cherchait absolument pas d'informations à ce sujet. Il allait comme d'habitude à ce genre de soirées afin d'assurer les apparences, donner le change, déposer un chèque généreux dans l'urne prévue afin de récolter des fonds pour une cause dont il ne se souciait guère, et éventuellement discuter contrats entre deux flûtes de champagne... Voire plus, si la gente féminine s'y prêtait, mais ce n'était pas souvent le cas, à vrai dire.

Le jeune Witman s'attendait donc à peu de distractions valables, ce soir-là, alors qu'il se rendait en limousine vers l'hôtel de la Fleur de Lys, dans l'Upper East Side, où se tenait le cocktail. Et s'il avait revêtu pour l'occasion un magnifique costume taillé sur mesure, c'était plus par habitude que par soucis de plaire à ses hôtes, qu'il ne connaissait d'ailleurs que très peu. Mais une soirée de cette envergure sans un représentant de la WitCom -en l'occurrence souvent le PDG lui-même-, c'était tout bonnement impensable.

Ce soir là, il avait décidé de ne pas y aller accompagné par une de ces greluches habituelles qu'il invitait parfois afin de les impressionner, il envisageait de passer une soirée plus sérieuse, et avait déjà consulter la liste des invités afin de prévoir plusieurs entretiens potentiellement prolifiques pour sa société, et même s'il n'arrivait à croiser et convaincre que la moitié des personnes à qui il avait prévu de proposer un contrat, ou tout du moins un partenariat, il en ressortirait grandement gagnant, et rien que cette idée le confortait dans sa décision de participer à ce gala, quand bien même il risquait de s'ennuyer de temps à autre.

Sur le trajet, Christopher dégustait un verre de bourbon de 12 ans d'âge, tranquillement installé sur la banquette de la limousine. Le chauffeur connaissait son job et évitait soigneusement les embouteillages, tout en conduisant avec souplesse, ce qui était un exploit au vu des dimensions de la voiture. Il arriva donc à destination en très peu de temps, et le jeune Witman le félicita de sa diligence et sa dextérité.

Il se gara face à l'entrée de l'hôtel, et un voiturier en livrée vint ouvrir à Chris afin qu'il descende. Remerciant le garçon d'un léger signe de main, il se dirigea nonchalamment vers la luxueuse bâtisse. D'une taille respectable, bien que moins élevée que les buildings du quartier des affaires, ses murs d'un blanc immaculé en étaient presque éblouissants, et l'ensemble de colonnades stylisées entourant l'entrée de part et d'autre, bien que suranné, gardait toujours un côté impressionnant, ce qui était bien entendu le but, afin d'attirer l'oeil d'un potentiel client. Les portiers, filtrant les invités à l'entrée, portaient tous le même uniforme, d'une propreté impeccable et sans accroc.

Les invités eux, avaient revêtus leurs plus beaux atours -et accessoirement plus expansifs, cela va sans dire-, rivalisant de rareté et d'originalité dans leurs tenues pour les unes, de classe et clinquant pour les autres. L'étalage de la richesse personnelle était de mise ce soir, et personne n'échappait à la règle. Chris lui-même n'avait aucun problème à ce sujet, son costume, bien que plutôt sobre, valait une petite fortune, et sa montre... ce n'était même pas la peine d'en parler.

La file avançait relativement lentement, et le jeune PDG commençait à s'impatienter, son observation des convives ne l'ayant distrait que pour un temps. Il poussa donc un soupir de soulagement bien ostensible lorsque son tour arriva. Et alors qu'il allait tendre son invitation au portier, il sentit brusquement quelqu'un s'accrocher à son bras. Cette personne avait intérêt à avoir une bonne raison d'avoir agi ainsi, car il détestait ce genre de surprise. Tournant la tête, Witman haussa un sourcil interrogateur, avant d'y aller de son petit commentaire à voix basse.

« C'est à quel sujet? »

Une soirée comme une autre... Ou presque. Alice s'avançait tranquillement dans la rue. Pour une des rares fois de sa vie, elle avait mis une robe plutôt chic. Cela n'était pas dans ses habitudes mais c'était nécessaire. A vrai dire, elle n'appréciait pas vraiment l'idée de voler... Mais quand cette idée devait être appliquée, alors elle aimait prendre la chose très au sérieux et s'en prendre à des gens dont elle était sûre que le jeu en valait la chandelle. C'était la raison qui l'amenait dans cet hôtel bien trop chic pour elle en cette soirée. Après avoir déposé ses affaires dans un hôtel qui ne méritait même pas son unique étoile, elle avait pris sa seule et unique robe assez habillée qu'elle réservait pour ce genre d'occasion. Quelques bracelets en or plaqué étaient également là pour rehausser sa véritable nature. Elle n'oubliait pas non plus un brin de maquillage et de démêler sa tignasse blonde avant de sortir dans ce type de soirées.

Voilà. Elle était là, et elle voulait juste entrer pour le moment. Mais après avoir évalué la situation et comment l'endroit était surveillé, elle se dit qu'elle allait devoir innover. Certes, elle aurait pu utiliser ses pouvoirs. Mais alors pénétrer dans l'hôtel n'aurait plus été un jeu, un défi. Et les défis, elle en raffolait. Une joueuse née, bourrée de détermination et de malice mais surtout, avec des dons bien pratiques en cas de problèmes majeurs.

Elle regardait les gens entrer, la file se former à l'entrer et les voitures se poster une par une devant le tapis rouge pour y déposer une ou deux personnes toutes plus friquées les unes que les autres. Elles inspiraient toutes un peu plus le dégout les unes que les autres à la jeune fille. Les gens couverts de vêtement qui valaient plus d’un p’tit millier de dollars alors que certains crevaient de faim dans la rue, ça la répugnait et à vrai dire, elle n’avait alors plus aucun scrupule à les détrousser un peu. Non pas qu’elle ait une âme de Robin des Bois mais elle aimait croire qu’il y avait une justice.

Les lèvres glossées, les yeux maquillés et les cheveux bien coiffés, elle s’était postée au coin d’une rue perpendiculaire et attendait le moment propice pour entrer. Ses talons aiguilles lui faisaient foutrement mal aux chevilles mais pour l’instant, elle avait d’autres idées en tête. Les chaussures ne reviendraient que dans son esprit au moment où il faudra marcher de façon à peu près normal. Elle observait attentivement les gens qui arrivaient, histoire de trouver une personne qui la ferait entrer avec facilité. Cependant, la tâche fut plus difficile qu’elle n’y paraissait : tous les hommes semblaient accompagnés par une greluche qui riait à s’en faire éclater les tympans. Tous étaient plus décevants les uns que les autres. Tous… Sauf un. Un homme, beau, assez jeune, les cheveux bruns, un regard méprisant se joignit alors à la file. Alice le savait : ce soir, ça serait lui.

Lentement, elle s’avança vers l’hôtel, passant la sécurité avec simplicité – C’est fou ce qu’une tenue vestimentaire peu changer beaucoup de choses… - et se joignit à la file. Au malheur des autres, elle commença à remonter l’allée tapissée de rouge. Elle pensa soudain « Si la daronne me voyait… » Mais elle dut effacer cette pensée rapidement car le temps lui était compté. Dans quelques secondes, le jeune homme allait donner son carton d’invitation et entrer… Sans la jeune fille. Elle serra les dents et joua le tout pour le tout. Elle s’agrippa rapidement à son bras. Elle aurait pu sortir quelque chose du style « très cher, je m’étais égarée » mais dans le cas présent, il semblait qu’en plus de la beauté, cet homme avait un cerveau.

« C'est à quel sujet? »

Aïe. Voix basse, haussement de sourcil. Le signe net d’un agacement prononcé. Mais Alice ne se laisserais pas démonter. Pas ce soir alors qu’elle avait la chance de faire une entrée fracassante à New York. De plus, quelle gamine de 16 ans est déjà entrée dans ce genre d’endroit ? C’est qualifiable de « carrément cool » ! Bon, pour le moment, il lui fallait des arguments plutôt convaincants et qui satisferont ce monsieur. Sans trop savoir pourquoi, elle lui joua le jeu de la franchise, choisissant cependant avec soin son vocabulaire.

« Oh ! Disons simplement que je suis une invitée non notée sur la liste et qui n’a pas reçu son invitation. Mais voyez vous, monsieur, une jeune fille comme moi à la recherche d’un éventuel job est évidemment intéressée par un endroit où tout brille… Et puis… Vous semblez un peu agacé à l’idée d’aller seul à cette soirée. Faites moi entrer, ça vous coutera quoi ? Bon, certes, ça sera inutile si vous me donnez vous même du travail mais vous serez casé et donc innaccessible aux yeux de ces… potiches blondes couvertes de maquillage pour la soirée. Et moi, je pourrais chercher quelqu’un pour obtenir ce que je veux. Ca gère ? »

Au bout de quelques instant, le portier nous observa, se racla la gorge et déclara :

« Monsieur ? Puis-je voir votre invitation ? »

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La tenue nouvelle arrivée ne dénotait pas de celles des convives, même si Chris doutait que sa robe portât la griffe d'un grand couturier, au vu de la façon dont la jeune femme venait de se présenter. Elle remplissait la plupart des critères physiques que le jeune Witman appréciait chez une femme, et semblait pour une fois savoir faire autre chose que pouffer bêtement ou se recoiffer. Restait qu'elle lui semblait plutôt jeune, mais ce détail restait comme souvent difficile à évaluer, entre les trop jeunes qui se maquillaient de façon à paraître plus âgées, et les moins jeunes qui souhaitaient toujours gagner quelques années.

