[Fini]Rencontre sous le soleil. [PV : Andrew Mc Phee]

Quelques jours s’étaient écoulés depuis mon arrivée à l’institut. Je m’étais plus ou moins familiarisée avec les lieux et étais pourtant restée à l’écart des autres. Était-ce la peur qui me retenait ainsi, me bridant à la solitude ? Je ne pouvais pas trop l’expliquer. Je découvrais littéralement ce monde comme je ne l’avais encore jamais fait. J’avais pourtant pris l’habitude de gambader un peu dans les couloirs du bâtiment, cherchant les chemins les plus courts menant aux endroits clés et ceux qui étaient le moins fréquentés. C’était d’ailleurs la raison pour laquelle je n’étais pratiquement jamais dans ma chambre. Elle me donnait le cafard et ce, depuis que j’avais découvert que certaines personnes avaient le talent de grimper aux murs pour y entrer par effraction. A dire vrai, j’aimais beaucoup sortir à l’extérieur du bâtiment pour aller prendre l’air et le soleil qui brillait aujourd’hui ne pouvait que me donner envie de m’allonger dans l’herbe et de profiter de l’instant présent.

J’étais donc sortie tranquillement de l’institut, vêtue d’un short en Jean, d’un débardeur vert et de Tennis basses. Ayant pris soin de mettre mon MP3 sur mes oreilles et mes lunettes de soleil sur mon nez, je m’éloigner de quelques mètres du sentier principal que l’on traversait obligatoirement lorsque l’on rentrait dans l’institut. Je m’assis alors délicatement dans l’herbe et observai les alentours. Cet endroit me permettait de conserver une sérénité appréciable. Plus je le fréquentai, mieux j’arrivai à maîtriser mes émotions qui avaient, jusque là, été le plus grand trouble qui déclenchait mes pouvoirs de façon incontrôlée. Chaque bouffée d’air pure me détendait un peu plus. Mon esprit focalisé sur ma musique, je m’évadai et repensai à chaque minute de ma vie ici depuis mon arrivée. La rencontre des professeurs Hopes et Haller m’avait délivrée. Puis, celle de Kurkaru qui m’avait laissée pensive. Ces gens étaient comme moi. Tous un peu plus différents les uns que les autres mais tous classés dans la même catégorie, celle des mutants qui était bien trop souvent associée à celle des méchants. Cependant, je m’étais rendue compte que ces gens étaient ceux qui me comprendraient le plus et ceux vers qui je devais définitivement me tourner. Pourrais-je réellement retourner parler à un humain normal sans ressentir une émotion vive à son égard ?

Je réfléchissais activement là-dessus lorsque je me rendis compte que quelqu’un marchait sur le sentier. Cette silhouette inconnue venait de l’entrée et se dirigeait vers le bâtiment. Je retirai mes lunettes de soleil pour avoir une meilleure vue d'ensemble. L'arrivant n’était pas encore assez proche de moi pour que je puisse voir réellement cette personne mais je pus remarquer qu’elle n’était pas richement vêtue et qu’elle ne portait qu’un sac à dos. Lorsqu’elle fut assez près pour que je puisse discerner ses traits, je remarquai alors que j’avais affaire à un jeune homme. Il ne paraissait pas beaucoup plus âgé que moi, 5 ans, tout au plus. Alors qu’il avançait sur le sentier, je l’observai minutieusement tout en essayant de rester la plus discrète possible, chose qui ne fut pas aisée. Dévisager les gens avec discrétion demande en effet un certain tact que je n’avais pas encore acquis. Au bout d’un certain temps, mon regard croisa le sien. Sombre, dur et froid face au mien qui se voulait curieux, amical et plaisantin. Je m’empressai de quitter cette vision, me reportant sur le reste du corps de ce jeune homme. Ses cheveux noirs corbeau encerclaient un visage magnifique. A vrai dire, je fus plus stupéfaite par la beauté de cet étranger que par l’allure qu’il se donnait.

Je m’enfonçai de plus en plus dans cette inspection lorsque je m’aperçus qu’il avait quitté le sentier pour venir à ma rencontre. Un sursaut me fit sauter sur mes pieds. Qui était-il ? Que me voulait-il ? Était-il un mutant ? Une chose était claire dans ma tête : le stress qu’il venait de déclencher en moi était assez violent pour que je puisse me défendre sans trop de problème s’il venait avec de mauvaises intentions. Cependant, il n’en fut rien. Son sombre regard se posa sur moi et il semblait vouloir prendre la parole mais comme il ne se décidai pas, je pris cette initiative.

