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| Moissons tardives. (Pv Cérès) | |
| | Auteur | Message |
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Daniel Hopes Agent du B.A.M. Alpha
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| Sujet: Moissons tardives. (Pv Cérès) Dim 4 Mar 2012 - 16:42 | |
| On n'est jamais aussi seul avec soi même que lorsqu'on se retrouve cerclé du tumulte. Parait-il que l'instinct grégaire est une chose que l'on perd avec l'age, sans doute est-ce vrai. Lorsqu'on vit trop, on finit par se connaitre comme une complainte mile fois entendue. On peut y discerner toute sorte de nuances qui colorent l'existence et de guère lasse, on en perd l'identité du souvenir s'y cramponnant. Hopes est un livre qui vire à l'encyclopédie, il en tourne les pages en solitaire dans une douleur confortable et rassurante et s'accorde lorsque la pression de l'existence devient trop pesante, l'opportunité de redevenir un anonyme dans n'importe quel lieu de vie bavard et coloré. La bar fleure bon le revival année 40 avec une sorte de fond sonore qu'un club de jazz tente d'égayer de façon feutrée et discrète. L'endroit est cosy et propice aux rencontres d'un soir pour une classe huppée embourgeoisée nécessitant un minimum de mystères et d'excitations dans une ambiance rassurante et légèrement sélecte. Assez peu de monde ce soir, juste ce qu'il faut pour jouir d'une intimité auprès du zinc ou un serveur connivent sert verre après verre en surveillant d'un d’œil la gente féminine en recherche d'émotions tièdes et pariant sur la quantité d'alcool que ce type quelconque dans un costume à la taille impeccable et peu habitué des lieux, est capable d'ingérer avant de tituber vers la sortie. Hopes se prend à sourire sous le poids de ses pensées, il ne risque pas l'ivresse dans sa condition, il en vient même à se penser humain. Devrait-il boire sa solitude ou s'abreuver à des bras de femmes pour une nuit ? L'idée le taraude quelques instants avant qu'il la repousse comme on chasse un nuage de fumée de fumée de cigarette. Ca supposerait trop de questions en devenir et trop de douleur à raviver. Ca supposerait de l'investissement et des espoirs qui risquent de se trouver mort nés. Ca supposerait de devenir un animal guidé par des pulsions ou de se bruler à un amour trompeur plus intense qu'un soleil noir. Hopes en était las de toutes ces aventures. Il goutait l'instant le verre aux lèvres et se donner des allures d'intemporalité. Il n'attendait rien d'autre que ce qu'il avait déjà dans son escapade solitaire, loin des grands destins, des luttes désespérées et des regards rivés à l'avenir.
Il n'attendait rien, mais c'est toujours sur la route qu'on a pris pour l'éviter qu'on rencontre un morceau de son destin.
Et elle, elle arriva.
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| | | Cérès Nouvel(le) Apprenti(e) de la Confrérie Gamma
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| Sujet: Re: Moissons tardives. (Pv Cérès) Dim 4 Mar 2012 - 22:33 | |
| Un regard à gauche, un regard à droite, un nouveau regard à gauche... Esther scruta même les trottoirs pour y dénicher des plaques d'égouts où Ernest aurait pu s'enfoncer, lui qui aimait tant ces boyaux humides et putrides. Hélas, rien. Elle devait se rendre à l'évidence. A le courser de trop loin, elle avait fini par le perdre. Avec un petit geste de pied rageur, elle martela le sol. Très vite sa colère fit place à un gros soupir de déception et de tristesse.
Ernest s'était carrément enfui. Il s'était jeté hors de la Confrérie après leur dispute, la première... Mais pour une première elle avait été rude. Pourtant, lorsqu'il s'était encouru Esther n'avait hésité que quelques minutes avant de sentir le regret la ronger et de se lancer à sa poursuite. Le temps d'enfiler l'ample manteau de velours noir dont elle s'enveloppait lorsqu'elle quittait la Confrérie pour une destination inconnue et elle se lançait sur ses traces. Elle ne s'en était pas trop mal tirée dans ce jeu de piste. Pendant près d'une demi-heure, elle avait réussi à le suivre sans éveiller ses soupçons dans cette nuit sans lune. Elle qui n'était pas une spécialiste de la filature. Mais toutes les bonnes choses ont une fin. Et maintenant, Ernest avait disparu de son champ de vision...
