Les rêves ces traîtres. [PV Alice]

-Vous avez été insupportables aujourd'hui! Demain examen, ça me fera des vacances tiens.

Malgré les protestations Warren rangea ses affaires dans sa mallette. Ses élèves avaient toujours été indisciplinés pour cette matière, les sciences économiques et sociales était quelque chose de très difficile et ennuyeux pour des adolescents. Lui même supportait tout juste cela étant plus jeune mais puisqu'il avait quand même réussi à se faire une raison, ces polissons aussi le devaient. Ils devaient apprendre que dans la vie, on ne faisait pas toujours ce que l'on voulait, et surtout que l'on avait pas ce que l'on souhaitait. C'était à cause de ce second proverbe surtout qu'Angel était devenu plus irritable. Lui qui auparavant était d'une grande patience semblait la perdre, il allait même à ses cours à reculons, laissait les affaires mineures de son entreprise être gérées par des PDG autres que lui et râlait parfois pour aller en mission. Rien de bien grave, on le "félicitait" même de ne plus jouer à l'ange parfait qu'il avait toujours tâché d'être. Les X-Men n'arrêtaient pas de se moquer de lui gentiment mais aucun ne pouvait deviner le mal être qui envahissait Warren.

Il faut dire que le mutant n'aidait pas, sa haute éducation lui avait permis de savoir comment garder les distances, un masque parfaitement neutre ornait ses traits et les changements n'étaient pas assez grands pour réellement s'inquiéter. Après tout qui n'avait jamais un petit coup de mou dans sa vie? Et puis même si il était plus exigeant avec ses élèves, il n'était pas injuste, n'insultait pas ni ne s'énervait, devenant juste un professeur un peu ennuyeux qui n'essayait même plus d'intéresser ses élèves. Il faisait cours de manière mécanique, peinant lui même à croire en ses paroles. Les entrainements de X-Men semblaient également lui être un peu égal même si son côté rigoureux le poussait à continuer. Mais il n'avait plus en lui cette lueur d'idéaliste. Comme son ami Diablo à un moment, le mutant ailé perdait la foi.

A quoi tout cela servait-il? Il y aurait toujours des antis mutants et des porteurs du gêne X extrémistes. Les premiers étaient nés de la peur des seconds, et les seconds de la haine qu'ils avaient pour les premiers. Un cercle vicieux qui ne faisait qu'augmenter petit à petit. Le jeune homme en avait assez de se battre pour rien semblait-il. Et puis lui qui ne demandait rien, qui était juste heureux de sa vie certes difficile, surchargée, voilà qu'on lui avait retiré un de ses seuls "caprices" durables, un caprice véritable sans lequel il était totalement perdu. Ce n'était pas l'oeuvre d'un gamin gâté, non... C'était autre chose qu'il avait adoré et détesté à la fois, dont il s'était senti fier et honteux. Sa relation avec Lucas Slang l'avocat dont il était qu'il le veuille ou non tombé amoureux. Ce dernier avait disparu dans la nature et le mutant ne pouvait s'empêcher de se sentir chagriné, en colère, démuni aussi. Aussi bien fâché du fait qu'il soit parti que contre lui même qui n'arrivait pas à se dire que c'était mieux ainsi.

Le soir venu après un après-midi d'entrainement visant à l'épuiser pour espérer dormir un peu mieux, et surtout plus tôt, le jeune homme prit une douche et s'effondra sur son matelas, content de voir que cela fonctionnait et que déjà le sommeil s'emparait de lui. Tombant littéralement dans les bras de morphée, le professeur se retrouva en train de rêver. Il volait au-dessus de New-York, rien d'exceptionnel en soi, la situation était pour lui tout à fait normale- sauf que son corps était légèrement alourdi, il portait quelqu'un probablement. Une victime? Non... Lucas lui même. L'avocat était d'abord effrayé par le vol mais avait ensuite ouvert les yeux et tous deux hurlèrent de joie en descendant en piquée. Autant dire que ce n'était pas très digne de leur rang respectif mais ils s'amusaient bien. Se posant sur un toit ils prirent un peu de champagne apparut là comme par magie et Warren s'en approcha, l'embrassant doucement avec timidité avant de s'écarter comme horrifié, puis de se lancer de nouveau à perde haleine cette fois, incapable de résister à son attraction. Il revivait simplement sa nuit de rencontre avec l'avocat.

