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 Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]

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MessageSujet: Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]   Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle] Icon_minitimeMar 20 Juil 2010 - 22:26


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    Un nouveau réveil faisait tic-tac sur la table de nuit en bois blanc de la chambre d'Angie. La grande aiguille indiquait huit heures; sans lire le chiffre, chose qu'elle ne faisait jamais sans y être obligée, l'adolescente savait que l'on était en soirée. Elle était assise sur le rebord de son lit, tête tournée vers la fenêtre. Le crépuscule d'été était encore doux, un soleil clair lançait quelques rayons de plus en plus timides à l'herbe du parc. Un plateau-repas vide était posé à côté d'elle. La jeune fille avait déjà mangé, puis était repartie dans sa chambre aux murs immaculés, évitant ainsi une trop grande affluence de personnes. Elle n'était rentrée qu'une demi-journée plus tôt de son escapade à New York. Elle n'était pas prête à oublier sa rencontre avec le magicien Mü. Mais si l'étrange personnage la faisait encore réfléchir, elle avait décidé de passer à autre chose. Du moins jusqu'à ce qu'il lui indique le moment propice, ou que sa propre envie de le revoir dépasse les gardes-fous qu'elle s'était imposée.

    Une semaine déjà qu'elle avait rallié l'institut. Les jours lui paraissaient des éternités, chacun d'entre-eux était l'occasion de rencontrer des personnes sensationnelles. L'école était pleine de gens aux pouvoirs étranges, quelques-uns impressionnants, d'autres tout à fait déplaisants. Angie ne s'y sentait encore pas entièrement chez-elle, et ce pour une raison évidente. Si la plupart des adultes avaient été d'une bonté remarquable avec elle, elle ne s'était encore liée d'amitié avec personne de son âge. Pendant les premiers jours, elle avait même pensé qu'elle était de loin la plus jeune de l'école. Les adolescents n'étaient pas simples à débusquer auraient-on dit, les rares qu'elle avait vus étaient en permanence occupés à des choses futiles comme s'entraîner au combat dans une salle spéciale, réviser les cours d'économie de Beaubier ou encore travailler la maîtrise de leurs dons. Elle avait fini par désespérer.

    La mutante se leva et observa la pièce froidement, comme pour attendre qu'une idée germe dans son esprit. Visiblement prévue pour deux personnes, alors qu'Angie l'habitait seule, elle était plus isolée que les autres chambres bien que dans la même aile, mesure qui avait été prise pour limiter le pouvoir de saturation de la jeune fille. Toutes les cloisons étaient blanches, tout comme les matelas, les draps et deux des trois oreillers (tandis que le dernier portait des rayures grises). Un couple de placards s'avérait être des penderies. Elles étaient scandaleusement remplies par les nouvelles affaires de l'adolescente et quelques couettes supplémentaires, disposées de manière anarchique, le très sale côtoyant, le sale, l'usagé, le presque propre, et enfin le propre. La paire de lit monoplace avait été collée de façon à n'en former qu'un seul, plus large. Avant son arrivée, elle avait pensé que l'endroit manquait sérieusement de personnalité, et c'était déjà, avec les traces de terre au sol, un peu mieux à ses yeux.

    Angie ne s'était pas encore décidée sur ses activités de la soirée. Elle n'avait pas enfreint ouvertement le règlement depuis la sortie où elle avait fait la connaissance de Jayden, et avait conclu que malgré son don, cela aurait pu mal finir. Ça n'en valait pas vraiment la peine dans ses conditions actuelles, de toute façon : elle n'en tirait rien si ce n'était l'euphorie de l'adrénaline et de la désobéissance. L'hondurienne entreprit donc d'ouvrir la porte de l'une des commodes pour changer son jean bleu ciel et sa chemise blanche par un pyjama. Le couvre-feu n'était certes que dans deux heures, mais si elle ne trouvait rien à faire, il était somme toute aussi bien qu'elle se couche maintenant.

    Elle n'eut que le temps de saisir le tissu cendre qu'elle identifia clairement une présence qui avait dépassé toutes les portes des autres chambres, et qui ne pouvait donc se diriger que vers la sienne. Venait-on s'inquiéter de son état ? Beaubier peut-être ? Il était trop tôt pour que le résident chargé de la surveillance vienne contrôler la présence des élèves. Avant même que le visiteur soit en mesure de frapper, Angie tourna sur elle-même pour être face à l'entrée, la tunique de nuit à la main et une expression interrogatrice sur le visage, les sourcils légèrement froncés, comme pour signaler qu'elle était quelque peu dérangée par cette intrusion.
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MessageSujet: Re: Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]   Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle] Icon_minitimeJeu 29 Juil 2010 - 15:30

Depuis combien de temps j'étais là ? Aucune idée. Assise sur ce banc, dans le parc de l'institut, j'attendais. Qui ? Personne. Quoi ? Rien. Je m'étais rendue compte qu'ici, on s'ennuyait à mourir. On ne pouvait rien faire. Accéder aux sous sols était impossible, et donc jouer dans les souterrains était une activité à supprimer de la liste. D'un côté c'était mieux comme ça, être enfermée là bas n'avait rien de marrant pour moi. Mais que pouvait on faire à part s'entrainer ? Tous les jeunes que je croisais et qui avaient à peu près mon âge ne pensaient qu'à s'entrainer. J'avais testé une fois, depuis mon arrivée, je pensais que ce serait amusant. Mais non. Alors pourquoi eux s'acharnaient ils ? Est ce qu'il y avait quelqu'un dans cet institut qui pensait à autre chose que développer son pouvoir, devenir fort, faire des missions, etc... ? Je commençais franchement à désespérer. Alors je préférais rester seule, sur ce banc, à ne rien faire, à attendre un événement. Et on ne me fit pas languir plus longtemps.

