Quand on a sommeil et qu'on ne dort pas (Max. Fray)

Invité

Il faisait noir, il faisait frais. À cette heure de la soirée, les gens reviennent de leur sortie, ils sont parfois saoûls ou inconscients. Souvent inconscients. Ils ne se rendent pas compte de ce qu'ils font, ce qu'ils devraient faire, de ce qui ne faut pas faire. Ces gens-là sont rares durant le jour, c'est pourquoi je préfère rôder le jour. Il y a un coin de la ville où les chaînes de nouvelles et de journaux disposent leurs locaux. J'y passe une fois de temps en temps. Non pas pour entrer dans les bâtiments, mais pour les escalader. Il me suffit de penser à une chose que je déteste qui provoque en moi une émotion négative et hop, je deviens un lézard. Du haut de ces bâtiments, je regardais la vue, je regardais ces fourmis au travail. Ce qui est difficile en escaladant ces bâtiments, c'est qu'ils ont de nombreuses vitres. Et bien sûr, pas à ce que je sache, je n'ai pas la faculté d'une araignée à me tenir partout. Quand j'escalade, je détruit le matériel avec mes griffes. Tant que les gens ne regardent pas au-dessus de leur tête pour inspecter l'état du bâtiment, ils ne peuvent pas savoir que j'ai passé par-là... à moins de regarder par les fenêtres du coin pendant qu'ils travaillent.

Avec cette nuit fraîche, je me suis essayée à entrer au refuge pour les gens sans domicile fixe comme moi. Là, ils nous donnent à manger, ils nous logent et nous permettent de nous laver comme convenu. Comme à toutes les nuits, cette nuit-là, il était plein, plus aucune place disponible. Je me permis donc de marcher pour me réchauffer du mieux que je pouvais. Sans manteau ni bottes, j'espérais au moins trouver un baril bouillant de feu réconfortant libre. Alors que je marchais dans cette rue bondée d'itinérants, je pus trouver une place près d'un homme âgé de la quarantaine. Il était seul et peut-être qu'un peu de compagnie ne lui ferait pas de tord. Debout en face de lui, je ne voyais que ce que le feu procurait comme éclairage. Je pouvais voir son visage encrassé. Je n'aimais définitivement pas l'expression sur celui-ci qui semblait obsédé par ma poitrine. Je poussai un soupir et quittais les lieux. L'homme protestait, je faisais la sourde oreille me disant qu'un jour quelque chose d'extraordinaire m'arrivera et je n'aurai plus à vivre avec des gens de la sorte. Même habillée, ces alcooliques dépravés trouvaient un moyen de me mater.

Un dernier endroit s'offrait donc à moi en souriant. Non pas les terrasses des habitations, mais bien le territoire de l'église. Je montais donc ces marches froides et dures pour me rendre aux portes qui contenaient une énorme quantité de chaleur et qui me permettrait de survivre durant la nuit. Les mains sur les poignées, je tirai un bon coup, me faisant arrêter sèchement par le verrou. Je poussai un soupir bruyant et frappai pour qu'on m'ouvre, mais rien. Le dos contre une des deux portes glissa lentement pour me faire accroupir avec désespoir. Les yeux élevés vers les astres, je réfléchissais de nouveau à une solution...

Melinda Kuvotchiva. Il avait reçu un dossier sur cette personne. SDF, sans emploi, on l'avait repéré à plusieurs reprise en train de changer de forme et d'escalader des buildings pour le plaisir. Pour le plaisir certes, mais ce n'était pas forcément une enfant de choeur, il avait le sentiment qu'il en faudrait peu pour la pousser à bout et la faire tuer pour une boite de ravioli périmé et ouverte. Il pouvait lui proposer infiniment plus et la sortir de la rue si jamais elle acceptait le marché. Ce quartier était mal famé et il se sentait bien mieux avec son pistolet dans un holster sous son manteau et un plus petit dans sa poche, aucune envie de laisser un de ces pestiféré approcher. La moitié avait soit une pneumonie soit la tuberculose, l'autre moitié était soit ivre soit drogué. Et le tiers restant était à peu prés normal. Certes, deux moitiés et un tiers, ça faisait quatre tiers, comme la recette du picon-citron-curacao de grand papa Marius: Tu mets d'abord un tiers de curaçao. Fais attention : un tout petit tiers. Bon. Maintenant, un tiers de citron. Un peu plus gros. Bon. Ensuite, un BON tiers de Picon. Regarde la couleur. Regarde comme c'est joli. Et à la fin, un GRAND tiers d'eau. Voilà. Tout dépend bien sur de la grosseur des tiers, Marius était très en avance sur son temps et l'arithmétique dans un repère à quatre dimensions voila tout.