Sa recherche d'un travail potentiel soutira un petit sourire à Christopher, qui bien que se doutant du contraire, le signala toujours à demi-mots à son interlocutrice:

« Un job? À tout hasard, le racolage serait mal vu dans ce genre de soirée caritative... »

C'était dit, non sans une pointe d'ironie puisqu'il ne pensait pas que la jeune femme fût à la recherche de ce genre d'activité. Puis une lueur malicieuse apparut dans ses yeux alors qu'il avait une nouvelle idée, et son sourire ne s'en élargit que plus. Tendant son carton d'invitation au portier qui s'impatientait, il s'adressa à ce dernier:

« Tant que j'y suis, je suis accompagné ce soir d'une hôte de marque, ce qui mériterait une annonce lors de notre entrée, je vous prie. Il s'agit en effet de rien moins que l'héritière du duché de Donetsk, la ravissante Anya Tarassivna Zavashenko. »

Sur ces mots, il sortit discrètement de la poche intérieure de sa veste quelques billets afin de s'assurer que l'homme se chargerait de la tâche. Ce nouveau jeu lui semblait pour le moins prometteur, et il lui tardait de voir comment la jeune femme allait s'en tirer.

« Avant que vous ne protestiez, considérez ceci comme votre prix d'entrée. Un peu de distraction n'a jamais fait de mal à personne, et je compte bien sur vous pour vous montrer à la hauteur de mes espérances. Ceci étant, j 'espère que vous savez roulez les « R », très chère, car la soirée risque d'être longue, et la partie ne fait que commencer. »

Et tandis qu'ils entraient dans le salon où avait lieu la réception, le PDG de WitCom se tourna vers sa compagne, toujours accrochée à son bras, lui susurrant quelques mots alors que leur entrée était annoncée, dans ce qu'il considérait comme une parodie désuète de ce que faisaient les hérauts dans le temps. Christopher sourit de plus belle en voyant les têtes des convives se tourner dans leur direction, ravi d'être le centre de l'attention de tous ces collets-montés. Et s'ils étaient le seul couple à avoir été ainsi annoncé, cela ne passerait que comme une frasque de plus à mettre à son actif, et les invités penseraient à coup sûr qu'il avait simplement voulu insister sur le statut important de sa compagne pour la soirée.

Dirigeant la nouvelle duchesse vers le centre de la salle, alors que les conversations environnantes reprenaient leur cours, il se pencha à nouveau vers elle pour lui murmurer quelques mots:

« Pour information, vous serez donc ukrainienne ce soir. J'attends une prestation sans faille, faites-moi rêver, Anya. »

La jeune fille regardait autour d’elle tandis que l’homme à qui elle tenait le bras la dévisageait. Première soirée New yorkaise et première réussite pour la jeune fille. Enfin, semi réussite. En effet, elle n’avait pas prévu l’idée en or du jeune homme qu’elle avait choisit pour l’accompagner. Aussi, elle fut plutôt surprise lorsqu’il finit par tendre son carton d’invitation au jeune homme, lui précisant alors :

« Tant que j'y suis, je suis accompagné ce soir d'une hôte de marque, ce qui mériterait une annonce lors de notre entrée, je vous prie. Il s'agit en effet de rien moins que l'héritière du duché de Donetsk, la ravissante Anya Tarassivna Zavashenko. »

La blondinette le regardait avec stupeur. Cependant, cela fonctionna, ils purent entrer. Elle se sentait cependant bouillir de rage. Insulter son compagnon de soirée d’enfoiré lui aurait fait un bien fou mais, compte tenu de sa nouvelle position et de la dite soirée, elle préféra serrer les dents. Le jeune homme lui fit alors part du but de ce mensonge. Un jeu. Un défi. Voilà ce qu’il lançait à Alice. Mais là, il ne savait pas à qui il s’adressait. Cette fois, un sourire large et carnassier envahit le visage de l’adolescente et pour lui montrer qu’elle roulait parfaitement les « r », elle lâcha un léger ronronnement. Il pouvait parraître déplacé, aguicheur, tout ce que l’on voulait. Mais c’était sa nature.

Ensemble, ils entrèrent dans la salle. On les annonça comme l’avait demandé le jeune homme. Christopher Witman. Ce nom fut immédiatement sauvegardé dans la mémoire de la jeune fille tout comme le nouveau qu’elle portait. Les regards se tournèrent vers eux et elle remarqua une chose : c’était tout ce que le jeune homme attendait. Ca, c’était une entrée à New York.

Quand les conversations reprirent leur cours, il entraîna « Anya » au centre de la salle, lui donnant quelques derniers détails quant au nouveau rôle qu’elle avait à jouer. A vrai dire, elle s’attarda surtout sur les derniers mots qu’il lui donna.

« J'attends une prestation sans faille, faites-moi rêver, Anya. »

Là, il n’allait pas être déçu. Qui sait, pour lui, la soirée pourrait même tourner au cauchemar car, après tout, la jeune fille était loin d’être facile. Et surtout, elle voulait gagner ce nouveau jeu. Ce fut donc avec détermination qu’elle releva fièrement le menton, se tenant alors droite comme un « i ». Une vraie princesse n’aurait su faire mieux et si un quelconque réalisateur cherchant une nouvelle actrice se trouvait dans la salle et qu’il avait été mis dans la confidence, il aurait certainement été ébloui par la prestation que la blonde s’apprêtait à donner.

Cependant, un hic survint. Oui, ça ne faisait pas 5 minutes qu’elle avait endossé ce nouveau rôle que le premier problème arriva. Un problème de taille. Car voyez vous, si elle avait l’habitude de ce genre de soirée, c’était plus en tant que rat des champs arrivant en ville. Là, elle devait faire croire à tous que… Ce n’était qu’une promenade de santé, qu’elle en avait l’habitude voire même qu’elle était née pour ce genre de soirée. Les sourcils légèrement froncés, elle se retourna de nouveau vers son compagnon.

« Dites monsieur Witman, quelqu’un comme moi est censé faire quoi exactement dans ce genre de soirées ? »

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La jeune femme sembla d'abord surprise par le petit jeu que venait de mettre en place Chris, puis sur le point d'exploser. Mais dès lors qu'elle entendit le mot « jeu », son expression changea du tout au tout, et le sourire qu'elle fit aurait presque pu faire frémir son cavalier. La soirée s'annonçait pour le moins intéressante. Et comme pour confirmer qu'elle acceptait le défi, la nouvelle princesse slave ronronna brièvement. Il n'en fallut pas plus faire s'épanouir sur le visage de Witman une mine réjouie. Et l'entrée triomphale qu'ils firent dans la salle ne fit que conforter sa bonne humeur naissante.

S'avançant dans la salle, il se réjouissait d'avance des événements à venir, et décida d'alléger conséquemment son programme d'origine afin d'accorder à son invitée l'attention qu'elle méritait, et voir comment elle s'en tirerait. Aussi manqua-t-il faire une moue désappointée lorsqu'elle lui demanda comment elle était sensée se comporter. Mais par la force de l'habitude, il ne cessa de sourire, et commença d'ailleurs par ce point les conseils qu'il envisageait de lui prodiguer. Mais il se devait de faire court, et d'aller droit à l'essentiel, s'il ne voulait pas perdre de temps.

« Plusieurs options s'offrent à vous, mais toutes s'entendent sur un même point, le plus important: toujours sourire, quelles que soient les circonstances. C'est crucial, dans ce genre de festivités. Ensuite, selon l'attitude que vous souhaitez adopter, celui-ci se manifestera différemment. Anya peut évidemment correspondre au cliché de petite fille de la princesse parfaite, chaste et pure, auquel cas ce sourire sera innocent, et il ne me semble pas nécessaire de vous détailler l'attitude qui l'accompagnerait.

Mais notre belle slave peut également être une petite dévergondée, au caractère aussi intense que son pays est froid, comme nombre de filles à son âge, et son sourire se fera dans ce cas bien plus aguicheur et malicieux, son attitude pouvant au choix être légèrement provocante, sans tomber dans la vulgarité du fait de son statut, tout en finesse et subtilité. Il existe évidemment d'autres possibilités, mais je préfère alors laisser marcher votre imagination. Le choix vous revient donc, et je conclurai cet aparté sur trois mots résumant ce que j'attends de vous: souriante, raffinée, resplendissante.

Maintenant, si vous le voulez bien, je dois me charger d'une ou deux formalités avant d'être à votre entière disposition, aussi lorsque je discuterai avec certaines personnes, j'apprécierais une compagnie discrète et silencieuse, le temps que vous vous décidiez.»

