Jusqu'au bout de la nuit [PV Alice]

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Le chauffeur démarra sans perdre de temps, et s'inséra habilement dans la circulation, toujours dense malgré l'heure avancée dans la soirée. L'intérieur de la limousine était confortable et luxueusement aménagé , et Christopher ouvrit le minibar afin de proposer une boisson à la jeune « slave ».

« Désirez-vous boire quelque chose le temps du trajet? J'ai un panel intéressant à disposition, aussi devriez-vous trouver votre bonheur si vous souhaitez vous désaltérer. Normalement, nous devrions arriver à destination d'ici une vingtaine de minutes, compte tenu de la circulation. »

Se servant ensuite un whisky, le jeune homme resta quelques instants à contempler sa compagne, assise face à lui dans la cabine arrière, puis savoura sa boisson, repensant brièvement aux événements de la soirée. Il avait réellement réussi son coup, et rentabilisé sa soirée tout en prenant plaisir à admirer le numéro de sa partenaire. Du haut niveau, sans aucun doute. Il hésita quelques instants à lui poser quelques questions concernant son nom ou sa profession, se demandant s'il n'était pas tout simplement tombé sur une graine d'actrice cherchant à se faire connaître, puis se ravisa. Après tout, le jeu perdrait de son attrait s'il découvrait à qui il avait réellement affaire, tant elle avait si bien endossé le rôle qu'il lui avait confié. Aussi se permit-il une unique remarque à ce propos, restant volontairement évasif:

« On jurerait que vous avez fait ça toute votre vie... »

Puis, quelques instants plus tard, il prit le parti de lui en dévoiler un peu plus sur la suite des événements, guettant sa réaction:

« J'ai pris la liberté de réserver une table à l'Eminence, un petit restaurant bien sympathique où j'ai mes habitudes. Sa cuisine est plus que correcte, et son service irréprochable, ce dont ils ne manquent pas de se targuer, évidemment. J'ai hâte de voir dîner une véritable princesse. »

En lieu et place de petit restaurant sympathique, l'Eminence était un de ces palaces huppés où se retrouvait la haute société, et ses prix étaient à la hauteur de son ambition. Sa cuisine était réputée dans toute la ville, au même titre que le coût astronomique d'un repas, de même que la qualité de vins que proposait sa carte, et la justesse des propositions de son sommelier. Un endroit tout à fait convenable pour une princesse, en somme.

La voiture ralentissant, le PDG de WitCom regarda par la fenêtre et vit qu'ils étaient arrivés en temps et en heure. Un portier vint évidemment ouvrir, et Chris sortit, tendant sa main à Anya afin de l'aider à s'extraire à son tour de la limousine, puis resta quelques instants à admirer la bâtisse avant d'entrer. L'extérieur mêlait colonnades et marbres de façon harmonieuse, bien qu'un peu trop clinquant au goût de Chris, qui considérait souvent que le summum du luxe était de réussir à se manifester tout en restant sobre, ce avec quoi l'architecte du bâtiment des lieux n'aurait vraisemblablement pas été d'accord. Mais le résultat parlait de lui-même, et affichait clairement les intentions que le maître avait eues: taper dans l'œil au premier regard, et marquer l'esprit de ceux qui l'admiraient. Le restaurant s'étalait sur deux étages, chacun ayant sa propre cuisine et son service, et aux murs s'étalaient de larges baies vitrées, laissant ainsi aux clients la possibilité d'admirer le panorama à loisir, New York de nuit restant particulièrement éclairée.

L'intérieur n'était pas en reste, peut-être légèrement moins surchargé afin de permettre un espacement plus important que la normale entre les différentes tables, assurant ainsi une certaine intimité lors des conversations. Se présentant à l'accueil, le couple fut conduit à l'étage, près d'une fenêtre, à la table qu'occupait habituellement Chris lorsqu'il venait ici. Le couvert était déjà préparé pour deux personnes, comportant maints verres, fourchettes, couteaux et cuillères, tous placés de part et d'autre de la place qu'occuperaient les assiettes. Le serveur recula alternativement leurs chaises afin de leur permettre de prendre place, et leur apporta le menu, qui prenait la forme d'un livret relié à couverture de cuir, et s'éclipsa. Witman en profita pour adresser quelques mots à la jeune femme:

« Voilà un lieux qui sied à votre rang, si je ne m'abuse. Ici, il n'y aura pas d'annonce officielle, aussi ne sauront-ils pas au préalable à qui ils ont affaire. A vous de le leur faire sentir, nous verrons s'ils adaptent un comportement adéquat en réponse à vos manières, ou vos caprices, évidemment, voire un subtil mélange des deux, je vous laisse seule juge. Bien entendu, interdiction formelle de jouer « franc-jeu », si tant est que l'on puisse réellement utiliser ce terme concernant une imposture, et d'annoncer clairement votre statut. Le côté ludique de ce repas disparaîtrait alors irrémédiablement, ce qui serait fort dommage... »

Alice ne pensait pas que garder le sourire durant toute cette soirée serait aussi simple et aisé. Surtout vers la fin. Une sortie à l’image de leur entrée : remarquée et provocante. Christopher lui tenait toujours le bras, la conduisant lentement à l’extérieur tandis qu’elle conservait en mémoire les têtes médusées de leurs victimes nocturnes. Cette première soirée New Yorkaise risquait de rester la meilleure qu’elle ait vécue sur tous les plans. Jamais elle ne s’était amusée autant. A dire vrai, son cavalier aussi culotté que séduisant devait certainement y être pour quelque chose. Et c’était avec un sourire comparable à celui de la jeune fille qu’il la conduisait à l’extérieur.

La fraicheur du soir n’eut pas le temps d’atteindre la jeune femme malgré sa tenue légère et estivale car elle fut conduite par le bras sûr de Chris jusqu’à une berline noire de longueur incroyable. Une limousine. Alice dut rattraper sa mâchoire en cours de route pour éviter de la perdre. Elle allait monter dans une limousine. Le rêve de toutes les jeunes filles désirant être une princesse. Un portier ouvrit la berline et le compagnon de la blonde la fit entrer dans la voiture. La chose fut plus ardue qu’elle n’y paraissait à cause des escarpins qu’elle portait et la crainte d’abimer la robe. Mais elle s’en sortit plutôt bien et s’installa sur la banquette avec soulagement. Le jeune homme monta à son tour et s’installa en face d’elle. Le moteur démarra et le trajet commença.

Alice s’étonnait de chaque petite chose présente dans la berline. En touriste qui se respecte, elle aurait du prendre des photos mais manque de bol, elle n’avait pas prévu l’appareil. Elle était tellement admirative devant l’intérieur du véhicule qu’elle se contenta de hocher la tête en signe de dénégation devant la demande de rafraichissement que lui proposait son cavalier. Elle ne vit pas non plus ce regard l’observer profondément tandis qu’elle jetait un coup d’œil à l’extérieur pour admirer New York. Toute cette soirée semblait tellement irréelle. Et elle continuait de l’être. La question que lui posa le jeune homme la surprit. Elle posa sur lui un regard stupéfait en haussant les sourcils avant de rire légèrement.

« Eh bien monsieur Witman, si j’avais fait cela toute ma vie, le niveau de la prrrestation de ce soirrr aurrrait été supérrrieurrr à celui là… »

Elle agrémenta ces mots par un sourire en coin et un petit regard sous les cils. Puis, elle détourna les yeux et se posa plusieurs questions. Le jeune homme s’empressa alors de répondre à plusieurs d’entre elles sans qu’elle n’ait besoin de les formuler. L’Eminence. Encore un de ces lieux friqués où ne vont que les bourges. Elle était encore dans de beaux draps. Non pas que jouer la princesse commençait à la fatiguer mais d’un certain point de vue, elle allait frôlait la schizophrénie. Anya avait le dessus mais pour combien de temps ? Plus beaucoup à ce rythme là. Il allait falloir qu’elle trouve une astuce avec elle-même.

La voiture s’arrêta et le portier refit son apparition. Witman sortit et tendit la main vers la jeune fille pour l’aider à s’extraire de la voiture. Elle la saisit avec une certaine douceur et sortit de la berline pour observer le bâtiment. Pour être stupéfaite, elle le fut énormément. Dans le genre bourratif, la déco était poussée au maximum. C’était presque trop. Elle s’étonnait que le jeune homme aime cet endroit car, à ce qu’elle avait pu voir ce soir, il préférait la classe sobre plutôt que la classe « look at meeee ». Bref, après avoir examiné l’extérieur, le jeune homme entraîna la jeune fille à l’intérieur. Là, elle retrouva plus le style Witman. Simple tout en étant brillant de classe.