Soudain le jeune homme remua dans son lit, défaisant rapidement les couvertures à cause de ses ailes qui se déplièrent par automatisme, répondant à son rêve dans lequel il venait de s'envoler précipitamment pour se diriger vers l'hôpital. Il entra et discuta avec une femme, semblant la supplier, chose qui au passage ne lui ressemblait vraiment pas. Finalement on laissa l'ange entrer dans une chambre ou Lucas reposait, plus mort que vif. Warren gémissait dans son sommeil, de la même manière que dans son rêve il laissait couler quelques larmes d'inquiétude, ce qui n'était pas non plus dans ses habitudes. Ensuite il s'ouvrit les veines pour laisser son sang régénérateur couler sur une des plaies de Lucas qui guérit petit à petit, rendant son sourire lumineux à Warren qui cessa de s'agiter dans son lit. Mais au moment où ils allaient s'envoler le jeune homme sentit que ses ailes ne lui répondaient plus et tous deux tombèrent dans les abîmes.

Le mutant se réveilla brutalement avant la chute, il ne suait pas, son corps adapté lui évitant ce désagrément mais il n'en restait pas moins que le lit était un vrai champ de bataille et que ses cheveux étaient entièrement en désordre. Entre deux mèches blondes le mutant put toutefois s'apercevoir d'une présence... Il se leva un peu chancelant et fit mine d'aller jusqu'à sa fenêtre pour mieux bondit sur la porte et l'ouvrir d'un coup, découvrant l'intruse.

Warren ne dit rien mais son regard sévère posait bien des questions comme "que fais-tu ici?!" En tout cas, il ne fallait pas être devin pour savoir que l'adolescente, Alice s'il se souvenait bien n'était pas la bienvenue en ces lieux. Elle avait intérêt d'avoir une sacrée excuse pour être là en pleine nuit.

Aujourd’hui, à part son cours d’économie, Alice n’avait que des cours qui lui plaisaient. Elle commençait malheureusement par ce cours d’économie qu’elle redoutait tant… Un cours où l’on ne faisait que notait des mots mis à la suite des autres pour former des phrases qui n’avaient aucune signification pour la jeune fille. Et, apparemment elle n’était pas la seule à ne rien comprendre à ce cours. Le pire était surement que depuis un certain temps, le jeune professeur n’était plus le même. A vrai dire, il n’était plus aussi « cool » qu’avant. Ceci ennuyait Alice parce qu’avant ce soudain changement, elle l’aimait bien malgré ce cours incompréhensible pour elle. Et puis, avant ça, il essayait de leur faire comprendre les grandes notions en s’y reprenant parfois à plusieurs reprises alors que maintenant ce n’était plus le cas. Maintenant il fallait trouver un moyen de savoir pourquoi il avait soudainement changé et ce n’était pas vraiment à son niveau d’élève qu’elle allait pouvoir lui demander ce qu’il se passait.

C’était enfin, la fin de ce cours cauchemardesque où la plupart des élèves ne faisaient que parler entre eux pour s’occuper et où elle avait appris que le lendemain il y avait un examen qui pesait un gros coefficient dans la moyenne. Alice avait ensuite ces cours d’art qui lui permettaient de se détendre un peu avant de se mettre à réviser son économie, l’après-midi. Ces camarades du cours d’économie étaient venus lui parler à la pause. Ils voulaient savoir si elle connaissait la cause du nouveau comportement du professeur. Comment pouvait-elle le savoir ? Elle n’était qu’une élève après tout. Puis, ils lui proposaient un marché : si elle trouvait en se faufilant dans les rêves du professeur ce qui le mettait dans cet état, ils l’inviteraient à leur prochaine sortie. C’était une proposition intéressante pour elle puisqu’elle ne sortait jamais avec des camarades. C’était en général pour se rendre à la bibliothèque et encore. Bref, elle avait accepté d’essayer.

En fin de journée, après avoir passé son après-midi à réviser les longs chapitres d’économie, elle avait attendu ses camarades dans le couloir qui menait aux dortoirs. Ils avaient discuté de la meilleure manière dont elle disposait pour se retrouver dans le rêve du professeur à coup sûr. Alice savait que d’avoir un contact physique avec la personne pouvait l’aider mais bien sûr ce n’était pas envisageable dans ce cas-là. Ils proposaient alors de la faire s’endormir en même temps que lui et qu’elle ne pense qu’à lui avant de dormir. Ce n’était vraiment pas sûr que ça marche mais bon qui ne tente rien n’a rien comme on dit. Elle ne savait pas exactement comme ils avaient appris qu’il allait dormir -et elle préférait ne pas le savoir- mais le signale était lancé, il fallait qu’elle dorme ! Une camarade proposait les somnifères… Ce qu’Alice utilisait. Elle faisait très attention de penser au professeur le plus fort possible pour tester cette théorie.