Un gros soupir de tristesse et de déception s'échappa de sa poitrine. Ce soir, ou plutôt cette nuit car il devait être plus d'une heure du matin, elle se sentait vraiment comme un petit bout de bois ballotté sur un océan déchaîné. Elle avait le coeur gros et l'âme en peine. Ernest, le seul être vivant qui semblais tenir sincèrement à elle la fuyait ce soir. De noirs souvenirs se ravivèrent dans la mémoire d'Esther : le rejet de sa mère, l'indifférence de son père, la trahison de Garett, ... Elle réprima un frisson, serra son manteau contre elle et secoua la tête pour chasser ses idées noires. Il valait mieux rentrer. Mais elle n'en avait aucune envie. Pas sans Ernest. Elle se sentirait trop coupable, trop mal.
C'est alors que passant devant un bar, elle s'arrêta, une idée saugrenue lui traversant l'esprit. Pourquoi, pour une fois dans sa triste et monotone vie, elle ne s'autorisait pas un de ces scénarios de films clichés? Pourquoi ne rentrerait-elle pas dans ce bar pour tuer le temps et endormir ses peurs avec quelques verres d'alcool? Qu'importe ce que les gens diraient de son apparence. A travers la vitrine, elle voyait que la salle était peu éclairée et peu fréquentée. Elle ne semblait pas correspondre au style de clientèle mais elle s'en moquait. A presque deux heures du matin, les rares personnes encore présente devaient bien s'en moquer de l'allure de la nouvelle arrivante, quand bien même eut-elle l'air d'une adepte du gothique ou du dark fantasy. Après tout, avec son ample manteau à capuchon, Esther pouvait bien passer pour une illuminée de ce genre et la couleur de sa peau pouvait passer pour du maquillage. Et puis le barman de nuit qui serait probablement son seul interlocuteur avait sûrement du en voir d'autres.
D'un geste décidé, elle poussa lentement la porte et entra. Hormis deux couples retranchés sur des banquettes au fond de la salle, il n'y avait qu'un homme assis au comptoir, la tête enfoncée dans les épaules et les mains curvées autour d'un verre. D'un pas lent et majestueux, Esther alla s'asseoir à l'autre bout du bar, sur le retour du zinc qui ne laissait la place que pour deux tabourets, tout près du mur, là où les lampes-billard qui éclairaient le comptoir n'étendaient les rayons jaunâtres que sur ses mains. Le serveur s'approcha d'elle, essuyant un verre d'un bout du torchon qui pendait sur son épaule.
- Qu'est-ce que je vous sers?
Question simple et directe. Le barman semblait savoir à quel genre de cliente il avait affaire. De celles qui aiment un service ponctuel, minimum et surtout silencieux. Elle répondit d'une voix monocorde.
- Un black Russian... double.
Sans un mot, sans un haussement de sourcil, il s'éclipsa le temps de mélanger la vodka et le kahlua. Sous l'abri de son capuchon, Cérès ne vit qu'une grande main poser le verre sur un petit carré de papier blanc avant de disparaître à nouveau. Esther prit alors le verre de liquide sombre et en but une gorgée, fermant les yeux. Elle reposa son verre avec un soupir las puis baissa un peu plus la tête. Pour un peu plus, elle aurait presque sentit les larmes lui monter aux yeux... Il y a de ces soirs où on se dit que la vie est une belle garce tout de même! | |
| | | Daniel Hopes Agent du B.A.M. Alpha
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| Sujet: Re: Moissons tardives. (Pv Cérès) Mer 7 Mar 2012 - 18:41 | |
| C'est alors que son regard sautait d'inconnu en inconnu dans un jeu de devinettes sans lendemain qu'elle entra dans son champ de vision. Elle était l'incohérence dans une scène insipide, la jeune fille qui pleure sur une photo montrant une scène de liesses, la touche de couleur éclatante dans une lithographie monochrome. Dès lors, il ne la quittait plus des yeux la regardant sillonner entres les anonymes égarés d'un pas qu'il devinait mal assuré et forcé dans l'assurance de donner le change. Lorsqu'elle fut plus proche, il distingua des caractéristiques hors du commun, cette couleur de peau étrange qu'elle cherchait à dissimuler légèrement sous son capuchon. Indiscutablement, lorsqu'on cherche à afficher une différence, on ne fait certes pas dans la demi mesure et on étale de façon ostentatoire sa non conformité, ici, le désir de passer le plus inaperçu venait affleurer en surface d'une mer d'huile. Le temps est un luxe qui permet à celui qui en jouit à l'infini de savoir observer les détails les plus minimes de la vie de tous les jours. Fin observateur, le Time Tricker restait fascinait par ce qui lui semblait incongrus. Comme cette probable mutante dans un lieu qui ne lui ressemblait guère. Son comportement semblait aussi clair que la lecture d'un livre ouvert. La douleur poussait à la solitude mais dans un lieu vivant. Ils procédaient tous deux de la même espèces de coeurs saignants en public ce qui finit bien sur par le faire sourire légèrement. Habituellement, il n'aurait pas franchis cette ligne invisible entre le dehors et les affres du dedans, la laissant naviguer seule dans sa tempête d'ame. Nous n'étions pas habituellement et les plus belles audaces sont celles que l'on ne calcule pas.