Ce faisant, menant sa compagne par le bras et se déplaçant à pas lents mais décidés, Christopher Witman gagna un petit groupe de convives, les saluant chaleureusement, et attira l'attention d'un magnat des affaires avec lequel il avait convenu de se voir ce soir-là, échangeant leur avis sur un futur partenariat. Son interlocuteur semblait bien conscient des avantages qu'il pourrait en tirer, et sa position quant à ce projet était résolument favorable, ce qui ne manqua pas contenter le jeune PDG. Tout semblait se passer pour le mieux ce soir-là, et il était ainsi dans d'excellentes dispositions pour apprécier au mieux la suite des péripéties, qui ne manqueraient sûrement pas de se produire au vu du petit jeu qu'il avait réussi à mettre en place.

Ayant déjà discuté de l'affaire la plus importante de la soirée, le jeune homme se tourna vers sa cavalière, et lui sourit , puis se dirigea vers le buffet. Au passage, un serveur vient leur proposer une flûte de champagne, et Chris en accepta d'office deux, en tendant aussitôt une à la jeune « slave », sans se soucier qu'elle en eût formulé le désir auparavant ou pas.

« Une princesse se doit de boire une boisson aussi raffinée que le champagne, ceci est un fait avéré. Alors, qu'avez-vous décidé? J'ai maintenant un peu de temps à vous consacrer pleinement, et ai hâte de voir la représentation démarrer... »

Alice sourit. Oui, c’est ce qu’elle devait faire, elle l’avait bien compris et tamponné dans son esprit. Cependant, ce sourire en disait long sur l’allure qu’elle allait adopter durant la soirée. Les yeux brillants, elle replaça, avec une lenteur digne d’un film d’action à tendance glamour, une mèche de cheveux derrière son oreille. Ses lèvres glossées allaient peut être lui être utiles tant elle allait se surpasser dans le glamour et la provocation. Elle espérait connaître les limites de sa vulgarités et se contenterais de longer cette ligne sans la dépasser.

Lançant un regard par-dessous ses longs cils maquillés accompagné du sourire le plus charmeur et malicieux qu’elle pouvait sortir à son compagnon, elle le suivit docilement vers les invités qu’il visait. Relevant la tête et le menton, elle tenta de suivre la conversation mais ne comprenait « que dalle ». Elle se contenta alors de mémoriser ce qui se disait, observant les compagnes de certains de ces riches playboys ou collectionneurs de billets. Elles, elles ne se gênaient pas pour dévisager entièrement la jeune fille, grimaçant légèrement l’air de dire « nan mais tu t’es vu dans ta robe à deux sous ? ». Ne relâchant pas son éclatant sourire, la blonde choisit sa victime. Enfin, future victime. Celle qui sortirait de la soirée en pleurant des larmes de crocodiles, quelque part sous terre à ramper. Qui plus est, cette pouf s’agrippait au bras de son compagnon, un jeune homme qui, comme elle, écoutait la conversation. Mais Alice l’avait déjà vu quelque part. Parfait.

Christopher l’écarta du peloton, l’emmenant avec lui un peu à l’écart. Puis, en un clin d’œil, elle se retrouva avec une coupe de champ’ dans les mains. Elle n’est pas belle la vie ? Elle qui n’avait pas le droit de toucher à l’alcool – mais qui ne se gênait pas pour le faire dès que ses parents avaient le dos tourné – se retrouvait avec la plus belle coupe de champagne qu’elle n’avait jamais eut dans les mains car elle était en train de la boire à New York. Elle prit une petite gorgée du vin français. Les bulles lui procurant une sensation de fraicheur colossale. Puis, monsieur Witman l’interrogea sur le chemin qu’elle allait prendre dans cette Cour nouvelle. Du même sourire malicieux qu’elle avait conservé lorsqu’il avait discuté avec le groupe de bourges, elle déclara avec simplicité.

« Eh bien, monsieur Witman, je crrrois bien que je vais choisirrr le côté prrrovoc’ de cette chèrrre Anya… »

Chemin faisant, elle posa son regard dans le sien et n’hésita pas une seconde à entrer dans la tête du jeune homme. Elle ne voulait rien toucher, juste chercher une ou deux informations qui lui manquait sans demander pour autant au brun séduisant. Et elle obtint ce qu’elle voulait. Le nom, le prénom et la profession du jeune homme qui avait toisé du regard le PDG pendant son entrevu avec un autre guignol habillé en pingouin. Elle sortit de la tête du jeune homme sans laisser la moindre trace. Le temps qu’il reprenne pleinement conscience de lui-même, elle prit une nouvelle gorgée de champagne, lorgnant du regard ses petites proies de la soirée. Séduire et détruire. Quand Witman reprit conscience et refit surface, elle lui montra du doigt le jeune homme et sa blondie. Puis, avec son sourire malicieux et un dernier sourire en coin qui voulait dire « restes là et admire », elle s’avança dans la foule.

Jeu de jambe subtile, déhanché approprié et battement de cil voluptueux. Certains regards se tournaient vers elle, d’autre n’y firent pas plus attention, tant absorbés dans leurs conversations. Alice s’avançait tranquillement, coupe de champagne à la main, échafaudant une idée diabolique dans sa tête. Puis, feignant ne pas avoir vu le petit couple, elle rencontra l’épaule du jeune homme et n’hésita pas une seconde à renverser un peu de champagne sur la robe de Barbie. Sourire malicieux puis, d’un battement de cil, changement de style. Air navré, désolé.

« Oh mon dieu qu’est ce que je peux êtrrre maladrrroite ! Veuillez m’excuser, je suis navrrrée ! Je… Mais… Vous êtes Steve MacCollaway ! »

Nouveau battement des cils orné d’un sourire triomphal. Le jeune homme quand à lui traversa plusieurs émotions visibles. D’abord une sorte de colère. Apparemment, le fait qu’une jeune fille, étrangère ou non, vienne déranger le cours de sa soirée ne lui plaisait pas énormément. Puis, la surprise lorsqu’il remarqua que la dite étrangère le connaissait. Alice souriait de façon plus malicieuse. Elle savait qu’elle avait gagné. La jeune fille attrapa alors le bras du jeune homme et commença une conversation des plus animée. Barbie quant à elle, se retrouva seule au monde dans sa robe mouillée au champ’. Alice, enfin, Anya entraîna alors le jeune homme un peu plus loin, se confondant en excuses puis, embrayant directement sur le fait que le jeune homme état « trrrrès connu dans les pays de l’est ». Il était même la « flèche montante du septième arrrt dans ces pays ». La jeune fille n’espérait qu’une chose, que l’autre brun au bout de la salle la contemple avec extase.

Elle poussa même son jeu d’acteur au bout en proposant au jeune homme de joindre une équipe de réalisation à la recherche d’un acteur de son talent et de sa carrure. Le jeune homme paraissait bien plus qu’emballé. Evidemment, vous l’auriez deviné, tout ceci n’était qu’un beau mensonge en plus. Cette soirée allait se finir en mensonge personnifié au rythme où la jeune fille avançait. Le jeune homme la tint légèrement à l’écart, prenant avec plaisir le faux numéro qu’elle lui énumérait. Puis, il lui proposa de passer la soirée avec lui. Là, elle venait de détruire Barbie qui s’empressa de rejoindre les toilettes à une allure plutôt rapide. Maintenant, au tour de l’autre. Un dernier sourire pour la route, un léger rapprochement contre lui et puis…

« Mon cherrr… C’aurrrait-été avec grrrand plaisirrr… Mais voyez-vous, cette soirrrée, je la passe déjà avec un grrrrand PDG… Là, bas, vous le voyez ? Bien plus puissant que n’imporrrte qui d’autrrre dans cette salle… »

La tête que pris le jeune homme montra fermement à Alice qu’il était en train de bouillir intérieurement. Un dernier battement de cil et elle tourna les talons dans un tournement de tête qui aurait fait rougir les minettes de chez l’Oréal. Elle retourna avec sa coupe auprès de ce cher Witman. Elle finit son verre et déclara simplement :

« J’pourrais en avoir un autre ? »

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Magnifique. La jeune femme semblait née pour tenir ce rôle, et le direction qu'elle décida de donner à son personnage d'une simple phrase fit frémir d'impatience Christopher. Ce soir, ils allaient laisser leur empreinte sur ce gala, à tel point que les journalistes immanquablement présents ne laisseraient pas passer une occasion pareille d'obtenir la première page de leur magazine de presse à scandale, à moins évidemment qu'une des greluches accrochées aux bras des véritables invités ne se lance après quelques flûtes de trop dans un strip-tease. Ça, c'était sûr de faire un carton, mais Witman préférait dorénavant faire parler de lui avec une image de classe collée à la peau, sa période de provocation facile était désormais derrière lui. Toute la subtilité était de se démarquer sans pour autant se donner en spectacle et sombrer dans le ridicule, et flirter avec la limite était toujours aussi excitant.

Les quelques instants qui suivirent restèrent flous dans son esprit, il se sentit légèrement étourdi et ne comprit pas bien pourquoi. Le peu d'alcool qu'il avait ingéré n'aurait su en être la cause, aussi mit-il ceci sur le compte de la fatigue. Il était vrai qu'il ne dormait pas souvent autant qu'il l'aurait fallu.