Très surprise, la jeune fille se retrouvait bien dans le rêve du jeune homme. Ca avait marché ! Par contre, ce qu’elle voyait ne devait pas être révélé à n’importe qui. C’était même assez dur de le décrire… Warren volait au-dessus de la ville avec un homme dans ces bras, un certain Lucas. Les prénoms des inconnus lui apparaissaient toujours lorsqu’elle ne les connaissait pas, c’était plutôt pratique lorsqu’elle devait leur parler. Ici, Alice préférait se taire. Elle ne faisait qu’observer en gardant le silence. Et puis, visiblement il n’avait pas remarqué sa présence. Étrange, normalement le rêveur la voit. Enfin, passons. Ils s’amusaient plutôt bien à en croire leurs rires et leur mine réjouit. A un moment, Alice compris le lien qui unissait les deux hommes : ils étaient en couple ! Malheureusement, le rêve ne restait pas aussi joyeux. Le cadre ne se déroulait plus dans le ciel de New York mais dans un hôpital.

Lucas n’était pas dans un très bon état et le professeur était visiblement inquiet pour son ami. Il versait même quelques larmes en le voyant ainsi ce qui émue un peu Alice. Elle n’aurait jamais pensé que ce professeur pouvait être amoureux et encore moins d’un homme. Vraiment, qui aurait cru que Warren était amoureux d’un homme ? Probablement personne dans la classe. Elle le voyait verser de son sang sur une plaie ce qui eut pour effet de la guérir. Et puis soudainement, il tombait dans un trou noir et elle se réveillait avant d’y sombrer également. Ses camarades la regardaient avec de grands yeux ébahies pour savoir ce qu’elle avait vu. Sans dire un mot a leur égard, elle se mit à courir en direction des chambres des professeurs. Maintenant qu’elle savait ce qui n’allait pas, elle devait lui parler. Alice garderait ce qu’elle avait vu pour elle pour ne pas mettre Warren dans l’embarra. Elle avait trouvé la chambre qu’il occupait et elle s’était arrêtée juste devant la porte. Presque aussitôt, il avait ouvert la porte, les cheveux en bataille, seulement vêtu d’un bas de pyjama.

« Excusez-moi de venir vous voir en pleine nuit mais… Je viens de vivre votre rêve en même temps que vous. On pourrait peut-être en discuter vous ne croyez pas ? »

-Et vous venez discuter de leurs "rêves" avec tous ceux avec qui vous les partagez?

Demanda Warren d'une voix ensommeillée, mi intrigué, mi agacé par cette arrivée impromptue, saugrenue selon lui. Le professeur ne voulait pas dévaloriser Alice, ni son pouvoir qui était tout à fait utile mais présentement il était fatigué et avait de plus à coeur de protéger son secret honteux. De plus c'était une élève, même Diablo son meilleur ami n'était au courant de rien, pourquoi parlerait-il avec une enfant? Certains professeurs le faisaient, pas lui, son éducation lui faisait garder certaine distance avec les disciples. Non pas qu'il soit arrogant ou méchant mais pour lui c'était normal. Etant petit, les professeurs se fichaient pas mal de sa vie, ils ne servaient qu'à donner des cours. Ici c'était un peu différent, Warren l'avait compris, il aidait même des enfants en difficultés, si ces derniers voulaient se confier, mais qu'un adulte le fasse à un plus jeune que soi, la chose lui paraissait ridicule et inconcevable.

-Ce n'était qu'un rêve mademoiselle. Les rêves ne sont que des chimères qui ne signifient rien à part des "fantasmes" ou des idées étranges qui ne nous traverseront même pas l'idée en réalité. Des choses qu'éveillées nous ne vivront jamais ni n'avons envie de vivre.

Warren mentait sur ce coup là car tout ceci il l'avait vécu, sauf la dernière chute qui était plus métaphorique qu'autre chose. Se frottant les yeux et résistant à un baillement qui serait très impoli le mutant se rassit sur son lit, Alice avait de la chance de l'avoir dérangé alors qu'il ne parvenait pas à sortir complètement de son sommeil, ça le rendait moins agressif. Aussi se contenta-t-il d'un simple questionnement étonné et non d'un reproche lorsqu'il lui demanda...

-Mais votre chambre n'est pas à côté de celles des professeurs n'est-ce pas? Alors comment avoir capté MON rêve? D'ailleurs quand on s'éveille, on ne s'en souviens plus en général. Présentement c'est le cas. Mais c'est gentil de vous êtes préoccupée. Vous devriez aller dormir mademoiselle Sherman

Fit-il avec un léger sourire contrit. Au fond il fallait croire que l'intention le touchait bien qu'il demeure sur ses gardes, peu apte à partager ses secrets les plus humiliants avec une adolescente. Le jeune homme l'avait malgré lui reconnu, c'était elle la jeune otage qu'il avait aidé lorsque le garçon voyageant dans le temps lui avait mis un couteau sous la gorge. Lequel avait disparu par ailleurs. Drôle d'oiseau celui là.

