Avoir rendez-vous avec son destin [PV: Magneto]

Tout ira mieux à partir de maintenant !

Ces quelques mots apposés avec soin sur une modeste feuille de papier me firent légèrement sourire. Promesse lancée à toutes les personnes que j’aimais, ils étaient le témoin vivant de l’espoir qui m’animait en cette magnifique soirée de septembre.

Le jour du Yom Kippour touchait alors à sa fin. Les milliers de fidèles qui, peu de temps avant, étaient rassemblé en ce lieu sacré, avaient déserté les bancs de l’assemblée le cœur empli de joie et d’amour pour leur prochain. La cérémonie du Heilah avait été une véritable splendeur et je ne pouvais que me sentir fier de sa réussite. Célébrer les offices du jour le plus saint de l’année avait toujours été mon vœux le plus cher et sa réalisation, un privilège que ma position de rabbin m’avait accordé… cette dernière volonté une fois accomplie, il ne me restait que régler quelques détails administratifs avant de rejoindre mes frères et me soumettre au Jugement de Dieu.

Mettant un point final à mes écrits, je refermais avec délicatesse l’enveloppe et la plaçait en évidence sur mon bureau. Il aurait été si dommage que les personnes concernées ne puisse jamais en prendre connaissance. Cette correspondance toute empreinte de regrets et d’amertume, exprimait tout ce que j’étais en droit d’espérer des miens en ce jour si particulier : leur pardon et leur entendement.

Jetant un instant un œil en direction des quelques photos trônant sur mon bureau, je ne pouvais m’empêcher de songer à ma famille. Seraient-ils capable de mesurer toute la portée de mon geste ? Auraient-ils le cœur brisés en découvrant mon corps glacé au petit matin ? Mon départ précipité serait sans nul doute une surprise pour eux et ils ne pourraient s’empêcher de verser quelques larmes à mon enterrement. Mais c’était la seule solution qui s’offrait à moi à présent. Je ne pouvais prendre le risque de faire machine arrière. Le besoin du réveil des monstres qui sommeillaient en moi se faisait trop grand. Les manifestations de Jack, Cindy et Fanya en témoignaient et je ne pouvais me permettre de jouer avec les vies des êtres qui m’étaient si chers.

Tout ira pour le mieux à partir de maintenant !

Avec soin je repliais mon châle de prière et reposait ma kippa dans l’armoire qui juxtaposait mon bureau. Le suicide étant un péché mortel, je ne pouvais plus me prétendre digne de me présenter devant l’Eternel. Cette effronterie supplémentaire n’aurait que peu de portée devant la gravité de mon geste. Je décrochais ensuite ma précieuse étoile de David et la déposait à son tour. Le souvenir de mon histoire si particulière avec elle me revenait alors à l’esprit. Elle était le témoin si précieux de ma foi, une confiance en l’avenir que je m’étais juré de rendre à Daniel et à Erik.

- Peu importe, quelqu’un d’autre s’en chargera pour moi.

Déclarais-je dans l’espoir de me débarrasser de cette culpabilité qui n’avait plus de raison d’être. Avec lenteur, je m’approchais alors d’une petite boîte boisée qui, une fois ouverte, découvrait un poignard magnifique poignard argenté. Je caressais avec affection les rebords coupant de sa lame et le saisi comme s’il s’agissait d’un objet d’une valeur inestimable. A mort, bien que déshonorante, méritait un traitement de choix.

Quelques instants plus tard, je me retrouvais au cœur de la synagogue. Aucune hésitation ni aucun chagrins ne vinrent troubler ma profonde conviction. Agenouillé devant Dieu comme un modeste serviteur, je faisais face au dernier démon qui me restait à terrasser. Tel le roi David faisant face à Goliath, je faisais face à mon destin. Est-ce que mon arme vaudrait la fronde du jeune berger ? Quoiqu’il en soit, j’étais prêt à faire mes adieux à toutes ses personnalités qui m’avaient gâché l’existence. Avant de frapper, je récitais en hébreux les quelques verset du livre de Samuel. Ces paroles-mêmes que j'avais choisi pour m'accompagner dans la mort