- Euh… Bonjour ! Est-ce que je peux t’être utile ?

Sa voix me marqua. Elle semblait distante et tellement présente à la fois. Froide et chaleureuse. Dure et douce. Bref, un paradoxe mystérieux à elle entière et parfaitement à l'image de son propriétaire. Il prononça ses mots lentement et parfaitement. Sur le coup, je ne sus plus vraiment si je devais écouter leur sens ou bien le son si étrange de cette voix.

Il s'appelait donc Andrew. Il était nouveau. Mon sens de la compréhension semblait légérement bouleversé et je ne sus dire pourquoi. J'eus l'envie violente de me frapper la tête mais je parvins à m'en empêcher, sachant que cela ne ferait que me plonger dans une humeur maussade et ingérable qui risquerait de me faire faire des choses que je ne souhaitait pas.

Je sentis le rouge me monter au joue lorsqu'il me fit remarquer qu'il avait bien vu que je le fixai. Cela n'était pas méchant. Non. Juste une simple remarque qui semblait l'amuser. Je m'en étonnai car, au vu de son apparence, je lui aurais attribué un certain succès auprès de la gente féminine. Mais les apparences sont parfois bien trompeuses. Toujours est-il qu'il me demanda si je pourrais l'aider à prendre ses marques ici. Etant moi même récemment arrivée, je ne sus que répondre et pendant que je réfléchissais, mes yeux se portèrent de nouveau au visage de mon interlocuteur qui admirait les environs. Je pus ainsi remarquer la légère coupure qu'il portait. Quel passé d'autres mutants tels que moi pouvaient avoir ? Je ne cherchais pas à poser plus de question et me contentai de lui sourire.

- Eh bien ! bienvenue à toi alors ! Je m'appelle Enora ! En ce qui me concerne, je suis ici depuis seulement quelques jours... Donc, je ne serais pas en mesure de prétendre être la plus qualifiée pour t'aider à prendre tes marques ici mais... On pourra s'entraider !

J'élargis légérement mon sourire pour qu'il comprenne que je ne balançai pas ces paroles pour faire bonne figure. A vraid dire, il était rare que je dise des choses que je ne respectai pas à l'avenir... Sauf peut être lorsque je buvais un peu trop mais cela n'arrivait pas souvent. En repensant à ma position d'élève dans cette école, je me demandais si le jeune homme avait déjà rencontré quelqu'un de plus qualifié que moi.

- Euh... Quelqu'un de l'institut est au courant de ton arrivée ?

J'eus l'impression que le jeune homme commençait à se relacher un peu et à s'ouvrir un peu plus à moi. Mais ce n'était peut être qu'une simple impression. Toujours est-il qui répondit à mes questions, flattant ainsi ma curiosité. Cependant, cela ne dura que quelques instans car, à peine un mot prononcé par sa voix si mystérieuse qu'une nouvelle question me sautait aux yeux. Quand il aborda le fait qu'il avait déjà rencontré le professeur Hopes, je souris, mes yeux étincelèrent et le moulin à parole que j'étais repris son mouvement.

- C'est vrai ? Tu as déjà rencontré Daniel ? Il est très gentil ! Enfin, avec moi. Je crois qu'il m'apprécie parce que je suis française comme lui ! Oui, moi j'ai voyagé au dessus de l'océan Atlantique pour venir jusqu'ici, j'avais jamais voyagé autant de toute ma vie ! Et j'arrive ici pour rencontrer un autre français ! Dingue ! Si je m'étais attendue à ça. Et... euh... Tu viens d'où toi ?

Et voilà ! Je m'étais encore attardée sur mon nombril pendant un dixième de seconde. Une gène m'envahit de peur d'avoir effrayé ce jeune homme dont le visage ne transmettait aucune émotion. Il aurait été joueur de poker, ses adversaires auraient été forcés de se coucher au bout de 30 secondes de peur de se faire plumer.

