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| L'expérience et l'innocence (PV : Requiem) | |
| | Auteur | Message |
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Invité Invité
| Sujet: L'expérience et l'innocence (PV : Requiem) Sam 13 Juin 2009 - 18:39 | |
| Second jour, aux alentours de 10h25
La veille avait été particulièrement remplie d'amitié poussée, de sentiments profonds, de découverte de la ville. Pourtant, cela n'égalait pas les évènements de la nuit. Pour la première fois de ma vie, j'avais fait un rêve bien fort, chargé de sentiments tous plus puissants et intenses les uns que les autres. Certes il m'était déjà arrivé plusieurs fois de rêver de Lore, mais jamais cela n'avait pris une telle envergure. C'était presque comme si elle était dotée de sa propre conscience alors qu'elle venait de mon rêve. C'était très bizarre. Il y avait certaines choses que j'aurais inventées sur elle alors que jamais je ne les aurais suspectées. Mais bon, cela devait être dû à la journée d'hier que j'ai passée en majorité avec elle. Cela a certainement eu pour conséquence d'occuper les moindres parcelles de mon esprit au point que j'ai fini par en rêver. Enfin je ne regrettai pas ce rêve, mais il y avait certaines choses dont je souhaitais en parler avec elle, or elle dormait bien profondément car malgré le bruit que j'ai pu faire, rien ne sut la réveiller. C'est pourquoi je suis sorti faire un tour ce jour-là, dans le parc pour me retrouver au calme et faire quelque chose que je n'avais pas fait depuis… depuis l'irréparable décès d'Éloïse… Finalement, cette journée ainsi que la nuit suivante n'avaient fait qu'accroître plus encore mon affection pour elle, si bien que désormais une seule question me trottait en tête : Quelle était précisément la valeur de mon affection ? Je ne savais pas si elle allait encore prendre une importance toujours plus grande pour moi, mais je pouvais émettre une hypothèse quant à mon attachement prochain, et presque assurément je finirai par l'aimer… Après tout, ce ne serait pas la première fois que cela m'est arrivé, et bien souvent cela avait mis bien moins de temps. Mais je pense que la faute incombait à cette tragique perte. Toutefois, sa présence auprès de moi cette dernière année m'aidait chaque jour à surmonter cette douleur, peut-être plus inconsciemment, par le simple fait que je la voyais forte et qu'à côté de ça je paraissais faible. Mais c'était principalement sa gentillesse qui me touchait le plus, sa douceur et sa bonté également. Je ne dis pas qu'elle s'occupait de moi comme l'aurait fait une mère à son enfant, mais c'était une situation qui s'en approchait.
Ainsi mes déambulations m'avaient conduit dans le parc de New-York, car j'allais y trouver quelque inspiration pour écrire, bien que de manière générale l'inspiration n'était pas le problème majeure qui tourmentait mon esprit, mais plutôt la volonté d'écrire qui me faisait défaut, plus exactement l'assiduité dans l'écriture sans être distrait par quoi que ce soit. Il y avait de nombreuses personnes dans cette lande de verdure, furent-elles seules ou en groupe, célibataires ou en couple, avec ou sans enfants. Je marchais un peu le long de cette peuplade, évitant quelque peu de me trouver trop près pour ne pas être imbriqué dans un groupe quel qu'il soit car ce dont j'avais besoin était une certaine solitude, afin de laisser exploser mon imagination et également mon talent, en tout cas c'était ainsi que Lore avait qualifié mes travaux. Je finis par trouver un banc en bois ancré au sol devant une table vide, et je m'y installai. Je sortis mon ordinateur de sa sacoche et le posait sur table, certes déçu d'user un tel matériel impropre à une bonne vue mais je n'avais que ça, je faisais avec ce que j'avais. Tout matériel électronique était toujours plus pratique qu'un amas de feuilles avant de trouver la forme finale à un travail écrit. Or souvent je reviens sur ce que j'ai écrit, plaçant une virgule ci ou là, changeant un mot ou une expression par autre qui chose qui sonne mieux à mon esprit. Or cela ferait brouillon sur papier, et qui plus est mon écriture n'est pas ce qu'il y a de plus joli à regarder. Je commençai donc à composer, et voici ce que j'obtins après une petite quarantaine de minutes :
Le trésor sans la clé
Telle une phrase qui sans cesse nous échappe, Si proche mais si loin, qu'elle n'est qu'à bout de bras, Comme un son dans l'instant où il est prononcé, Si tôt saisissable et si tard trop éloigné.
