Fringale nocturne

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Lucas était arrivé à l’institue depuis bien peu de temps. En effet, le professeur l’avait convaincu de rejoindre les élèves de son école il n’y avait une semaine à peine, il ne connaissait donc pas très bien les lieux… Il avait cependant su repérer la cuisine assez rapidement, étant gourmand de nature. Ce soir là, alors qu’il n’arrivait pas à dormir, le jeune adulte décida de se rendre dans sa pièce préférée pour soulager les cris de son estomac.

• Mmmh, a qui peut bien être cette pointe de tarte ? Ho tampis, elle est pour moi ! •

Lucas engloutit donc la pointe de tarte à la vitesse de la lumière. Ayant soif, il saisit la pinque de lait. Il venait d’apporter celle-ci à sa bouche quand il cru apercevoir quelqu’un à l’entrée de la cuisine… Misère, boire directement à la pinque n’était sans doute pas très bien vu…

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Lauri ne dormait plus depuis l'attaque du bar où il avait rencontré Sunshine. Son père était mort et il n'avait aucune nouvelles de son frère. S'il ne pleurait pas, c'était juste parce que ses colocataires étaient là et qu'il ne voulait pas les ennuyer avec ça. Il discutait avec entrain avec eux quand ils étaient éveillés, dissimulant son chagrin derrière un masque de bonne humeur, mais une fois qu'ils dormaient, Mortis versait des larmes aussi silencieuses que possible. Il avait reçu un appel de la police de Lakewood lui annonçant le décès de son père et, quand il avait demandé où était son frère, on lui avait répondu qu'il avait disparu.

Ne parvenant pas à s'endormir, il s'habilla rapidement, sortit silencieusement de la chambre et se mit à arpenter les couloirs, sans vraiment savoir où il voulait aller.

*Où es-tu, Arto, bon sang ?! Je n'ai plus que toi !*

Tout à ses sombres pensées, il parvint aux cuisines. Bah, peut-être qu'il trouverait un pot de crème glacée sur lequel se venger. Il ne fit même pas attention au jeune homme déjà présent et se dirigea automatiquement vers le frigo. Il espérait aussi y trouver quelque boisson alcoolisée. Non, il ne fallait pas rêver, non plus.

Bon, va pour un soda ! Ah salut ! dit-il en voyant le mutant.

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Lucas avait fait un sursaut en voyant quelqu’un entrer alors qu’il buvait du lait directement à la pinque. Le jeune homme semblait cependant préoccupé, étant donné qu’il ne s’était même pas rendu compte du méfait du jeune mutant… Il choisit donc de se présenter.

« Salut l’ami ! Je ne crois pas qu’on se connaisse… Je suis Lucas, et toi ? »

Lucas ne connaissait pas beaucoup de personnes à l’institue, comme il venait à peine d’arriver. Une connaissance de plus était particulièrement souhaitable. Le jeune mutant réouvra donc la porte du refrigerateur, en sortit une canette de soda et la lance à Lauri.

« Tiens, ton soda »

Lucas remit la pinque de lait en place, et se pris également un soda. Il se dirigea vers un quelconque banc pour s’asseoir.

Spoiler:

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Lauri avait les yeux cernés par le manque de sommeil et les nombreux sanglots. Le jour, il le dissimulait sous son maquillage, mais là, il faisait réellement peur à voir. Et ce fait était rendorcé par son oeil noir.
Il ne répondit pas tout de suite à son interlocuteur, car son corps réclamait, à défaut de sommeil, du sucre et/ou de la caféine. Mais à voir comme il était parti, ça risquait d'être l'un ET l'autre. S'il passait encore une nuit blanche, ce serait à la petite cuillère qu'il faudrait le ramasser.

Merci. J'm'appelle Lauri Hakala. Mais certaines personnes m'appellent Reaper ou Mortis. Appelle-moi comme tu veux, donc.

À un stade aussi avancé de fatigue physique et psychologique, il parlait avec un fort accent finlandais, mais ce qu'il disait restait compréhensible. Il prit le soda que lui tendait Lucas, l'ouvrit et but une gorgée. Il se sentit presque revivre, rien de tel qu'une bonne boisson gazeuse bien fraîche pour se réveiller. Le Nordique alla s'asseoir en face de son interlocuteur. Il n'avait absolument rien contre un peu de compagnie.