Un serveur conduit le duo vers une table située devant les baies vitrées ouvrant un horizon imprenable sur la ville. Alice s’en régala les pupilles, observant attentivement cette ville si illuminée bien qu’en pleine nuit. Une chose était sure, l’arrivée récente de la jeune fille dans cette ville était on ne peut plus flagrante. La preuve était qu’elle s’émerveillait d’un rien. Elle observa encore quelques instants l’extérieur avant de revenir dans le restaurant… et de tomber nez à nez avec une masse de couverts impressionnante. Elle manqua de demander à son cavalier s’il était BIEN sûr qu’ils ne seraient que deux pour ce dîner car la table ainsi présentée donnait l’impression de pouvoir nourrir une famille nombreuse. Heureusement pour elle, elle avait déjà vu cette situation dans un certain film où un paquebot célèbre coulait. Et si la dame de ce film disait vrai, il suffisait de « prendre les couverts de l’extérieur pour revenir à l’assiette ». Ou alors… Une autre hypothèse pouvait fonctionner pour ce genre de situation mais elle préférait se retrouver devant le fait accompli pour la mettre en pratique.

Alice s’empara de la carte et l’ouvrit. Witman se pencha vers elle et lui énonça les nouvelles règles du jeu. Oui, car qui disait changement de lieu disait aussi changement de règles. Alice écouta son compagnon avec attention, cherchant des failles dans ses paroles ou du moins, de quoi jouer un peu. Sa nouvelle mission, et elle l’acceptait, était de faire comprendre à ces bourriques de serveurs qu’elle était princesse sans le crier haut et fort. L’habituel sourire en coin de la demoiselle fit son apparition sur ses lèvres. Elle espérait fortement que le personnel s’était reposé car, même lorsqu’elle était elle-même, elle prenait un malin plaisir à déboussoler le monde entier. Elle se plongea dans la carte, sachant déjà plus ou moins ce qu’elle allait faire en début de repas.

Christopher lui avait dit que la cuisine était irréprochable. Elle allait commencer par tester les habitudes culinaires des chefs cuistots. Fouillant la carte des entrées de fond en comble, elle chercha celle qui lui permettrait de mettre un sacré bazar en cuisine. Et elle la trouva dans une salade composée, assez simple d’aspect mais complexe si on prenait en compte le nombre d’ingrédients et donc le nombre de recommandations. De là à ce que, finalement, elle la refuse, on n’était pas loin. Elle se creusa la tête encore quelques instants, cherchant ses mots pour exprimer correctement ses désirs. Une fois ses phrases longuement répétées, elle reposa la carte sur la table. Entrée et plat était bien mitonnés dans sa tête. Restait à savoir si, maintenant, tout allait être parfait au niveau du service. Une serveur se dirigea vers le table et elle lança un dernier regard à Witman qui disait clairement « que la partie commence… ». Connaissant son métier, le jeune homme demanda avec tact s’ils avaient fait leur choix tout en omettant pas de leur conseiller le plat du jour. Alice sourit à ce jeune homme avant de se lancer.

« Eh bien, en ce qui me concerrrne, je prrrendrrrais une salade prrrintanièrrre. Vos tomates ont du goût j’espèrrre. Et votrrre salade est évidemment crrraquante tout en rrrestant de la salade. Ah ! Et j’oubliais, les carrrrés d’emmentals ne doivent êtrrre ni trrrop grrros, ni trrrop petits, le foie grrras doit êtrrre rrraisonnablement dosé et l’assaisonnement doit êtrrre assez léger sans pourrr autant se montrrrer fade. Voilà en ce qui concerrrne l’entrrrée. Je vais prrrendrrre ensuite un plat du jourrr mais là aussi, je ne veux pas un morrrceau de viande trrrop imporrrtant et il doit êtrrre bien tendrrre. Quand à la guirrrlande de légumes qui l’entourrre, rrretenez qu’ils doivent avoirrr un maximum de goût. »

Un moment fantastique. Le pauvre jeune homme avait l’air de peiner à tout retenir. Retenir ? Une nouvelle idée vint à Alice. Certes, c’était un peu de la triche mais… Non, pas vraiment. Fixant le jeune homme qui l’observait par-dessus son calepin, elle se glissa dans sa mémoire et s’amusa quelques peu à déboussoler un peu plus le jeune homme. Une sorte d’exercice quotidien. Elle modifia la compréhension qu’il avait reçue sur quelques uns des ingrédients et détourna le regard. Ni vue ni connue, cet instant venait de durer au plus une seconde. Son regard se posa sur Christopher et elle haussa un sourcil, le mettant au défi lui aussi. Pendant qu’il passait commande, les méninges de l’adolescente tournaient à plein régime.

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Contempler Anya réaliser son numéro était toujours un délice pour le jeune homme, qui se délectait de la confusion qu'elle réussissait à créer chez le pauvre serveur, sans nul doute un employé d'habitude irréprochable n'ayant rien demandé. Mais ce soir, il en serait pour ses frais. Et pas question de lui faciliter la tâche. Pour rien au monde Chris n'aurait voulu saboter le jeu de sa compagne, préférant même en rajouter dès que l'occasion se présenta.

« Quant à moi, je prendrai un carpaccio de saumon et de lotte, accompagné d'une feuille-de-chêne assaisonnée de coriandre fraîche, menthe et mélisse. J'attends du carpaccio qu'il ait un goût relevé, évidemment. En plat principal, je pense qu'un gîte à la noix de boeuf braisé avec son accompagnement de morilles et chanterelles me conviendra parfaitement, tant que la cuisson est à point. Et envoyez-nous le sommelier, je vous prie, je préfère m'adresser à un connaisseur pour ce qui est des boissons... »

Laissant partir un serveur pour le moins débordé, et manifestement pas au bout de ses peines pour cette fin de soirée. Alors qu'il s'éloignait, semblant préoccupé, sans doute par la complexité de la commande, le sommelier s'avança, proposant la carte des vins au jeune PDG, qui la refusa d'un geste.

« Je vous remercie, mais cela ne sera pas nécessaire. Au vu de nos choix respectifs, je pense qu'un blanc fruité, mais pas trop liquoreux, ira divinement de paire avec l'entrée, par exemple, hum... un Puligny-Montrachet. Le plat de résistance nécessitera lui un rouge, et il me semble que votre cave comprend quelques bouteilles de Château Pape Clément, qui devrait convenir à merveille. Et pour la fin du repas, un de vos Dom Perignon sera parfait. Bien évidemment, je compte sur vous pour les servir en temps et en heure.

-Bien, monsieur, je vais de ce pas m'en occuper. »

De grands noms étaient commandés, et le jeune Witman se ferait un plaisir d'éconduire le sommelier si l'année ne lui convenait pas.

Attendant que leurs commandes soient traitées, Christopher repensa au déroulement de la soirée jusqu'à présent, et se mit à sourire légèrement. Ils avaient vraiment fait fort, au gala, ce soir. Peu de doutes subsistaient encore quant aux couvertures des tabloïds du lendemain matin. D'autant qu'en regardant à travers les baies vitrées, il lui semblait bien reconnaître en contrebas la silhouette de quelques paparazzi, et la lueur de flash. Heureusement qu'ils n'étaient pas autorisés à pénétrer dans l'enceinte de l'établissement, car le jeune homme venait d'avoir une nouvelle idée, qu'il jugeait brillante, afin de tester sa cavalière. Mais tout ceci prendrait du temps à se mettre en place, et il devrait attendre le bon moment.

Lorsque l'entrée arriva, Chris décida de faire profil bas, laissant le soin à Anya d'exprimer son mécontentement, et dégusta son plat en silence, appréciant de en même temps la qualité supérieur du vin. Il s'amusait néanmoins à épier le désespoir grandissant qui s'inscrivait au fur et à mesure sur le visage de l'employé, qui semblait totalement perdu, voire même par moments sur le point de s'effondrer.

Profitant que sa partenaire était occupée à réprimander le serveur, Witman fit semblant de redisposer sa serviette sur ses genoux, cachant ainsi brièvement sa main gauche, il désolidarisa une seule et unique guêpe de son majeur, ce qui au final n'était que très peu visible, et l'envoya se dissimuler sous la table, prête à agir.