A l'instar d'un rêve que l'on voudrait réel, Un songe, un signe, à l'image tellement belle, Ressemblant trait pour trait, au vampire mythique, Une utopie perpétuelle à l'ampleur biblique.
C'est pour toi, Ô grande âme, destinée de mon cœur, Magnificence, dulcinée, nymphe du Bonheur, Maîtresse de mon être, guide de mes pensées,
Puiss's-tu m'accorder la force de l'absolu, Permettre à mon âme de jeter son dévolu, Pour qu'à ton coffre au trésor, il en soit la clé.
Puis j'enregistrai tout ça et me préparais à partir lorsque mon regard se posa sur une personne qui ne se trouvait pas très loin de moi et semblait vouloir une table vide. D'ordinaire je n'en aurais pas fait attention à cela, mais là, cette personne avait un air qui ne m'était pas inconnu. Je ne pensais pas l'avoir rencontré quelque part, mais l'avoir vu ça c'était certain. Mais je n'arrivais pas encore à mettre un nom sur ce visage et encore moins à trouver j'avais bien pu voir ces traits-là. Toutefois lorsqu'il passa près de moi, je lui montrai mon ordinateur après avoir claqué des doigts pour attirer son attention : « Je vous cède ma place si vous le désirez. J'en ai terminé ici pour ma part. » |
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| Sujet: Re: L'expérience et l'innocence (PV : Requiem) Dim 14 Juin 2009 - 0:23 | |
| Depuis son retour aux Etats-Unis, et plus précisément à New-York City, Grégoire avait tenté de se reposer, mais cela lui était quasiment impossible. Lorsqu’il était en France, dans on château comtal de Foix, aucun journaliste ni aucun photographe ne pouvait venir l’embêter pour une interview quelconque ou prendre quelque cliché. Mais ici, c’était différent : les paparazzis se cachaient à tous les coins de rues, et il ne pouvait même pas prendre son repas en paix.
Il est vrai qu’au début de sa célébrité, en tant que chanteur d’opéra mondialement reconnu, il adorait cela : d’être le centre d’intérêt de ces vautours était, par certains côtés, très agréable. Puis les années avaient passé, et il s’était rendu compte de la véritable nature de ces charognards. Désormais, il voulait les éviter comme il pouvait : il n’y avait aussi pas intérêt à ce que ceux-là découvrent les rapports que Grégoire avait avec la Confrérie et les mutants tel que Magnéto ou Dents-de-Sabre.
Les plans qu’il leur destinait n’était pas encore assez clairs, et il aurait beaucoup à faire ici pour rattraper son absence. Mais le premier objectif était atteint, et cela le confortait. Cependant, les années pesaient quelque peu sur ses épaules, et sa jeunesse était partie depuis bien longtemps. Même si son esprit était encore affûté comme une lame de rasoir, que ses talents de chanteur étaient toujours à leur apogée et que son don de mutant évoluait encore et qu’il perfectionnait sa maîtrise de jour en jour, son corps charnel quant à lui, ne l’entendait pas de la même façon. Grégoire savait que peu à peu, il perdait de ses capacités physiques. Aussi, il était plus déterminé que jamais à mettre à jour ses plans, et à les exécuter.