- Posez votre fardeau l'espace de quelques verres, le monde de dehors s’arrête sur le zinc de ce comptoir. Si le cœur vous en dit, je serais votre compagnon de tristesse, si il ne vous en dit pas, laissez moi payer un verre à votre solitude.
C'était dit d'une manière pleine de malice et appuyé d'un regard sincère. Il n'attendit pas de réponse faisant un geste au garçon d'approcher pour prendre commande. Il souffla d'une voix plus basse.
[Triste époque et dans le climat et dans les mœurs, passez inaperçu peu parfois éviter bien des déboires. Quel grand méchant loup fuyez vous sous votre pèlerine ?
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| | | Cérès Nouvel(le) Apprenti(e) de la Confrérie Gamma
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| Sujet: Re: Moissons tardives. (Pv Cérès) Ven 9 Mar 2012 - 22:10 | |
| Elle s'enfonçait de plus en plus dans ses pensées aussi sombre que l'alcool qu'elle buvait lorsqu'un léger bruit mit son attention en éveil. Il s'agissait d'une sorte de coulée... ou plutôt de glissement. Celui du tissus sur le métal brossé du comptoir, du verre qui glisse sur ce même métal dans un léger crissement, de quelques pas claquant lentement sur le dallage de pierre mouchetée et du cuir du tabouret qui couine légèrement en s'affaissant sous le poids d'une personne... Oui, aucun doute là-dessus, l'inconnu du comptoir avait glisser de trois ou quatre tabourets pour venir s'asseoir près d'elle. Avec un profond soupir intérieur, Esther s’apprêta à faire face à l'un de ces piliers de comptoir au costume défraîchi à l'hygiène douteuse et à l'haleine fétide qui harponnaient chaque femme seule qui avait le malheur de venir s'asseoir au zinc.
- Posez votre fardeau l'espace de quelques verres, le monde de dehors s’arrête sur le zinc de ce comptoir. Si le cœur vous en dit, je serais votre compagnon de tristesse, si il ne vous en dit pas, laissez moi payer un verre à votre solitude.
Esther ouvrit les yeux, surprise par les mots soigneusement choisis, le ton à la fois doux et ferme et l'évidente poésie de son interlocuteur. Elle releva la tête tout en restant abrité par les larges bords de son capuchon et découvrit un personnage plutôt proche de ce qu'elle s'imaginait sans pour autant être tout à fait dans le vrai. Premièrement, il était plus jeune que ce à quoi elle avait cru s'attendre. Son visage était assez doux et gardait un côté enfantin qui devait le faire paraître plus jeune qu'il ne devait l'être. Si son visage annonçait trente ans, son attitude et son aspect général annonçaient plutôt quarante. Son costume était un peu froissé sans pour autant paraître miteux ou dégager une odeur désagréable. Les légers cernes qui pendaient à ses paupières et la barbe de trois jours qui lui mangeait le bas du visage plaidaient pour un bourreau de travail, le genre de personne dont la seule vie sociale se résume à ce genre de situation : un verre seul dans un bar, seul moment de pseudo détente où il peut espérer mettre les tracas de son boulot de côté.