Alice était assez surprise de la question de son professeur. Il lui demandait si elle discutait avec toutes les personnes dont elle visitait les rêves. Elle ne s’était pas vraiment posé la question plus tôt et toute façon la réponse était non. Elle n’avait pas la capacité de retrouver toutes ses personnes. Et puis, ce qu’il ne savait pas, s’était que ce rêve partagé était prémédité en quelque sorte. Elle l’observait attentivement pour trouver de quoi répondre.

« Euh… Je ne peux pas voir toutes ces personnes… mais vous, c’est différent. »

En quoi c’était différent pour lui ? C’était son professeur et vu qu’il passait la plupart de leur temps dans le même établissement -jour et nuit- ce n’était pas comme si elle pouvait faire l’impasse sur ce qu’elle avait vu. Ce n’était pas comme avec ces inconnus qu’elle rencontrait dans leur rêve. Pour eux, elle ne pouvait rien faire alors que pour Angel… En parlant de lui, il tentait de se justifier.

« Vous vous fichez de moi ? J’ai très bien compris que ce n’était pas un rêve comme les autres, un fantasme ou même une idée étrange comme vous dites. Il s’agissait d’un souvenir, j’arrive à le sentir ce genre de choses. »

Elle souriait, pas pour être insolente ou quoi que ce soit d’autre, elle voulait juste qu’il comprenne qu’elle n’était pas aussi innocente et crédule qu’on pourrait le croire en la voyant. C’était même tout le contraire. Elle était confiante en ce qu’elle voyait et surtout ce qu’elle interprétait dans ces rêves. Et ici, elle avait très bien compris que Lucas n’était pas un simple fantasme, Warren était réellement amoureux de lui. Il retournait s’asseoir sur son lit mais pourtant elle ne le suivrait pas. C’était une question de respect. Vous vous voyez entrer dans la chambre d’un professeur alors qu’il ne voit y a pas invité ? Et, on lui avait appris à attendre le bon moment pour agir. Elle décidait que c’était le bon moment pour lui faire son monologue.

« Non effectivement, ma chambre n’est pas à côté de celle des professeurs, et puis, j’ai « prémédité » mon coup pour me retrouver dans votre rêve et non pas dans celui d’un autre. A vrai dire, M. Worthington, mes camarades de cours m’ont demandé de le faire. On s’inquiète pour vous… »

Elle baissait les yeux pour éviter de voir la réaction de Warren sur ce qu’elle allait dire.

« Très bien comme vous voudrez ! Je vais retourner dans ma chambre et raconter à mes camarades ce rêve qui n’a aucune importance pour vous. Après cela, tout le monde saura que vous êtes amoureux d’un homme qui s’appelle Lucas. »

Puis elle fit mine de partir s’attendant au pire, bien qu’elle savait qu’il ne lui ferait pas de mal.

Ahah ! Elle savait bien que sa ruse allait fonctionner ! Le professeur n’avait pas marché, il avait couru. Totalement piégé dans les filets de la jeune mutante. Bien évidemment elle n’aurait parlé de cette histoire à personne mais c’était trop tentant de voir sa réaction. Il l’avait rattrapé pour l’attirer dans sa chambre. Après tout comment voulez-vous qu’il réagisse alors qu’elle allait transmettre son secret à tout le monde ? Et puis, parler dans un couloir en pleine nuit ce n’était pas franchement une bonne idée. Les murs ont des oreilles comme on dit…

Une fois entrée dans la chambre du professeur, Alice ne se sentait pas tout à fait à sa place. Il n’avait rien à faire dans la chambre d’un professeur totalement perdu dans ses sentiments et ça, elle le savait. Elle osait à peine regarder ce lieu inconnu pour se concentrer sur Warren. Il se justifiait… encore. Ce n’était pas nécessaire mais bon tant pis, elle préférait le laisser faire sans rien dire. Il affirmait ne pas être gay. Ca par contre, elle ne pouvait pas le savoir à sa place. Elle jugeait alors qu’il disait la vérité.