Et pour ce faire, rien ne lui faisait de plus grand bien que ses ballades à Central Park. C’était bien un des seuls endroits et un des seuls moments où il pouvait espérer être tranquille, sans tous ces vautours assoiffés de ragots lui tournant autour. Il y a quelques années, un malchanceux journaliste avait eu le malheur de prendre une photo de lui alors qu’il se promenait dans le parc à la pleine lune. A la fois de la semaine, le journal qui avait publié le cliché en question se voyait contraint de mettre la clé sous la porte suite aux actions de Grégoire. Depuis lors, plus aucun journal ou magazine n’avait tenté de le surprendre pendant ses sorties nocturnes à Central Park.
Ce matin-là, Grégoire marchait paisiblement dans les allées du parc. Il entonnait quelques paroles de son chant préféré : l’Ave Maria de Schubert. Cette musique fut son premier chef d’œuvre sur scène, et il garderait à jamais le souvenir des orgues résonnantes et des applaudissements. Il sentait le poids des âges peser sur lui, et ses jambes étaient fatiguées. Il prit sa canne télescopique de la poche intérieure de son long manteau noir, et d’un geste vif, la fit se dérouler. Ramenant son borcalino plus en avant sur son crâne, et renvoyant sa cape en arrière, il continua d’avancer.
Après quelques minutes de marche, il arrive dans une sorte d’enclave au sein du parc, où plusieurs tables et bancs se présentaient à lui. Il y avait du monde ce matin, malgré la pâleur du soleil. Avançant de quelques pas, il remarque une table où seul un jeune homme était assis. Il allait s’asseoir lorsque ce-dernier intervint : « Je vous cède ma place si vous le désirez. J'en ai terminé ici pour ma part. »
Grégoire ne supportait guère, pour le moment, d’être considéré comme un vieil homme qui ne pouvait plus tenir sur ses jambes, même s’il utilisait une canne. Sa première réaction fut de répondre sèchement à cet individu : « Croyez-vous que je sois vieux au point de ne plus tenir sur mes jambes, jeune impertinent !! » La comte fit volte face, et allait s’en aller lorsqu’après quelques secondes de réflexion, il finit quand même par s’asseoir. « Restez, si vous le désirez… Ça n’a aucune importance… »
Grégoire soupira. Même après tant d’années, il ne pouvait s’empêcher de considérer chaque remarque qu’on lui faisait comme une attaque. Il est vrai l’âge n’arrange en rien ce genre de choses, mais la paranoïa, voire peut-être même la folie depuis quelques temps, étaient ses compagnes de toujours. Que voulez-vous ? Ce n’est pas maintenant qu’on le changera ! |
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| Sujet: Re: L'expérience et l'innocence (PV : Requiem) Lun 15 Juin 2009 - 12:12 | |
| La réponse de ce vieil homme me foudroya littéralement, tant je n'avais jamais imaginé qu'il eût pu me répondre ainsi après ma marque de politesse qu'on m'avait reprochée à de nombreuses reprises dans le bus – ou peu importe où je me trouvais – de ne pas montrer très souvent. Or j'étais silencieux avant même que ma voix ne disparut, ce n'était pas ce jour-là que cela pouvait changer. Or si là j'avais finalement cédé à mon naturel discret, il suffisait d'un vieillard pour m'en tenir rigueur ! Non mais vraiment ! On cherche à se montrer serviable et voilà comment on est remercié ! D'emblée cet homme, aussi âgé puisse-t-il être, ne m'inspirait pas grande amabilité, et suscitait en moi plutôt une certaine répulsion, malgré son visage qui n'arrêtait pas de harceler mes souvenirs. Pour sûr j'avais déjà vu ces traits fins quelque part mais je ne pouvais pas avoir la moindre révélation.