Il faisait noir et partout autour, on pouvait voir des déshérités tenter de se réchauffer autour de bidon plein de kerdan enflammé, sous des cartons ou dans un empilement de couvertures avec juste un nez et de la vapeur en sortaient. La vie n'avait pas fait des cadeaux à ces braves gens qui avaient peut être à une époque eu une chance avec une famille aimante, une enfance avant de tomber dans le gouffre sans pouvoir en sortir et à partir de la, sans tomber dans l'allégorie de la caverne, ils ne reverront plus jamais le monde réel que sous la forme d'une ombre lointaine provenant de leur dos et même en se retournant pour trouver la lumière, l'ombre les suivra.
Au centre d'accueil, on lui indiqua que la personne qu'il recherchait était passée plus tôt mais était repartie. Autant continuer à chercher.

Chemin faisant, il se dirigea vers l'église, un peu par hasard et appelé par le souvenir de sa dernière visite dans ce genre d'endroit, pas franchement lointaine, mais au final il n'avait pas tellement prié. Le Seigneur ne devait pas être faché de sa dernière tuerie vu que se fut ici qu'il rencontra son objectif.

Melinda Kuvotchiva

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Pratiquement plongée dans une inquiétude infinie sur ma situation, je me demandais bien ce que les gens pouvaient trouver de bonifiant de prier un Dieu. Pourtant, il est évident que la situation de ce monde s'en va en dégradant. Les gens ont de plus en plus peur, sont de plus en plus agressifs et méchants. Ils n'en peuvent plus. Pour les autres qui ne veulent pas confronter ces malheurs réels, ils se contentent de prier une entité dont on n'a jamais vu la silhouette depuis le début des temps. C'est bien à se demander si le livre sacré n'a pas été crée de toutes pièces par l'humain lui-même. Pourquoi au fil du temps, on a ajouté le «nouveau testament»? La bible était-elle réellement incomplète? Ou bien c'était pour nous faire présager une apocalypse de l'humanité? Peu importe ce qui en est, je ne suis pas rendue assez désespérée pour croire en quelque chose qui n'existe pas. J'ai beau être naïve, mais pour ce genre de chose, je demande une preuve que je puisse voir avec mes propres yeux!

Le dos contre une plaque froide, je cherchais un réconfort, une chaleur avec laquelle je pourrais passer la nuit. Grelottant de tous mes membres, le froid ne faisait que m'envahir et faire fuir le peu de chaleur qui me restait encore. Je voyais plusieurs silhouettes sombres passer leur chemin. Je me disais que j'allais me servir de leur passage pour compter mes moutons. Je voyais des gens seuls, des couples et des bandes d'amis traverser. Il semblerait qu'une ombre devant une porte éclairée d'église n'intéresse plus personne. De moins en moins de gens vont à l'église et de plus en plus en ignorent l'existence.

Alors que j'étais sur le point de fermer l'oeil, je vis une silhouette se détacher de cette redondance et s'approcher. Cet inconnu à la voix masculine m'appelait par mon nom. Je me relevai lentement sur mes deux jambes, l'épiant d'où j'étais, le regard rempli de haine et de mépris. Je me posais un millier de questions sur cette personne. Je vis qu'il avait un espèce de dossier en mains et qu'il n'était pas là pour me demander quelques sous. Les poings serrés, je sentais mon instinct qui me criait de lui sauter à la gorge et d'en finir. Je tremblais quelque peu, contrôlant autant bien que mal les émotions qui me traversaient les nerfs.

Qui êtes-vous? Que me voulez-vous? Vous êtes de la police c'est ça? Comment savez-vous mon nom?

J'étais en train de me demander si c'était un de mes anciens amis, Shadow, qui m'aurait dénoncé. Après la poursuite des polices à notre égard, nous nous étions réfugiés dans une ruelle pour nous reposer et puis, plus rien. Je m'étais réveillée seule, sans trace de mon ami. Les yeux paniqués qui scrutaient rapidement les alentours, je sentais l'animal qui voulait parler... Je le retenais juste assez suffisamment pour entendre la réponse de l'individu qui avait besoin d'une bonne excuse pour s'en sortir...

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