Une impression de déjà vu [PV Vermine] [Terminé]

D'un pas leste, le jeune homme se dirigeait vers le parc. Jay semblait savoir exactement ce qu'il voulait, ce qui était parfaitement faux en réalité. Égaré, le mutant évoluait par hasard dans l'institut où il était arrivé ce matin même, après 8 jours d'absence... Une éternité pour lui, il avait en effet vécu tellement de choses en une semaine! Un enlèvement, puis la vie dans une cellule minuscule, trop petite pour qu'il puisse y étendre ses ailes totalement, la douleur, les injections, la peur et l'humiliation; complètement changé, tant physiquement que moralement, Icare marchait d'un pas sûr uniquement parce qu'il avait apprit que l'air de petit gosse fragile qu'il abordait auparavant lui avait valu la plupart de ses mésaventures. Il y avait toujours de mauvaises âmes pour guetter les faibles, les esprits fragiles et pour éviter cela, mieux valait avoir l'air sûr de soi. Icare n'avait rien eut à dire à l'entrée, son empreinte "télépathique" enregistrée par Cerebro était la même. En revanche Daniel Hopes n'était pas là et le mutant qui avait d'abord râlé en voyant son bureau fermé s'en repentait désormais. Il aurait été capable de hurler à tort sur le professeur qui avait peut-être tout fait pour le sauver ou de fondre en larmes devant lui à cause de son apparence "monstrueuse", de son physique altéré qui flouait son identité, son mental aussi.

Avançant dans le parc, l'ange reconnu l'arbre où il aimait tant se reposer auparavant, jouer de la guitare aussi parfois. Au loin se trouvait la petite courette où il avait transporté le garçon d'acier qui avait embêté Vermine. Jay se rappelait encore de son atterrissage catastrophique, maintenant ça allait mieux même si dans ses progrès, il avait reculé à cause des nouveaux paramètres à prendre en compte. Avec bien de la sueur et beaucoup de sang, le garçon ailé avait toutefois pu rattraper son énorme retard dû à son refus des dons lorsqu'il était adolescent. Le jeune homme s'assit sous l'arbre, à l'ombre, ses ailes désormais blanches repliées contre lui et le regard vague. Peu de gens l'avaient reconnu, ceux qui l'avaient pu avaient eu recours à la logique... Après l'avoir prit pour Angel à cause de ses plumes immaculées, sa taille raisonnable pour un homme et sa silhouette bien masculine au contraire d'Icare avait fini par deviner, de part la jeunesse et la finesse émanant de ses traits qu'il s'agissait de lui. Il n'y avait pas beaucoup de mutants ailés de part le monde; trois se cantonnaient à l'institut, un certain Lucifel, Warren et lui, bien que n'étant pas la plus puissante, la mutation était extrêmement complexe, mêlant beaucoup de facteurs internes, ce qui expliquait peut-être sa rareté. Certains plus évolués n'avaient pas besoin d'ailes pour voler, Icare était un peu leur "prototype", celui qui avait les avantages mais aussi les inconvénients alors que les autres gardaient un physique totalement humain et ne s'encombraient pas d'ailes d'ange. Mais quelle importance que tout cela? Ce n'était que de l'esthétisme et Icare s'apercevait combien il avait été stupide d'y prêter autant d'intérêt, autant que cette folle de Gretchen qui l'avait capturé pour cela, pour donner à sa créature un aspect "divin"... Étranges goûts pour une tarée de ce genre! En général ils préféraient les bêtes affreuses pas vrai? Mais bon tant mieux pour Jay, au moins, même s'il ne s'assumait pas vraiment et se sentait "monstrueux" à cause des modifications génétiques, il ne l'était pas réellement.