Quoi qu'il en soit, face à cette réponse la plus directe que j'avais jamais connue, je m'interrogeai plutôt sur qui de nous deux faisait preuve d'une plus grande effronterie. Cependant, quelques instants après, il m'invita à me rassoir, et j'étais plus hésitant quant à savoir si je devais accéder à sa requête ou non. Avais-je réellement envie de subir à nouveau le caractère impétueux de cet homme ou ne devais-je pas plutôt partir ? Car pour sûr sa voix grave traduisait une très grande force de persuasion, celui qui devait s'attirer ses colères aurait bien de la peine à demeurer de marbre face à un tel déchaînement. Or dans cette même décision ma curiosité me hantait toujours, et je n'aurais pas eu de cesse de savoir qui il était. Ce qui fit que finalement je repris place à table, fixant des yeux cette personne anonyme mais pas inconnue. Pourtant, je ne pouvais céder complètement la place dans ma tête à la curiosité, sinon quoi elle m'aurait fait « dire » n'importe quoi, et déjà que cette personne ne me portait pas particulièrement dans son cœur, je ne souhaitais pas non plus attiser sa colère, car c'est bien une des choses que je supportais le moins que de parvenir à avoir des personnes avec idées malsaines me courir après, même si pour être honnête ça n'aurait pas été la première fois que j'aurais manqué de me faire refaire le portrait, même si dans la quasi-totalité des cas la faute retombait essentiellement sur ce détestable pouvoir, qui faisait qu'en changeant la colère de quelqu'un à l'égard d'un autre celle-ci revint sur moi. Ce n'était pas la plus agréable des situations que d'avoir quelqu'un qui vous en voulait simplement parce que vous le regardiez, et je ne voulais pas que la même chose se produise mais cette fois-ci par ma simple stupidité plutôt que par le contre-effet de mon pouvoir.
Cependant une fois que j'étais installé en face de lui, je ne savais pas vraiment de quoi parler, et je ne savais même pas si je devais m'excuser de mon soi-disant affront, puisque quoi que je fasse je n'étais absolument pas convaincu de la réussite de mon entreprise, et je doutais totalement qu'il sût me pardonner pour ces paroles. Près d'une minute plus tard de silence uniquement perturbé par le piaillement des autres personnes qui se trouvaient dans le parc, je décidai tout de même de m'excuser, car pour moi il m'était plus aisé de m'excuser à l'aide de l'écriture que de vive voix, parce que sinon je parvenais difficilement à trouver mes mots, que ce soit dans une discussion à cœur ouvert ou lors d'une réponse à une question ou une affirmation spontanée. Qui plus est lorsque j'avais l'intention de répondre, les mots ne me venaient que plus tard, or la conversation avait déjà progressé ou avait même changé de sujet, si bien que mon avis ne fut jamais échangé, et à force c'est cela même qui m'avait conduit à mettre l'amitié de tout un chacun en doute, me questionnant toujours de l'intérêt réel des autres à mon égard, ou si je n'étais là que pour montrer qu'ils, mais surtout elles, avaient un ami de plus. C'est ainsi que je finis par écrire sur l'ordinateur : « Veuillez m'excuser de mon impertinence, mais la situation inverse m'est trop souvent arrivée pour que je ne montre pas de signe de politesse. Qui plus est, je doute que vous auriez apprécié que je parte au moment même où vous vous seriez assis ici sans une seule attention à votre égard, ce qui aurait été bien plus impoli de ma part. » À l'écriture de ces mots, j'avais pu sentir en moi une certaine colère m'emporter, et il fallut que je me continsse pour ne pas la laisser sortir. Puisque je n'étais pas dans la plus appréciable des positions, autant que je n'aggrave pas mon cas. Je lui laissai le temps de lire ce que j'avais composé et également un temps d'attente pour une réponse potentielle. Il ne fallait pas non plus que je me montre bavard alors même que la parole me faisait défaut, de toute manière je ne pouvais pas rivaliser avec l'envie de parler qui pouvait éventuellement le traverser. Les mots ne surpassaient pas encore la voix.