Reprenant son repas comme si de rien n'était, Chris en profita pour glisser une petite phrase dans ses propos, innocente en soit, mais qui pour nous observateurs omnicients prenait tout son sens:

« Vos caprices sont un délice à observer, très chère, montrant bien des goûts raffinés habitués à la plus haute qualité et ne laissant aucune place au médiocre, ni même à l'acceptable. Et votre port reste délicat, alliant noblesse et féminité en même temps. En somme, lorsque tout suit son court, vous savez incarner parfaitement une princesse de haute lignée... »

Finalement, l'entrée terminée, vint le plat de résistance. C'est alors qu'entra en action le petit insecte solitaire. Suivant à la perfection les ordres que lui dictait mentalement le mutant, la guêpe attendit que le serveur ne soit plus qu'à une courte distance de la table pour se faufiler rapidement à ras de terre jusqu'à la cheville du pauvre homme, et le piqua, refaisant directement le chemin en sens inverse, pour finir sa course au plus près de son point d'origine, un des doigts de Chris, et fusionner avec, disparaissant ainsi sans laisser de traces. Sous la surprise, et en pleine marche, l'employé, déséquilibré, laissa échapper un des plats qu'il tenait, et ce dernier termina sa course... sur la splendide robe de haute couture que portait la ravissante Anya.

Ainsi se brisa le calme relatif qui semblait avoir jusqu'alors régné sur le repas...

Les commandes prisent Alice observa avec délectation le serveur qui regagnait les cuisines. Witman avait joué le même jeu qu’elle, cherchant à complexifier légèrement les plats qu’elle prenait pour les rendre parfaits pour son palet. Elle avait hâte de le voir revenir pour le démonter lentement et délicieusement. Le sommelier vint à son tour à leur table et elle écouta attentivement ce qui se disait. Les deux hommes, ou plutôt Christopher, semblait avoir une connaissance parfaite des vins. Elle même avait quelques connaissances question alcool. Mais, ces connaissances n’allaient pas plus loin que champagne, vodka aux parfums divers et varié et autre trucs buvables en soirées. Aussi, tous les vins cités lui étaient inconnus. Raison de plus pour y goûter.

Alice s’évada alors quelques peu durant cet intermède. Elle ne doutait pas de la rapidité de la préparation des plats mais avait besoin de ce court instant pour se détendre. Observant New York d’en haut, elle se régala les pupilles. Son regard fut attiré par des flashs lumineux et un léger sourire vint s’étendre sur ses lèvres. Quand Ely verrait n’importe quel magasine people, elle allait frôler une attaque. Alice venait de se prouver deux choses : elle était capable de rentrer dans la cour des grands et d’y jouer un rôle qui ne lui ressemble pas. Après tout, elle qui n’allait décrocher ses 17 ans qu’en octobre prochain venait de rentrer pleinement dans un monde qui ne lui appartenait pas. D’une part, ça l’effrayait, de l’autre, ça l’enchantait.

Le serveur fut rapidement de retour et Anya repris sa place. Une fois les assiettes déposées, elle commença son plat en prenant des manières qui ne lui ressemblait pas. Elle faisait attention à tout. Sa tenue, celle de ses couverts, la quantité de nourriture sur la fourchette… Et, évidemment, ce qu’elle mangeait. Les commentaires ne se firent pas vraiment attendre et le serveur parut s’enfoncer six pieds sous terre. Elle, elle jubilait. C’était tellement amusant de faire tourner ces serveurs en bourrique qu’elle commençait presque à en demander plus à chaque fois. Une chose l’étonna étrangement : l’attitude de Witman. Il semblait observer la scène avec délice sans y prendre part. Cela était assez étonnant et ne pouvait présager que quelque chose de plus impressionnant que tout ce qu’elle avait pu voir. Tout en faisant cette constatation, elle trempa ses lèvres dans son verre de vin. Elle fut surprise qu’un truc aussi « pourave et datant de mathusalem » puisse être si bon et n’hésita plus une seconde à en boire de temps à autre.

Alors qu’elle terminait son plat et que le jeune homme en faisait autant, il l’observa et ouvrit de nouveau la bouche pour une phrase qui, cette fois, ne cacher plus vraiment les compliments. Alice resta sceptique et l’observa en fronçant légèrement les sourcils. Depuis quand il faisait des compliments gratuits, lui ? Ca sentait presque le roussit. Cependant, elle se contenta de sourire légèrement, adoptant cet air charmeur et raffiné à la fois. Un serveur vint récupérer les assiettes sales tandis qu’un autre s’avançait vers eux, les plats de résistance en main. C’est là que les choses commencèrent à se gâter.

En effet, le serveur qui leur amenait les plats sembla soudain déséquilibré, comme si quelqu’un venait de lui assener un coup de pied dans le genou. Alice n’eut le temps que d’écarquiller les yeux. L’un des plats qui trônait de façon professionnelle et parfaitement artistique dans les mains du jeune employé commença sa chute… Et l’acheva sur sa robe. Surprise et effrayée à la fois, elle se leva d’un bond, repoussant la chaise qui finit sa course sur le sol. Un temps d’arrêt fit son apparition. Intense et infini. Tout le monde semblait s’être suspendu. Que ce soit les autres employés qui observaient leur collègue avec horreur, les autres clients qui se tordaient le cou pour observer la scène, tous s’étaient figés. Alice vit rouge. Elle dut retenir ses pulsions meurtrières pour ne pas sauter au cou de ce malheureux serveur afin de l’étrangler. Elle lança un regard en coin sur Witman et crut y voir un mince sourire. Il avait presque l’air… satisfait… Puis, elle resongea à ses paroles et, cette fois-ci, s’accrocha à ses derniers mots. « En somme, lorsque tout suit son court, vous savez incarner parfaitement une princesse de haute lignée... ». Pour le coup, sa rage s’évanouit.

Etait-il responsable de ce qui venait de se passer ? L’avait-il prédit ? Ou n’était-ce là qu’une simple coïncidence ? Elle avait besoin de réfléchir là-dessus, tout de suite et dans le calme. Et le calme, ce n’était pas un serveur se confondant en excuses et se tordant de douleur qui le lui donnerait. Cette fois, elle vit même une larme au coin de l’œil de celui-ci qui s’avançait vers elle, la suppliant de lui pardonner cette erreur monumentale. Elle eut un mouvement de recul et se fit dure et froide comme le marbre. Son regard fut plus noir que le charbon et ses lèvres adoptèrent un rictus mauvais. Tout ce qu’elle devait faire, là, maintenant, c’était s’échapper quelques secondes sans faire sauter sa couverture.

« Bas les pattes, sombrrre imbécile ! Vos excuses ne nettoierrront pas la rrrobe et ma pitié à ses limites. Disparrraissez de ma vue et sachez que vous me paierrrez cet affrrront un jourr ou l’autrrre. »

Le serveur aux yeux écarquillés de frayeur ne se le fit pas dire deux fois. Boitant légèrement, il repartit dans les cuisines vitesse grand V. Alice baissa les yeux et observa l’étendue des dégâts. Son excuse pour s’isoler, elle l’avait. Il ne manquait plus qu’à s’éclipser avec retenue. Relevant les yeux sur Christopher qui l’observait, elle sourit momentanément.

« Mon cherrr, vous m’excuserrrez mais Cendrrrillon doit s’en aller quelques instants pourrr rrrenouveller le sorrrt dont elle fait l’objet. »

Sur ce, avec une légère révérence dont plusieurs regards furent surpris, elle se dirigea vers les toilettes. Le chemin fut aisé car, en même temps qu’elle le suivait, elle se remémorait le peu d’images qu’elle possédait pour y aller. Elle entra dans ce lieu intime et vérifia qu’elle était bien seule. Une fois cela fait, elle tapa du poing contre le rebord du lavabo. Il fallait que sa rage s’évacue par un moyen ou un autre, sinon, elle allait rapidement perdre sa couverture et effacer Anya d’elle-même. Attrapant quelques feuilles de papier absorbant destinées à s’essuyer les mains, elle s’occupa de la robe. Les dégâts n’étaient pas trop étendus et il lui fut aisé de les dissimuler. Un regard pointilleux aurait été outré mais sinon, il n’y verrait que du feu. Elle s’empressa de jeter les papiers dans la poubelle et s’appuya sur le lavabo, s’observant dans la glace. Elle doutait que l’on puisse la déranger car les personnes ayant observé la scène n’oseraient pas entrer dans une pièce où se trouvait un fauve enragé. Quoiqu’avec ces bourges, il fallait s’attendre à tout.