Finallement, Andrew me parla de nouveau et me fit part, lui aussi, qu'une aide mutuelle pour une arrivée était une bonne idée. Je repris alors mon sourire habituel et fixa son regard sombre. Je n'avais jamais parlé autant que cela à quelqu'un depuis mon arrivée ici. Enfin, ormis avec Daniel et David. Je n'avais pas réellement cherché à créer des liens avec les gens vivants ici et pourtant, après cette rencontre, je savais que mon but premier serait de savoir qui vivait dans la même maison que moi.

- Bah, en ce qui concerne cette aide mutuelle, ça me va ! Marché conclu ! Je t'aiderais et tu m'aideras si l'un de nous à un problème !

Je lui tendis la main pour qu'il la serre comme pour valider cet accord.

Enora rejoignit bien rapidement Andrew et ils marchaient maintenant côte à côte. Quelques regards se portèrent sur eux, plus que d'ordinaire selon le jeune homme, comme s'ils attiraient l'attention. Peut-être les nouveaux étaient-ils vite repérés ici. Pourtant Andrew aurait cru le contraire vu le nombre d'individus présents à l'Institut. Que tous se connaissent semblait peu probable, dès lors il était tout aussi peu probable qu'on sache qu'un nouveau l'était à sa simple vue.
Ou alors, peut-être était-il en ce moment même en train de changer d'apparence ? Vérifiant aussitôt et discrètement son état, il fut rassuré de voir que ce ne semblait pas être le cas. Tant mieux, il était encore un peu trop tôt pour se montrer sous sa véritable forme. Pour le moment, il avait prévu tout autre chose : reprendre sa forme naturelle dans sa chambre à l'abri des regards et se montrer sous forme humaine le reste du temps, juste le temps de se faire une place à l'Institut. Ensuite seulement il commencerait à se montrer en public sous son vrai visage. Il ne craignait pas vraiment le regard des autres. En fait, il y était déjà plutôt habitué avant même d'être un mutant par sa particularité "sociale" si l'on peut dire. Il préférait juste éviter d'éventuels ennuis pour le moment et se faire le plus discret possible donc.

Enora entreprit alors de lui répondre, l'interrompant dans ses pensées. De toute façon il n'y avait rien de plus à observer. Peut-être même se faisait-il tout simplement un film. A trop craindre d'attirer l'attention on a l'impression que c'est le cas alors qu'il n'y a rien. Que la jeune fille lui fasse penser à autre chose n'était pas plus mal. Quoi que bientôt, la discussion ne tournerait pas à son avantage...
Pour l'instant, elle lui annonça juste qu'il fallait s'attendre à tout ici. La surprise n'était pas chose courante chez Andrew et il ne s'interrogeait pas plus que cela sur ce qu'il verrait ici. Certes, il était tout de même curieux de voir ce que chacun pourrait faire, sans compter que certaines situations seraient probablement très insolites avec les capacités de tous. Mais à dire vrai, ceci ne l'inquiétait pas. Au contraire, au milieu de gens comme lui il serait plus facile de passer inaperçu. C'était donc plutôt une situation qui lui plaisait.

Elle lui parla ensuite du respect. Là aussi, rien qui puisse inquiéter le jeune homme. Il avait pour principe de toujours se montrer respectueux aux premiers abords, et de rendre ensuite ce qu'on pouvait lui donner. Généralement tant qu'on ne lui manquait pas de respect, tout se passait donc bien. Même quand on lui en manquait légèrement ça passait encore, on indifférence prenant le pas sur son ego. Il n'y avait que quand ça pouvait vraiment aller trop loin qu'il pouvait se montrer moins "amical". C'était donc plutôt rare, et si le respect était relativement présent ici ça n'aurait que très peu de chance d'arriver.
Elle en vint enfin à ce qu'il l'intéressait presque le plus actuellement : sa chambre. Ils allaient voir s'il y en avait une qui l'attendait. Parfait ! Elle lui précisa en même temps que le fonctionnement de l'Institut était similaire à celui d'une école normale. Rien de bien surprenant non plus, cela paraissait normal. Enfin dans la limite de ce qui était normal ici bien sûr, il y avait sûrement quelques petites règles propres à leurs conditions respectives tout de même. Si tel était le cas, on ne l'avait pas encore informé. Mais d'un autre côté, celles-ci lui semblaient évidentes et tombaient sous le sens. Qu'on les lui précise ne serait pas vraiment utile à son goût. De toute façon vu ses propres capacités, il ne voyait pas vraiment comment il pourrait en abuser ou nuire à quelqu'un, du moins pour le moment. C'est qu'il n'avait jamais vraiment réfléchi encore à comment se servir de ses pouvoirs en fait...