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Lucas observa Lauri avec attention. Il n’était pas rare de voir des gens veiller tard à l’institue, la plupart des élèves et des instituteurs étant des adultes libres de leurs actions. Ce dernier, cependant, semblait cumuler les journées de veille, étant donné les cernes évidents autour de ses yeux. Après un court silence, Lauri se présenta.

« Enchanté, Lauri… Reaper et Mortis, c’est en rapport avec tes capacités ? Quel est ton pouvoir, dis moi ? Je suis quelqu’un d’assez curieux… »

Lucas posa ses questions, puis se concentra à nouveau sur le visage de son interlocuteur. Il semblait vraiment mal au point. L’état de son visage, de ses yeux surtout… De plus, la voix qu’il employait semblait faible et enrouée…

« Dis, Reaper, est-ce que ça va ? »

Lucas commençait déjà à s’inquiéter pour une personne qu’il venait tout juste de rencontrer. Décidément, il était vraiment trop empathique.

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Eh voilà, c'était donc à Scott de se coller aux rondes nocturnes, cette nuit. Sa tâche était de veiller à ce que les jeunes ne flânent pas trop dans le manoir, mais surtout de veiller à la sécurité de l'Institut.

Il ne se faisait pas trop d'illusions; ce n'était pas tous les mutants qui dormaient à cette heure-ci, et il devait faire la part des choses. Il était vital que les jeunes se sentent chez eux, mais ils devaient apprendre à respecter l'autorité et observer les règlements.

Puis il entendit des bruits venant de la cuisine. Il s'approcha tout doucement, juste au cas où quelque chose ne tournait pas rond. Puis risqua un coup d'oeil et vit que c'était deux élèves d'âge assez mûr, presque le sien, qui prenaient une petite collation. Il pénétra donc le seuil de la cuisine. Il fit signe de baisser le ton de voix d'une main et mis son index de l'autre main sur sa bouche.

- Bonsoir... S'il-vous-plaît, faites moins de bruit, certains ont du mal à dormir.

Il s'approcha d'eux, l'air détendu.

- Est-ce que vous allez bien? Avez-vous du mal à dormir?

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Lauri bâilla un coup. Trois jours et trois nuits sans dormir, à pleurer uniquement quand les autres ne pouvaient pas le voir, c'était éprouvant. Ses défenses émotionnelles en patissaient énormément, il le savait. Et il savait également qu'il risquait de craquer à tout moment. Un mot, un seul en rapport avec son frère ou son père et il ne pourrait plus retenir ses larmes.

Mes pouvoirs sont liés au Monde des Morts. Quand je touche une personne qui a de grandes chances de mourir dans les trois jours, je vois sa mort. Et je peux drainer l'énergie du monde des Morts, ce que j'appelle l'énergie mortuaire, et la renvoyer vers quelqu'un. Je peux aussi la condenser dans ma main et m'en faire une arme. Rien de bien joyeux, quoi.
Et toi ? Quels sont tes pouvoirs ?

Il allait répondre à la deuxième question de son interlocuteur quand ils entendirent tous deux la porte s'ouvrir. Le Finlandais se tourna dans la direction du nouveau venu. Ce dernier était un des professeurs, bien qu'il ne le connaisse pas plus que ça. Apparemment, ils parlaient trop fort. Reaper fit un petit signe de la main pour signifier qu'il était désolé.

Est-ce qu'au bout de trois nuits de complète insomnie, on peut dire qu'on a du mal à dormir ? demanda-t-il sur le ton ironique qu'il utilisait quand il était vraiment très fatigué.

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Lucas regardait Lauri de façon compatissante, celui-ci semblait tellement mal au point… Il ne savait cependant pas encore la raison de ses problèmes, et ne souhaitait pas le précipiter, après tout, il ne le connaissait pas vraiment… S’il avait voulu tout savoir, Lucas n’aurait eut qu’à poser sa main sur lui, ça aurait été d’une telle facilité…

• La curiosité est le pire de tes vices, Lucas

Il écouta ensuite Lauri parler de son pouvoir. Lucas trouvait ce pouvoir vraiment étrange… L’énergie mortuaire ? Il n’en avait vraiment jamais entendu parler… Et pouvoir voir la mort de quelqu’un, n’était-ce pas plutôt une malédiction ? Ces visions devaient vraiment être horribles, comment Reaper arrivait-il à les supporter ?