Puis la représentation en elle-même commença réellement. D'un geste, la nouvellement nommée Anya lui montra un couple de tourtereaux médiatisés, l'homme étant une étoile montante du cinéma. Elle se dirigea ensuite nonchalamment vers eux, et d'un geste aussi adroit que discret, ruina la création unique portée par la jet-setteuse. Et loin de se faire crier dessus, la « princesse » réussit à gagner l'attention de l'acteur, qui commença à lui sourire et répondre avec entrain. Si Chris ne pouvait pas saisir un traître mot de la conversation, il admirait cependant la facilité avec laquelle sa cavalière mettait son interlocuteur dans sa poche, celui-ci avait totalement délaissé sa compagne et était suspendu aux lèvres de la jeune femme, et nota manifestement quelques mots, ou un numéro, alors qu'elle le lui dictait.

Il était complètement sous le charme, donc mûr pour la douche froide. Il soumit une proposition à la slave d'adoption, qui eut pour conséquence directe la course vers les sanitaires d'une pauvre petite blonde à la robe tâchée, et maintenant en larmes. Mais là ne s'arrêta pas le massacre, évidemment. La réponse et le départ de la jeune femme entraînèrent la décomposition graduelle du masque de perfection souriante plaqué jusqu'alors sur la face du jeune MacCollaway, remplacé au fur et à mesure par une mine déconfite doublée d'une fureur sans bornes de s'être ainsi fait siffler sous le nez une perle rare pareille.

Pour toute réponse au regard envieux que lui jetait l'acteur, Witman se contenta d'un sourire en coin et d'un vague signe de la main, mimant un salut militaire, les deux derniers doigts repliés. Pas besoin d'en faire plus pour dégoûter la pauvre victime de sa compagne, qui partit manifestement afin de rattraper et tenter de reconquérir l'écervelée qu'il avait plantée peu de temps auparavant. Chris lui souhaita intérieurement bien du courage, car il allait en avoir besoin, d'autant qu'il était pratiquement sûr que la blonde qu'il venait de rejeter possédait des connections dans le monde cinématographique, et risquait de s'en servir afin de lui pourrir la vie s'il ne réussissait pas un plaidoyer convaincant ce soir. Le rôle de sa vie, en somme.

Décidant brusquement d'ajouter une touche personnelle à la soirée, afin de parfaire le rôle de la duchesse héritière, il passa rapidement deux coups de téléphone, évaluant à distance la silhouette d'Anya d'un oeil appréciateur.

Sa cavalière revenant vers lui, il raccrocha et lui proposa son bras, l'entraînant à nouveau dans une direction différente, afin de s'éloigner d'oreilles indiscrètes. Et les félicitations ne se firent pas attendre, sous une forme bien évidemment indirecte.

« Ce soir, elle aura appris l'âpreté de la vie, et lui la dureté de la chute lorsqu'on se montre trop gourmand. Je lui souhaite bien du plaisir lorsqu'il va essaye d'arranger les choses entre eux. »

La demande suivante de la jeune femme le fit tiquer. Bien qu'ils fussent excentrés du gros des convives, il remarqua immédiatement l'absence de l'accent. Et une réplique cinglante partit sur le champ.

« La princesse y aurait sûrement eu le droit, pour la jeune femme sans éducation il n'en est pas question. »

Puis son ton se radoucit, alors qu'il ajoutait:

« Comprenez moi bien, vous ne jouez pas le rôle d'une princesse ce soir, vous ETES une princesse. »

Puis une idée germa dans son esprit, alors qu'il apercevait un visage connu et peu apprécié. D'un geste, il fit s'approcher le serveur, qui leur offrit à nouveau une coupe de champagne, puis le congédia.

« Et en tant que princesse, vous vous devez d'avoir tout ce que vous désirez, n'est-ce pas? Aussi, lorsque je vous ferais signe, fermant la main que j'aurais tenu ouverte dans mon dos, vous m'ordonnerez de revenir vous tenir compagnie, ce que je m'empresserai de faire, évidemment. N'hésitez pas à élever la voix. »

Sur ces mots, il s'éloigna de sa compagne, et vérifia au passage discrètement le contenu de la poche intérieure de sa veste. Une feuille blanche soigneusement pliée lui indiqua qu'il avait de quoi créer un nouveau potin pour la soirée, même s'il n'aurait pas l'honneur d'y être inclus. Mais après tout, il fallait savoir laisser un peu de gloire aux autres, n'est-ce pas? Aussi se dirigea-t-il vers le jeune Chet Lowry, fils d'un de ses concurrents, connu également pour ses abus, et avec qui il avait d'ailleurs partagé dans le temps quelques soirées survoltées. Le pauvre sortait tout juste d'une cure de désintoxication, qui avait fait à l'époque la une des tabloids, et risquait bien entendu un nouvel internement dans le centre dont il sortait à peine au moindre écart.

Chris entama donc la conversation sur quelques banalités, se réjouissant de le revoir parmi eux, et le félicitant d'avoir eu la force d'aller au bout du traitement. Il était après tout grand temps de devenir un peu plus sérieux et commencer à s'intéresser aux affaires de son père. Le signe fut fait, et un ordre presque crié le suivit de peu. C'était l'occasion qu'attendait le jeune PDG, feignit sursauter sous la surprise, bousculant au passage Lowry, et glissa subrepticement la feuille de papier repliée dans une des poches du costume de ce dernier, prenant bien soin de ne la tenir que par une pointe afin de ne pas laisser d'empreintes. Sur ce, il s'excusa de devoir le quitter, mais « on ne fait pas attendre une personne de son importance, vous comprenez ». Et il rejoignit sa belle cavalière, la gratifiant d'un baise-main alors qu'il feignait de se répandre en excuses.

« Excellent. Ce qu'il y a à savoir, c'est que notre cher Lowry sort tout juste de désintox. Maintenant que tous les éléments sont en place, ne reste plus qu'à appuyer sur le bouton et admirer le résultat. »

Se dissimulant au regard d'une bonne partie des invités derrière un pilier, tout spécialement celui de Lowry, il sortit son portable et composa le numéro de la police, tout en s'assurant que son appel était passé anonymement.

« Oui, bonsoir monsieur. Je suis serveur dans le gala de charité se tenant ce soir à la Fleur de Lys, et j'ai reçu des consignes un peu particulières concernant monsieur Chet Lowry. … Oui, exactement, de ce genre, son père a été très clair là-dessus. … Tout à fait, je l'ai vu échanger il y a peu une liasse de billet à un homme pour le moins louche, alors qu'il se dirigeait vers les sanitaires. … Entendu monsieur, et merci de votre discrétion à ce sujet, je ne souhaite qu'assurer la réputation de l'hôtel. Au revoir. »

Raccrochant, il sourit à sa cavalière, puis ajouta ces quelques mots:

« Reste un détail à régler »

Il envoya alors un sms à son assistant, contenant seulement 3 mots: « presse porte arrière », puis rangea son téléphone, après avoir pris connaissance de sa réponse, ainsi que d'une seconde, concernant son coup de fil passé plus tôt dans la soirée.

« Maintenant, il ne nous reste plus qu'à attendre, et s'attrister des difficultés que rencontre un camarade de longue date à se sortir d'un cercle vicieux. »

Et quelques minutes plus tard, alors qu'ils savouraient leur champagne, acceptant quelques canapés au caviar à l'occasion, deux hommes en costumes surgirent de part et d'autre du jeune Lowry, l'abordèrent, et le fouillèrent discrètement, trouvant évidemment la feuille de papier et son contenu dans une de ses poches. Il l'emmenèrent alors vers l'entrée secondaire, généralement plus discrète. Mais pas ce soir, malheureusement pour la famille du jeune homme...

Le tumulte causé par cette apparition passé, Chris se retourna vers la jeune femme qui l'accompagnait, et la gratifia d'un sourire éclatant, alors qu'il lui demandait:

« Aimez-vous les surprises, très chère Anya? Car il se trouve que j'en ai une pour vous ce soir. Ou tout du moins une première... »

Le sourire d'Alice étincellait. Elle avait conquis le jeune homme, elle le voyait au visage souriant et au regard brillant qu'il portait dans ses yeux. Elle l'avait vu passer un coup de fil avant qu'elle ne revienne jusqu'à lui après sa performance incroyable. Il lui reprit le bras et elle sourit de plus belle. Par ailleurs, au vue de ce qu'il lui expliqua ensuite, elle savait qu'elle avait marqué quelques points supplémentaires... Qu'elle s'empressa alors de perdre le plus rapidement possible.

Sa demande pour obtenir une nouvelle coupe de champagne fut suivie d'une replique aussi claquante que glaciale. Une véritable douche froide qui n'était pas accompagnée des petites bulles dorées. Aucune peur ne se lût alors dans les yeux de la jeune fille. Juste une soudaine envie de meurtre et de violence. Personne n'avait encore osé lui palrer sur ce ton - ou plutôt, le dernier à s'y être risqué avait fini avec un oeil au beurre noir - ormis ses parents. L'impression soudaine d'être traitée comme une gamine lui donner envie de frapper tout ce qui bougeait. Cependant, dans le cas présent et après un si beau début prestation, il serait dommage de se faire virer en tabassant son cavalier. De plus, elle aurait un peu de culpabilité pour sa pauvre robe. Elle serra donc les dents et assombrit son regard. Witman dût se rendre compte de la dureté de sa remarque car il ajouta une remarque, signalant à la jeune fille que la "princesse" qu'elle jouait ne devait pas n'être qu'un rôle. Un ton plus doux fut utilisé mais Alice n'était pas duppe : avec un homme pareil, cela ne voulait rien dire. A part peut être qu'il se calmait compte tenu de sa réaction première.