Une personne arriva, sa démarche était souple, et ses pieds frôlaient doucement l'herbe. Il s'agissait d'un garçon, son odeur ne me dit rien, et sa voix m'était elle aussi étrangère. Peu importe. Son message était important. Il m'annonça que je changeais de dortoir. Enfin, ce n'était pas trop tôt, depuis que je dormais ici, je trouvais la chambre trop petite, et nous étions quatre dedans. Alors moi j'étouffais, je n'arrivais pas à trouver le sommeil. Le rythme de ma respiration s'accentuait à chaque fois que le soir venait. Un véritable cauchemar. J'avais donc fait remarquer que je ne pouvais plus supporter ces conditions et j'allais enfin pouvoir m'installer ailleurs. Je me demandais vraiment où on allait me mettre. Ceux qui étaient chargés de ça avaient du beaucoup y réfléchir vu le temps qu'ils ont pris à prendre cette décision cruciale. A vrai dire, la je me fichais un peu du pourquoi du comment, seul le résultat m'intéressait réellement. Alors, je ramassai tranquillement ma canne, et j'allais prendre mes affaires pour les changer de chambre.

Vite fait, je pliais mes vêtements neufs. J'étais allée faire les boutiques, et je n'avais pas eu le temps de tout essayer, mais j'avais déjà pris soin de jeter les vieux habits avec lesquels j'étais arrivée. Ils ne me serviraient plus à rien, de plus ils étaient déchirés un peu partout à cause de ce que je leur faisais subir. Lentement je marchais maintenant vers l'endroit où j'allais passer la nuit. L'homme me précédait toujours. Il devait vraiment s'ennuyer lui aussi, ce ne doit pas être très drôle de devoir regarder quelqu'un ranger ses possessions pour la conduire seulement quelques mètres plus loin juste parce qu'elle ne pouvait voir le numéro de la chambre. Il y eu un grincement, celui d'une porte qui s'ouvre. Je n'y avais guère prêté attention, mais j'étais sûre d'être dans un des dortoirs les plus éloignés. A vrai dire, je n'entendais plus les murmures qui provenaient des chambres où étaient les élèves depuis quelques minutes. Je me demandais ce que cela signifiait. Tant pis, on verra plus tard.

Je m'engouffre dans l'ouverture, devant moi une respiration. Il n'y en a qu'une, nous serions donc seulement deux dans cet espace. Ce dernier me paraissait plus dégagé aussi. L'autre était reparti, je me retrouvais seule avec cette inconnue qui était féminine d'après son odeur. Je déposais ma valise sur le sol avant de prononcer :

-Salut, moi c'est Abigayle, ou Abi si tu préfères. Désolée si tu aimes être seule, mais on m'a dit de partager ta chambre.

Dans toute ma splendeur, ma dernière réplique lui annonça clairement mes intentions, c'est donc sur un ton complètement anodin que je lui dis en plus :

-De toute façon, je n'ai pas l'intention de rester souvent dans cette chambre alors...

En effet, il y avait tellement de bêtises à faire, je n'allais pas passer ma vie à rester cloitré ici. J'avais bien l'intention de me servir de cette pièce, mais uniquement pour dormir, mais le moins possible.
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MessageSujet: Re: Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]   Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle] Icon_minitimeJeu 12 Aoû 2010 - 1:20

    Angie examina avec un air ahuri la nouvelle arrivante, la bouche ouverte. Quelque chose était étrange dans son apparence. Non, pourtant, elle était bien habillée d'après les standards des états-unis. L'adolescente cligna plusieurs fois des yeux avant d'identifier le, ou plutôt les éléments troublants : la canne et les lunettes, accessoires peu courants chez les jeunes filles. Elle n'en avait jamais beaucoup de semblables, mais elle sut finalement de quoi il en revenait; cette Abi était aveugle. Aveugle, elle ne pouvait donc pas voir, de quoi déconcerter l'hondurienne habituée à exécuter de nombreuses mimiques lors des conversations. Une déficiente visuelle, sans doute n'était-ce pas l'amie la plus utile qu'elle aurait pu se faire. Aussi stupide que cela paraissait néanmoins, le directeur, en permanence dans son fauteuil roulant, était soit-disant l'un des mutants les plus puissants du globe. Le gène X, véritable malédiction pour son sens de la déduction, effaçait toutes ses marques. La frêle Jayden pouvait d'après ses propres dire déclencher des incendies... Mais tout de même, une aveugle. Elle ne s'attendait pas à devoir vivre avec une autre personne, et encore moins avec une handicapée. La prenait-on pour une infirmière ? Elle pensait fermement que la place de ces gens là était dans une hospice.