Elle prit une longue inspiration et ferma les yeux, fouillant sa mémoire si parfaite. Elle remonta aux dernières minutes et revit la scène, cherchant le détail qu’elle n’aurait pas vu. Quelques questions refirent surface : Pourquoi le serveur avait-il trébuché ? Pourquoi a cet instant précis ? Etait-elle visée ? Et surtout, quel avait été le rôle de Witman dans cette histoire ? Ca, ça lui échappait. La jeune fille savait exactement comment remédier à cela mais elle hésita. Elle se mordit la lèvre inférieure, se demandant si elle réussirait à chercher dans les mémoires de Christopher quelque chose qui lui indiquerait ce qui s’était passé. De toute façon, elle n’aurait pas vraiment le choix si elle souhaitait faire la lumière sur cet événement. De plus, elle se promit intérieurement que si Christopher était responsable ou qu’il aurait pu éviter ce qui s’était passé, elle le lui ferait payer tout autant. Elle redressa la tête et sourit à son reflet. Elle replaça quelques mèches de cheveux et ressortit.

Elle se faufila avec grâce et légèreté entre les tables afin de regagner la sienne. Quelques regards convergèrent sur elle, lui rappelant avec le sourire le gala. Puis, Christopher la vit et elle lui sourit. Sa chaise avait été redressée et les dégâts ramassés, ne laissant aucune trace de l’incident. Elle se rassit sur sa chaise et le plat de résistance fit son entrée, cette fois-ci pour de bon. Ce fut à son tour de devenir silencieuse. Elle allait jouer au même jeu que le jeune homme. Elle commençait presqu’à en avoir assez de le voir mener la danse sans cesse. A elle de le surprendre, ce qu’elle ne tarda pas à faire. Après une nouvelle gorgée de vin, différent et toujours aussi succulent, elle lui lança un regard charmeur.

« Eh bien, on peut dirrre que cette soirrrée aurrra été forrrtement mouvementée, n’est-ce pas ? Difficile d’êtrrre une prrrincesse et de s’adapter à toutes les situations, je trrrouve. Quoique, j’aurrrais prrresque pu la voirrr venir, cette pérrripétie là… »

Elle lui lança un regard malicieux avant de reprendre une gorgée de vin. Dans sa tête, une chose était sure : elle ferait tomber le masque de Christopher Witman, ce soir…

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Manifestement, il y en avait un qui n'aurait pas de prime à la fin du mois... Ce restaurant, renommé pour son irréprochable service, commettre un impair? Ridicule. Impensable. Et pourtant, ce qui venait d'arriver y ressemblait fortement. Le rôle qu'y avait joué Christopher était somme toute minime, il n'avait après tout été que l'élément perturbateur de l'histoire. Certes, sans élément perturbateur, il n'y aurait pas eu de péripéties, mais ceci était un détail, un simple et insignifiant détail, n'est-ce pas?

Le jeune homme s'attendait à une scène dantesque de la part de sa compagne, compte tenu du caractère qu'il lui avait semblé cerner lors des cours instants en début de soirée où il avait fait face à sa véritable personnalité, mais pour le coup resta sur sa faim. Alors que la somptueuse robe paraissait souillée aux yeux de tous, spectacle navrant s'il en était, sa détentrice sembla dans un premier temps sur le point de laisser libre court à sa fureur, ce qui, du point de vue de Witman, aurait aussitôt mis un terme à la soirée.

Puis son regard se posa quelques instants sur Chris, et elle sembla se calmer. Une telle maîtrise de soi ne manqua pas d'impressionner le PDG, qui aurait quelques instants auparavant tablé sur une colère noire. Elle congédia ensuite le serveur, qui continuait de se répandre en excuses, d'un ton glacial, dont la froideur aurait fait pâlir d'envie un hiver de son pays d'adoption. Puis, avec toute la prestance qu'exigeait son rôle, elle s'éclipsa dans l'intention évidente de tenter de réparer les dégâts causés par l'incident.

Ce ne fut que lorsque la jeune femme eut franchi la porte des sanitaires que la salle, qui semblait jusqu'alors avoir retenu son souffle, dans l'attente d'une frasque à pouvoir raconter le lendemain dans les cercles relationnels de la haute société, reprit vie. Les regards qui jusqu'alors convergeaient vers leur tables se détournèrent, les conversations reprirent leur cours, et les couverts le chemin des assiettes. L'incident était clos.

Le jeune mutant s'amusait décidément beaucoup, ce soir, bien plus qu'il ne l'aurait imaginé lorsqu'il attendait pour entrer à la Fleur de Lys au début de la soirée. Ce qui au départ n'était sensé être qu'un petit jeu, le temps de se débarrasser d'une inopportune, avait fini par devenir plus consistant au fur et à mesure que le temps passait, Chris ayant trouvé adversaire à sa taille en manière de mesquinerie et coups bas, comme le lui avait prouvé sa compagne lors du gala de charité.

Tout en attendant qu'Anya revint, Witman réfléchissait afin de trouver de nouvelles idées, mais rien de vraiment exceptionnel ne lui venait à l'esprit pour l'instant, aussi se contenta-t-il de « lâcher » une guêpe qu'il envoya se dissimuler en hauteur, tranquillement posée sur les feuilles d'une des plantes présentes dans la salle, ce qui lui permettait d'avoir une bonne vue d'ensemble de la salle. Certes, le jaune n'est pas une des couleurs les plus discrètes qui soient, mais dans un massif de fleurs, elle avait de grandes chances de passer inaperçue.

La princesse revenant sur ces faits, Chris observa l'état de la robe quelques instants, notant un travail remarquable de camouflage. Manifestement, la jeune femme devait avoir l'habitude de s'occuper de ses vêtements elle-même. Reprenant silencieusement place, la duchesse héritière slave trempa ses lèvres dans le verre que le sommelier avait quelques instants auparavant rempli du vin approprié au plat de résistance, puis fit une réflexion pour le moins étrange, qui ne manqua pas faire hausser un sourcil interrogateur au PDG, l'espace de quelques instants.

« Vraiment? Voilà qui est remarquable. Quoique, il est vrai que la démarche peu assurée du serveur avait de quoi mettre la puce à l'oreille. »

Ceci n'avait rien d'évident, pourtant, à partir du moment où ce serveur n'était en réalité pas plus gauche qu'un autre, il avait uniquement eu le malheur d'être au mauvais endroit au mauvais moment. Mais mentir avec aplomb était évidemment une des premières leçons que son père lui avait enseignées, quant au monde du business. Le tout en ne cessant pas de sourire, cela allait de soit.

Le plat principal était cuit selon ses désirs, mais Chris décida de le faire rapporter en cuisine, le trouvant « trop tiède ». Ce qu'un nouveau serviteur s'empressa de faire, des consignes avaient manifestement été données afin de ne plus contrarier plus avant le couple « sinistré ». Le remplacement arriva peu de temps après, cette fois-ci parfait en tous points, ce que ne fit cependant pas remarquer le jeune homme, ne voulant pas donner cette satisfaction à l'employé. Mieux valait le garder alerte, cherchant à satisfaire leurs moindres désirs pour compenser l'incroyable maladresse de son collègue, que le laisser s'endormir sur ses lauriers, quand bien même les aurait-il mérités.

Recentrant son attention sur sa compagne, il s'enquit de son point de vue sur la soirée:

« Alors, que pensez-vous de cette première soirée mondaine new-yorkaise, très chère? Est-elle à la hauteur de vos attentes? »

Sujet: Re: Jusqu'au bout de la nuit [PV Alice] Ven 15 Oct 2010 - 20:19

L'ambiance du restaurant semblait s'être apaisée. L'incident fut rapidement oublié aux yeux de tous… Enfin, presque. Alice, elle ne pouvait s'empêcher de revoir cette scène, tâchant de trouver le hic qui avait fait basculer la situation. Cependant, elle avait beau passer et repasser la scène au ralenti dans sa tête, elle ne voyait pas. Elle décida donc de se changer les idées, se concentrant sur son plat. Si Christopher demanda à ce qu'il soit réchauffé, Alice n'en fit rien. Malgré elle, ses pensées restait ailleurs. De plus, elle soupçonna le jeune homme d'avoir fait ramener le plat histoire de s'assurer que les serveurs seraient encore plus à leurs pieds qu'auparavant.