Cependant je ne savais pas trop comment allonger la discussion, je n'étais pas particulièrement bavard avec les gens que je connaissais pas, encore moins avec des personnes de sexe masculin, et même en présence d'une femme j'éprouvais bien du mal à communiquer avec une parfaite inconnue. Toutefois cela ne signifiait pas que mon cerveau fonctionnait au ralenti, bien que parfois je le suspectais, cependant j'avais constamment à l'esprit la question de savoir si ce dont je pouvais éventuellement parler intéressera mon interlocuteur ou non, afin de ne pas passer pour idiot en tentant de discuter sur un sujet sans intérêt. À l'inverse je ne pouvais pas non plus lancer un sujet sur la politique, tant ma connaissance de celle-ci était moindre et infructueuse, ou bien sur la question mutante car je n'avais pas dans l'intention de faire un faux pas et de révéler ma nature cachée, et méprisée. Je fixai l'écran de mon ordinateur, les mains prêtes à écrire quoi que ce soit, avec l'espoir que j'aurai fini par mettre la main sur l'idée qui se verra numérisée. Et c'est donc au terme de cette minute silencieuse qu'elle me vint, ainsi que la manière dont j'allais la formuler, ce qui avait été toutefois plus rapide. Je l'écrivis ainsi : « Dîtes-moi, votre voix est bien portante, indubitablement plus que ce que je pourrais faire même avec la plus grande volonté, quelle est votre entretien pour la conserver ainsi ? » Je me retins d'ajouter « après toutes ces années », sinon quoi j'aurais certainement connu un autre tonnerre de colère qui m'aurait valu de m'en vouloir énormément pour ces mots, ce qui aurait été regrettable, même si au fond de moi j'étais conscient d'avoir accompli ce pour quoi j'étais venu et que je pourrais très bien partir ainsi sans chercher à me faire pardonner. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: L'expérience et l'innocence (PV : Requiem) Mar 16 Juin 2009 - 23:46 | |
| Impertinent ? Assurément. Insolent ? Sans aucun doute. Le jeune homme en face de Grégoire partait d’un mauvais pied pour engager une quelconque conversation avec le Comte de Foix. Mais soit dit en passant, personne encore ne s’était engagé de la bonne façon avec lui, et ce, de tout temps. Hautain et dédaigneux vis-à-vis des êtres humains, que nous nommerons ici « fourmis à la prétention d’être quelque chose et à l’ego plus grand que leur bêtise encore » pour le plaisir du Comte, ce-dernier n’exprimait pas moins de répugnance à dire vrai, face à ces pairs mutants. En vérité, seul lui-même avait une quelconque valeur et ce faisant, il se considérait comme un dieu parmi tant d’abjections. Mais en l’instant étrange de cette situation, Grégoire n’exprimait bizarrement que du mépris face a son interlocuteur. Mépris, il va s’en dire, qui n’allait pas tarder à être matérialise en une cascade de cynisme et de remarques blessantes à l’attention du malheureux.
Mais était-ce le poids des âges ? Il y avait surement gorgone sous roche pour ce point-ci. Serait-ce alors le sentiment d’être perdu dans un monde qui est le sien, alors que l’on s’est efforcé de se construire les bases solides d’un empire s’étant alors envolé lorsque l’on désira un mouvement peut-être trop vif de la part de ses sujets ? Il ne se le serait jamais avoué, bien trop prétentieux et imbus de sa personne. Mais le fait était (malheureusement ?) que c’en était la raison. Grégoire n’eut pas la force de répondre, obligé d’accepter en son fort intérieur la défaite présente qui n’en était une que pour lui-même, puisque son adversaire du moment assis en face de lui n’avait pas la moindre idée de cette lutte incessante entre le Comte et son univers.