« Hé bien, tu as un pouvoir très particulier dis donc... Ça ne doit être qu’une capacité très rare chez les mutants, étant donné que je n’ai jamais entendu parler de l’énergie dont tu parles… J’aimerais bien en savoir plus, quand tu auras le temps de m’en parler…! »

Lucas aperçut ensuite Scott sur le bord de la porte. C’était un instructeur, il l’avait déjà vu donner des leçons à une équipe d’apprentis. Il n’avait cependant jamais eut l’occasion de lui parler. Il fit également signe qu’il avait compris le message, suivi d’un autre signe de la main indiquant simplement qu’il allait terminer son explication.

« Pour répondre à ta question, Lauri, je suis métamorphe. Je peux prendre la forme d’un homme ou d’une femme de mon choix, tant que j’ai déjà vu cette personne à la télévision ou que je l’ai croisé dans une rue. Mon pouvoir n’est pas suffisamment puissant pour que je prenne la forme de personnages fictifs… Je peux aussi prendre la forme d’un animal de taille moyenne, comme un chien ! »

Lucas ne parla volontairement pas de son pouvoir sur les pulsions. Quand les gens apprenaient que ce dernier avait le pouvoir de faire dire à quelqu’un tout ce qu’il voulait entendre, ils avaient souvent tendance à avoir peur… Il se retourna finalement vers Cyclope, puis Lauri, et termina :

« Généralement non, je n’ai pas de problème de sommeil… Mais mon métabolisme est différent de celui des mutants et humains normaux, comme mon corps change de forme continuellement, donc je me suis reposé dans la journée et je paye le prix maintenant… Je te plains, Mortis, l’insomnie ne doit pas être facile à vivre… On dit que c’est souvent en lien avec un grand stress ou des éléments bouleversants. »

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Apparament, il avait surpris une conversation assez profonde. Il semblerait que Lauri soit pouvoir assez lourd à porter, et qu'en plus, il souffrait d'insomnie. Un peu d'aide ne lui ferait pas de mal et il semblait être là pour en avoir de besoin. Il dit à Lucas, une fois qu'il eut terminé:

- Je vois, il semble que ton cycle soit débalancé. Avec le temps, tu apprendras à rattrapper le contrôle sur ton rythme de vie, dépendemment si tu souhaites vivre de nuit ou de jour. L'important soit que ce soit toi qui soit en contrôle.

Mais il semble nettement que ce soit Mortis qui avait un problème ici. Scott s'avança tranquillement et pris poliment place à la table, après s'être assuré qu'il était le bienvenue. S'il semblait relativement bien accueilli par les deux jeunes, qui semblaient finalement au seuil de la vingtaine, donc un peu plus jeunes que lui, il continua:

- Tu sais, dans cet institut, on peut trouver des histoires des plus traumatisantes. La découverte de notre corps à l'aube de l'adolescence est signe anonciateur que nous sommes différents et en ces temps sombres, condamné à vivre en marge de la société des... (cherchant ses mots)... autres.

Il marqua une pause cherchant le regard et l'attention de Mortis.

- Je veux que tu saches que tu es libre ou non de partager ce que tu as sur le coeur, ce que tu as vécu, car c'est ta vie et nous respectons cela. Prends-moi, par exemple. Je présume que tu as du entendre ce qu'on dit sur mes yeux. Si jamais je retire ces lunettes, d'un simple regard je pourrais commettre l'irréparable. Ainsi, celle que j'aime est condamnée à ne jamais pouvoir voir mes yeux. Et je suis coincé avec ce truc sur le nez peut-être à jamais. Mais j'ai développé des astuces pour faire avec. Ainsi, j'ai un peu de mal à complètement dissimuler mon pouvoir. Sans l'aide du Professeur, j'aurais peut-être des morts sur la conscience à ce jour.

Il marqua une seconde pause, examinant la réaction du jeune, puis continua:

- On a tous nos secrets. Tu es ici pour apprendre à controler ce que tu as en toi et pouvoir avoir la chance de vivre la vie que tu choisis d'avoir. Et si tu es prêt à en parler, je tiens vraiment à ce que tu saches qu'il y a tout plein de gens ici à qui tu peux te confier et qui sont prêts à t'aider, à commencer par le Professeur. Pour moi, le fait que les élèves se sentent en paix avec eux-même est une priorité.

Il attendit la réponse de Lauri.