Finalement, ce que redoutait le plus Andrew et qu'il aurait vraiment voulu éviter d'aborder arriva : Enora lui demanda ce dont il était capable. C'était à prévoir, il savait y échapper difficilement. Mais il espérait en revanche un peu plus de temps avant qu'on ne le lui demande, pas que ça se fasse à peine arrivé.
Que répondre maintenant ? Sens mentir mais sans trop en révéler...

"Et bien on ne peut pas dire que je sois capable de grand chose pour le moment. Disons que je suis doué pour imiter."

Il avait légèrement insisté sur le "doué", comme s'il n'en pensait pas un mot et trouvait cela amusant de considérer ceci comme un talent. Enfin qu'importe, il était là pour que ça change de toute façon, il n'était pas pessimiste on plus, juste légèrement sceptique.
N'ayant rien de plus à ajouter pour le moment le concernant, en ayant déjà dit assez à son goût, il se contenta de retourner la question à Enora. Bavarde comme elle était, elle aurait certainement plein de choses à lui dire. Et avec un peu de chance, elle n'insisterait pas sur ses pouvoirs à lui. De toute manière, elle le saurait bien assez tôt, c'était certain...

"C'est assez vague pour le moment je dois t'avouer. Ce qui n'était pas vraiment faux d'ailleurs, il ne savait même pas encore s'il pouvait imiter à la perfection quelqu'un. Jusqu'à maintenant il avait juste pris son ancien physique et celui d'un inconnu qui n'existait peut-être même pas. Et toi alors, qu'est-ce que tu sais faire ? Pourquoi tu es ici ?"

Trop tard ! La question était posée et Andrew le regrettait déjà. Il avait en toute innocence ajouté sa dernière question sur les raisons de sa présence ici en liaison avec son ou ses pouvoirs, puisque c'était probablement lié. En revanche, il venait de réaliser seulement après l'avoir posée que ça pouvait inclure des raisons plus personnelles au-delà des pouvoirs et qu'Enora risquait de lui retourner la question. Qu'on lui retourne la question... c'était l'une des raisons pour lesquelles il évitait de poser trop de questions indiscrètes généralement. Or pour le moment, Andrew n'était pas très enclin non plus à donner les raisons de sa présence à l'Institut, lui qui aimait tellement l'indépendance et la solitude.

Je tentai de suivre l'allure imposée par Andrew. De part sa taille et ce que je pensais être une envie pressante de découvrir les lieux, ses enjambées étaient bien plus grandes que les miennes et je devais reconnaitre que j'avais du mal à suivre. Mais je restai près de lui, coutant ses réponses tout en me questionnant sur l'empressement qu'il avait à rejoindre l'institut. Cependant, je préférai me dire qu'il avait simplement hâte de découvrir le bâtiment où il allait vivre ses prochains jours, mois ou années et de savoir qu'un lit l'attendait.

La réponse qu'il me donna sur ses pouvoirs me permis de constater qu'en plus d'être d'une distance impénétrable, il aimait laisser planer une part de mystère sur lui-même, le rendant à la fois plus effrayant et intéressant. Il prétendait ne pas être doué pour grand-chose mais j’étais persuadée du contraire. S’il était là, c’est qu’il possédait un don impressionnant, pas un simple talent pour la musique ou la peinture. Il ajouta par la suite que ce qu’il savait faire consister à « imiter ». Je restai un peu perplexe. De quelle façon pouvait-on imiter ? Un mime est un bon cas de l’imitation mais je ne voyais pas vraiment en quoi cela faisait de lui un mutant. Peut-être était-il capable de répéter les mêmes gestes que les autres… Ou bien d’imiter les pouvoirs des autres mutants… Je restai un moment plongée dans ces pensées, laissant la place au silence. Nous n’entendions plus que le crissement des graviers sous nos pas. La distance par rapport à l’institut, bien qu’impressionnante, paraissait déjà moins insurmontable.