    Comme à chaque fois qu'elle rencontrait un individu à la capacité inconnue néanmoins, elle usa de la plus grande prudence. C'était difficile : comment pouvait-elle être dangereuse si elle ne la voyait même pas ? Angie n'imaginait même pas vivre sans ses yeux, alors blesser quelqu'un, c'était inconcevable. Toujours était-il qu'elle serait surement obligée de partager, et c'était pour elle un principe bien douloureux. Elle jeta un regard mélancolique à son lit, qu'elle devrait probablement scinder, tout comme l'une des deux armoires, qu'elle devrait vider. Elle aurait pourtant dû s'y attendre. Elle avait cru pendant un temps qu'on lui accorderait un traitement de faveur, mais l'adolescente sut à ce moment que ce n'était qu'une illusion. A l'institut comme ailleurs, c'était la loi du plus fort et il fallait se battre pour vivre correctement. La jeune fille lança avec une pointe de sécheresse.

    -Salut. Angie-Gabrielle. Tu veux mettre où ta valise ?

    Son accent hispanique était bien sûr toujours audible, tout comme la pauvre constitution grammaticale de ses phrases. Angie avait beau chercher, elle ne trouva pas d'endroit où les bagages d'Abigayle ne la dérangerait pas, les siens, de par leur désordre, prenaient toute la place. La deuxième réplique de l'arrivante réveilla quand même un autre intérêt, qu'elle ne tarda pas à exprimer.

    -Bien. Tu ne dors pas, c'est ça ?

    Après tout, c'était bien possible. Sans songer une seule seconde à aider sa partenaire, par véritable négligence plutôt que par choix, elle commença à tirer un de deux matelas sur le côté. Elle se réservait la place près de la fenêtre, de toute façon, l'autre ne pourrait pas en profiter.


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MessageSujet: Re: Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]   Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle] Icon_minitimeVen 20 Aoû 2010 - 7:26

Elle n'avait pas bouger depuis mon arrivée, du moins, c'est ce que j'avais ressenti. J'étais franchement navrée de l'indisposer, et les espoirs que je nourrissais quelques minutes plus tôt s'effondrèrent un peu. Je voulais qu'elle soit une amie, quelqu'un avec qui je serais complice, peut voudrait elle venir faire des conneries avec moi ! Tout cela était refroidi dans mon esprit. Si déjà elle m'acceptait dans sa chambre, ce serait super. La question était maintenant : pourquoi ne voulait elle pas d-elle ? Je connaissais divers éléments de réponses, mais j'ignorais quelle excuse parmi toute la liste elle avait choisi. Elle pouvait tenir à son intimité, ne pas aimer la compagnie, avoir un pouvoir qui l'obligeait à s'isoler, peut un mixe de tout. Mais cela ne me regardait pas. J'avais juste l'impression d'être de trop. Intruse. Cependant, je ne pouvais pas remédier à la situation. La seule chose qui m'était possible c'était d'espérer que nos relations s'arrangent avec le temps.

Elle me parla, et m'annonça avec un peu de sécheresse dans la voix qu'elle s'appelait Angie-Gabrielle. Lorsqu'elle me demanda où je voulais mettre ma valise, je ne pus que constater que la construction de sa phrase était incorrecte. Cependant, je n'allais pas lui faire une remarque, déjà qu'elle avait l'air de ne pas trop m'apprécier, et puis elle apprendrait en écoutant les autres parler, de toute manière, on la comprenait facilement. J'entendais aussi un léger accent hispanique. Puis, à ma phrase précédente qui lui annonçait que je ne passerais pas beaucoup de temps dans cette pièce, je compris la méprise, et je lui expliquai :

-Si, je dors comme tout le monde. Cependant, ici le moins possible, il y a tellement de chose à faire, et j'ai l'intention d'en profiter. Je crois que le soir il y a aussi des soirées sympathiques en ville, pourquoi ne pas y faire un tour, discrètement, on se tire, et on revient avant que les autres ne se réveillent, ni vu, ni connu. Tu pourras venir si tu le souhaites. Sinon, je pense qu'il n'y a pas mal à faire dans l'institut, enfin je crois.

Si elle était d'accord, cela pourrait nous rapprocher et mettre une ambiance plus agréable dans cet espace réduit que nous allions partager. Puis, Angie scinda le lit en deux, et j'eus la réponse pour savoir où ma valise aller se caler, sans déranger la fille. Ainsi, j'avançai, et je la glissais sous le lit. L'autre avait pris celui à côté de la fenêtre. Dommage, le matin j'aimais ouvrir cette dernière pour sentir la brise fraiche m'arriver au visage. Tant pis, première arrivée première servit. Au pire, je pourrais plus tard lui demander ,si on s'entend bien, de décaler un peu sa couche pour que puisse me glisser jusqu'à cette ouverture et en profiter un peu, mais ça on verra.