« Eh mais j’ai jamais dit que vous étiez gay ! C’est vous qui avez mis ce mot dans la conversation. Et puis de toute façon, même si c’était vrai qu’est-ce que ça changerait ? »

Il avait tenté d’enfiler un tee-shirt sans grand succès mais de toute façon Alice ne le regarderait jamais de cette façon. A vrai dire, elle n’avait jamais regardé quelqu’un avec une intention sexuelle quel qu’elle soit dans la tête. Ca ne lui aurait même pas traversé l’esprit face à un professeur… Surtout pas. Mais, elle comprenait qu’il agisse ainsi. Il devait surement être gêné face à une élève et d’autant plus qu’il venait de se réveiller. Elle avait découvert un de ces secrets et pas des moindres.

Alors qu’il faisait mine de corriger une copie en la poussant à parler puis à s’en aller, Alice s’avançait jusqu’à une des plumes abandonnées sur le sol quelque instant plus tôt. Elle la prit entre ses doigts pour la faire tournoyer en souriant. Pour une fois qu’elle avait en quelque sorte la position de supériorité dans la conversation elle voulait en profiter en gardant un peu le silence. Elle s’amusait à observer les plumes tout en s’avançant vers lui. Il valait mieux être prudent face à un homme désespéré mais elle s’en fichait. Un x-men n’était pas censé faire du mal aux autres…

Elle attrapait la copie des mains du jeune homme, la repassait sur le tas avec ces semblables pour finir par s’appuyer sur le bureau. Elle prit le visage de son professeur entre ses mains pour l’obliger à la regarder. Vraiment si quelqu’un entrer dans le bureau à cet instant il pourrait se poser toutes les questions du monde à leur sujet… Faisant glisser la plume sur le visage de son interlocuteur elle prit la parole :

« Vraiment Monsieur, ce que j’ai vu dans ce rêve je sais bien que je n’aurais jamais dû le voir et je tiens vraiment à m’excuser de vous mettre dans l’embarra… Je dois vous avouer que je ne l’aurais dit à personne de toute façon. Ce n’est pas mon genre de lancer des rumeurs.
Et puis pour ce qui est de Lucas, si j’étais vous, j’en parlerai à quelqu’un… Vous semblez avoir des amis que peuvent vous comprendre. Si vraiment vous ne trouvez pas la force de leur expliquer je peux vous écouter même si je comprendrais que vous refusiez l’aide d’une de vos élèves. »

Alice sentait que la situation échappée peu à peu à son contrôle. Il est vrai que leur position n’était pas des plus innocentes. Elle dominait la discussion comme lui-même. Mais même si elle contrôlait en partie ce qui se déroulait, Warren pouvait très bien se rebeller. Il avait bien plus de force qu’elle et il avait donc le pouvoir de la déloger. Et pourtant, il ne faisait rien de plus que de se justifier encore… Il bredouillait qu’il n’avait rien contre les homosexuels mais qu’il ne faisait pas parti de ce groupement de la population. Après tout qui cela pouvait-il intéresser ? C’est vrai que si Lucas n’avait pas été un homme, la situation ne serait pas exactement la même. Le professeur serait sans doute aussi gêné d’avoir une étudiante dans sa chambre. D’autant plus qu’elle avait vu ces rêves.

Selon ses dires, ce n’était pas le fait qu’elle lui vienne en aide qui le dérange mais il disait que ça n’avait plus d’importance, que ce Lucas était parti et que c’était surement mieux ainsi. Alors pourquoi est-ce qu’il était si mal si c’était soit disant la meilleure chose pour lui ? Enfin il abordait la position qu’ils avaient en cet instant. Elle, assise sur ces genoux alors qu’il était torse nu. Elle avait dérapé et lui aussi cela ne faisait aucun doute. Sans attendre, Alice se levait des genoux de son professeur. Mais pourquoi avait-elle fait ça ?! Ce n’était pas qu’elle s’en voulait d’avoir agi ainsi mais presque. Il avait repris le contrôle de la discussion en lui rappelant un mauvais souvenir : sa prise en otage. Elle aurait dû s’en douter qu’il allait aborder le sujet. C’était lui qui l’avait sortie de cette mauvaise passe après tout.

La jeune fille n’avait cependant aucune envie de reparler de cela. Ce jeune homme qui l’avait agressé, Ludwig semblait-elle se souvenir, avait disparu depuis. Elle lui avait reparlé quelques jours plus tard mais la discussion ne s’était pas tout à fait bien terminée. Aucune violence à signaler cette fois-ci. Elle préférait éviter le regard de son sauveur. A croire qu’elle s’était attachée à ce type, ce malade qui avait osé la menacer avec un couteau.