Andrew ajouta par la suite que son propre pouvoir était encore assez vague pour lui-même. Ainsi, j’en déduis qu’il n’en connaissait ni les limites, ni le fonctionnement, ce qui nous plaçait dans la même catégorie : celle des novices. Je souris, heureuse d’avoir rencontré quelqu’un de ma situation. Puis, il me retourna ma propre question, me demandant également pourquoi j’étais venue ici. Posant mon regard sur le chemin devant moi, je lui répondis d’un ton assez détaché.

" D’après ce que j’ai pu voir, je suis capable d’envoyer des champs de force. Des sphères argentées qui peuvent expulser des ennemis ou quiconque m’énerverait un peu trop à quelques mètres. Je sais aussi faire apparaitre un bouclier argenté. Pour l’instant, je ne sais pas trop à quoi il sert, mais ça peut être pratique. Quant à ma présence ici… Elle vient du fait que je ne me contrôle pas. Mes pouvoirs se manifestent à leur guise, en suivant mes humeurs ce qui fait de moi quelqu’un de dangereux. La dernière fois que je m’en suis servie, j’ai envoyé un camarade de classe dans un mur… "

Je me tus de nouveau, me repassant inlassablement cette scène qui avait fait basculer ma vie. Si rien de tout cela n’était arrivé, ça ne serait pas moi actuellement qui accueillerais ce jeune homme. Je serais simplement restée en France et j’aurais préparé la suite de mes études comme les autres jeunes gens de mon âge. Et surtout, je n’aurais jamais quitté les gens qui m’entouraient et je n’aurais jamais rencontré ceux qui m’avaient été présentés ici. Je poussai un léger soupir, ne sachant plus trop quelle partie de moi écouter.

Cela me fit presque oublier la présence du jeune homme. Je m’apprêtai à lui retourner la question, curieuse de savoir les raisons qui l’avait amené ici. Avait-il également subit une démonstration de la sorte ? Pour ma part, j’avais été effrayée par mes pouvoirs et totalement désorientée. Cependant, la façon dont il restait distant me fit hésiter. J’avais remarqué qu’il n’appréciait pas trop parler de lui. Quiconque aurait été avec nous l’aurait remarqué aussi, qu’importe sa couleur de cheveux. Je cherchai alors à continuer la discussion mais en suivant une autre voie.

" Si tu veux, après que nous t’ayons trouvé une chambre, je pourrais te faire visiter les parties du bâtiment que je connais… Tu verras, c’est un vrai labyrinthe ! "

Enora commença par lui répondre concernant son pouvoir. D'après ses dires, elle était capable de générer des champs de force envoyant valser quiconque s'y frotterait. Ce qui semblait déjà bien plus offensif que son pouvoir à lui. Elle, elle pouvait être dangereuse comparé à lui. D'ailleurs, le fait qu'elle ne contrôle pas totalement son pouvoir selon ses propres propos n'était pas très rassurant non plus. Cela voulait donc dire qu'à n'importe quel moment, elle pouvait lui envoyer l'un de ses champs de force en plein dessus sans crier garde et sans le vouloir ! Il valait donc mieux éviter de l'énerver si ça se manifestait principalement lors de ce genre d'occasions. Enfin avec Andrew, il y avait peu de chance que ça arrive. Oh quoi que, parfois son indifférence pouvait en énerver plus d'un, il devait bien l'avouer...
Si tout le monde était comme elle ici, ça risquait d'être souvent un "carnage" non ? Andrew se demandait s'il était nécessaire d'être tout le temps sur ses gardes au risque de prendre un mauvais coup ou s'il y avait tout de même suffisamment d'ordre malgré cette éventuelle profusion de mutants sans expérience ou avec très peu. Enfin au moins, il ne venait pas ajouter aux dangers potentiels de mutants dangereux de l'Institut. Avec lui, un manque de contrôle de ses pouvoirs aurait pour seule conséquence de le ridiculiser aux yeux des autres, mais rien de bien gênant pour les individus autour de lui.