D'abord réticente à se faire accosté par un illustre inconnu, Esther revint sur son envie de l'envoyer promener. Il était évident qu'il n'était pas ivre, qu'il avait de l'éducation et du savoir vivre et qu'il savait le prix d'une solitude dans un bar. De plus, il avait un regard sincère et une voix agréable quoiqu'un peu rauque. Et puis après tout, il ne s'imposait pas. Il la laissait libre de refuser. Avec un sourire très timide, elle répondit :
- Personne n'occupe ce siège... et nous sommes en république.
L'inconnu sembla satisfait de cette demi-réponse. Il s'installa plus confortablement sur son tabouret et fit un signe au serveur. Esther vida son verre d'un trait. Elle se fichait de passer pour une pochetronne, l'alcool n'avait aucune prise sur son organisme. Elle ne pouvait qu'apprécier le goût des mélanges. C'est donc d'une voix toujours aussi assurée qu'elle demanda :
- La même chose... Toujours un double, cela va de soi...
Le serveur s'éloigna tandis que l'inconnu reprenait à voix basse :
- Triste époque et dans le climat et dans les mœurs, passez inaperçu peu parfois éviter bien des déboires. Quel grand méchant loup fuyez vous sous votre pèlerine ?
Esther eut un petit mouvement de gêne devant l'allusion évidente à sa mutation. Cependant, elle aurait été stupide de croire que personne dans ce bar n'aurait remarqué sa condition de mutante. Elle conserva donc une apparence parfaitement calme pour répondre.
- Il est rare d'encore rencontrer des personnes que la tristesse des autres ne fait pas fuir dans cette société égoïste... A fortiori il est encore plus rare de rencontrer quelqu'un qu'une mutante triste ne fasse pas fuir. Il serait grossier que je ne vous accorde pas un peu du temps que j'ai décidé de perdre ici quand vous m'offrez élégamment le vôtre.
Elle le gratifia d'un sourire un peu plus appuyé et un peu plus expressif tandis que le barman redéposait devant elle un Black Russian. Elle prit son verre et le leva lentement.
- Je crains hélas de ne pas être d'une si agréable compagnie ce soir... Je vous rassures, aucun loup ne me poursuis. J'aurais plutôt tendance à faire fuir les personnes qui m'entourent... Vous voila prévenu. Merci tout de même pour le verre.
Elle choqua légèrement son verre contre celui de l'inconnu.
- A la vôtre. | |
| | | Daniel Hopes Agent du B.A.M. Alpha
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| Sujet: Re: Moissons tardives. (Pv Cérès) Sam 24 Mar 2012 - 11:57 | |
| Daniel laissa échapper un rire bref et léger avant de pencher son visage vers son verre et d’y noyer son regard affichant alors une expression intemporelle. - Me faire fuir ? Vous y aller un peu fort car ce que je vois n’a rien d’effrayant, au contraire. Il est des solitudes qu’il est parfois bon de partager afin d’en alléger le fardeau. J’aime venir à me perdre ici parmi le tumulte. J’avais un ami, jadis, qui aimait à dire qu’on ne pouvait être personne que parmi des milliers. Ce que j’apprécie particulièrement c’est de laisser notre vie au seuil de l’établissement.Il fit une pause comme si il méditait sur ses propres paroles, puis laissa courir son regard sur son vis-à-vis. Mutante certes, charmante à sa manière et troublante dans cette fragilité qu’elle affichait. Daniel se mit à penser qu’il aimerait mieux la connaitre, ce météore égaré dans sa course vers l’ailleurs et que les pas du destin avait menaient à lui ce soir. Il poursuivit sur le ton de la confidence. - Ce que nous pensons, ce que nous avons été et les choix qui nous ont menés à être ce que nous sommes…tout cela dans ce genre d’endroit et à cette heure précise devient d’une futilité désarmante. Je n’ai pas à vous dire la nature des démons qui me pousse à gouter cette solitude, vous n’avez pas à le faire non plus. Nous sommes deux veilles âmes