Je ressortis ma valise à peine quelques secondes plus tard. Je la hissais sur mon lit, déposant les affaires sur le côté. Il y avait là, toutes sortes d'habits, de toutes les couleurs, pour tous les goûts. Sur l'oreiller, je ne déposais que les T-shirt noir, et les jeans. Dans ma valise, il avait eu une place à part. Puis avant de continuer à déballer mes possessions, je jetai un coup d'oeil vers Angie.

-Si tu veux, tu peux emprunter mes affaires si elle te plaise ça ne me dérange pas.

Puis je me remis à chercher ce don j'avais besoin. En l'occurrence, et comme d'habitude, ce que je veux se trouve toujours au fond du sac. Je sortis donc mes pastels et mes crayons de couleurs, ainsi qu'un bloc de feuilles blanches. J'adorais dessiner, cependant, comme j'étais aveugle, mes dessins ne ressemblaient pas à ce que l'on peut voir habituellement. Bien sur, quand j'ouvre les yeux, il m'ai facile de représenter quelqu'un, ou quelque chose. Sinon, je détournais la tête de ma feuille. Regardais sans le voir le plafond. Puis tout à coup, ma main se mit à tracer des lignes. Au bout d'une dizaine de minutes, n'importe qui aurait pu reconnaître la fille qui partageait ma chambre. Non pas parce que j'avais fait un portrait d'elle pur et simple. Sur mon dessin, il n'y avait que des courbes fictives. Mais je l'avais représenté selon mon inspiration, et aussi par rapport à mes impressions à son égard. En le voyant, on voyait certains sentiments, comme l'envie de ne pas être dérangée, et son besoin d'espace. On le ressentait par les différentes courbes, et les différentes couleurs que je venais d'utiliser.


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MessageSujet: Re: Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]   Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle] Icon_minitimeVen 20 Aoû 2010 - 21:56

    La nouvelle et elle semblaient partager des objectifs communs finalement. Angie reporta un peu son attention sur elle quand le goût de savon assez habituel à présent vint lui agresser le palais. C'était la déception, ou quelque chose comme ça, elle avait fini par le déduire avec Beaubier d'abord, puis Martin, un peu après. En effet, la mutante avait une tendance à briser les espoirs de ses proches. Peut-être ne paraissait-elle pas physiquement ce qu'elle était vraiment, les gens devaient se faire souvent de fausses idées. Ou alors, tout simplement, c'était une sensation qui ressortait beaucoup dans la vie de tous les jours. Les gens étaient plus souvent tristes qu'heureux, du peu qu'elle avait ressentit pendant la première semaine passée en possession de ses pouvoirs. Globalement, elle pouvait tout de même se considérer satisfaite, pour le moment. Sans Rémy et l'institut, elle serait encore à se terrer du côté de Prospect Park. Mais elle n'était pas du genre à se contenter de ce qu'elle avait déjà. Il lui en fallait toujours un peu plus. Et ce qui pêchait le plus à l'école Xavier, pour elle, c'était le couvre-feu. Aussi la proposition d'Abigayle sonna à ses oreilles comme une très juste remarque. Amèrement réaliste cependant, elle fut forcée de lui rappeler l'évidence. Elle l'avait vu quand elle était arrivée : l'établissement pouvait rapidement se transformer en prison.

    -Hé, c'est cool (un mot qu'utilisait souvent Rémy, sur qui elle se plaisait à copier). Mais ... les portes sont fermées la nuit. Il y a Beaubier ... Daniel et d'autres qui surveillent. Ils vont passer voir dans moins d'une heure. Ils sont gentils mais je ne crois pas qu'ils nous laisseront sortir. Il y a aussi un homme avec un bras ... bizarre. On a l'impression qu'il sait tout où sont les gens. Ça ne va pas être facile. Avec ton... euh.

    La jeune fille ne savait pas comment exprimer le handicap de sa colocataire, autant d'un point de vue lexical que d'un point de vue éthique, aussi s'arrêta-t-elle là. Elle avait décidé de ne pas faire de cadeau à l'arrivante, mais cela se sentait dans sa voix qu'elle était très enthousiasmée par la suggestion. Elle considérait de suite avec plus d'intérêt Abigayle. Elle aurait vraiment pu être une bonne amie, si elle n'avait pas eu ce problème qui ferait probablement d'elle un fardeau. La manière dont elle se repérait était tout de même impressionnante, sans ce sens, Angie elle aurait été totalement perdue, elle se serait cognée à tous les meubles.

    Au moins, on ne pouvait pas prétendre que la nouvelle prenait trop de place. La mutante rousse était persuadée qu'Abigayle avait l'air de savoir où était la sienne. Elle lui proposait aussi de lui prêter ses affaires. Ce n'était pas vraiment dans les habitudes de l'hondurienne, qui était toujours un peu troublée par les actes de gentillesse pure. Cette bonté cachait peut-être quelque chose, bien que de nombreux membres de l'institut avaient le même comportement : ils étaient ''cool''. Ils avaient presque tous essayé de lui enseigner cette valeur, mais c'était encore trop récent pour qu'elle l'acquière autrement qu'en apparence. Peut-être qu'en fréquentant une personne qui était généreuse, elle finirait par apprendre l'altruisme. Elle avait de toute façon juré de s'adapter à tous les milieux. Elle émergea de ses pensées en remarquant l'activité de l'autre adolescente. Intriguant ... une aveugle qui dessinait. Ça lui parut stupide, elle devait se moquer d'elle. Elle y jeta un œil : les arcs chromatiques se croisaient et se mêlaient sur la feuille de papier. Les tons impressionnistes réveillaient réellement quelque chose chez Angie. Ils ressemblaient aux peintures du manoir du magicien Mü, c'était autant de reflets de sa propre situation. Des bourdonnements sonores, olfactifs et tactiles qui l'envahissaient.