Enora avait un second pouvoir qui consistait à créer un bouclier. Elle ne paraissait pas en savoir beaucoup dessus, mais ça ne pouvait qu'être un atout à n'en pas douter. Quoi que comme pour son pouvoir de métamorphose, cela risquait peut-être d'être voyant. Alors si ça ne se déclenchait pas seulement lorsqu'on le souhait, ça pouvait être quelque peu gênant pour elle aussi...
Finalement, elle lui fit part de la raison de sa présence ici, comme il l'avait malencontreusement demandé à la fin. La raison était relativement similaire à la sienne : un manque de contrôle de ses pouvoirs qu'elle pensait possible de maîtriser ici avec le temps. A la différence près que l'humeur d'Andrew n'intervenait pas vraiment dans son cas, étant de nature assez indifférente en permanence. Il se demandait d'ailleurs ce qui faisait qu'il se transforme parfois sans le vouloir... A moins qu'il n'ait des sentiments qu'il se serait toujours nié ? Peu probable, mais aucune hypothèse n'était à écarter pour le moment vu la situation particulière dans laquelle il se trouvait depuis peu.

S'étant brusquement tu sans lui poser de questions, Andrew jeta un bref coup d'oeil à Enora. Il n'était pas normal qu'elle s'arrête ainsi, généralement les gens continuaient toujours la discussion avant de se taire, ils ne se contentaient pas de répondre aux questions. Du moins pas les gens comme cette jeune fille.
Elle semblait se perdre un peu dans ses pensées. Sûrement ce qu'elle venait de lui dire lui avait rappelé quelques souvenirs, bons ou mauvais Andrew n'aurait su le dire. Il y avait probablement un peu des deux. Si elle venait de France, elle devait se sentir un peu seule ici où elle ne connaissait personne. Mais en contrepartie, elle s'était découvert des pouvoirs qu'elle devait sûrement apprécier. Il y avait donc sûrement du bon comme du mauvais dans les souvenirs de cette fille. Inutile de continuer de les lui ressasser donc, il n'était pas là pour la blesser ou la rendre trop nostalgique.

Lorsqu'elle revint avec lui, elle continua de parler mais ne lui posa pas de questions, et surtout pas la question à laquelle il s'attendait pourtant. Etrange... Elle avait peut-être remarqué qu'il n'était pas très bavard sur lui. Enfin qui ne s'en apercevait jamais d'un autre côté ? En revanche, tous n'avaient pas la décence de ne pas lui poser plus de questions indiscrètes. Elle semblait-il, si. Et bien tant mieux, quelque part ça l'arrangeait bien !
A la place, elle se contenta donc de lui proposer une petite visite guidée après qu'ils aient trouvé sa chambre, l'Institut étant plutôt vaste à ce qu'il paraît. Là encore, cette proposition l'arrangeait plutôt puisqu'il en aurait sûrement fait la demande par la suite. Au moins il n'aurait pas à le faire, sachant qu'il détestait devoir demander quelque chose à quelqu'un. Qu'on le lui propose ainsi était donc parfait.

"C'est donc si grand que cela ? Et bien ce serait avec plaisir alors. je risquerais bien de m'y perdre tout seul sinon."

Après quelques secondes de réflexion, Andrew continua, jugeant qu'il pouvait poser quelques questions sur la jeune femme sans que cela ne la dérange puisqu'elle semblait ouverte. Il espérait juste que si cela l'ennuyait elle l'en informerait.

"Ton pouvoir est plutôt pratique pour te défendre. On ne doit pas venir te chercher à deux fois sans y réfléchir. Andrew doutait qu'on apprécie être jeté contre les murs. Quoi qu'un sadomasochiste peut-être...
Et alors ? Bien que tu sois là depuis peu, est-ce que tu peux déjà dire que l'Institut t'ait aidé d'une quelconque façon ? Arrives-tu à mieux te contrôler, à mieux cerner et comprendre tes pouvoirs ?
Comment sommes-nous entourés d'ailleurs ici ?"

A défaut d'en demander plus sur le passé de la jeune femme, Andrew trouva bon d'en demander plus sur son présent ici et ainsi par la même occasion se renseigner un peu plus sur cet établissement où il allait maintenant vivre quelques temps et surtout, du moins l'espérait-il, y apprendre sur ses pouvoirs.