La jeune fille le laissa faire selon son bon plaisir, réfléchissant à un moyen de découvrir qui pouvait être Christopher Witman hormis un PDG bourge et aussi peu compassionnel qu'elle pouvait l'être avec les autres. Finalement, si on excluait leur mode de vie et leur âge, les deux jeune gens avaient bien plus de points communs qu'on aurait pu le croire. La jeune fille y pensa vaguement et partit de ce fait pour tenter de mieux cerner son interlocuteur. Mais elle n'en eut pas vraiment le loisir, coupée dans ses pensées par une nouvelle question du jeune homme.

« Alors, que pensez-vous de cette première soirée mondaine new-yorkaise, très chère? Est-elle à la hauteur de vos attentes? »

Elle haussa les sourcils, reposant ses yeux verts sur ceux du jeune homme qui la fixait. Maintenant ? Ou jamais. Elle réfléchit durant une petite fraction de seconde. Puis, elle se glissa dans la tête du jeune homme, comme elle l'avait fait la première fois. Mais beaucoup de choses différaient depuis l'instant où elle s'était glissée dans la tête de Witman durant le gala et cet instant. Elle entrait dans la tête du jeune homme sans savoir trop quoi chercher alors qu'auparavant, elle savait ce qu'elle voulait. C'était peut être la première fois qu'elle réalisait une telle chose. Elle savait qu'il y avait des risques… Mais elle allait se montrer prudente. La pire des situation serait une amnésie totale ou même momentanée du jeune homme. Mais bon, si il était responsable d'une façon ou d'une autre de ce qui venait de se passer, elle lui réserverait peut être ce genre de châtiment…

La fouille commença, telle une recherche de document dans la bibliothèque d'Alexandrie. Elle avait l’impression de se promener dans les rayons couverts de livres, de tailles et de couleurs diverses et variées. Elle ouvrait certains d’entre eux, cherchant un information croustillante à se mettre sous la main mais généralement, elle les refermait, déçue de leur contenu. La vie de Witman n’avait pas été très joyeuse et surtout, tournait toujours autour des même choses : la richesse, la haine paternelle, le travail et la provocation qui était liée à toutes ses folies. Il aimait s’afficher en public et ce, dans toutes les situations imaginables. Il voulait que l’on parle de lui. Drôle de façon d’envisager l’avenir.

Alice poursuivait son enquête silencieuse et indétectable. Quelqu’un de l’extérieur aurait pu penser que les deux jeunes gens étaient en train de s’observer avec intensité. Elle s’attarda sur les événements récents, passant en revue toute la soirée depuis le moment où elle avait attrapé le bras du jeune homme. Elle révécut cette soirée en accéléré, s’attardant sur les moments où Witman été resté seul. Elle le vit passer différents coups de fils ou encore déballer le paquet contenant le joyau qu’elle portait autour du cou. Puis, le moment tant attendu : l’incident du restaurant. Enfin, l’adolescente compris enfin quel avait été l’élément perturbateur de la chute du serveur : un insecte. Apparement, un insecte piquant assez douloureusement. La jeune fille opta pour une abeille. Cependant, un détail fit mouche : L’insecte avait surgit de sous la table pour se ruer sur l’employé. L’acte était donc purement prémédité. Restait plus qu’à en trouver l’auteur…

La jeune fille sentait sa concentration faiblir. Elle n’avait plus beaucoup de temps si elle ne voulait pas blesser la mémoire du jeune homme de façon involontaire. Elle se décida donc pour les grandes lignes. Mais dans ces grandes lignes, elle se retrouva face à un souvenir terrifiant pour le jeune homme. Le genre de souvenirs traumatisants à jamais. Il était tombé. Tombé du haut d’un building. Comment avait-il put survivre ? La jeune fille ne compris pas tout. La mémoire sembla se… diviser ? créant un brouhaha terrible dans l’esprit du jeune homme. Si elle s’était attendue à ce genre de chose… La jeune fille ne comprit pas tout. La seule chose qu’elle retint était le fait que Chris avait bel et bien participé à l’incident… Et il allait le lui payer. Elle allait modifier un élément qui, à première vue, pouvait parraître sans importance. Mais, demain matin, ce serait Witman qui aurait une sacrée surprise. Aussi, elle revint sur le moment où le jeune PDG avait conclu une sacrée belle affaire durant le gala. Cependant, elle modifia la réponse de l’homme qui avait créé la joie de Witman en la transformant en « non » catégorique. Si cet inconnu appelait Witman le lendemain matin pour mettre au clair leur accord, le jeune homme risquerait de perdre patience et de se montrer quelques peu désagrables avec cet homme… Sans pour autant comprendre quoi que ce soit. Elle finit le travail en regardant les derniers instants que Witman avait passé sans elle, lorsqu’elle était dans les toilettes. Comme la première fois, elle ne comprit pas tout mais fut marquée par les fleurs qui se trouvait là. Puis, elle s’effaça.

Elle cligna des paupières et tendit la main pour prendre son verre de vin. L’action avait du lui prendre entre 10 et 20 secondes. Dans 10 secondes, le jeune homme allait reprendre « vie » en sortant d’une torpeur incompréhensible pour lui. Elle allait devoit jouer finement. Buvant calmement une nouvelle gorgée de vin, elle comptait les secondes… 8… 9… 10 ! Le jeune homme cligna des paupières. A elle de jouer.

« Eh bien monsieur Witman… Je crrrois que je pourrrais qualifier cette soirrrée de parrrticulièrrrement épprrrouvante pourrr les nerrrfs bien que trrrès instrrructive. »

Elle s’arrêta là pour le moment, laissant au jeune homme le temps de reprendre conscience de son état actuel. Avec un peu de chance, il ferait passer ça sur le vin. En ce qui la concernait, la jeune fille commençait à fatiguer et à sentir les effets de l’alcool arriver. L’utilisation importante de son pouvoir l’avait quelque peu « affaiblie ». Elle continua donc à manger avec tranquilité. Cependant, après une petite minute de silence, elle fit mine d’être contrariée et appela le serveur. L’employé s’empressa de venir jusqu’à la jeune fille.

« Pourrrriez-vous vous arrranger pourrr nous débarrrasser de ces fleurrrs ? Tout ce polen va finirrr parrr me prrovoquer de sacrrrées allerrrgies… »

Mensonge. Mais autant éloigner le danger tant qu’elle le pouvait. Sa robe avait souffert, elle ne voulait pas avoir affaire à pire. De plus, cela mettrait peut-être la puce à l’oreille du jeune homme. Le serveur l’observa avec des yeux rond avant d’obéir à ce nouveau caprice de l’adolescente. Les massifs de fleurs furent emmenés ailleurs et Alice reposa son regard sur Chris. Un regard profond qui incitait au défi. Elle reprit son verre et le termina sans demander son reste, laissant le repas se poursuivre dans le calme…

Invité

Un étourdissement. Le second de la soirée. Et Christopher Witman sembla quelques instants perdu, les yeux dans le vague, alors qu'il tentait de remettre ses pensées en ordre. Il lui semblait qu'elles formaient un fouillis inextricable. Fermant les yeux quelques secondes pour se concentrer, il se ressaisit, saisissant au vol la fin de la réponse de la jeune blonde qui lui faisait face, et hocha la tête en signe d'assentiment sans même chercher à en saisir le sens.

Deux absences ainsi au cours de la soirée, voilà qui était pour le moins désagréable, et surtout surprenant. Il ne lui semblait pourtant pas avoir fait des abus de boisson ce soir, ni d'aucune substance susceptible d'expliquer ce qui lui était arrivé. Aussi mit-il cela sur le compte de la fatigue. Le jeune homme se sentait las d'avoir raté le coche ce soir pour conclure ce qui aurait pu être une affaire exceptionnellement profitable. Même si le reste de la soirée avait été amusant, il ne se leurrait pas, quoi qu'il fasse pour se changer les idées, la sensation d'échec restait toujours aussi cuisante. D'autant plus quand il repensait à la conversation, qui s'était déroulée pour le mieux. Le jeune PDG ne comprenant décidément pas ce qui avait pris à son interlocuteur, qui avait semblé pourtant jusqu'au tout dernier moment se ranger à son point de vue...

Chassant ces sombres pensées de son esprit, Chris reporta son attention sur sa « compagne russe » et l'entendit quelques instants après demander à un serveur d'éloigner les plantes proches. Totale incompréhension pour le jeune homme, qui ne laissa pas pour autant paraître sa surprise. Surprise qui fut d'autant plus grande lorsque cette demande saugrenue céda la place à un regard appuyé. Qu'il lui rendit, évidemment, plissant les yeux en tentant de comprendre ce qui l'avait amenée à agir ainsi.