La jeune princesse retint la leçon et savait qu'elle ne ferait plus d'erreur de la soirée. Le jeune homme observait les alentours et trouva une nouvelle victime pour la soirée. Il donna à Alice ses instructions. Des ordres. Ou du moins, c'était tout comme. La jeune fille tiqua légèrement. Mouvement imperceptible des lèvres qui marquait son agacement. Mais elle obéit. Elle ne devait plus être Alice mais Anya ce soir. Ce soir seulement.

Christopher s'eloigna d'elle et elle prit une nouvelle coupe de champagne. Elle but quelques gorgées fraiches du vin français tout en observant le plus discrètement possible le jeune homme. Un autre homme, inconnu, l'aborda. Alice l'aurait envoyé ballader avec injures et gestes peu recommandés mais Anya se contenta de sourire. Puis le signal. Son sourire s'élargit. Elle allait s'en donner à cœur joie.

"WITMAN ! CESSEZ DE VOUS CACHER ET VENEZ DONC ME TENIRRR COMPAGNIE, ESPECE DE GENTLEMAN NEGLIGEANT. CESSEZ DE ME NEGLIGER DE LA SORRRTE !"

Pour être franche, elle avait adoré hurler ainsi d'un soprano parfait à travers la salle. Cela lui rappelait ses concerts où elle devait tout donner sur scène. Se donner à fond pour être sûre que le public ressente la même chose qu'elle, créant une harmonie parfaite.

La réaction fut directe : le PDG bouscula l'autre jeune homme et lui glissa quelque chose dans la poche. Au vue de la distane la jeune fille ne sut ce que cela pouvait être mais son petit doigt lui dit qu'elle ne tarderait pas à le savoir. Christopher revint vers elle et lui baisa distinctement la main. Alice sourit. Ce genre de trucs carément cools lui plaisait vraiment. Le jeune lui précisa alors quelques détails sur la situation. Le déclic se fit alors dans la tête de la jeune fille. Un toxico sortant de cure ? Cela lui était largement suffisant pour comprendre e que contenait l'enveloppe. Le jeune homme sortit son téléphone et appela alors la police avant d'envoyer un message qui ne voulait rien dire pour elle à un interlocuteur inconnu. Alice souriait un peu plus à chaque instant. Elle admirait ce que pouvait faire le jeune homme. Cette soirée serait innoubliable, certes, mais elle le serait pour tout ce qui y auront participé. Ce gala lui donnait presque envie de devenir friquée à millions juste pour pouvoir renouveller ce genre d'amusements. Oui, elle s'amusait.

Cachés derrière un pillier de la salle tels deux adolescents admirants les degats de leur bêtise, ils buvaient leur champagne et mangeaient de petits canapés au caviar avec délectation. D'ordinaire, ce genre de trucs répugnait affreusement Alice mais la faim et le fait de boire sans manger lui fit entendre raison. La jeune fille regardait le jeune homme avec le sourire. Et dire que, pendant quelques minutes, elle avait songé à le prendre en victime. Son ravisement avait certainement était le choix le plus judicieux de la soirée. Avant que les policiers ne fassent leur entrée, une question qui la démangeait depuis un petit moment fit surface.

"Que ferrrez-vous si on découvrrre que c'est vous le rrresponsable de cette petite plaisanterrrie ?"

La réponse à cette question pouvait être tout à fait intéressante. C'était là que l'on voyait si ce genre de personnes faisaient attention à tout sans exception. Puis, les deux hommes en uniformes firent leur entrée. Ils tachèrent de faire cela discrètement mais plusieurs regards se tournèrent vers eux. Une convergence qu'Alice et Christopher suivirent. Puis, le jeune homme fut emmené par derrière et le sens du message de Christopher eut enfin un sens. Il savait que la sortie arrière allait être la porte de l'enfer personnel du toxico. Elle sourit, s'amusant un peu plus.

Puis, alors qu'elle terminait son deuxième - ou troisième ? Elle ne savait plus - verre, Christopher lui fit une proposition à la fois intéressante et effrayante. Une surprise ? Ça ne sentait pas très bon. La jeune fille sut qu'elle devrait choisir ses mots avec attention.

"Une surrrprrrise ? Si elle est du même goût que celle que vous avez fait à ce jeune homme, je crains qu'elle ne me plaise pas vraiment..."

Invité

Chris était plutôt content de son coup, il venait après tout de porter un coup à la réputation d'un rival au travers de son fils, tout en s'amusant franchement grâce à ce petit jeu. Deux pions avancés sur l'échiquier complexe des affaires ce soir, c'était plus que satisfaisant, d'autant qu'il était à peu près sûr que ces mouvements porteraient leurs fruits. Il sourit donc à la remarque de sa cavalière, il avait pris toutes les précautions nécessaires et n'envisageait pas un seul instant de pouvoir être découvert. D'autant que même si cela arrivait, ses relations passées avec Lowry lui permettraient d'étouffer facilement l'affaire en faisant passer ça pour une blague entre amis, certes d'un goût douteux. Aussi l'expliqua-t-il brièvement à la jeune femme.

« Personne ne découvrira quoi que ce soit, voyons. D'une part, le cadeau est dépourvu de toute empreinte, mis à part un coin où on pourrait en retrouver une , très partielle, de la taille d'une tête d'épingle, et de toute façon brouillée par le frottement des doigts lorsqu'il a été lâché. L'achat en est intraçable, et il ne s'agissait bien évidemment pas d'une dose coupée avec un quelconque produit qui aurait pu la rendre traçable en remontant à son revendeur, mais bien du produit pur. Ici, vous ne trouverez pas ce genre d'ersatz.

Ah, et quand bien même on remonterait jusqu'à l'origine, il se trouve que l'excuse d'une blague entre vieux amis arrangerait toutes les parties, dans ce monde fermé qu'est la haute société. Quant au petit personnel, un pourboire généreux accompagné d'une clause de confidentialité permet en général d'obtenir une discrétion à toute épreuve... »

Les deux comparses assistèrent alors à la « cueillette » du pauvre Chet, manifestement déboussolé, puis la soirée reprit son cours, les policiers ayant agit avec une discrétion exemplaire, quand bien même leur sortie ferait la une des magazines à scandales le lendemain matin. A la suite de ceci, la réaction de sa compagne face au cadeau qu'il lui préparait le fit logiquement sourire. Elle le considérait donc comme potentiellement dangereux, même envers elle? De fait, elle n'avait pas tout à fait tort, Chris était capable de beaucoup de choses, mais heureusement pour elle il s'amusait tellement qu'aucune de ses idées à l'heure actuelle ne visait à la ridiculiser, ou pire. Non, tout ce qui importait, pour l'instant, c'était le jeu, la partie était des plus intéressantes et le jeune Witman ne comptait pas la laisser s'arrêter de sitôt.

Et le prochain rebondissement qu'il avait prévu le faisait sourire à l'avance, rien qu'en imaginant les possibles réactions de sa cavalière. Il décida néanmoins de la rassurer quant à ses intentions, histoire de la laisser un peu son esprit imaginer différentes possibilités, tout en la prenant par le bras et l'attirant vers le hall. Tout ceci en arborant un sourire éclatant et assuré, cela allait sans dire.

« Voyons, je parlais d'une agréable surprise, évidemment. Il faudra cependant nous éclipser quelques instants de la soirée, mais uniquement afin d'y reparaître par la suite, plus resplendissants que jamais! »

Et afin de parer à toute idée inappropriée, le jeune PDG ajouta une petite phrase, qui n'était clairement pas anodine.

« N'allez pas me prêter des intentions mal placées, cependant, je vous rappelle que nous sommes en plein jeu, et je souhaite juste ajouter quelques, hum, « détails » afin de parfaire votre interprétation. Je doute d'ailleurs que ces ajouts vous déplaisent.»

Arrivé à l'accueil, Chris interpella le réceptionniste, lui offrant pour toute conversation son simple nom.

« Witman. »

L'employé attrapa aussitôt la clé d'une des chambres, et la lui tendit.

« Tenez, monsieur. Il s'agit de la chambre 327, et votre assistant m'a chargé de vous dire qu'il avait agi conformément à vos instructions. »

Sans ajouter un mot, Christopher s'empara de la clé et entraîna Anya dans son sillage, directement vers l'ascenseur. Et sans lui avoir laissé le temps de dire quoi que ce soit, il reprit ses explications, restant volontairement vague.