Un sourire revint peu à peu illuminer mon visage. Sans le savoir, Andrew parvenait à me remonter le moral d’une façon que j’ignorai encore. Peut-être que la distance qu’il installait avec les gens m’amusait finalement, moi qui en était l’extrême opposé. J’avais peut être un peu exagéré en prétendant que l’institut était grand mais il représentait un véritable dédale de couloirs qui pouvait piéger facilement les nouveaux arrivés. Je resongeai alors à ma ballade derrière David pour atteindre la cuisine puis à l’explication détaillée qu’il m’avait donné pour rejoindre ma chambre. Sans cela, j’aurais tourné en rond pendant des heures avant de trouver l’endroit recherché. Il me semblait donc nécessaire d’avoir un bon guide la première fois que l’on s’aventure dans un couloir de l’institut. Non pas que j’avais la prétention d’être ce bon guide, mais j’avais pris quelques marques depuis mon arrivée, ce qui serait bien suffisant.

Le jeune homme me parla ensuite de mon pouvoir. Il me fit remarquer que ce genre de pouvoir pouvait éviter un certain nombre d’ennuis que d’autre pourraient me causer. Je me contentai de hausser brièvement les épaules, espérant pour ma part ne jamais avoir besoin de m’en servir pour mon usage personnel. Puis, il souleva une cascade de questions toutes centrées sur les progrès que nous pouvons faire avec nos pouvoirs ainsi que la manière dont on nous apprenait à les contrôler. N’ayant pas énormément d’éléments de réponse, je répondis rapidement.

"Eh bien, comme tu l’as dit toi même, je ne suis pas là depuis suffisamment longtemps pour avoir eu le droit à un quelconque cours de maîtrise, bien que celui-ci ne soit en partie programmé. Pendant ces cours, on est pris d’abord en individuel avec un professeur qui nous met à l’épreuve et qui essaie de voir ce dont nous sommes capable, je crois. Le but qui nous est donné et d’apprendre à se contrôler pour pouvoir, par la suite, avoir le choix entre retourner vivre dans le monde comme quelqu’un de normal ou bien de rester ici pour enseigner à notre tour. Après, j’espère qu’il y a des cours collectifs. Ca doit être intéressant de voir comment certains pouvoirs peuvent être compatibles…"

Je repris mon souffle, réfléchissant à plus de détails que je pourrais lui donner. Cependant, il est vrai qu’hormis ce qu’avait pu me souffler David en cuisine le jour de mon arrivée, je ne voyais pas grand-chose à ajouter. J’espérais que cette réponse suffirait à Andrew pour le moment. De toute façon, il risquait de découvrir prochainement et par lui-même tout cela, je ne me faisais pas trop de soucis quant à son avenir dans l’institut. S’il restait continuellement discret, il ne rencontrerait pas de soucis majeurs. Cependant, sans trop savoir pourquoi, j’avais envie de le rassurer.

"Tu sais, la plupart des gens d’ici ne pose des questions que s’ils voient que nous avons un problème. Tu peux donc demander de l’aide à n’importe qui, je pense que tu en recevras. D’ailleurs, si tu as d’autres questions qui te viennent à l’esprit, j’essaierais d’y répondre du mieux que je peux… "

J’accompagnai cette dernière tirade d’un sourire franc. L’institut n’était plus très loin et nos pas ne tarderaient à nous transporter à l’intérieur du bâtiment où les autres élèves allaient nous observer avec curiosité.

Des cours individuels ? Parfait ! Il était préférable selon Andrew d'évoluer seul plutôt qu'avec des autres. Déjà parce que cela évitait de trop en montrer sur soi aux autres. Ensuite parce que ça permettait également de progresser plus rapidement plutôt que de devoir attendre tout le monde. Et puis il pourrait aller à son rythme ainsi, sans avoir attendre les plus lents mais sans non plus devoir se précipiter pour suivre les plus rapides. Le seul léger soucis finalement restait d'être le seul centre d'attention du professeur concerné pendant ce laps de temps que durait le "cours". Mais bon, c'était un "mal" pour un bien, Andrew n'allait pas s'en plaindre non plus. Puis c'était loin d'être la fin du monde.
Le professeur tenait alors de savoir de quoi chacun était capable. Ca, Andrew avait déjà une petite idée le concernant, il cherchait plus à maîtriser ceci plutôt qu'à savoir quelles étaient toutes ses capacités. Quoi qu'il se découvrirait peut-être de nouvelles aptitudes. Et peut-être aussi que celles-ci seraient tout aussi incontrôlables que celles qu'il savait déjà posséder... Mauvaise idée donc, autant se contenter de ce qu'il connaissait déjà avant d'aller explorer de nouvelles voies. Enfin, il verrait tout ceci en temps et en heure. Ce n'était pas Enora qui allait l'aider sur ce point.
Quant au choix que lui précisa par la suite la jeune femme, il était vite fait pour lui. En effet, il se voyait très mal enseigner à son tour. Il était probablement trop "asocial" pour ceci. Et trop incompétent également, il ne savait presque rien du monde mutant encore. Quoi que ceci changerait sûrement avec le temps. Enfin ça ne l'empêcherait pas de partir une fois qu'il se contrôlerait, ou en tous cas il n'enseignerait jamais, ça il en était certain.