Le jeune homme d'affaires eut pendant un cours instant dans l'idée de rapatrier l'insecte solitaire, mais l'abandonna bien vite. A mesure que s'éloignait l'employé, faire revenir la guêpe sans qu'elle ne soit aperçue devenait de plus en plus difficile. Tant pis, il se passerait de l'extrémité de son majeur pour un temps...

Pendant ce temps, les deux convives avaient finalement terminé le plat de résistance, leurs assiettes furent donc promptement débarrassées, et la carte des desserts atterrit quelques instants plus tard dans leurs mains, un serveur attendant même à leurs côtés le temps qu'ils se décident. Ladite carte était fort conséquente, composée de plusieurs âges de mets divers, mais ayant en commun une haute teneur en sucre. Un sourire en coin s'épanouit brièvement sur le visage du jeune Witman lorsqu'il pensa au dilemme auquel allait être confrontée Anya, d'une part au vu des noms pompeux et alambiqués employés dans la carte, d'autre part en supposant qu'elle serait tiraillée entre une vraisemblable gourmandise et son rôle de princesse de haute lignée à tenir.

Portant son attention sur la guêpe solitaire qu'il avait laissée s'éloignée, Chris se rendit compte que les ornements floraux avaient été déplacés dans le couloir reliant la salle aux cuisines, ce qu'il trouva amusant. Il s'adressa ensuite à la jeune femme, d'un ton détaché, teinté d'un soupçon de tentation:

« Cette carte est une pure merveille en matière de variété, ne trouvez-vous pas? Tous plus appétissants les uns que les autres, à tel point que choisir en deviendrait presque un supplice... Un véritable calvaire... Bien, je prendrai donc un feuillant aux fraises de Verlinghen, ce me semble être un bon choix. Quant à vous, très chère...? »

Le jeune PDG s'amusait de la situation, et avait évidemment fait exprès de se décider rapidement, afin de laisser le moins de temps possible à sa compagne pour réfléchir. Car c'était évidemment dans le feu de l'action, lorsque le scénario quittait la trame prédéfinie, que l'on voyait si les acteurs s'étaient réellement appropriés leurs personnages...

La jeune fille s'étonna de la réaction du PDG qui resta de marbre. Elle sentit son trouble et s'en amusa. Pour une fois dans sa vie, elle se sentait puissante. Surtout lorsqu'elle prenait conscience de la position du jeune homme comparé à la sienne. Elle n'était rien, il était tout. Il avait tout, elle n'avait rien. A dire vrai, hormis le culot qui l'avait poussé à venir ce soir là, elle ne savait qu'être superficielle, en contradiction avec la société. C'était sa façon d'exister. Elle mit de côté ces pensées peu agréables et les effaça définitivement avec une nouvelle gorgée de vin.

Les serveurs vinrent débarrasser la table à grande vitesse. L'adolescente commençait à sentir quelques effets dus certainement à la fatigue et l'alcool mélangés. Mais elle se devait de tenir encore un moment. Quoique… Etant une princesse, elle avait le droit de partir en plein milieu du dîner s'il le fallait… non ? Mais quand elle eut la carte des desserts entre les mains, la question de la fatigue ne se posait plus. Une telle palette de délices lui fit écarquiller les yeux. Elle chercha longuement son bonheur, ne sachant réellement quoi prendre. Elle dut se mordiller la lèvre inférieure ta nt la gourmandise faisait d'elle une proie facile. Quant à certains desserts, leur nom était si complexes qu'elle ne tenta même pas de s'y hasarder, ne sachant ce qui l'attendrait au bout.

Le serveur patientait sagement à leurs côtés, attendant les commandes. A moitié cachée derrière sa carte, Alice jeta des coups d'œil récurrents vers le jeune homme. Elle put ainsi voir le petit sourire en coin sur son visage et ne se sentit pas immédiatement rassurée. Qu'attendait-il d'elle exactement ?Elle n'en savait strictement rien et se retint de lâcher une grimace. Puis, il daigna délier la langue. Witman commença à vanter les mérites de cette carte si variée et si classe. Puis, il lui glissa la puce à l'oreille. Un supplice, oui. Elle était tout à fait d'accord. Les doutes de la blonde se confirmèrent : le jeune homme avait une idée derrière la tête. Laquelle, elle n'en savait rien. Et à l'heure actuelle, il devenait dangereux pour les deux de tenter de savoir ce qu'il avait réellement dans la tête… Le serveur les observait de trop prêt et la mémoire de Christopher risquait réellement de prendre cher.

La princesse pinça les lèvres, faisant mine de chercher un dessert qui lui plaisait tandis que les deux hommes attendaient sa réponse. Son cerveau tournait à plein régime. Elle cherchait à détourner tout le trouble qui reposait sur elle mais en restant discrète. Autant vous dire que c'était mission impossible. Peu d'options s'offraient à elle et elle savait que Witman ne manquerait pas de lui rappeler qui avait les rênes en main pour la soirée si cela devait se faire. Aussi, elle tenta le tout pour le tout.

"Eh bien, mon cherrr, on peut dirrre que vos goûts sont rrremarrrquables… J'ajouterrrai même qu'ils s'accordent avec les miens… Je prrrendrrrais moi aussi ce desserrrt à la fois frrruité et rrriche en saveurrrs…"

Et voilà comment congédier efficacement un serveur et tenir tête à un milliardaire de façon passive. Au fond d'elle-même, elle espérait vraiment avoir surpris le jeune homme. Mais bon, même si ce n'était pas le cas, elle s'en fichait. En tous cas, elle espérait s'en sortir… Comme une reine. Elle releva ses yeux maquillés vers le jeune homme, lui lançant un regard de braise. Une question lui brulait la langue. L'adolescente finit par craquer et la posa au PDG.

"Dites moi… Avez-vous une idée du dénouement de cette soirrrée ? Une fois la parrrtie finie… Que va-t-il advenirrr de la pauvrrre Anya ?"

Invité

La pseudo-russe avait semblait-il choisi la solution de facilité, face à une carte des plus complexes, et commandé le même dessert, ce qui était après tout une sage décision, d'autant plus de la part d'une si jeune personne. Et alors qu'ils attendaient le dessert, sa compagne posa à Christopher une question particulièrement pertinente, agrémenté d'un regard appuyé. Elle avait donc quelques inquiétudes à ce sujet, bien qu'elle les ait jusqu'à présent particulièrement bien camouflées...

Affichant un léger sourire en coin, Chris laissa passer quelques instants, avant de finalement se décider à lui répondre:

"Le dénouement se doit effectivement de constituer l'apogée de la soirée, et vous faites bien de l'aborder. Quant à la "pauvre Anya", si vous me permettez, elle n'a de pauvre que le nom, ses atours me semblent d'une toute autre dimension, n'êtes-vous pas d'accord? Toujours est-il que pour revenir au final, l'apothéose ne manquera pas de vous plaire ma chère, je puis vous en assurer."

Il avait en effet prévu quelques réjouissances supplémentaires, et pour eux la nuit n'était pas prête de se terminer... Mais restait toujours le restaurant à terminer, soit encore un petit moment à passer dans ces luxueux locaux, et savourer une cuisine raffinée et de délicieuses boissons, le tout en charmante compagnie.

Witman repensa avec amusement au début de la soirée, dont le cours avait finalement été chamboulé par quelques paroles audacieuses et un défi relevé. Une simple idée, qui avait finalement évolué en tout un concept, et rompu la monotonie d'une soirée qui s'annonçait aussi ennuyeuse qu'interminable. Et avait par ailleurs en partie compensé le revers cuisant qu'avait essuyé le jeune PDG de WitCom dans ses transactions.

Restant silencieux le temps de savourer le dessert, le jeune homme rappela le serveur, et leur demanda la carte des spiritueux.

"Un bon digestif s'impose après un repas copieux comme celui-ci, n'est-ce pas? Je prendrais donc un verre de votre excellent Macallan 15 ans d'âge. Et pour cette charmante demoiselle, et bien, pourquoi pas un Maiden's Prayer? A moins que vous ne désiriez absolument autre chose, très chère?"

Il avait à dessein choisi un cocktail au nom interpellant, tout en restant pour le moins mystérieux sur son contenu. Accessoirement, proposé ainsi, il mettait la jeune femme en porte à faux, refuser n'étant plus réellement une option, et choisir autre chose reviendrait à se replonger dans une cinquantaine de noms dont une bonne partie lui serait, à n'en pas douter, inconnue. Et ne manquerait pas de la plonger dans une intense réflexion, voire l'embarras si la situation s'éternisait.