« Je refuse de parler de lui… de toute façon il est parti. Et puis pourquoi m’en parler maintenant ? Cà s’est passé il y a plusieurs mois déjà. Si vraiment mon état vous inquiétez, vous seriez venu me parler à la fin d’un de vos cours et non aujourd’hui. »

Elle se sentait totalement démunie. Pourquoi fallait-il que toutes ces personnes qu’elle avait appréciées au moins un peu disparaissent ? Il y avait d’abord eu ces parents, puis cet homme qui l’avait sauvé de la mort et qu’elle n’avait jamais revu et enfin ce garçon. Il ne lui manquait plus que l’un des plus proches adultes de la demoiselle lui ferme ces portes. Warren était, même si elle ne l’aurait jamais cru, le x-man auquel elle était le plus attachée. Il était le seul qui n’avait pas disparu de sa vie et puis si elle ne l’appréciait pas autant, elle n’aurait pas tenté de lui remonter le moral. S’asseyant sur le lit d’Angel, ne voulant même pas savoir comment il allait réagir, elle enfouit son visage entre ses mains. Il ne fallait pas qu’elle pleure, pas ici, pas maintenant. Tout le monde allait vraiment la prendre pour la pleurnicharde de service.

« Je ne sais pas pourquoi tout le monde m’abandonne… est-ce que je mérite vraiment de perdre tous les êtres qui me sont chers ? Et vous alors, vous allez m’abandonner pas vrai ? »

Alors que la situation commençait vraiment à être délicate pour Alice, Warren semblait être plus détendu qu’il y a quelques instants. Pour que tout s’arrange simplement il fallait juste que le professeur lui confirme qu’il ne l’abandonnerait pas. C’était tout ce qu’elle voulait entendre de sa part et rien de plus. De toute façon elle savait bien qu’elle n’était en droit de n’espérer rien d’autre de lui. Dans l’histoire de cette école on ne devait jamais avoir vu une situation comme la leur. Si une élève était venue dans la chambre d’un professeur aussi séduisant que lui ce ne devait pas être pour seulement discuter. Ca n’aurait même pas étonné que certains professeurs se laissent aller à de telles pratiques avec leur élève. Elle voulait cependant croire que celui en quel elle croyait n’était pas de ce genre.

Quand on regardait bien, les écarts d’âge entre les professeurs et les élèves n’étaient pas très conséquents. Les élèves pouvaient donc se mettre facilement à fantasmer sur eux. Malgré l’attachement évident de la jeune mutante pour le professeur ailé elle ne ressentait rien de ce gens pour lui. Si vraiment elle avait ressenti cela, la situation aurait pu très vite déraper et bien plus que tout à l’heure. Elle aurait pu par exemple l’embrasser mais ça n’était vraiment pas son genre de provoquer les situations pour qu’elles entre dans un jeu dangereux. Et pourtant c’était si facile d’inciter le désir d’un homme à venir. Enfin, pas qu’elle s’y intéresse tant que ça mais il ne fallait pas se mentir à 18 ans au 21ème siècle tout le monde savait comment ça marcher.

Le jeune homme blond faisait remarquer que si aucun d’eux ne se confiait ils étaient dans une impasse. C’était bien sûr le cas mais elle n’était pas dans un état pour déballer ses sentiments sur un sujet aussi délicat que sa prise en otage. Ce n’était pourtant pas la première fois qu’elle risquait de mourir. Elle avait même gardé une petite marque où la balle était entrée le jour où elle avait essayé de sauver un inconnu. Un homme qui n’avait pas hésité à tuer pour l’aider. Et pourtant elle savait qu’il ne s’agissait pas d’une bonne personne. Il aurait dû suivre le chemin de son père, Wolverine, mais elle savait aussi que parfois la vie était dure pour certaine personne et que dans ce cas ils pouvaient décider de choisir la voie de la violence. Heureusement qu’ici elle pouvait se sentir en sécurité, loin de ces fous qui tuaient sans aucune pitié.

Alice se sentait un peu rassuré quand son jeune professeur lui affirmait qu’il avait pris de ses nouvelles et qu’il s’inquiétait pour elle. Même s’il devait s’inquiéter pour tous ses élèves elle se sentait déjà un peu mieux. Au moins lui n’était pas aussi indifférent qu’on pourrait le croire. Il s’inquiétait de son sort, pas comme sa famille. Sa sœur aurait tout de même pu l’appeler en sept mois de temps… Mais aucun appel de Lucie à signaler. Elle n’avait pas d’espoir de la revoir avec la doctrine que sa tante faisait sur elle. Tout ceci ne concernait personne d’autres qu’elle et peut-être sa famille. Heureusement que Warren n’était pas télépathe et qu’il n’avait pas la possibilité de savoir ce dont à quoi elle pensait. Il venait justement s’asseoir à côté d’elle sans rien faire au début.