    -C'est ... beau. Ça ressemble à ce qui se passe dans ma tête.

    Hélas bien piètre critique d'art, elle ne sut en dire plus. Elle regarda alors avec suspicion son pyjama gris, puis elle le rangea. Déterminée, elle releva la tête.

    -Je pense qu'on doit attendre la fin de la ronde.
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MessageSujet: Re: Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]   Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle] Icon_minitimeSam 21 Aoû 2010 - 17:01

Faisait elle semblant ? Avait elle peur de me vexer ? Non, je ne voyais chez elle qu'une personne franche qui disait ce qu'elle pensait sans prendre de gant, enfin sauf sur mon handicap qui la dérangeait. N'empêche, elle était arrivée dans cet institut avant moi, et les informations qu'elle me transmit me seront utiles plus tard, enfin, surement. Sa voix était enjouée, elle paraissait enthousiaste à l'idée de sortir d'ici. Je savais qu'on pourrait le faire, s'en sortir facilement en combinant son don au mien. Cependant j'avais promis que je n'en ferai plus l'usage. J'étais déchirée. Devais je m'en servir pour nous faciliter la tache ? Ou devais je tenter de sortir normalement en risquant de me faire prendre. Non ! Dehors c'était des mutants. On nous gardait en prison, et ils pouvaient nous empêcher de filer en douce et eux, ils n'hésiteraient pas. Bien, on m'avait mise au courant qu'Angie pouvait ressentir les émotions des autres. Elle n'aurait qu'à me guider et me prévenir de l'arrivée de quelqu'un, moi doucement, comme si l'obscurité gagnait du terrain, je le rendrai aveugle temporairement, juste assez pour qu'on puisse se tirer. Et si cela ne suffirait pas, je couperais tous ses sens pour qu'il est l'impression d'être dans le néant.

Alors là, j'avais trouvé pour esquiver la ronde, mais l'homme au bras bizarre, je ne trouvais pas de solution. Tant pis, on aviserai sur le moment. Ma main continuait de tracer des ligne sur la feuilles sans que je ne m'en rende compte, mon esprit était ailleurs. Mais Angie me ramena à la réalité en complimentant mon dessin, et en disant que ça lui ressemblait, je ne pouvait que sourire et lui offrir ce dernier, après tout, ça avait été elle mon modèle, je rajoutais aussi :

-Merci, s'il te ressemble, c'est parce que je l'ai fait par rapport à mes impression sur toi. Et apparemment, je ne me suis pas trompée. Tien, si tu l'aimes, il est à toi, cadeau.

Sur ce, je retirai mes lunettes noires. Contrairement aux aveugles, mes yeux n'étaient pas décolorés, surement parce que je n'étais pas née ainsi, mais que c'était de la faute de ce maudit accident. Rien qu'à cette idée, je poussais un soupir. Après tout, ma vie avait déraillé à cause de ça. Plus de parents, plus d'amie qui vous trouve trop différent, que de la pitié (et ça c'est bien le pire). Et comme si ça ne suffisait pas, j'étais une mutante. A croire qu'on s'acharnait sur moi.
Bref, je n'allais tout de même pas me plaindre du pouvoir auquel j'allais faire appel car il était tout de même bien pratique. Me concentrant à peine, je fis revenir ma vu. Un court instant je fixai le dessin, puis mes yeux se levèrent sur Angie. La première chose que je remarquai chez elle, c'était sa belle chevelure enflammée qui contrasté avec la pâleur de sa peau. Tout comme moi, elle possédait des yeux verts. Ses habits eux paraissaient usagés, si on sortait faire la fête, autant qu'on se fasse belle. Pour moi, plus aucun doute, elle voulait sortir, elle venait de ranger son pyjama gris avant de m'annoncer qu'on devait attendre la fin de la ronde. J'étais en parfait accord avec ce qu'elle venait de dire. Mais il était tout de même encore tôt, alors on allait de voir s'occuper. Et j'avais une petite idée de ce qu'on allait faire.
Je retournais rapidement mes affaires, si je gardais trop longtemps les yeux ouverts, j'allais être trop fatiguée. Trouvant ce que je cherchais je pris Angie pour l'assoir sur une chaise devant un miroir. Dans ma main, un fer à lisser, je ne m'en servais pas souvent, mais là, j'avais peut être une nouvelle amie alors...
Dès que ce fut fini, et ça ne mit pas longtemps, je lui dénichai dans mon sac une robe noire, avec un léger décolleté, qui lui arrivait juste au dessus des genoux. Elle était un peu moulante, mais elle n'entravait pas trop les mouvements. Heureusement qu'on faisait à peu près la même taille. Je la lui tendis :

-Si tu ne l'aimes pas, où si tu préfères autres choses, sert toi !