qui nagent dans le même bocal à poissons rouge. Inévitablement, nos routes devaient se croiser, ne pensez-vous pas ? Il porta son verre aux lèvres puis secoua la tête avec un sourire lui donna une expression juvénile. - J’espère ne pas vous assommer avec tout mon palabre, il parait que je suis un incorrigible bavard. La vérité c’est que je goute trop souvent le silence pour le laisser s’installer partout comme si il était le bienvenu. J’aime la routine, elle a quelque chose de rassurant et réconfortant…avec le temps, j’en ai fait mon amie, une amie que j’adore à voir se faire trahir. Comme ce soir d’ailleurs. - Il n’est pas coutume de croiser des mutants dans un tel lieu, même avec plus de discrétion je vous aurez de toute façon reconnu. C’est ainsi entre nous…une sorte d’alchimie invisible qui fait qu’on ne peut facilement se dissimuler l’un à l’autre. Je choisi ce lieu car habituellement, je n’y croise aucun membre de notre…espèce…je déteste ce mot mais force de constater que par les temps qui courent, nous en viendront à inventer un vocabulaire spécifique comme les Nazis le firent avec les juifs. Une abomination en engendre une autre, c’est ainsi. Il fit de nouveau une pause avec un sourire un peu amer.- Vous voyez, vous qui craigniez de n’être pas de bonne compagnie, il semblerait que je puisse facilement vous battre à ce jeu. - Au fait, je manque à toutes règles de bienséances, mille excuses, je ne me suis pas présenté. Je me nomme Daniel…passons nos noms, ils n’ont d’utilisation qu’en dehors de ces murs.Il opina du chef en signe de salut tardif. - J’ai une question pour vous, ma belle inconnue du soir, libre à vous d’y répondre. Comment vivez-vous le fait d’être mutante ? Je ne parle pas d’idéologie ou de sociologie…Je parle juste de vous, à titre personnel. La question m’importe car je cherche à comprendre comment chacun de nous réagissons face à ce choix qui n’en a jamais été un. Pourquoi ? Pour me sentir …moins seul, je suppose. | |
| | | Cérès Nouvel(le) Apprenti(e) de la Confrérie Gamma
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| Sujet: Re: Moissons tardives. (Pv Cérès) Sam 24 Mar 2012 - 16:42 | |
| L'inconnu eut un rire discret mais franc qui sonna agréablement tandis que son verre choquait celui d'Esther.
- Me faire fuir ? Vous y aller un peu fort car ce que je vois n’a rien d’effrayant, au contraire. Il est des solitudes qu’il est parfois bon de partager afin d’en alléger le fardeau. J’aime venir à me perdre ici parmi le tumulte. J’avais un ami, jadis, qui aimait à dire qu’on ne pouvait être personne que parmi des milliers. Ce que j’apprécie particulièrement c’est de laisser notre vie au seuil de l’établissement.
Il marqua une pause durant laquelle Esther ne savait si elle devait répondre quelque chose ou attendre qu'il poursuive. Ses paroles semblaient plus proche du monologue que du dialogue et somme toute il n'avait pas vraiment posé une question. Seulement un affirmation à laquelle Esther adhérait parfaitement. Il était inutile de répondre un simple "Je suis d'accord" ou "Vous avez raison" pour le simple plaisir d'ouvrir le bec. Elle se contenta donc d’acquiescer légèrement du chef et de l'imiter en buvant une gorgée. Il ne devait pas s'attendre à ce qu'elle réponde à ce moment là car il poursuivit, les yeux plongés dans son verre.
- Ce que nous pensons, ce que nous avons été et les choix qui nous ont menés à être ce que nous sommes…tout cela dans ce genre d’endroit et à cette heure précise devient d’une futilité désarmante. Je n’ai pas à vous dire la nature des démons qui me pousse à gouter cette solitude, vous n’avez pas à le faire non plus. Nous sommes deux veilles âmes qui nagent dans le même bocal à poissons rouge. Inévitablement, nos routes devaient se croiser, ne pensez-vous pas ?