« Je n'entrerai que quelques instants dans la chambre. C'est surtout pour vous qu'elle va se révéler utile. »

La montée ne dura que quelques instants, et le jeune homme emmena promptement sa compagne en direction de la fameuse chambre. Ouvrant la porte, il la fit entrer, puis lui emboîta le pas. La chambre était belle, mais pas excessivement luxueuse. Son assistant avait manifestement décidé que le chic sobre suffirait pour ce que Chris avait prévu, et au vu du peu de temps qu'il était sensé y passer. Avisant les deux paquets déposés sur le lit et une boîte à ses pieds, il se saisit du plus petit, et retourna vers l'embrasure de la porte, délivrant ses explications finales à sa compagne:

« Elle a été retouchée ce soir afin de vous convenir, et c'est une pointure dans ce domaine qui s'en est occupée, je n'ai donc aucun doute sur la qualité des retouches. Les chaussures ont été choisies pour être parfaitement assorties. Je me suis dis qu'en tant que duchesse héritière, et opulente, vous souhaiteriez vous changer en milieu de soirée juste dans le but de faire une forte impression une fois de plus. Je vous laisse le temps qu'il faudra pour revêtir tout ça. »

Puis, sur un sourire éclatant, il franchit le seuil et referma la porte à sa suite, son paquet toujours à la main. Celui qu'il avait laissé à l'intérieur pour la jeune femme contenait un exemplaire unique, modèle de la nouvelle collection de haute couture griffée « Witman ». Une magnifique robe fourreau dans un camaïeu de bleu cendre et de gris, sur laquelle Chris avait tellement flashé qu'il avait tenu à féliciter personnellement la styliste lorsqu'on lui avait présenté le modèle. Il ne doutait pas que les tons froids de la robes contrasteraient à merveille avec la franche blondeur de la jeune femme, et avait hâte de voir le résultat final.

La réponse du jeune homme fut satisfaisante pour la jeune fille qui lui sourit. Elle s'était méfiée à tord mais elle préférait se montrer prudente. Après tout, à partir du moment où Witman déciderait que le jeu serait fini, elle ne serait plus rien. Elle n'aurait plus qu'à rentrer à son hôtel miteux où l'attendait ses shorts en jeans délavés, ses T-Shirts fluos et ses converses customisées. Adieu Anya et la richesse qui l'entourait. Mais pour l'instant, il n'en était pas encore question ni pour elle, ni pour lui.

Le jeune homme l'entraîna dans le hall pour obtenir la clé d'une chambre. S'il ne lui avait pas précisé quelques instants plus tôt qu'il n'avait pas d'idées mal placées, elle l'aurait regardé avec des yeux ronds et l'envie féroce de la frapper. Mais elle se contenta de lui sourire légèrement, cherchant à découvrir le mystère qu'il avait crée. Il ajouta alors qu'il n'entrerait pas longtemps dans la chambre. Qu'elle lui serait, à elle, d'une plus grande utilité...

Ils montèrent dans un ascenceur à la décoration aussi chic que le peu de l'hôtel qu'elle avait vu. Ses yeux émerveillés devant un un tel spectacle contemplaient attentivement tout ce qui l'entourait. Elle ne cherchait pas à savoir si Christopher l'observait. Son cerveau tournait à plein regime. Quelles étaient les intentions du jeune homme à son égard ? Il lui avait bien dit qu'il souhaitait simplement faire quelques ajouts qui feraient d'elle une véritable princesse. Mais elle ne voyait pas vraiment quoi rajouter à sa tenue actuelle.

La porte de l'ascenceur s'ouvrit sur un couloir aussi long que large. Alice ne savait plus ou donner de la tête tant il y avait à voir. Christopher l'entraîna à sa suite avant de s'arrêter devant une porte et de l'ouvrir. "Voilà donc la chambre...". Il lui fit signe d'entrer et elle s'executa en silence. Elle découvrit une pièce plutôt sobre, mais qui ne manquait pas de classe et de charme. Sur le lit, deux paquets. L'un plus grand que l'autre et un troisième au pied du lit. Les sourcils de la blonde se froncèrent. Où voulait-il donc en venir ?

Le jeune homme s'avanca dans la chambre, prit le plus petit paquet des deux placés sur le lit et se dirigea vers la sortie. Avant de refermer la porte, il laissa quelques dernières informations à la jeune fille. Ces révélations entrainèrent un léger choc chez la "duchesse". Witman pensait à tout. Il referma la porte et elle se mordilla la lèvre inférieure. Ça, c'était un cadeau et un vrai.

Elle se retourna vers le lit et s'avanca lentement vers lui. Après une longue inspiration, elle ouvrit la boite et une stupeur plus grande encore que si elle découvrait quelque chose de surprenant l'envahit. Elle n'eut pas besoin de sortir le vêtement entièrement pour en découvrir la nature. Une robe plus belle que celle qu'elle regardait dans les magasines de mode avait été pliée avec soin dans cette boîte. Un petit carton avec le nom de la marque se trouvait dessus. "Witman". Un léger sourire en coin apparut sur les lèvres de la jeune fille.

"Eh bah merde alors..."

Elle sortit la robe de la boîte et l'admira. Les premiers mots qui lui vinrent à l'esprit furent "Carrement canon". Elle repéra un miroir et se tint devant avec la robe placée devant elle. La couleur foncée de la robe faisait ressortir sa blondeur naturelle et son visage aux airs d'enfant. Elle pinça légèrement les lèvres et n'osait imaginer la tête des chaussures. Elle reposa avec soin la robe sur le lit et ouvrit la boite des chaussures. Elle retint un nouveau juron en découvrant de véritables echasses. Elle prit une nouvelle grande inspiration pour garder son calme.

Puis, dans le silence et avec une lenteur qui ne lui ressemblait pas, elle retira ses propres chaussures qu'elle trouvait désormais bien ringardes. Puis elle fit glisser la fermeture éclaire de sa robe et la laissa glisser sur le sol. Elle se ravança vers le lit et y deposa ses propres affaires. Puis, elle s'empra de la nouvelle robe et l'enfila avec soin et attention de peur de l'abimer. Elle referma ensuite la fermeture éclaire et s'admira dans le miroir. Jamais elle ne s'était sentie aussi jolie et bien dans un vêtement. Elle se sourit à elle même et s'admira encore quelques instants. La première question qui lui vint à l'esprit fut "Est-ce que je pourrais la garder ou est ce qu'il me la prête seulement ?" Toujours est-il qu'elle comptait bien repartir avec. Elle jaugea les chaussures du regard, de demandant si elle réussirait à marcher avec de telles perches. Tant qu'elle n'avait pas tenté, elle ne pourrait pas savoir. Elle enfila donc les chaussure, prit le temps de les attacher comme il faut et se remit debout. La robe fourreau s'evasant en bas masquait ses pieds. Elle tenta quelques pas avant de se faire à l'allure qui était de rigueur pour cette soirée. Pour être pleinement satisfaite, elle ajusta vite fait ses cheveux. S'il avait pensé à tout, il aurait appelé un coiffeur mais elle ne lui en tiendrait pas rigueur.

Avant de resortir, elle se questionna sur le contenu de la boîte qu'avait pris Christopher. Puis, elle saisit la poignée et sortit. Le jeune homme l'attendait dans le couloir un peu plus loin et lui tournait le dos. Cherchant un moyen efficace d'attirer son attention, Alice toussota légèrement. Quand le regard de Witman se posa sur elle, elle readopta son air pimenté et provocateur, retornant alors dans la peau d'Anya. Elle osa même faire un tour su elle même et attendit la réaction du jeune homme.

Invité

La jeune femme n'avait montré aucun signe de réticence tout au long du trajet, ce qui avait grandement simplifié la tâche à Christopher, et sans vouloir être trop présomptueux, il pensait avoir maintenant réussit à attiser son intérêt, et espérait bien voir la représentation continuer encore un moment, tant il prenait plaisir à participer à cette mascarade. Il attendait en ce moment que sa complice dans cette supercherie se change, et ne doutait pas qu'elle trouverait la robe à son goût.

Ne perdant pas de temps, le jeune homme ouvrit le paquet qu'il avait emporté avec lui hors de la chambre, dévoilant un splendide collier d'or blanc torsadé, accompagné d'un pendentif mettant en valeur un saphir vert, le tout reposant sur son écrin. Pas vraiment tape à l'oeil, mais vraiment beau, et un oeil avisé l'examinant de près saurait immédiatement en reconnaître le prix, de par la finesse de l'ouvrage et la qualité de la pierre précieuse. Chris en avait ainsi décidé lorsqu'il avait appelé son assistant, un peu plus tôt dans la soirée, il ne voulait pas d'un collier trop large, qui ferait « placard » et masquerait trop le cou d'Anya, et l'aurait fait paraître plus petite. A contrario, le saphir vert, à l'éclat bien plus pâle qu'une émeraude, ferait ainsi écho à la couleur de ses yeux sans les éclipser.

Glissant le collier dans une des poches de sa veste, il referma le paquet et rechercha dans le couloir une poubelle, qu'il trouva camouflée avec ingéniosité en support floral. Faisant coulisser le panneau d'ouverture, il y glissa le paquet, et put tout juste reclore la trappe lorsqu'il entendit quelqu'un tousser derrière lui. Il se retourna donc, et fut éblouit par la vision qui s'offrit à lui. La slave d'adoption portait magnifiquement cette robe, et Chris se félicita de son choix parmi les différents modèles. Elle le gratifia quelques instants d'une virevolte, qui permit au jeune PDG d'apprécier le travail d'ajustement réalisé d'une main de maître. Et lui confirma qu'il avait toujours l'oeil pour ce genre de choses. Reprenant un air un peu plus sérieux et maîtrisé, il applaudit brièvement, avant d'en aller de son commentaire.