- Le coeur de l’humain ne tombera pas devant lui ! Ton serviteur ira et guerroiera contre ce Pelishti. IHVH-Adonaï, qui m’a secouru de la main du lion, me secourra de celle de mon ennemi

Brusquement la dague fut arrachée des mains du jeune homme comme si elle était mu par une volonté propre et alla se ficher dans les boiseries d'un mur opposé avec un bruit sourd. Même à travers la pénombre, on pouvait voir le métal froid luire sous les flammes montant la garde contre la pénombre des lieux. Le silence fut à nouveau troublé par des bruits de pas assez lourds provenant du fond du local vers la porte d'entrée. Un bruissement d'étoffe, quelqu'un s'installait sur un banc juste derrière je jeune juif, il pourrait même en sentir le souffle derrière lui.

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David.
Il m'était précieux.
J'aimais son cheminement, j'aimais partager des points de vue avec lui, ses conversations pouvaient être aussi passionnantes que celles de Charles. Bon sang ne saurait mentir aurait pu t-on dire. Ses errances me renvoyaient aux limites de mon ami toujours. David ne souhaitait qu'une chose, qu'on l'écoute avant toute chose. Force était de constater que cela n'était pas le fort de Xavier. Il était prompt à donner conseils et leçons mais l'écoute...ca non. Impatient...pressé d'agir. Combien d'erreurs avait-il commis ? Sans doutes toutes, tout comme moi, je n'irai pas le blâmer.
David à défaut des autres, a très vite compris que ce monde n'était pas blanc ni noir, mais fait de nuances. Ces nuances, il les affrontait droit dans les yeux laissant ses démons s'en repaitre.
Ces même démons qui ce soir le faisait cheminer vers l'inacceptable.
Encore une question de sémantique.
Charles aurait dit, inexcusable car il en aurait porté la responsabilité comme il s'arroge le droit de porter la croix du genre mutant.
Moi je laisse le concept de culpabilité et celui de responsabilité à ceux qui aiment cet aspect sado masochiste de la vie.
Inacceptable.
Je ne peux accepter qu'il mette fin à un tel esprit même si il est vicié, je ne peux accepter qu'il perdure dans l'erreur de Dieu quelque soit le nom qu'il aime à lui donner. Il se déteste, il ne s'aime pas...il est magnifique dans sa complexité et sa puissance mais il l'ignore.

“assez maintenant, ô mon Dieu, prends ma vie car je ne suis pas meilleur que mes pères *”
Moi je te le dis, jeune idiot, seul lui peut s'arroger ce droit de te juger et sa justice ne se convoque pas.

Il était aussi érudit que moi et je le savais.
Ma voix se voulait douce mais ferme.


Ne te prive pas de voir l'avenir, mon enfant, il pourrait-être si intéressant.
Bonsoir David.
Il est coutume de dire "ca fait bien longtemps" je préfère dire que l'absence peut être longue du moment que le retour tombe à point.
Tu sembles troublé David, il me semblait t'avoir dit jadis que de garder les choses trop sombres dans les recoins sinueux de l'esprit ne conduisait qu'à prendre les mauvaises décisions.




*Elie (Premier Livre des Rois, 19, 4-5)

Le poignard s’écartant subitement de ma poitrine pour atterrir contre le mur me faisant front me plongea dans une totale perplexité. L’espace de quelques secondes, je demeurais figer sur place, totalement ébahit par ce curieux phénomène. Mon esprit, parcouru de centaines de questions, en trouva rapidement l’explication… une réponse qui d’ailleurs ne m’enchantait guère. Je n’étais pas seul dans la synagogue et les bruits de pas résonnant dans la sainte bâtisse me glacèrent littéralement le sang. Se faufilant derrière moi, le mystérieux visiteur prit place dans l’assistance. Resté immobile sur mes appuis, j’adoptais une attitude soumise et silencieuse, tel un enfant prit sur le fait d’une bêtise.