Par contre, la dernière précision d'Enora lui plut moins : il y avait peut-être des cours collectifs aussi ? Tous les avantages des cours individuels deviendraient alors leurs opposés, soit des inconvénients pour Andrew. A dire vrai il n'y voyait même aucun atout, ceux d'Enora n'en étaient pas pour lui. Pour deux raisons : pour le moment, il préférait ne pas trop étaler son pouvoir à tous vu la maîtrise qu'il en avait ; et lorsqu'il en aurait un meilleurs contrôle, il ne doutait pas qu'il lui servirait plus à être furtif qu'autre chose. Là aussi s'exécuter devant tous n'était donc pas forcément le plus intéressant... Enfin encore une fois, il n'en était pas encore là pour le moment, loin de là même.

Manifestement, la jeune femme n'avait pas grand chose de plus à lui révéler. D'un autre côté elle n'était pas là depuis très longtemps elle non plus. Et puis elle lui en avait déjà dit suffisamment aussi.
Elle trouva tout de même bon de lui préciser de ne pas hésiter s'il avait d'autres questions (ce qui serait fort probable très prochainement). Elle ajouta également que les gens d'ici ne posaient des questions que s'ils voyaient qu'on en avait besoin. Ca c'était plutôt positif pour Andrew. Discret comme il était, il devrait donc pouvoir être relativement tranquille. Quant au fait qu'il aille demander de l'aide à d'autres, cela restait très improbable et rare. Quoi qu'un peu moins ces derniers temps, c'était vrai. Mais ce serait sûrement à des professeurs ou autres responsables qu'il en demanderait s'il en avait besoin, pas aux élèves eux-mêmes.

Enora s'exprimait avec un sourire bienveillant qui se voulait plutôt sincère. Andrew n'en doutait d'ailleurs pas, ce qu'il avait vu de la jeune femme jusqu'à maintenant tendait à lui prouver que c'était parfaitement dans sa nature d'être agréable et gentille sans que ce soit par hypocrisie. Enfin bien entendu, il ne faisait pas aussi rapidement confiance et ne se fiait jamais totalement aux premières impressions. Après tout, on savait tous que les débuts d'une nouvelle rencontre se voulaient toujours accueillants, chacun faisant des efforts. Ce n'est que plus tard, lorsque chacun redevenait naturel, que les vrais visages apparaissaient généralement. Alors seulement on pouvait réellement juger quelqu'un et savoir à quoi s'en tenir.

"Ok, merci."

Le merci était bref, mais sincère tout de même. Bon certes, il ne s'accompagnait pas tout à fait du même sourire que celui de son interlocutrice, mais un petit tout de même, c'était déjà ça.
Finalement, ils arrivèrent aux portes de l'Institut en lui-même. Sans plus tarder, Andrew ouvra les portes et... les maintint ainsi pour laisser entrer Enora. Bah oui, vous croyiez quoi ? Il était peut-être un peu asocial, mais il lui restait des principes dont celui d'être galant.

"Je crois que la visite peut commencer. Je te suis à partir de maintenant alors, je m'en remets totalement entre tes mains. Si je me perds, tu en seras donc responsable !"

C'était une blague bien sûr, bien que ceux ne connaissant pas suffisamment Andrew pouvaient ne pas s'en apercevoir. C'est-à-dire tout le monde donc.
Il fallait dire aussi qu'il disait ceci comme il parlait de n'importe quoi d'autre. Aucun changement de ton, aucun signe trahissant une quelconque plaisanterie. Il pourrait parler le plus sérieusement du monde qu'il n'y aurait aucune différence. Seul son petit sourire en coin, légèrement malicieux, pouvait trahir l'ironie pour quiconque serait assez observateur ou habitué à Andrew.

[Suite dans l'Institut ]