« vous êtes tout simplement sublime dans cette tenue, cette robe vous va à ravir. Je suis content de voir que je n'ai pas perdu la main lorsqu'il s'agit d'évaluer les mensurations d'une personne... »

Il prit ensuite un air contrit, tracassé, comme si quelque chose n'allait pas, finalement.

« A bien y réfléchir, j'ai comme l'impression qu'il manque quelque chose, mais je n'arrive pas à cerner quoi exactement... Pourriez-vous vous tourner, je vous prie? »

Et alors qu'elle lui tournait maintenant le dos, Chris sortit silencieusement le collier de sa poche, et le passa délicatement au cou de la jeune femme, s'assurant que le fermoir fonctionnait bien, puis lui murmura quelques mots à l'oreille avant de se reculer.

« Voilà qui est mieux... »

Exécutant quelques pas en arrière, il attendit quelques instants, avant de reprendre la parole, cette fois-ci sur un ton plus habituel, affichant un sourire en coin.

« Maintenant, si vous le voulez bien, je pense qu'il est grand temps de rejoindre à nouveau les autres convives. Après tout, je m'en voudrais de les priver de votre présence plus longtemps. »

Puis, lui proposant son bras, il l'entraîna à nouveau vers l'ascenseur, non sans avoir auparavant verrouillé la chambre et empoché la clé.

Regagnant le hall, il sourit à la simple évocation mentale du remue-ménage que provoquerait leur retour, entre les regards admiratifs des invités et ceux, plus envieux, de leurs compagnes. Mais après tout, une duchesse avait des prérogatives à honorer, et il n'était rien de plus normal que de la voir changer de tenue en cours de soirée, afin de faire montre de sa prestance à tous, et plus particulièrement à « toutes », marquant au fer rouge les pensées de toutes les femmes présentes ce soir, aussi ravissantes fussent-elles, d'un « nous ne jouons pas dans la même catégorie... ». Christopher avait hâte de contempler tous ces visages déconfis, jaloux, ou ébahis. Après tout, il avait décidé que cette soirée serait la leur, et comptait bien y mettre les moyens nécessaires. Parti d'un simple jeu, le couple d'une soirée se devait maintenant d'aller jusqu'au bout, et devenir le sujet qui serrait sur toutes les lèvres le lendemain matin, peut-être même plus que l'enième arrestation du jeune Lowry. Mais pour ça, il faudrait laisser à tous une forte impression, en jouant au maximum sur leurs émotions ressenties.

« En piste... »

La jeune fille se plaisait. Elle se sentait tellement bien dans cette robe qui lui allait comme un gant. De plus, au vu du regard que lui lança Witman, elle sut qu'elle n'était alors pas que tombante mais tout simplement au bord d'être l'egerie d'une grande marque. Elle avait dépassé le stade du sex appeal et s'apparentait désormais à la perfection même.

Christopher applaudit légèrement, fier de lui même et du resultat obtenu. A l'intérieur d'elle même, Alice se sentait différente. Elle se sentait plus Anya qu'Alice. Cela faisait naitre en elle un certain malaise. Elle ne le comprenait pas vraiment, ce malaise. Le jeune homme l'observait alors comme on obsere une œuvre d'art sur laquelle on cherche un défaut comme un autre. Et apparemment, il en trouva un, demandant à la jeune fille de se retourner. La blonde haussa un sourcil avant d'obeir. Decidement, ce soir, elle allait franchement à l'encontre de ses principes. Depuis quand se soumettait-elle de la sorte ?

La surprise fut pour elle immense lorsqu'elle vit passer le joyau devant ses yeux pour rejoindre son cou. Elle le fixa longuement, cherchant à déterminer s'il s'agissait d'un vrai ou non. Puis, se rappelant à qui elle avait à faire, elle sourit. Un chuchottement vint la faire légèrement frissoner. Même la proximité de l'homme comparée à l'ordinaire était inhabituelle pour elle. Elle se demanda même si le fait d'être elle même survivrait à une telle soirée. Le jeune homme garda le silence durant quelques instants comme s'il voulait lui laisser le temps de digérer tout cela.

Puis, il lui proposa de retourner à la soirée, lui rendant son bras. Elle s'en saisit avec le sourire et le suivit dans l'ascenceur. Durant la descente, elle se demanda comment un tel changement allait être accueillit par les autres convives. En tout cas, on ne lui repprocherait plus d'avoir une robe qui pourrait parraitre inférieure à sa condition. Witman gardait le silence, conservant son énigmatique sourire sur les lèvres. Cet homme bluffait littéralement Alice. Sa façon d'etre avec les autres qui étaient pourtant de la même condition que lui était exceptionnelle. Il semblait les mépriser, tous autant qu'ils sont. Et pourtant, dès qu'il s'agissait de jouer, il semblait passer outre ses principes pour mieux s'amuser.

La porte de l'ascenseur s'ouvrit. Les deux compagnons sortiret de l'ascenseur et pénétrèrent dans le Hall. Le jeune garcon qui avait donné ses clés à Christopher regardait la blonde avec des yeux qui s'apparentaient désormais à des soucoupes. Le jeune homme se pencha vers elle et ne prononça que deux mots. Deux mots qui signalèrent à Alice qu'elle devait s'effacer pour laisser Anya réapparaître.

"En piste..."

Une dernière inspiration et elle reprit son sourire charmeur qui pouvait en déstabiliser plus d'un. Puis, leur entrée fut remarquée. Comme à leur arrivée, tous les regards convergèrent vers eux. Eux, si parfaits en cet instants. Les regards se firent d'abord surpris puis, jaloux de la part des minettes qui accompagnaient tous ces hommes riches. Barbie qui avait refait surface depuis la coupe renversée manqua de retourner en courant dans les toilettes pour pleurer ou défaillir en tote tranquilité. Quant aux hommes qui se trouvaient là, ils regardaient Alice comme si elle était la meilleure friandise au monde. Tous la voulaient, souhaitaient la prendre à leur bras... Mais tous s'abstinrent devant le compagnon de la jeune femme. La jalousie et l'envie les envahirent telle une lame glacée pénètrant dans leur chair. Si elle n'avait pas était assuré que le jeune homme était sous bonne protection, Alice aurait craint pour sa vie.

Mais pour le moment, elle rayonnait, tel un soleil entré par effraction dans cette soirée. Cillant, souriant de façon intense et de manière à allumer littéralement tous les convives, elle les observait, les dévisageant sans aucune honte désormais. Entrainée par le jeune homme, leur entrée fut bien plus que remarquée ou exceptionnelle : elle marquerait définitivement les esprits. Cette soirée serait la leur de façon personelle. Un serveur s'empressa de leur resservir du Champagne. Alice accepta cette nouvelle coupe avec un large sourire et avec un "merrrci bien mon brrrave" qui affirmait un peu plus son costume, son rôle, masquant les dernieres failles qui auraient pu la trahir. Elle tourna les yeux vers Witman, prête à affronter les nouvelles péripéties de la soirée...

Invité

Et une entrée sensationnelle de plus à mettre à leur compte. Ils n'allaient pas se faire que des amis, ce soir, ceci au moins était certain. Chris en fit d'ailleurs la remarque à sa cavalière alors qu'ils constituaient le centre d'intérêt de la grande majorité des convives. Il savait bien que quelques paroles murmurées allaient encore rajouter à la jalousie des invités, et prit ainsi un air légèrement dédaigneux alors qu'il s'exprimait, uniquement dans le but d'en faire pâlir de rage.

« Alors, qu'est-ce que ça fait, d'être au sommet? D'avoir tous les regards braqués sur soit? Et d'augmenter son nombre d'ennemis exponentiellement à chaque pas, chaque respiration? N'est-ce pas délectable? »

Acceptant en même temps que sa compagne une flûte de champagne, le jeune homme but lentement, réfléchissant à une nouvelle idée, si possible encore plus surprenante que les précédentes, provocante, également, cela allait sans dire, mais tout en conservant classe et dignité. Et finalement une idée originale lui vint. Et cela restait presque dans le thème de la soirée, en allant chercher un peu plus loin dans le sens profond du terme gala. Sortant un carnet de sa poche intérieure de veston et un stylo, il griffonna rapidement quelques mots puis, hélant un serviteur, lui transmit le mot en lui demandant de le transmettre au personnel chargé de la musique d'ambiance pour cette soirée. Il glissa ensuite quelques mots à Anya, un grand sourire plaqué sur son visage:

« Finalement, je n'aurais pas pensé être si proche de la vérité, il a quelques minutes, lorsque je parlais de piste.. »

Et sur ces mots énigmatiques, il prit la coupe qu'elle tenait en main, et déposa les deux sur une petite table attenante, puis guida la jeune femme vers le centre de la salle, et attendit quelques instants. La petite musique qui accompagnait le cocktail depuis le début de la soirée se tut soudainement, et laissa place après quelques instants à un morceau mondialement connu, le « Danube Bleu ». Un appel à la valse comme on n'en faisait plus de nos jours. Irrésistible, classique, mais efficace. Et l'allusion aux origines slaves de la duchesse était des plus évidentes.