Il ponctua sa dernière question par un petit sourire qui le fit rajeunir de dix ans. Esther se sentit à la fois soulagée et troublée par le discours de l'inconnu. Soulagée car il ne cherchait pas à savoir le pourquoi du comment elle se trouvait là, troublée car cette proposition et le discours de l'inconnu sonnaient étrangement. "Nos routes devaient se croiser"... Qu'entendait-il par là? La suivait-il? était-il un mutant capable de voir l'avenir ou de repérer les autres mutants? Esther se dit qu'elle se devait d'être méfiante. Son discours n'était peut-être qu'un stratagème destiné à gagner sa confiance. Elle eut un sourire poli pour répondre au sien.
- Faites-vous partie de ces gens qui croient dur comme fer au destin? Ou a n'importe quelle autre puissance surnaturelle qui régit inexplicablement la vie d'autrui? Pardonnez-moi si je vous offense en disant cela mais je ne crois pas que nos routes devaient nécessairement se croiser. Je vois plutôt cela comme le fruit du hasard. Car même si deux routes se croisent, ce n'est pas pour autant que ceux qui les empruntent se rencontrent nécessairement. Et puis, ceux qui ratent une rencontre se consolent en disant que plus loin, leur route en croisera une autre et que peut-être là-bas ils auront la chance de rencontrer quelqu'un.
Elle marqua une pause et rebut une gorgée de Black Russian.
- Mais j'admet volontiers qu'il faut une chance incroyable pour tomber nez à nez avec quelqu'un pile à la croisée de deux longs chemins. La vie est tellement semée d'embûches qu'il est plaisant de croire au destin lorsque pour une fois dans sa vie on est synchrone avec un autre voyageur.
Peut-être avait-elle eut l'air ennuyé en répondant? Peut-être l'inconnu n'avait-il rien compris à sa réponse? Elle ne savait trop que dire vu qu'elle ne l'avait pas regardé en rétorquant. Toujours est-il qu'il lui présenta une sorte de simili justification à ses paroles.
- J’espère ne pas vous assommer avec tout mon palabre, il parait que je suis un incorrigible bavard. La vérité c’est que je goute trop souvent le silence pour le laisser s’installer partout comme si il était le bienvenu. J’aime la routine, elle a quelque chose de rassurant et réconfortant…avec le temps, j’en ai fait mon amie, une amie que j’adore à voir se faire trahir. Comme ce soir d’ailleurs.
Cette fois-ci Esther releva la tête avec un franc sourire pour rencontrer le regard de l'inconnu.
- Vous n'êtes pas saoul... Et vous êtes loin d'être simple d'esprit. Je ne vois pas en quoi vous seriez assommant. Mais je dois reconnaître que vous semblez aimer l'art oratoire. Rassurez-vous, ce n'est pas déplaisant dans cet endroit, ajouta-t-elle afin d'éviter que ses paroles soient mal interprétées. Mais contrairement à vous qui semblez en avoir assez du silence, ce dernier ne me gêne pas. Je lui trouve de bons côtés la plupart du temps. Après tout, ne dit-on pas que le silence est d'or? Et puis pour moi, "silence" ne veut pas nécessairement dire "routine". Comme vous le dites si bien, la routine se trahit aisément. Le silence beaucoup moins...
Elle eut un petit silence pensif tandis qu'elle nichait sa joue dans la paume de sa main, appuyant son coude sur le zinc du bar. Le regard perdu dans la lumière tamisée du bar, elle reprit d'une voix rêveuse.
- Je crois que tout comme vous j'ai voulu trahir ma routine en entrant ici ce soir. N'est-ce pas cocasse? Pour un peu on pourrait croire que le hasard l'a fait exprès.
Elle eut un petit rire tandis que tout en l'observant d'un regard appliqué, l'inconnu poursuivait :
- Il n’est pas coutume de croiser des mutants dans un tel lieu, même avec plus de discrétion je vous aurais de toute façon reconnue. C’est ainsi entre nous…une sorte d’alchimie invisible qui fait qu’on ne peut facilement se dissimuler l’un à l’autre.
* Tiens tiens... J'avais vu juste*, pensa Esther, *C'est bien un mutant... *.
Elle se contenta de cette pensée un peu creuse, ne sachant trop quelle attitude adopter. Elle se permit toutefois un léger sarcasme.