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Lauri devait lutter contre les larmes qui lui montaient aux yeux. Ses mains étaient crispées sur sa cannette de soda. Déjà que la dernière phrase de Lucas avait commencé à détruire le peu de défense psychologique que l'insomnie avait bien voulu épargner., les paroles de Scotts firent couler une goutte traîtresse sur la joue du jeune mutant. Ce dernier s'empressa de l'essuyer, en espérant que personne ne l'ait vu. Il n'aimait pas pleurer devant les gens, surtout devant des personnes qu'il connaissait à peine. Mais, une fois que la vanne était ouverte, ça lui était très difficile d'arrêter l'eau. Il arriva à ne pas éclater en sanglots, mais ce fut ardu.

Moi, les autres peuvent voir mes yeux. C'est d'ailleurs ce qui m'a valu de nombreuses moqueries ou injures. Mais, le fait de voir la mort imminente de certaines personnes en les touchant, ça peut aussi être très pénible. J'ai peur chaque fois que je tends la main vers quelqu'un pour le saluer. Et quand j'ai une vision d'une mort inévitable, parce que j'ai eu cette prémonition trop tard ou qu'on ne peux rien faire pour éviter ce décès, j'ai l'impression de mourir un peu, moi aussi.
J'ai vu deux fois ma mère mourir, à une fraction de seconde d'intervalle, il y a deux ans. Ce jour-là, ça a été la première fois que je ne pouvais empêcher une tragédie d'arriver. Après ça, j'ai eu des insomnies pendant en tout cas une semaine. Je pense que je voulais mourir, tant j'étais mal. N'eût été mon frère, je ne sais pas si je m'en serais sorti.
J'allais bien mieux, jusqu'à il y a quelques jours. Mon père et mon frère s'étaient installés à Lakewood, dans le New-Jersey, après mon entrée à l'Institut. Mais des mutants ont attaqué un bar dans lequel mon père était... ils... ils l'ont... tu...tué... lui et un policier...

Il ne put continuer, sa gorge était eaucoup trop serrée. Il but une longue gorgée de soda, luttant durement contre les sanglots qui menaçaient de s'échapper. Les larmes coulaient à flot sur son visage et il tremblait un peu.

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Pauvre petit gars, se dit Scott. Il écouta avec la plus grande attention le récit de Lauri. Bon sang, il ne pouvait pas aller dire la vérité afin de sauver ses prochains, on l'aurait pris pour un fou ou pire... on l'aurait pris pour un mutant. Il était trop jeune pour un tel fardeau!

Vers la fin de la réponse de Lauri, les traits de Scott se durcirent, il se sentait en colère que de telles choses arrivent à ce gosse. Sans compter qu'il affirmait avoir été victime d'harcèlement psychologique. Scott était sur le point de lui serrer l'épaule en signe de compassion, mais se retint. Il devait respecter la bulle de Lauri, pour l'instant... et s'il fallait qu'une prémonition s'empare de lui, ça aurait agravé la situation.

Ce qui rageait d'autant plus Scott, c'était que la psychologie n'était pas le domaine dans lequel il était le plus calé; si au moins sa douce moitié serait là... elle saurait les mots. Mais Scott avait le devoir de s'occuper de ses élèves en-dehors des missions et entraînements. Lorsque c'était eux qui avaient besoin d'aide.

- Ne retiens pas tes larmes, on est comme une seconde famille pour toi, tu n'as rien à cacher. Je ne savais pas que c'était grave à ce point. Tu es fort d'avoir pu lutter jusqu'à ce jour. À compter d'aujourd'hui, tu ne seras plus jamais seul. Mais je ne puis m'empêcher de te dire qu'en ce que l'on pourrait considérer un fardeau, tu détiens la clé d'un grand espoir. Grâce à toi, des secouristes pourraient éviter tant de morts, des meurtres pourraient être évités... accompagné par une équipe spécialement formée, tu pourrais sauver des tas et des tas de vies. Crois-moi, le destin te réserve de grandes choses. Ne te décourage pas. Tu es fort.

Il le laissa souffler un peu puis reprit, avec un peu plus de respect:

- Je suis désolé pour tes parents... j'ai perdu les miens lorsque j'avais sept ans, ils ont disparu dans un accident d'avion. Je comprends un peu ce que tu ressens. Rien ne les remplacera. Mais saches que tu es entre bonnes mains, ici, si ça peut aider un peu.

Il le laissa reprendre et lui donna le temps de répondre.

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