« Je me demande si quelqu'un a déjà dansé ainsi en pleine soirée, dans ce genre de gala. Si ce n'est pas le cas, vous aurez l'honneur d'être la première »

Et sur ces mots, il entraîna sa partenaire dans une valse plutôt lente, au début, guidant soigneusement leurs pas, afin de lui laisser le temps de s'accoutumer à ses escarpins nouvellement chaussés, puis augmenta petit à petit le rythme, tout en s'assurant qu'Anya suivait. Autour d'eux, il aperçut quelques couples qui suivaient le mouvement d'un pas hésitant, se demandant sans doute s'il s'agissait d'une animation prévue officiellement. Les quelques journalistes conviés ne perdaient pas une miette de la scène, trop heureux d'avoir un sujet sortant de l'ordinaire pour cet énième gala qu'ils avaient été conviés à couvrir. S'il restait encore dans la salle auparavant quelques personnes à ne pas avoir encore remarqué le couple ce soir, la chose était maintenant impossible, et Chris sourit de plus belle à cette pensée. Faire parler de lui ainsi, même s'il ne s'agissait que d'une excentricité de plus à mettre à son compte, aurait un effet bénéfique pour sa société. Après tout, parler de lui entraînerait ensuite les conversations sur sa société, ses derniers produits... Exactement l'effet recherché par le jeune PDG, en somme.

Lorsque la danse prit fin, Witman se pencha vers sa cavalière, et lui murmura une forme détournée de félicitations:

« Une duchesse slave se devait de savoir valser parfaitement en toute circonstance, je dois avouer que vous avez entièrement rempli votre contrat. »

Marchant à pas lents vers le hall, le temps de se redonner une contenance, le jeune homme s'adressa à l'héritière ukrainienne:

« Bien. Cette soirée commence à traîner en longueur, ne trouvez-vous pas? Et toute cette activité m'a ouvert l'appétit, que diriez-vous de changer un peu d'air et aller dîner quelque part en ville? »

Toujours sourire. Lorsque Christopher lui avait dit cela en début de soirée, elle avait douté de ses capacités là dessus. Mais, à présent qu'elle voyait les mines déterrée des autres invités devant leur nouvelle arrivée, elle savait que sourire n'était qu'une formalité. Le tout était de sourire sans éclater de rire ce qui s'avouait plus compliqué dans le fond. Lorsque Witman se pencha vers elle pour saisir ses impressions, elle remarqua la crispation de certain et les envies de meurtre d'autres. Le jeune homme avait raison. Être le centre de l'admiration, des regards, de l'envie et de la haine des autres avait quelque chose de plaisant. La jeune fille se sentait enfin à la place qui était la sienne. Lorsqu'elle montait sur scène, elle ne ressentait pas moins d'excitation qu'à ce moment même. Être le centre de l'attention, tous ces regards braqués sur elle. Elle sourit largement.

Une coupe de Champagne à la main, elle observait ouvertement les autres qui eux, lui jetaient quelques petits regards qui parassaient presque timides ou appeurés. Quelques gorgées de vin français et Christopher appela de nouveau un jeune garcon pour lui donner un morceau de papier. Une nouvelle idée avait germée dans l'esprit du jeune homme. Mais d'où sortait-il toutes ces excentricitées ? La jeune fille comprit que les limites du jeune PDG etaient très éloignées lorsqu'il s'agissait de se faire remarquer. Une phrase, courte, suffit à Alice pour comprendre. Il lui prit son verre qu'il déposa sur une table avant de prendre la main de la blonde pour l'emmener au centre de la salle.

Danser. A part sauter partout comme on pouvait le faire en boite sur une musique aux basses démesurées, Alice n'avait aucune notion de danse dans l'ame. En revanche, elle avait la musique dans la peau. De plus, les quelques annees d'études musicales qu'elle avait eut pouvait lui en dire long sur l'analyse de la pièce qui venait d'être lancée. Tempo, mesure, rien ne lui echappait. Witman lui dit alors dans un sourire que c'était peut être la première fois que l'on dansait dans un tel gala. La jeune fille lui lança alors un sourire ravageur, ravie de cette exclusivité qu'il lui réservait. Cette nuit à New York sera certainement la plus belle qu'elle aura vécu. Le jeune homme l'entraîna dans la danse. Alice tentait de suivre, se fiant avant tout à la musique, les notes se dévoilant un peu plus à chaque instant. Elle aurait bien retiré ses chaussures qui tentèrent d'avoir raison d'elle à bien des occasions mais sans succès. Telle une danseuse accomplie - certes, le cavalier y était pour quelque chose - elle prenait son temps pour poser ses pas, restant dans la musique et suivant Christopher avec le sourire. Toujours sourire. Oui. Mais avec differentes façons.

Lorsque la valse s'arrêta, le jeune homme lui murmura un nouveau compliment voilé dont il avait le secret. Il s'eloignerent du centre de la salle et reprirent leur coupe. Alice la finit rapidemment, consciente que l'alcool et ses effets ne l'avaient pas encore prise dans ses filets. A moins que le tournis qu'elle associait à la valse n'avait une autre origine... Christopher lui fit alors une proposition nouvelle. Une invitation à diner. La jeune fille se retint de lui rappeller la façon dont elle était entrée ici ainsi que le but initial de cette entrée. Finallement, rien de toute cette soirée ne s'était déroulée comme elle l'avait envisagée mais elle ne se chagrina pas la dessus. Le sourire charmant qu'elle n'avait réservé qu'au jeune homme depuis le début de la soirée fit une brève apparition sur son visage.

"Eh bien, Monsieur Witman, étant donné la bonne soirrrée que j'ai passé en votrrre compagnie dans cet hôtel, il me semble qu'en effet, je peux accepter cette invitation pourrr un diner en ville..."

Un nouveau sourire sur les lèvres, plein de malice cette fois. Elle était prête à le suivre où qu'il aille ce soir.

Invité

Chris pensait avoir posé un défi de taille à sa partenaire avec cette valse, même s'il n'en avait augmenté le rythme que progressivement, mais avait été agréablement surpris par la qualité du pas de la jeune femme, qui s'était rapidement adaptée à son allure malgré les escarpins qu'elle portait. Décidément, cette compagne qu'il s'était trouvée pour la soirée ne manquait pas de l'étonner. Enfin, pour être plus précis, c'était plutôt elle qui était venue le trouver, à vrai dire. Ce qui avait également été une surprise, d'ailleurs, maintenant qu'il y repensait, mais c'est ce culot inouï qui l'avait poussé à tenter le coup, et il ne le regrettait pas. Il avait même hâte de la pousser dans ses derniers retranchements, la faisant interpréter son personnage jusqu'au bout pour voir si elle lâcherait prise à un moment ou tiendrait jusqu'au bout.

Et c'est pourquoi il avait décidé qu'il était temps de changer d'environnement, et de tester un peu sa compagne de la soirée dans d'autres conditions. Aussi, après une réception mondaine, la suite logique qui lui était venue à l'esprit était bien évidemment le repas au sein d'un restaurant huppé, avec entre les deux un trajet en limousine, quoi de plus normal? Pour Witman, il s'agirait d'une soirée comme les autres, peut-être légèrement plus chargée qu'à l'accoutumée, mais il ne s'en souciait guère, tant il était en train de s'amuser à cet instant. C'est pourquoi il fit sa proposition à Anya, et sourit donc de ravissement lorsqu'elle accepta.

« Magnifique! Si vous le voulez bien, je vais prendre les dispositions nécessaires, veuillez m'excuser un court instant. »

S'éloignant de quelques pas, Christopher passa rapidement quelques coups de fil, réservant une table dans un de ses restaurant favoris, et signalant à son chauffeur de se tenir prêt. Ceci fait, il revint aux côtés de la duchesse héritière, et lui proposa son bras afin de sortir de la salle, et regagner le hall d'entrée. Un concert de murmures accompagna cette sortie, et Chris, alors qu'ils allaient quitter la pièce, se retourna soudainement et, soumettant discrètement à sa cavalière la suggestion d'une révérence, s'inclina, comme pour saluer l'assemblée entière, avant de se retirer. Il s'agissait là d'une ultime forme d'ironie, un respect feint qui flatterait les plus vaniteux, mais ne manquerait pas d'exaspérer son monde. Et pourtant, rien ne pouvait lui être reproché, tant il se conformait à l'étiquette...

Gagnant la rue, sa compagne au bras, le jeune PDG se dirigea tranquillement vers la limousine qui les attendait face à eux, et laissa le voiturier ouvrir la portière arrière afin de laisser la jeune femme qui l'accompagnait s'engouffrer dans l'ouverture, avant de prendre place à son tour. Les dés étaient lancés, dorénavant il comptait faire durer le jeu aussi longtemps qu'il le pourrait, et entraîner Anya jusqu'au bout de la nuit...

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