Le jeune homme tenta, tant bien que mal (plus bien que mal… plus mal que bien… c’est au goût de chacun), de se rattraper en engageant d’une manière malhabile la conversation. Et si jusque maintenant, Grégoire n’avait eu la force de répliquer et se contentait de soupirs que l’individu lambda de passage aurait vu comme la lassitude d’une vie trop longue s’éternisant sur la fin, pesant sur, voire oppressant même, les épaules déjà bien lourdes du poids des ans, le Comte ne put contourner, ignorer, oublier, la question du malheur qui au final, allait s’en prendre plein le gueule : “COMMENT ?!” [ Message IMPORTANT: âmes sensibles s’abstenir. En raison des événements choquants et de la violence de la scène qui suit, nous vous prions de bien vouloir faire sortir les enfants présents dans la salle. Nous déclinons toute responsabilité quant aux conséquences et dommages collatéraux que pourrait occasionner la suite de ce scénario. ] “Vous osez prétendre, pauvre ***CENSURE***, que vous ne me connaissais pas ?!? Que mon illustre nom vous est inconnu en entendant cette voix ?!? Espèce de ***CENSURE*** de ***CENSURE*** à la ***CENSURE*** !!” [ Message : En raison de contraintes de la part de nos producteurs, et du refus de nos acteurs à vouloir jouer le script initialement prévu, la scène de violence dont il est question dans le message précédent a été transcrite dans un langage convenable. A la suite de cela, plusieurs passages ont été passés sous censure, afin d’alléger et de rendre viable un tel texte. Merci de votre compréhension ; pour les amateurs de violence gratuite qui attendaient impatiemment ce passage, nous vous prions de bien vouloir nous excuser pour les faux espoirs que nous avons suscité chez vous. ] Et le Comte de conclure : “Imbécile de jeune !”
Il avait été rare dans la vie de Grégoire, qu’il en vienne jusque là ; cependant, c’était bien la première fois que la personne en face de lui ne le reconnaissait pas, et cela valait bien une scène digne des plus grandes colères divines. Une fois la tempête passée, les nuages sombres éloignés et la paisible bise revenue, le Comte conclut tout de même : “Grégoire de Foix. Chanteur d’opéra. Et vous êtes ?” A la grande surprise (de qui ?), la voix grave de Requiem était pausée et sereine, légèrement chantante et chaleureuse. Comme si cette crise passagère avait eu un effet cathartique sur lui, de telle sorte que plus rien dans ses réflexions ne lui soit contrariant ou de vienne troubler la quiétude de son psychisme. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: L'expérience et l'innocence (PV : Requiem) Mar 23 Juin 2009 - 22:34 | |
| Si j'avais pu me sentir consterné par la précédente réponse de ce vieillard, son emportement soudain m'avait totalement sidéré. Jamais ô grand jamais je n'avais pu imaginer – même dans mon imagination la plus débordante que j'eus pu connaître – que ce vieil homme au visage meurtri quelque peu par les années se serait ainsi énervé et m'aurait ainsi agressé de la façon la plus pitoyable qui m'eût été donné de voir, à savoir celle des êtres, humains certes, mais abjects que constituaient les jeunes d'aujourd'hui. Oui, si cet octogénaire présentait visiblement les strates des temps passés, il semblait nullement représenter la sagesse dont on dit des anciens qu'ils la possèdent. Non il faisait plutôt figure de ces vieux rabougris qui passent leur temps à se plaindre de tout, et qu'il fut connu ou non, sa nature fâcheuse ne laissait jamais passer la moindre impression de sympathie, ni n'en suscitait pas une seule once, et qui plus est je n'avais nullement l'intention de rester là à me faire insulter de la sorte, encaissant des noms plus blessants les uns que les autres. Cependant, quelque part au fond de moi, je me disais que j'avais pu le blesser, et que le fait que je ne fus absolument pas physionomiste dans l'âme soit en soi un problème que cet être, aussi vulgaire fut-il, tentait de résoudre, mais à sa manière. Oui, je me mis sérieusement en doute à ce moment-là, considérant les attaques personnelles de ce vieux débris comme un réel signe de sagesse mal utilisée, désobligeante et même carrément méchante, mais qui partaient d'un bon fond. Toutefois, cette idée-là partit très vite de mon esprit, car il semblait pleinement conscient et entièrement maître de son esprit, pas comme la plupart des personnes âgées qui étaient victimes de maladies ou dont le cerveau n'avait pas supporté le poids du temps qui chaque jour s'abat toujours un peu plus sur les épaules de tout un chacun. Oui j'en étais persuadé, il avait dit ces mots avec une conviction certaine, ce n'était pas sous le joug de la colère, aussi je n'avais plus rien à faire auprès de cet homme qui, je l'espérais, allait très vite voir l'immensité de l'au-delà. C'était regrettable et sans doute même honteux, mais je n'avais réellement que faire de son avenir. Et c'était bien à cause de mon manque de voix que je ne lui répondis pas : « Imbécile de vieux ».