En attendant, je lui remis aussi des ballerines qui allaient avec, on devait faire la même pointure, du moins je l'espérais. Si elle n'aimais pas, je n'en serai pas vexée, et je serai même contente qu'elle choisisse sans gêne ce qu'elle aimerait porter. Pour moi, je pris une robe noire avec des reflets bleutés presque imperceptible, elle se nouait à mon cou, et laissait mon dos nu. C'était ma préférée. Je pris des chaussures assorties et un sac, puis j'allai m'habiller sous les couvertures du lit, ce qui ne fut pas aisée. Ensuite, je jetai un regard vers Angie, croisant les doigts pour qu'elle soit prête et que je puisse l'admirer quelques secondes avant de retomber dans le noir.
J'aurais pu rester encore un peu les yeux ouverts, mais si je devais me servir de mon autre pouvoir pas la suite, il fallait que je garde un peu d'énergie. Notre nuit serait surement agitée aussi, et après, il y avait le retour.
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MessageSujet: Re: Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]   Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle] Icon_minitimeLun 23 Aoû 2010 - 0:28

Spoiler:

    Angie prit le dessin pour l'observer encore un peu. Elle ignorait quoi en faire : ce n'était pas vraiment utile en soit, et elle ne pouvait pas le transporter sous peine de l'abîmer. Mü avait encadré ses peintures et les exposait dans son hall, mais elle n'avait pas d'endroit pour le mettre. Dans le doute, elle le posa sur son lit. Elle constata ensuite, rappelée par une odeur de rose, qu'Abi avait retiré ses lunettes noires. Elle se dit qu'elle devait se rappeler un souvenir, peut-être mauvais, et peut-être en rapport avec sa cécité. La jeune fille avait pour projet de lui poser la question quand l'autre adolescente la prit par le bras, un étrange appareil à la main. En moins de quelques secondes, elle était devant un miroir alors que cette espèce de pince plate était en train de passer sur ses cheveux.

    -Qué pa...

    L'hondurienne s'interrompit en voyant l'effet de la machine légèrement chaude. L'arrondi habituel de sa crinière rousse était en train de se raidir. Il ne restait que des mèches droites et lisses, et le tout était bien plus évident à coiffer. Elle se contempla un peu dans la glace avec un air ahuri. Elle fut encore plus surprise quand elle vit qu'Abigayle s'en servait aussi. Faisait-elle semblant ou se moquait-elle d'elle dès le début ? Angie frissonna; si elle avait réussi à mentir jusque là, elle pouvait cacher n'importe quoi d'autre. Elle songea un moment qu'elle s'engageait peut-être un peu vite avec une parfaite inconnue. Et si elle attendait simplement qu'elles sortent de l'enceinte de l'école pour se repaître de son cerveau, au quelque chose du même genre ?

    -Hé, mais tu sais voir ?!

    Le prochain ''cadeau'' lui fit oublier ses craintes. On lui proposait une magnifique robe ébène. Une tunique hyper-féminin, elle n'en avait jamais porté de tel. Élevée comme un jeune garçon, elle n'avait commencé à porter de bustier que parce qu'on lui en avait proposés à son arrivée à l'institut. Elle avait porté pendant une durée incalculable les mêmes vêtements, taillés pour homme, mais il était vrai que depuis quelques temps, sa poitrine naissante avait commencé à lui poser de menus soucis. Elle prit un certain temps pour la regarder, hébétée. Angie avait longtemps pensé qu'être une femme était une faiblesse autant que s'habiller ainsi, et n'en voyait pas encore bien l'intérêt. Sachant néanmoins que sa complice était bien mieux informée qu'elle sur les us dans ces fameuses soirées, elle s'y soumi. Elle s'habilla donc sur place avec une maladresse risible, n'étant pas familière des modèles une-pièce et dû s'y reprendre à plusieurs fois pour l'ajuster correctement.

    Elle se tourna vers le miroir et se contempla longuement. Elle n'avait plus rien à voir avec la petite fille qui avait quitté, sur un coup de tête, la ferme de ses parents en compagnie de son frère pour remonter jusqu'aux US. Son visage et son corps s'étaient allongés, ses cheveux courts avaient poussés. Elle eut un rire nerveux, il ne restait plus rien de la Mara, de la drogue et de son frère. Elle allait jusqu'à se demander s'il restait quelque chose d'elle. Elle avait tellement changé qu'elle ne savait pas si elle pouvait toujours dire qu'elle était la même personne. L'adolescente regarda ensuite avec insistance Abigayle, cherchant à savoir s'il manquait quelque chose à sa tenue. Elle supposait que l'américaine répondait aussi aux critères de beauté de son pays, dans son costume marine. Ses yeux à l'éclat vert rapprochaient les deux étudiantes, ils n'avaient rien à voir avec ceux d'une aveugle.

    Soudain, la porte s'ouvrit sur un adulte, probablement en ronde de 22 heures. Angie ne n'avait absolument pas anticipé, et pensa que son pouvoir présentait des lacunes, avant de reconnaître l'individu. La seule personne à sa connaissance qu'elle ne pouvait pas détecter. Elle tenta :

    -Salut Ré-my.