Fermant à demi ses yeux clairs à cause du soleil qui les rendait plutôt sensibles, l'ange mit un certain temps à distinguer une ombre proche de lui. Mettant un petit temps à comprendre de qui il s'agissait, le jeune homme haussa un sourcil. Il savait que Vermine avait eut des ennuis mais ignorait de quoi il en retournait vraiment, juste que c'était un genre d'enlèvement comme lui. Daniel Hopes était dans tous ses états avec cette histoire; alors que lui, on n'avait peut-être même pas noté sa disparition. De ce fait, le mutant ailé était surprit de trouver l'enfant-rat ici, mais il y avait aussi le fait que l'ironie les fassent se rencontrer à l'endroit de leur première rencontre... Et puis qu'il était à la fois très heureux et très mécontent de voir le gamin. En effet, ce dernier l'ayant connu auparavant pourrait certainement le "juger", ce qui effrayait beaucoup Icare. Pourtant inconsciemment il recherchait cette confrontation, cette comparaison entre son lui de maintenant et son ancien soi. Ayant perdu cette innocence fragile qui agaçait tant le rat, ce fut d'un ton sûr-mais ce n'était que de l'apparence- qu'il s'adressa au garçon rongeur, se demandant comme il allait être reçu... Et souhaitant inconsciemment être reconnu, qu'il se représenta.

-Vermine... C'est moi... Icare.

Il ne lui demanda pas comment il allait, c'était une question stupide faite pour ceux qui ne comprenaient rien à ce que l'enfant -rat ou l'ange avaient vécu. Sans savoir exactement ce qui était arrivé, Icare sentait bien que c'était à peu près la même chose, puisque de toutes manières ça partait apparemment d'un enlèvement! Vermine avait-il eu affaire à un groupe anti-mutant? A une scientifique folle aussi? Quoiqu'il en soit, la base, le traumatisme était sans doute le même et ça, Jay pouvait le comprendre. Jetant un coup d'oeil en direction du petit tunnel qui avait servi au garçon rongeur à effrayer Icare grâce à un talent de conteur et d'acteur latent, il eut un sourire en coin, s'étonnant d'être encore capable de faire cette action.

-Tu te souviens de cette histoire?

Demanda-t-il d'une voix neutre, tranquille, aimable mais posée alors qu'auparavant il aurait déjà sauté sur Vermine comme un gosse. Les larmes des cieux font grandir les fleurs, la pluie des yeux fait grandir les enfants... Et la souffrance qu'avait connu Icare, une de plus dans sa vie chaotique l'avait fait mûrir cette fois. Il s'était refermé sur lui-même comme auparavant mais pas de manière totale non plus puisqu'il était capable de communiquer quand même... Le changement résidait surtout dans son attitude, bien plus mature, adulte et méfiante. Mais fallait-il vraiment se méfier de Vermine? Un ami!

Dans un léger soupire, Vermine referma le livre. Il venait de le terminer. Une bonne lecture, une de plus. Il aurait aimé que l’ouvrage soit plus long, que jamais ne vienne le mot « fin »… Lui qui un instant auparavant était transporté par l’émotion en s’imaginant l’époustouflant dénouement, était à présent juste mélancolique. Son regard absent errait sur la couverture du livre, lisait et relisait le titre. Ernest sentit son chagrin croitre. Il eut bien vite un poids dans l’estomac. Quand l’imaginaire s’effondrait, quand il n’y avait plus cette muraille de rêve pour le protéger, il faisait face à la réalité, à ses souvenirs, à l’horreur de ce qu’il avait vécu. Il était loin, très loin de s’en être remis. Les larmes lui venaient aux yeux. L’une d’elles glissa le long de sa joue et resta suspendu à un poil. Sentant cela, le garçon parut émerger de la tristesse qui s’était sournoisement emparée de lui. D’un revers de manche, il essuya sa joue puis il déposa le livre sur le lit. Ensuite, il jeta un coup d’œil au chronomètre. Il indiquait 16 minutes. C’était assez. Le jeune mutant retira son casque et le débrancha avant de soigneusement le remettre à sa place, dans l’armoire. Sans cette invention, l’existence de l’ex-cobaye aurait été invivable. En refermant la porte de l’armoire, Vermine aperçu le soleil qui passait par la fenêtre. Le verdoyait parc s’étendait derrière la vitre. Aussi beau soit-il, l’enfant ne le trouvait pas accueillant. Il préférait les lieux sombres et souterrains, les lieux où on ne croisait presque personne. Son traumatisme n’avait fait que renforcer cette affinité. Mais dans le parc, il y avait ce gros terrier. Le jeune mutant ne savait plus très bien comment il l’avait découvert mais il se souvenait qu’il s’y sentait bien, mieux que dans sa chambre. Alors il décida de s’y rendre.