Alice préférait regarder ailleurs, ne pas croiser le regard du professeur en qui elle avait assez confiance pour être seule dans sa chambre. Elle savait évidemment qu’il ne lui ferait rien mais maintenant c’était elle qui était gênée de la situation. Quand enfin il agit pour la prendre contre lui, en essayant de la réconforter un minimum en employant des paroles tout ce qu’il y a de plus gentil, elle sourit. C’était tout ce qu’elle voulait en faite. Il n’était pas très sûr de lui apparemment et ça l’amuser. Et puis surtout il lui avait confirmé qu’il ne l’abandonnerait pas. Elle était rassurée, et elle se sentait en sécurité entourée de cette aile. Les larmes étaient retombées peu à peu. Totalement indépendamment de sa volonté elle se mit à rire. C’était le moyen qu’elle avait trouvé pour décompresser.

« Non mais vraiment je ne sais pas comment vous faites pour être aussi inexpérimenté pour réconforter les filles ! Ba remarqué ça a marché »

Fit-elle en souriant. Elle se moquait gentiment de lui comme elle aurait pu le faire avec un ami ou même un membre de sa famille. Il n’était rien de tout ça mais elle se sentait bien avec lui et de voir qu’il l’appréciait lui remonter le moral. Au moins elle n’était plus tout à fait seule dans cet institut. Malheureusement elle n’arrivait pas à se lier amicalement avec quelqu’un ici. Les filles ne la remarquaient pas vraiment et les garçons non plus en faite. Elle aurait cru qu’ils étaient plus ouverts pour accueillir les nouveaux venus. En même temps elle ne s’incrustait pas vraiment dans les discussions et elle ne se voyait pas s’imposer à leur table au déjeuner. Ce n’était pas son genre. Et puis bizarrement elle préférait faire des rencontres -parfois mauvaises- en dehors de cet endroit. Elle restait bien au chaud contre lui et elle reprit plus confiante :

« Hum… à part la souffrance qui est toujours là depuis la mort de mes parents je n’ai presque rien à dire. Mes camarades ne sont pas très ouverts pour devenir ami avec moi et c’est vrai que je me sens un peu seule parfois… Je dois avouer que je cherche alors la compagnie d’autres gens dans les bars du quartier. »

Sans vraiment laisser le temps au mutant de dire quelque chose elle se justifiait en ces termes :

« Je sais que ce n’est pas bien mais si les gens en qui j’ai confiance, dont vous, n’étaient pas aussi inaccessibles ce ne serait pas le cas… je crois. »

Elle relevait alors la tête pour lui sourire sincèrement. Ce n’était pas très sympa de remettre la faute sur lui mais elle espérait qu’il ne se fâche pas. Ce n’était pas si grave que çela après tout. Il ne lui était rien arrivé de très grave dans ces bars pour l’instant…

-Bien sûr que cela a fonctionné, suffisamment pour que vous vous moquiez injustement de moi

Reprit Warren en riant légèrement et en ramenant son aile contre lui; désormais que la jeune oiselle était consolée. Enfin presque dirait-on, car la voilà qui plongeait à nouveau dans les méandres de la mélancolie en évoquant ses difficultés pour se lier d'amitié. Warren l'écouta attentivement, tiltant quelques secondes après seulement qu'Alice avait l'habitude de sortir en cachette... Ainsi la jeune fille put reprendre la parole avant qu'il ne la lui coupe, achevant ses confidences par une demande de pardon en bonne et du forme. Angel savait que son devoir de X-Man était de la gronder très sévèrement, de lui faire la morale en lui expliquant le danger auquel elle s'exposait et celui qu'elle représentait pour les autres si elle perdait le contrôle sur ses dons. Cependant cela ne serait pas utile car la demoiselle se fermerait comme une huître probablement et que deuxièmement, le mutant venait de se rappeler qu'il n'y avait pas d'urgence immédiate, le pouvoir de lire les rêves d'Alice n'était pas un véritable danger pour les gens en tant que tel. Il faudrait donc la prendre par la douceur pour lui expliquer tout ceci, être plus... Accessible? Oui c'était bien le terme utilisé par Alice.