    Une odeur d'alcool vint titiller les narines des jeunes filles. Le x-men les toisa d'un regard qu'on pouvait facilement imaginer absent, même s'il était caché derrière ses lunettes de soleil, et murmura une salutation fatiguée. Le fait qu'elles soient en robe aurait peut-être pu attirer l'attention d'un surveillant plus pointilleux, mais sans chercher à plus comprendre, il leur fit un signe de main amical et referma la porte. L'adolescente haussa les épaules en regardant Abi, l'air de s'excuser. Elle se dit ensuite qu'il faudrait mieux éviter la communication visuelle à l'avenir.


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MessageSujet: Re: Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]   Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle] Icon_minitimeSam 28 Aoû 2010 - 9:39

Elle s'était laisser guider sans résistance lorsque je lui avait lissé les cheveux, cependant, sa surprise était évidente. Tout comme moi elle ne devait pas avoir l'habitude de tenter de se faire belle. Lorsqu'elle vit que je me servais de la machine sur moi, elle me posa une question qui était d'ailleurs plus une affirmation qu'autre chose. Est ce que je savais voir ? La réponse était compliquée, et je la lui donnerai plus tard.
Une fois qu'elle fut habillée, et après plusieurs tentatives difficiles pour ajuster sa tenues, elle était enfin prête. Elle était magnifique avec cette robe noire ébène faisant ressortir la pâleur de sa peau, et mettant en valeur le vert de ses yeux si semblables aux miens. Quand je vins me poster à côté d'elle, n'importe qui, en voyant cette image nous aurait pris pour deux soeurs, le même regard, la même façon de se tenir - comme si nous étions en jeans et en T-shirt, et non comme si on partait en soirée -, menues et pas très grandes, seule nos cheveux permettaient vraiment de nous différencier, et encore, des soeurs ont parfois les cheveux dissemblables.
Avant que quelqu'un arrive, nous avions je pense, quelques bonnes minutes que je souhaitai utiliser pour répondre à sa question, plutôt à son affirmation, mais cela n'avait aucune importance.

-Oui, je peux voir, mais seulement parce que je suis mutante. Si mes yeux ne sont pas opaques, livides, ou encore presque transparent, c'est parce que ce n'est pas une maladie qui les a affectés, ce n'est pas non plus de naissance, mes nerfs optiques se sont rompus à la suite d'un grave accident de voiture, à l'hôpital, les médecins n'ont rien pu faire pour moi. Mon père conduisait, il est mort sur le coup, et ma mère à fait une hémorragie à la suite d'une intervention car sa colonne vertébrale était endommagée, elle n'a pas non plus survécu.

Il n'était pas facile d'en parler, mais lorsque ce tournant s'était déroulé dans ma vie, je n'avais que 4 ans, donc je n'avais pas compris ce qui se passait tout de suite, et à force de réfléchir, d'essayer de comprendre, j'avais grandi avec cette idée et cette absence, j'avais donc appris à l'accepter. De plus, je considérai maintenant Angie comme une petite soeur, même si on ne se connaissait pas beaucoup, elle devait avoir un caractère bien trempé comme le mien.

Nous fumes coupées par quelqu'un, je l'entendis du bout du couloir, sa démarche n'était pas sûre, et quand il entra par la porte pour vérifier que nous étions bien là, je remarquai sans problème qu'il puait l'alcool à plein nez. Et il devait être assez soul, car il ne fut pas capable d'interpréter les tenues que nous portions, en effet, ce n'était pas vraiment des pyjamas. Angie devait le connaitre car elle le salua, et il lui rendit dans un murmure un petit bonsoir. Il repartit en fermant la porte.

J'attendis quelques secondes pour qu'il soit hors d'atteinte, et ainsi pouvoir parler tranquillement sans avoir peur d'être entendu. Puis je désignai le sol à Angie en lui annonçant :

-J'ai trouvé notre moyen de sortir d'ici !

A l'endroit indiqué par mon doigt, se trouvait des clefs, elle étaient tombées de la poche du surveillant lorsqu'il en avait sorti sa main pour répondre à Angie, heureusement qu'ils s'étaient salués. Le tintement avait retenti, bien qu'étouffé par la moquette, jusqu'à mes oreilles. Je me penchai pour les saisir, et en les touchant, je remarquai qu'une avait la forme de celles utilisées pour les deux roues, d'autres étaient faites pour des serrures - surement une pour le garage où la moto était garée - et encore des nouvelles pour des cadenas, là il devait s'agir d'un pour sa moto, on est jamais assez prudent, et de celui du portail qu'il nous fallait franchir. Décidément, ce trousseau nous serait bien utile. Je le tendis à Angie, elle trouverait avec ses yeux la serrure plus facilement que moi. Et, comme un défi à une amie, je lui lançai :

-Tu sais conduire au moins ?