Cinq minutes plus tard, il déambulait dans le parc à la façon d’un automate. Sa mine d’atterrement dissuada les quelques personnes qui auraient voulu l’accoster de le faire. L’hybride ne pensait qu’au tunnel. Celui-ci avait prit en son esprit une importance tout à fait disproportionnée. Il devait absolument s’y rendre, comme si sa vie en dépendait. Ce n’était en fait qu’une nouvelle lubie, une obsession maladive.

Tout d’un coup, surprise. Ernest était arrivé au terrier mais quelqu’un lui avait adressé la parole. Ce quelqu’un, il ne l’avait pas remarqué. Dans son état, il n’aurait pas remarqué un éléphant au milieu d’un couloir. Ce quelqu’un disait s’appeler Icare. Icare… celui de la légende ? C’est au personnage mythologique que pensa l’enfant-rat. Il s’immobilisa et se tourna vers l’ange.

-Icare… répétât-il, mollement.

Il observa le jeune homme. Non, ce n’était pas Icare. Icare n’avait pas de véritables ailes. Mais alors, qui était-ce ? Le garçon chercha un instant puis renonça. Ce n’avait pas d’importance. Il allait disparaitre dans le tunnel quand le prénommé Icare lui fit une autre remarque. Il évoquait une histoire, une histoire sur le terrier. Pour la seconde fois, Ernest s’immobilisa et regarda l’ange… puis le tunnel. De quelle histoire s’agissait-il ?

C’était une vraie métamorphose. Vermine n’avait peut-être pas changé physiquement, mais il semblait pourtant être un autre. Où était passé sa fierté, son assurance ? Il n’était plus que l’ombre de lui-même : un gosse amorphe et triste. Sa tenue négligée, un jean et un t-shirt débraillé et tâché, ne faisait que le souligner.

-Icare… reprit le jeune Mutant, perplexe.

Il ne le reconnaissait pas, c’était évident. Comment l’aurait-il put vu sa mémoire défaillante et la nouvelle apparence du jeune homme ? Tout fois, il se souvenait de l’histoire. Il se souvenait de son propre récit, de son propre jeu d’acteur. Pour qui jouait-il ? Pour... Icare… Une lueur de surprise perça dans le sanglant regard de Vermine. Maintenant, il se rappelait qui était Icare. Mais ce souvenir ne correspondait pas à l’individu qui s’adressait à lui. Il en déduisit qu’on essayait de le duper. Tout le monde, ou presque, savait qu’il était devenu un peu fou. La colère se peignit sur son visage bestial. Quand il s’exprima de nouveau, ce fut avec une froide hostilité.

-L’Icare que je connais n’est qu’une lopette pleurnicharde. Mais c’est toujours mieux qu’être un grand couillon pseudo mannequin comme toi. Maintenant dégage, où j’te taille en pièces.

Ce n’était pas une exagération, Vermine était tout à fait prêt à exécuter sa menace. Et on le sentait à son attitude qui, en l’espace d’une poignée de secondes à peine, était devenu celle d’une bête belliqueuse. Ce qu’il avait dit sur l’Icare qu’il connaissait, il le pensait. Mais il n’avait évoqué que ce qui le dérangeait chez cet individu. A côté de cela, il aurait put faire nombre d’éloges. Il n’en avait juste pas envie. Quand on se sentait mal, on ne voit pas les choses du bon côté.

Le jeune homme aurait dû s'y attendre. La violence de l'enfant-rat débraillé le surprit mais pendant une seconde à peine. Répondant par réflexe, Icare déploya ses ailes blanches pour se donner plus de carrure et défier le gamin poilu de l'attaquer. Il finit par soupirer et abaisser sa garde. C'était stupide de se battre pour rien... Vermine avait été son ami après tout. Son ami? Vraiment? Avec la suite d'adjectifs qualificatifs que lui avaient donné le rongeur? Pas sûr. Cependant Jay n'était plus du genre à pleurnicher pour une pseudo amitié rompue, et heureusement, sinon il se serait présentement enfuis, enfermé dans sa chambre et aurait éclaté de sanglots pendant deux jours consécutifs en se traitant soi-même de monstre. Pourtant, côté confiance en soi le nouvel Icare n'avait pas beaucoup grandi, et c'était peut-être pire qu'avant encore! Car désormais on seulement ses ailes étaient une erreur de la nature, mais son physique modelé entier l'était... Mais cela s'exprimait différemment, Josh avait apprit à le cacher dans l'optique qu'une scientifique folle ne décide pas encore de prendre comme cobaye, un gamin à l'allure fragile et égarée. Tous ses ennuis venaient de là, Jay en était sûr et c'est pourquoi il avait changé d'attitude.