Sans doute cela expliquait-il aussi le manque de réaction à chaud du X-Man qui resta un moment interloqué. On lui avait déjà fait savoir implicitement qu'il avait ce problème. Premièrement il n'était pas souvent présent à l'institut en dehors des cours à cause de l'entrainement, des missions et de son entreprise et deuxièmement son éducation le poussait à rester à distance des gens. Il ne savait pas quoi dire, jamais on ne lui avait parlé de ce problème de manière aussi direct et Warren se sentait coupable. De plus la jeune fille avait avoué sa faute directement parce qu'elle lui faisait confiance, ce n'était pas pour qu'il la renvoie immédiatement dans ses buts et en fasse une rebelle. Ses soucis avec les autres étaient également une raison à sa souffrance, lui même se souvenait avoir été ce genre d'adolescent très seul, rejeté presque par ceux de l'institut à cause de son éducation de "fils à papa"... Et oui, les mutants n'étaient pas tous tolérants entre eux, on n'était pas dans le monde des gentils petits bisounours. Malgré leur différence, les élèves ne savaient pas toujours accepter les autres, comme le statut social, la couleur de peau, l'apparence même pour certains mutants particulièrement laids ou déformés, la sexualité, un caractère plus timide, maladroit etc... Tous ces critères pouvaient faire que même un jeune mutant ne se sente pas bien dans son école, surtout si les professeurs qu'il avait choisi comme modèles-pas forcément les bons d'ailleurs.- se révélaient aussi inaccessibles et distants en apparence qu'Angel.

Se relevant, Warren alla à sa fenêtre pour réfléchir un moment puis il prit son téléphone portable, un tactile dernier cri évidemment. Griffonnant avec le petit stylet un numéro, le jeune homme éloigna l'objet de son oreille uniquement pour prévenir Alice, pas pour lui demander son avis.

-Quand j'ai besoin de m'aérer sans entendre de blablas qui se veulent réconfortants, savez-vous ce que je fais? Je vais voler... Ce traitement guérirait n'importe qui!

Sauf qu'Alice devait le faire part elle même! C'était moins naturel comme système mais primordial pour qu'elle s'extériorise, hurle dans le ciel si nécessaire; ait l'impression que l'impossible était devenu accessible. La jeune femme avait besoin de prendre son envol, pas d'être rendue encore plus dépendante justement. Lorsque la secrétaire répondit, habilitée à le faire 24h/24h, elle avait une voix endormie mais Warren ne la laissa pas s'étonner de l'heure de son appel lui qui était plutôt tranquille d'habitude, comparé à d'autres riches si exigeant.

-Madame Frapper, pourriez-vous dire au pilote de préparer le Jet, nous allons où vous voulez, mais dans un lieu où le soleil brille encore et où il y a des hauteurs... Ah et... Je souhaiterais aussi que vous apportiez un deltaplane.

-Mais monsieur Worthington vous... N'en

-Bien évidemment, je suis au courant que je n'en ai pas besoin personnellement, ce n'est pas pour moi. Dans une demi-heure nous serons à l'entreprise, merci.

-Oh... D'accord.

Warren eut un petit sourire énigmatique alors que Madame Frapper, préférant ne pas savoir ce qu'avait encore inventer son patron commandait un deltaplane dans un magasin dans un pays où tout était ouvert. Ceci était possible quand on avait de l'argent, il faisait jours à toute heure et les magasins étaient disponibles, les voyages également. Quant aux cours normalement obligatoires pour les débutants en deltaplane ou autres sports du genre emmenant l'homme dans un terrain inconnu qu'il ne maîtrisait pas, ce n'était pas obligatoire; Warren pouvait largement assurer sa sécurité voir même son apprentissage. Il avait choisi le deltaplane car c'était ce qui se rapprochait le plus de son moyen de vol: les ailes. Ainsi son instinct de mutant lui permettrait d'aider la jeune fille à apprendre malgré le fait qu'elle n'ait pas de pouvoir de vol. Enfin si elle le souhaitait.

-Alors, ça vous dit? Après tout, vous qui aimez sortir, c'est une bonne occasion n'est-ce pas?

Amusé, le jeune homme sourit, il n'était pas aussi prévisible qu'on pouvait le penser venant d'un homme d'affaires forcé d'être presque toujours calculateur. C'était aussi à ses heures un garçon plein de fougue et rempli d'idées folles, rocambolesques mais agréables. Il adorait faire plaisir à ses conquêtes ou à ses amis avec ce genre de surprises, son grand coeur l'aidant à sortir de sa réserve bien souvent. Invitant Alice à le suivre alors qu'il ouvrait la porte de sa chambre pour rejoindre la voiture qui les attendait déjà en bas probablement-Il ne voulait pas l'emmener à l'entreprise en volant, souhaitant qu'elle découvre cette possibilité pour la première fois avec le deltaplane, d'elle même... Sauf s'il s'avérait qu'elle en avait déjà fait bien sûr.-, Warren se contenta de lui jeter un regard enjôleur. Si Alice refusait, tant pis le professeur irait seul dans le jet, mais sinon il se ferait un plaisir de lui rendre cette nuit inoubliable, de lui faire vivre l'inverse de son gêne X: rêver éveillée!