- Vous savez, il n'est pas besoin d'alchimie avec moi. Celui qui ne me reconnaîtrait pas comme mutante deviendrait l'idiot du village. Pour ma part, je ne vous avais pas reconnu comme mutant avant que vous me l'avouiez indirectement. Ce qui me fait dire que je ne crois pas à cette forme d'alchimie, à moins que ce ne soit un don qui fait partie de votre pouvoir.
Réponse pas si stupide. S'il embrayait convenablement, elle pourrait peut-être savoir quel était la nature de son pouvoir. Non pas qu'elle cherchait à le connaître à des fins personnelles ou pour le livrer à Magneto mais elle n'était tout simplement jamais à l'aise lorsqu'elle ne connaissait pas la nature du pouvoir d'un mutant proche d'elle. Elle avait toujours l'impression que les autres avaient un avantage sur elle ou de se promener avec une épée de Damoclès au dessus de sa tête.
Visiblement, l'inconnu préféra rester prudent car il poursuivit sans relever sa boutade.
- Je choisi ce lieu car habituellement, je n’y croise aucun membre de notre…espèce…je déteste ce mot mais force de constater que par les temps qui courent, nous en viendront à inventer un vocabulaire spécifique comme les Nazis le firent avec les juifs. Une abomination en engendre une autre, c’est ainsi.
Il marqua à nouveau un silence et un rictus qui cette fois parut un peu plus crispé.
- Vous voyez, vous qui craigniez de n’être pas de bonne compagnie, il semblerait que je puisse facilement vous battre à ce jeu.
Esther eut un petit rire franc.
- Nous voila quitte alors.
Il répondit à son sourire pui se présenta enfin. - Au fait, je manque à toutes règles de bienséances, mille excuses, je ne me suis pas présenté. Je me nomme Daniel…passons nos noms, ils n’ont d’utilisation qu’en dehors de ces murs.
Esther lui tendit sa fine main gantée en guise de salut.
- Esther, charmée... du moins pour le moment.
Elle préférait toujours donner des réponses prudentes. Daniel ne sembla pas s'en offusquer car il prit doucement sa main dans la sienne et s'inclina légèrement avant de la relâcher et de poursuivre leur conversation.
- J’ai une question pour vous, ma belle inconnue du soir, libre à vous d’y répondre. Comment vivez-vous le fait d’être mutante ? Je ne parle pas d’idéologie ou de sociologie…Je parle juste de vous, à titre personnel. La question m’importe car je cherche à comprendre comment chacun de nous réagissons face à ce choix qui n’en a jamais été un.
Esther haussa un sourcil méfiant, se demandant pourquoi il pouvait bien poser cette question. Son visage sembla traduire suffisamment sa question car Daniel le traduisit de suite.
- Pourquoi ? Pour me sentir …moins seul, je suppose.
Esther prit le temps de la réflexion, répétant la question de Daniel à mi-voix. Après une petite minute, elle répondit :
- Je ne sais trop quoi répondre. Je dois dire que je n'y ai jamais vraiment réfléchis. Je crois que je suis passée par tous les grands classiques : la peur de l'inconnu, la souffrance due au rejet des autres, la haine et l'amertume qui en découlent puis avec le temps et la quête d'un équilibre, la haine se calme, l'amertume s'estompe. Aujourd'hui, je suis plutôt blasée et résignée. Je sais que je ne dois attendre que peu de chose de peu de personnes et je m'efforce de vivre le plus en autarcie possible. Cela évite les problèmes et les déceptions.
Elle parut assez satisfaite de sa réponse. Elle demanda en guise de conclusion :
- Ceci répond-t-il à vos attentes? | |
| | | Daniel Hopes Agent du B.A.M. Alpha
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| Sujet: Re: Moissons tardives. (Pv Cérès) Dim 25 Mar 2012 - 14:01 | |
| Hopes écouta calmement son interlocutrice tout en faisant signe au barman de resservir la même chose. Il se mira un léger instant dans le liquide ambré alors qu’Esther, puisque c’est ainsi qu’elle se nommait, venait de terminer son explication. Au loin, un jeune couple riait bruyamment à une table projetant leur franc bonheur en une éphémère passion pour phagocyter un univers extérieur indifférent à leur fortune.