Aussi je m'étais levé et avais commencé à partir, conscient que c'était à la fois ingrat et impoli mais aussi que cet ignoble individu avait pourtant mérité qu'on le traite de cette manière, lorsque bizarrement la voix de ce vieillard s'était encore calmée, et m'avait adressé la parole presque aussi paisiblement que l'eau qui coulait le long d'une rivière. Il était étrange cet homme, il représentait tant la colère du vécu que le calme de la sagesse… Aussi je m'installai de nouveau sur le banc mais prêt à tout moment à partir. Au moindre haussement de ton je partirais, et cette fois-ci pour ne jamais revenir, en tout cas pas dans l'immédiat. Je serais revenu sans doute le soir, ou le lendemain, ou même le surlendemain je n'en savais rien, mais je serais revenu tout de même, de gré ou de force. Toutefois, ce n'était pas le calme soudain de sa voix qui m'avait fait me rassoir sur ce banc dur et froid, ni même la notion de respect ou de politesse à l'égard des personnes âgées. Non, c'était plutôt ce que sa réponse contenait, car le nom qu'il avait prononcé, je le connaissais. Je le regardais fixement, et aussitôt des images m'apparurent, non pas comme par magie, mais tirées de mes souvenirs. Oui j'avais déjà vu cet homme comme je le disais, or je savais désormais où. Certes pas en vrai personnellement, mais j'avais déjà vu ces traits-ci sur des affiches, sur des couvertures de livres, et à la télévision. J'avais même lu un livre sur celui-ci, tout du moins je le croyais, mais je n'avais pas fait suffisamment attention à la couverture pour m'ancrer sa photo dans la tête. Oui je me souvenais à présent de cet être, encore un trop surestimé par le monde de l'édition de ce que je pus en juger moi-même, bien qu'il fut relaté que sa relation à l'égard des paparazzis n'était pas franchement une histoire d'amour, mais je n'avais pas l'air d'être de cette nuisible catégorie. Il avait, outre sa carrière sans précédent de chanteur d'opéra, un statut social très élevé, baron ou comte je ne savais plus exactement, il allait falloir que je cherche de moi-même, plus simple que de lui demander directement, à moins d'avoir des tendances suicidaires, et même si par certains égards on aurait pu le croire, j'aurais souhaité mettre un terme à ma vie de moi-même, sans l'aide de qui ce fut. Mais l'heure n'était pas au suicide, je devais avant tout surmonter l'obstacle que cet homme à lui seul représentait, et si je devais affirmer quelque chose sur-le-champ, c'est que ce n'était pas chose aisée.
Je fus tout de même intrigué qu'il finisse par me demander qui j'étais, comme si ma simple existence importait quelque part au fond de son esprit. Toutefois je me fis une raison, mon existence même ne représentait rien face à la sienne, et si je n'aimais pas particulièrement être traité comme une vile créature bonne à égaler le fumier, je devais bien reconnaître que socialement je ne lui arrivais pas à la cheville. Cependant je n'avais pas dans l'idée de le faire sentir, et encore moins de l'avouer, car même s'il devait s'en douter de par mes manières, je ne souhaitais pas lui offrir ce plaisir. Je tapai alors rapidement sur l'ordinateur : « Je me fais appeler Célar Defaurthune. Sans doute ne connaissez-vous pas ce nom, mais si je n'ai pas de profession fixe, je peux juste vous dire que je suis écrivain, même si je ne compte que deux ouvrages à ce jour, et encore pas dans des maisons d'édition des plus connues. » Je n'avais pas donné mon vrai nom, je n'en avais nullement besoin, et qui plus est cet homme était français d'origine, je ne voulais pas qu'il apprenne mon nom réel, car même si ça n'avait pas spécialement une importance capitale, je voulais mettre un terme à mon ancienne vie en quelque sorte, et je craignais qu'il eut un jour à faire avec mon père. |
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