L’étrangeté de cette situation fit apparaître un tendre rictus sur mes lèvres. Comment n’avais-je pas pu m’en douter plus tôt ? La lame qui m’avait été enlevée tout comme les rêves qui étaient à ma portée, ce brutal arrachement à mes espoirs les plus profonds ne pouvaient être l’acte que d’un seul homme. Resté agenouillé devant l’autel, tournant ainsi le dos à Erik, je ne savais comment réagir à sa brutale intervention. Sa présence qui m’avait toujours été si chaleureuse, si rassurante se changeait subitement en une amertume que je répugnais à ressentir. Au nom de quoi s’était-il attribué le droit d’arrêter mon bras à l’instant le plus crucial ? N’avais-je donc pas le droit de disposer de ma vie à ma guise ?

Ces quelques interrogations qui brûlaient mes lèvres ne sortirent pour autant pas de ma bouche. Le respect et l’affection que je ressentais pour lui me les interdisaient. Comment aurait-il pu se douter des bouleversements et des remouds qui secouaient mon quotidien ? Il y a si longtemps que nous ne nous étions pas parlé. Il n’aurait pas pu comprendre les raisons qui motivaient mon geste.

« Pardonnes-lui parce qu’il ne sait pas ce qu’il fait »

Telles étaient les paroles que je m’apprêtais à lui lancer en guise de remerciement. Mais bientôt, ses dires si cruel et pourtant si justes s’élevèrent et me laissèrent dans l’impasse. Prétendre connaître les plans que Dieu avaient tracé pour moi étaient sans nul doute présomptueux de ma part et mon acte une injure-même à ma Foi.

- Tu as sans doute raison. Je ne puis librement invoquer la justice de Dieu en de telles circonstances et faire preuve de tant d’orgueil est un manquement impardonnable à ma fonction… Si la justice divine se veut droite et équitable, le Seigneur ne saurait tolérer de me voir accomplir les desseins apocalyptiques auxquels je suis immanquablement destiné.

Demeurant muet durant l’espace de quelques secondes je me relevais lorsqu’Erik m’adressait ses salutations.

Il était de retour !

L a colère que j’avais ressentie tantôt s’évanouit subitement au moment où nos regards se croisèrent. Mû par cette pensée je ressentais une joie immense à l’idée de pouvoir enfin partager mes doutes et mes craintes avec le plus fidèle de mes confidents.

- Bonsoir et Shalom Erik. Un retour tombant un point dis-tu ? Je partage quant à moi un avis plus nuancé sur cette question. Car, si le Rabbi Haller serait tenté de reprocher tes heures de retard, David lui préfèrerait déclarer que tu as bien deux jours d’avance sur notre ultime rendez-vous. Quoi qu’il en soit, et malgré les circonstances, sache que je suis ravi de te revoir.*

M’[/color]asseyant ensuite à ses côtés, je me remémorais les termes de son discours et soupira profondément avant de lui offrir ma vision des choses.

- Lorsque Dieu recherchait un roi pour diriger le peuple d’Israël, son choix se porta sur un jeune berger nommé David qu’il avait longuement observé et jugé. Ce pasteur, rempli d’amour et de diligence pour ses brebis, et possédant une Foi inébranlable en l’Eternel lui semblait le plus digne de le servir dans cette tâche… J’ai cru l’espace d’un moment que je pourrais lui ressembler. Que ma Foi indéfectible et la volonté de servir mon peuple, me donnerait confiance en cet avenir qui me tendait les bras. Mais mes rêves et mes espoirs on été brusquement balayés par le réveil de mes démons intérieurs… Je ne puis plus longtemps cacher la vérité. Je ne suis pas digne de me prendre pour le roi David et ne le saurais sans doute jamais… Le mal que j’ai déjà infligé autour de moi et les brutales pertes de maîtrise de mes pouvoirs ne sont que les prémices d’un bouleversement beaucoup plus fort et inévitable… me forcer à croire encore en un hypothétiques avenir ne serait que pur égoïsme de ma part et je n’ose croire que la volonté de Dieu consiste à me voir faire souffrir les gens que j’aime.

Tu voulais que je confie ce qui se cachait dans les recoins sinueux de mon esprit ? Te voilà servit maintenant… quelle décision prendrais-tu si tu te retrouvais dans ma position ?

*En yiddish dans le texte