- Oui, c’est à peu de choses près un discours que j’ai souvent entendu. Que sont les autres sinon l’espoir qu’on place en eux ? Placer peu d’espoir et se replier sur soi-même permet d’éviter bien des déconvenues. L’autarcie n’est pas le meilleur refuge, vous savez, j’ai longtemps privilégié cette solution lorsque je me suis découvert différent des autres. A l’époque, la génétique balbutiait et j’ai erré longtemps dans les ténèbres de l’ignorance me croyant une erreur de la nature. J’ai cherché dans la science, dans la religion, je n’ai rien trouvé. Un jour j’ai fini par comprendre que nous n’étions rien sans les autres et sans ce monde que nous construisons, actions après actions. Ensuite on peut ou pas y adhérer. On peut le trouver imparfait, injuste, cruel…mais c’est le seul que nous ayons. Il faut donc faire avec. C’est mon point de vue. Je ne l’impose pas.
Conscient d’avoir donné un avis plus que personnel et peut être un peu trop moralisateur. Il soupira plus pour se forcer à interrompre ses idées que pour manifester une quelconque lassitude.
- Esther….C’est un très joli prénom à consonance européenne. Vous n’avez pourtant aucun accent, votre famille serait donc originaire de la vieille Europe ? Ne soyez pas sur la défensive, je vous assure que vous ne sauriez être plus en sécurité avec un congénère et je n’ai d’autre projet que de passer un moment en fort charmante compagnie. Vous savez agencer vos idées avec cohérence et raffinement, vous êtes quelqu’un de cultivé et sensible.
A nouveau Hopes laissa échapper un rire indulgent avant de jouer avec son verre du bout de doigts.
- Non, non, je ne suis pas une sorte de Profiler, ni un étranger qui racole dans un bar. Mais j’ai une certaine expérience des gens, voyez-vous. Je ne veux pas vous effrayer Esther mais je sens grandir votre inquiétude. Vous êtes un esprit pragmatique qui aime à se savoir en sureté dans ses choix. Je déteste me définir par ma différence et parler de nos « dons ». Je ne conçois pas cela comme un « don » pour moi. C’est une malédiction qui m’a gâché l’existence jusqu’à vouloir trouver la mort bien souvent. Je pourrais vous le dire, votre nature vous pousserait à ne pas me croire et je vous trouve trop intéressante pour vous laisser mettre des barrières inutiles entre nous. Donc…
Il esquissa un sourire. L’instant suivant, Esther sembla entendre un écho une voix lointaine qui psalmodiait en son ame une litanie étrange et envoutante la tirant d’une sorte d’état hypnotique.
- Ouvrez les yeux, ma chère. Bienvenue dans mon monde.
Le silence. Le silence absolu qui frappa la jeune femme en premier lieu. Hopes l’observait du coin du regard affichant une mine curieuse, il redoutait un peu sa réaction. Tout autour d’elle, la vie s’était figée totalement comme paralysée dans un étrange musée de cire.
- C’est déstabilisant la première fois, surtout le silence. Vous êtes dans le temps figé Esther et je viens de vous y ramener consciente. Si j’avais une once d’hostilité, vous seriez déjà morte et sans doute ne l’auriez-vous jamais su. - Est-ce cet isolement dont vous parliez ? Cette autarcie rassurante ? Non…je ne saurais repérer des mutants, mais mon instinct s’est aiguisé durant plus de 120 ans. Je suis né en France, bien avant la Première Guerre Mondiale et j’ai traversé le tumulte des époques. Quand on nage parmi les poissons depuis une éternité, on sait lorsqu’un dauphin traverse les fonds.
Daniel afficha pour la première fois un air profondément désespéré, une vague de tristesse profonde d’où perçait l’amertume.
- Excusez-moi pour mon audace et ma brusquerie. Je suis las de cette peur les uns envers les autres, je n’aurais pas agis comme ça jadis. Je ne veux pas que vous vous fassiez de fausses idées sur moi, pas ce soir, pas ici. Je suis un homme fatigué et qui n’a pas grand-chose à cacher lorsqu’il parle de lui, et uniquement de lui. Si vous ne supportez pas ce silence et cet état, il suffit de me le signifier et je rétablirais la continuité du temps. Je tenais à vous offrir ce que j’ai de plus intime. Cet espace en gage de ma sincérité.
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