Une fois la commande passée, et les boissons arrivées, Chris prit son temps pour la savourer, puis lâcha un petit commentaire, calmement:

"C'est agréable de déguster un bon spiritueux après un repas aussi rafiné, vous ne trouvez pas? Ça a quelque chose de reposant, surtout après une soirée aussi mouvementée. Et dans l'attente de la suite, évidemment..."

Un sourire presque carnassier s'épanouit sur le visage du jeune mutant l'espace d'un instant, alors qu'il réfléchissait au programme de la fin de la soirée, et à ce qu'il réservait à sa charmante compagne.

Payant rapidement la note après qu'ils eussent terminé leur dernier verre, Chris raccompagna Anya vers la sortie, tranquillement, repassant par le vestiaire pour récupérer leurs manteaux, puis regagner la limousine, qui avait évidemment été avancée, et attendant face à la sortie, un employé se tenait prêt à leur ouvrir la portière, les laissant prendre place dans le véhicule avant de la refermer délicatement.

Alors que la voiture de luxe redémarrait, prenant la direction d'une boîte de nuit très sélect, mais situé à une bonne dizaine de minutes du restaurant, Witman remarqua que la jeune blonde commençait à montrer des signes de fatigue pour le moins évidents. Elle baillait, avait de très petits yeux, et n'écoutait pas la moitié de ce qu'il lui racontait à propos de la suite de la soirée. Bientôt, il sentit sa tête se poser contre son épaule, et hésita sur la conduite à tenir. D'un côté, il avait envie de la réveiller, et lui faire vivre une nuit folle, teintée de musique et excès en tous genres, contrastant avec la soirée très huppée qu'ils venaient de vivre. Mais d'un autre côté, il s'était déjà terriblement amusé à la forcer à tenir un rôle difficile toute une réception durant, et même bien plus encore, et estimait qu'elle avait parfaitement rempli sa tâche, aussi méritait-elle ce repos que son corps semblait exiger. Il se doutait bien qu'il y avait de grandes chances qu'il ne la revoie jamais, mais cela lui importait somme toute peu, elle l'avait distrait le temps d'un soir, ce qui était prévu, et il devait reconnaître s'être particulièrement bien diverti.

Il la laissa donc plonger dans un profond sommeil, et signala à son chauffeur de faire demi-tour, pour regagner le Fleur de Lys. Arrivé à destination, il fit transporter délicatement la jeune femme dans la suite qu'il avait réservée plus tôt dans la soirée, et demanda à ce que le service de buanderie s'occupe de la tâche sur la robe. Il la quitta après avoir murmuré quelques mots "Adieu, charmante inconnue aux si délicates intonations slaves." Finalement, il paya la chambre en pension complète pour la journée suivante, laissant un pourboire généreux pour la discrétion et diligence du service, comme à son habitude. Il aimait ainsi laisser une bonne impression, et faire étalage de son opulence tout en passant pour quelqu'un de généreux, alors qu'en réalité tout était calculé. Des employés mis dans de bonnes dispositions étaient parfois une source de renseignements précieux, c'était un fait avéré.

Rentrant ensuite au siège de sa société, Christopher fit appeler en urgence Jenkins dans son bureau. L'attendant, assit dans son luxueux fauteuil, il joua avec un stylo Mont Blanc en argent massif, le faisant rapidement tourner et retourner dans sa main, puis lorsque son subordonné fut introduit dans son office, il lui donna ses directives sans plus attendre, désireux de régler ça dans les plus brefs délais:

"Jenkins, je veux lancer une OPA immédiate contre Fayerman. J'ai tenté ce soir l'approche diplomatique, mais il a daigné refuser la main tendue que je lui proposais, aussi allons-nous l'écraser sans ménagement."

Sujet: Re: Jusqu'au bout de la nuit [PV Alice] Lun 10 Jan 2011 - 18:36

Witman ne fit aucun commentaire supplémentaire sur le choix du dessert de la jeune fille qui en conclue qu’elle avait atteint les attentes du jeune homme. Cependant, suite à sa question, un léger silence se fit. Silence accompagné d’un sourire en coin de Christopher qui ne présageait rien de bon pour Alice. Mais, finalement, il finit par lui répondre. L’apogée de la soirée ? Ainsi, il allait en attendre encore plus par la suite… Aïe. Là, ça s’annonçait perdu d’avance. Mais lorsqu’il souligna que cela ne pourrait que lui plaire, Alice sourit. Etait-elle fatiguée ? Oui. Mais une action sans borne et sans interruption devrait lui permettre de garder l’esprit éveillé pour un moment encore.

Puis, tandis que l’on déposait les desserts sur la table, la jeune fille repensa à la soirée qu’elle venait de passer. Tout cela lui semblait si irréel pour elle, venue de la banlieue de San Fransisco, qu’elle commençait à se demander sérieusement si elle n’était pas plongée en plein rêve. Son entrée au gala, son rôle de princesse, le petit jeu qui s’en était suivit avec les autres personnalités, le changement de tenue, la danse, le restaurant… Il n’y a que dans les rêves que l’on peut vivre une telle chose. Et pourtant, c’était bien réel.

Et tandis qu’elle finissait son dessert, elle observa une nouvelle fois New York depuis la baie vitrée. Sa vie allait changer, elle en était certaine. Puis, le jeune PDG rappela le serveur, lui demandant une nouvelle carte. Alice haussa un sourcil. Que prend-on après le dessert en toute logique ? Un café ? Pas loin. Un cocktail en l’occurrence. Ah oui, il ne fallait pas qu’elle oublie qu’elle était encore au pays des bourges. Witman choisit pour elle, lui demandant cependant son avis. Parce qu’elle avait réellement son mot à dire ? Elle n’y connaissait rien dans le domaine. Aussi, choisit-elle la carte « jouons-notre-rôle-jusqu’au-bout » et, pinçant les lèvres, se contenta d’un léger signe de main qui signalait qu’elle n’avait aucune objection. Le serveur repartit et l’inquiétude grandit chez la jeune fille.

Lorsqu’elle eut son verre devant elle, Alice l’observa un moment avant de tenter le diable. Une gorgée suffit pour lui faire comprendre que l’alcool contenu dans ce verre allait suffire pour lui faire atteindre un certain degré d’alcoolémie. Le commentaire que fit Witman n’était pas là pour l’encourager. Comment pouvait-il espérer une suite avec un tel cocktail ? Sans compter le mélange d‘alcool avec tous les vins bus auparavant... Espérait-il plonger la jeune princesse dans un tel état d’ébriété qu’elle ne se rendrait même plus compte de ses faits et gestes, la rendant joyeuse pour la fin de la soirée ? Certes, il aurait pu ne pas être déçu. Mais pour le coup, l’adolescente se retrouvait littéralement assommée et fut plutôt heureuse quand son verre fut vide.

Alors, le jeune homme paya ce qu’il devait et raccompagna Alice jusqu’à la limousine sans omettre de passer par la case « vestiaire ». Le ronronnement du moteur avait quelque chose d’apaisant et la blonde lâcha un premier bâillement. Mentalement, elle tentait de se donner des baffes pour rester éveillée. Mais le sommeil finit par avoir raison d’elle et elle cessa cette lutte. Ses yeux se fermèrent lentement. Cherchant une position relativement confortable, elle n’eut d’autre choix que de poser la tête contre l’épaule du jeune homme. Lui en tiendrait-il rigueur ? Elle n’eut pas le temps de le savoir car elle plongea dans un sommeil profond, bercée par ce ronronnement doux que faisait la Rolls.

Elle rêvait. Elle rêvait qu’elle était une princesse et qu’on la ramenait dans un lit alors qu’elle dormait. Witman était là et, finalement, il partit. Il la laissa sur quelques paroles qu’elle interpréta comme présentes dans son rêve. Puis, le noir absolu.

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Elle avait connu de meilleurs réveils. Elle se sentait complètement perdue. Sa tête lui faisait un mal de chien et son premier réflexe fut de poser une main fraiche dessus. Puis, Alice ouvrit les yeux. Les quelques rayons de soleil qui étaient filtrés par les rideaux rendaient la pièce visible malgré l’obscurité. Où était-elle ? Les sourcils légèrement froncés, elle sauta hors du lit. Elle était en sous vêtements. Elle ne comprenait plus rien à ce qui lui était arrivé. Alors, elle ouvrit les rideaux et fit la lumière sur toute cette histoire. La luminosité l’obligeait à plisser les yeux mais une fois ses pupilles correctement adaptées, elle s’orienta. Cette chambre, elle l’avait déjà vue. Ou plutôt, elle y était déjà venue. Et en regardant de plus prêt, elle repéra les affaires qu’elle portait la veille lorsqu’elle s’était présentée dans cet hôtel. Le fleur de Lys.