Sur ce, je m'élançai dans le couloir, il n'y avait personne. Puis sur un ton posé, mais tout de même joyeux parce qu'on allait échapper à cette prison, je lui demandai après avoir remis mes lunettes sur mon nez :

-C'est par où ?
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MessageSujet: Re: Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle]   Dans une chambre bientôt partagée [Avec Abigayle] Icon_minitimeLun 30 Aoû 2010 - 2:11

    Angie était loin de comprendre tous les termes médicaux, mais certains mots comme ''mort'', ne laissaient pas la place au doute. Elle ne déplorerait pas le sort des parents d'Abigayle. D'abord parce que l'odeur de rose était plus forte que jamais et qu'elle avait bien assez de mal à s'empêcher de lui ordonner d'arrêter d'y songer; l'hondurienne se recula imperceptiblement pour réduire un peu la force du signal. Ensuite parce que la mort avait tellement fait partie de son quotidien qu'elle allait jusqu'à ne plus la considérer comme un drame. C'est d'ailleurs avec une certaine impassibilité qu'elle parla à son tour, pour avoir quelque chose d'intéressant à dire.

    -Moi aussi, mon frère est mort.

    Enfin, une chose était maintenant sûre, sa nouvelle complice avait un moyen de pallier à sa cécité, et n'était donc pas un si gros fardeau. Angie pensait depuis déjà un certain moment que certaines mutations étaient de véritables dons, mais celui d'Abi était providentiel, contrairement au sien. De même, ses autres sens semblaient particulièrement aiguisés, car elle entendit le bruit d'un trousseau choir sur la moquette.

    C'est avec ravissement qu'elle apprit la nouvelle des clés que Rémy avait laissées tomber. Plus elle le connaissait, et plus elle admirait cet homme. C'était son modèle et son inspiration, il était à la fois proche d'elle et adulte, une combinaison que seul Daniel occupait lui-aussi fidèlement. Le cajun était de plus doté d'un charme fou et surnaturel... et d'une générosité sans faille. Car pour elle, ça ne faisait aucun doute : son geste était parfaitement prémédité. Il leur offrait, sans en avoir l'air, leur porte de sortie. La jeune fille esquissa un grand sourire malicieux, en fuyant la chambre sur la pointe des pieds.

    -Bien sûr.

    ~chuchota-t-elle sur le ton de l'évidence. Elle n'avait pas fait des centaines de kilomètres à pied, ou du moins, pas seulement. Les quatre comme les deux roues la connaissaient bien, le code de la route, moins. Si elle suivait l'exemple du x-man, de toute façon, elle n'aurait aucune raison de ne pas aller vite : il suffisait de s'arrêter aux feux.

    -Hééé...

    Elle guida Abigayle comme elle le put. Son habitude de l'institut était tout juste suffisante pour trouver la bonne direction sous la luminosité faible, car seule la lune et quelques veilleuses pavaient leur route. Les couloirs étaient vides à ce moment de la nuit, les élèves ayant la consigne stricte de ne pas sortir de leurs dortoirs après 22 heures. La structure était pour Angie comme une grande plaine qui s'étendait à perte de vue, et qu'elle ne pouvait observer qu'avec une certaine myopie. Cette imprécision ne l'empêcha néanmoins pas de détecter, à une bifurcation, les signaux d'une personne qui avançait vers eux. Pinçant sa complice, car lui faire des gestes était inutile, elle lui fit comprendre sans un bruit qu'elles devaient rebrousser chemin. Elle n'était pas vraiment à l'aise pour se faire discrète dans son habit, mais après plusieurs péripéties, sûres d'être seules dans un bon rayon, elle lui annonça :

    -Le ... l'endroit où sont les motos est ailleurs.

    Pour illustrer sa pensée, elle la mena à l'extérieur, dans le parc. Bien que l'hondurienne ne pouvait pas non plus le voir, elle savait que Rémy rangeait son véhicule dans un garage à part. Elle s'apprêtait à se précipiter sur l'herbe fraiche quand elle eut un sursaut de lucidité. Elle emprunta alors le chemin, épargnant à ses mocassins une salissure qui, pensa-t-elle, n'était probablement pas dans le genre des habitants des états-unis. Elle n'avait que trop fait les frais des regards suspicieux des passants quand elle portait encore ses haillons tâchés. Devant la porte du local à voitures, elle s'essaya à plusieurs clés avant de trouver la bonne. Elle put alors lever la herse et, en l'absence de tout signe de présence, alluma les néons lumineux, sur les côtés de l'entrepôt.

    Dans celui-ci, pas de l'impressionnant x-jet qu'elle n'avait vu que de loin, bien entendu, mais plusieurs véhicules de toute sorte. Dont un seul, mais pas des moindres, l'intéressait. Cette magnifique moto, elle l'avait déjà monté une fois, et ce jour-là, elle s'était promise d'y retourner. Ouvrant les cadenas et la porte annexe qui menait de l'autre côté du portail, elle flatta le bolide avec douceur. Sa carrosserie de métal était comme son propriétaire : silencieuse et inodore, merveilleusement silencieuse et inodore. Elle invita presque à contre-cœur Abi à y prendre place, puis mis le contact, avant de faire démarrer l'engin avec un rugissement. Grisée par la puissance, elle s'écria avec allégresse :

    -Alors, où on va ?


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