La soirée lui revint en mémoire dans les moindres détails et elle dut se rasseoir sur le lit, la respiration haletante. Son pouvoir pouvait se montrer éprouvant lorsqu’elle ne parvenait pas à le maîtriser. Surtout le lendemain d’une soirée fraichement arrosée. Elle se frotta les yeux et observa la chambre avec attention. Sa robe et ses chaussures étaient là. Et les affaires que Witman lui avait offertes aussi. Que ce soit la robe fourreau ou les échasses qu’elle avait porté toute la soirée, rien ne manquait. Pas même le magnifique collier posé avec soin sur la table de nuit. Alors Alice Rigby réalisa que toute cette soirée avait été on ne peut plus réelle. Une soirée pailletée, digne d’une princesse. Et d’après ce qu’elle avait pu constater en cette belle matinée, elle allait pouvoir poursuivre cet événement encore aujourd’hui. Même si aucun mot n’avait été laissé à son attention, elle en avait déduit que c’était là le message que Witman lui avait donné en lui accordant cette chambre.

Un bref instant, elle vit cela comme un cadeau empoisonné : la plupart des gens présents au gala la veille avait certainement pris soin de réserver une chambre dans l’hôtel et elle allait devoir faire profil bas si elle souhaitait s’en sortir la tête haute. Mais elle n’en était pas là. Pour l’heure, elle se décida de passer par la case toilette afin de se sentir propre pour entamer cette nouvelle journée. Et ce ne fut qu’après une heure passée dans la salle de bain qu’elle en ressortit fraiche, propre et maquillée avec soin. Elle ne prit pas le risque de remettre la robe fourreau et remit simplement la sienne. A vrai dire, l’envie de retrouver un Jean et des Converses la prenait de plus en plus. Et pour cela, il fallait qu’elle s’échappe de l’hôtel. De toutes façons… La vie de princesse à une fin. Même pour Alice Rigby. Mais bon, on a le droit de rêver une journée de plus, non ?

Aussi, une fois rhabillée, elle descendit au restaurant de l’hôtel. Etant donné son réveil tardif, l’heure était au déjeuner. S’installant à une table, seule, on lui apporta rapidement la carte. Certes, elle devait rester dans son rôle de princesse. Mais plus rien ni personne ne pouvait lui dicter sa conduite et ne lui ferait de reproches sur les plats qu’elle prendrait. Aussi, elle décida de se faire plaisir tout en faisant attention. Evidemment, ce repas n’avait rien de comparable avec celui de la veille au soir. Rien de lourd et de compliqué. Tout dans la simplicité.

Quand elle eut fini son repas, elle regagna sa chambre. Elle devait désormais quitter l’hôtel sans se faire remarquer. La chose allait certainement se montrer plus difficile que prévue. Depuis quand les princesses quittaient-elles un hôtel à pied, avec un colis sous le bras et sans passer par la case hall d’entrée ? Autant dire que le personnel du Fleur de Lys risquait d’avoir quelques soupçons. Sauf peut-être si la princesse possédait quelques talents dans l’art de détourner l’attention et surtout démolir la mémoire des autres. Il fallait qu’elle tente. Elle n’avait rien à perdre. Elle rangea la robe et les chaussures dans la grande boîte qui était restée là. Puis, elle colla son oreille à la porte de la chambre. Aucun bruit dans le couloir. La voie était libre. La jeune fille ferma les yeux et re-visualisa les lieux. Elle savait parfaitement où se trouvait l’ascenseur. Mais il était complètement insensé de l’emprunter. Elle risquait de tomber sur n’importe qui et ne saurait sur quoi les portes de l’appareil allaient s’ouvrir. Cherchant dans sa mémoire, elle retrouva quelques petites bornes lumineuses indiquant une sortie de secours.

Ses yeux s’ouvrirent et elle tourna la poignée de la porte. Elle avait laissé la clé en évidence sur une des tables de nuit et ne verrouilla pas la porte. Après tout, ce genre d’attitude pouvait se montrer royal. Elle se faufila discrètement dans le couloir, veillant à ne croiser personne. Puis, guidée par les bornes d’évacuation de l’hôtel en cas d’incendie – incendie qu’elle aurait même pu provoquer pour lui faciliter la tâche – elle atteignit l’escalier de service. Combien d’étage la séparaient du sol ? Elle n’en avait aucune idée mais entreprit la descente. Pour plus de discrétion, elle ôta ses propres chaussures et, dans un léger bruit causé par le mouvement du tissu de sa robe, elle se précipita vers le rez-de-chaussée.

Arrivée à bon port, elle réenfila ses chaussures à talons. Puis, elle se posa une question toute bête : Et maintenant ? Quels choix s’offraient à elle. Ou plutôt, combien de sorties en omettant la principale possédait l’hôtel ? Elle n’eut pas beaucoup à réfléchir. Une porte coupe feu qui donnait certainement sur l’extérieur se trouvait devant elle. Elle allait l’ouvrir mais fut stoppée net dans son élan par une nouvelle pensée. La veille, elle avait dû pénétrer dans un périmètre de sécurité tenu par des gorilles pour pouvoir entrer dans l’hôtel. Quel était le pourcentage de chance que la porte était actuellement surveillée ? Alice serra les dents.

« Et merde… »

Elle n’avait plus vraiment le choix : à part la sortie principale, elle ne pourrait pas sortir avec tranquillité. Sauf si elle utilisait les grands moyens. Aux grands maux, les grands remèdes comme on dit. Et rien ne lui garantissait de trouver quelqu'un derrière cette porte. Aussi, elle préféra poser la boite sur les marches et, après une profonde inspiration, l'ouvrit. Personne. Elle passa la tête à droite et à gauche et ne vit rien. Son cœur battant à tout rompre fit des bonds satisfaits. Elle récupéra la boîte et sortit dans la ruelle. Elle marchait d'un pas vif. Rien de très discret. Mais elle était désireuse de quitter ce lieu le plus rapidement possible. Elle allait sortir de la ruelle, soulagée, lorsqu'elle manqua de se cogner contre un gorille.

Dans le genre primate bien musclé… C'était une espèce de compét'. En tout cas, il fut au moins autant surpris qu'elle. Oui, le seul passage théorique pour se retrouver dans cette ruelle était la rue principale… Et vu qu'il ne l'avait pas quitté des yeux, il avait du mal à comprendre ce qu'elle pouvait faire là, cette gamine. Aussi, ce fut le plus rapide qui réagit en premier. Et étant donné que c'était plutôt le boulot du gorille, il attrapa Alice par les épaules, la serrant fermement. La douleur fit réagir la jeune fille qui poussa un léger cri.

"Mais… t'es qui toi ? Qu'est ce que tu fous là ?"

La jeune fille lui lança un regard mauvais avant de plonger ses yeux dans le regard étonné du garde. Et hop, en route pour un voyage cyber-spatial dans la mémoire d'un primate. Elle effaça alors les événements récents du môssieur-le-pas-gentil et les remplaça par un autre souvenir qui se trouvait dans la tête de celui-ci, c'est-à-dire, un retour au travail en toute tranquillité, sans la moindre rencontre anormale telle que celle d'une jolie blonde en tenue de soirée. Puis, Alice rompit le contact et se dégagea les épaules. Puis, sans regarder derrière elle, elle se dirigea dans la rue. Elle la traversa d'un pas pressé et accéléra l'allure pour prendre une rue perpendiculaire. Quand, enfin, elle se sentit en sécurité, elle s'autorisa une petite pause pour reprendre sons souffle. Pus, elle se retourna et regarda l'hôtel. Elle fit ses adieux à celui-ci et à tout ce qui s'y rattachait. Elle fit ses adieux à la richesse, à la journée qu'elle avait passée, à Anya et à Chris. Elle redevenait Alice… Et cela lui avait pas mal manqué… Elle entra dans un bar tabac après avoir calculé l'argent qu'elle avait sur elle. Puis, elle se dirigea vers le comptoir.

"Un paquet de Malboro, s'il vous plait…"

» Comme au bout d'une chaine [Phobos]
» Alice Roger