-J'ai eu... Quelques soucis avec une... dingue de la seringue dirons-nous.-Pourquoi le disait-il? Et surtout avec ce ton neutre?! Comme si cette rencontre était déjà surmonté, que la souffrance n'existait plus! Aurait-il réussi comme il en rêvait autrefois à devenir insensible à sa propre douleur? S'en devenait effrayant, ce calme, cette sincérité avec laquelle il avait balancé cette histoire qui expliquait tout!-Quant à la lopette pleurnicharde, excuse moi mais là, c'est toi qui semble avoir prit le rôle...

Répondit le jeune homme en haussant simplement les épaules. Il trouvait à Vermine un air farouche, même dangereux, pourtant le mutant ailé ne voulait pas se laisser impressionner cette fois; bien qu'il soit au fond, un peu inquiet quant à l'attaque éventuelle du rat... Il retenait surtout la mollesse avec laquelle le demi-rongeur avait répété son nom par deux fois, le pauvre avait l'air vraiment pommé. Cependant Jay n'imaginait bien évidemment pas à quel point c'était rendu! L'enfant-rat avait pleuré mais lui ne l'avait pas remarqué... Sa réplique allait en ce sens mais il n'imaginait pas combien ça collait avec la situation de Vermine, ne se fiant lui, qu'à son air négligé et son temps de réaction.

-C'est compliqué à expliquer... Mais c'est bien moi. Je rappelle avec exactitude de l'homme-acier qui voulait t'embêter et qui avait bouché le trou de ce terrier que je t'avais montré, en imaginant que l'on pouvait arriver dans un autre monde. Puis j'ai atterri avec lui dans la courrette, là-bas, celle dont je t'ai également parlé. L'atterrissage a été une catastrophe et ce sont un garçon et une fille plus âgés que moi qui m'ont aidé.

Le jeune homme se rappela de la beauté des deux personnes, à tel point que même sans ailes, ils faisaient à l'époque, plus angélique que lui. Là c'était difficilement possible vu que Gretchen avait modelé son physique en fonction. Icare peinait cependant à y croire, à tel point qu'il ne comprenait pas qu'on puisse le traiter de "pseudo-mannequin". Il était un monstre! Trouvant des défauts à chaque fois qu'il passait par hasard et sans jamais s'y attarder devant un miroir: ces cheveux blonds étaient trop clair, ses yeux d'azur étaient horribles tout simplement parce qu'ils n'étaient pas verts comme avant. Ses ailes d'un blanc stupide et salissant etc... Mais sous cette critique bassement matérielle, se cachait évidemment toute une psychologie, une souffrance abominable dû à la perte d'identité, tant physique que morale.

Et Vermine? Que lui était-il arrivé? L'ange voyait bien que quelque chose ne tournait pas rond, mais n'étant pas télépathe, il ne pouvait pas deviner. Le garçon-rat ne lui inspirait pas de pitié, lui-même détesterait qu'on en est pour lui! Avant non, il cherchait constamment l'affection, l'écoute, sans pour autant être égoïste, préférant tout de même aider les autres, mais en sérieux manque de tendresse. Maintenant Icare trouvait cette attitude dégradante! Et le fait qu'il reste malgré les paroles peu aimables de son camarade, c'était simplement pour lui laisser le temps, le temps de se reprendre peut-être? Comme lui en avait réellement besoin pour se retrouver. C'était une sorte de solidarité que son coeur bon n'avait pu gommer de son esprit malgré son vécu. L'ange agissait aussi au nom de leur ancienne amitié, car cela comptait encore pour lui malgré les apparences. Les rôles semblaient s'être inversés et Icare avait envie de "bouger" Vermine, même sans savoir ce qu'il avait vécu, il imaginait bien qu'un enlèvement ne pouvait pas être quelque chose d'agréable! Qu'il soit tombé lui aussi sur une scientifique folle ou un groupe anti-mutant ou simplement quelque demandant une rançon à ses parents voir à l'institut... Tout était possible mais le résultat était quasiment le même, au moins la base du traumatisme en tout cas.

-Ton auteur favori est Howard Wedness. Selon toi il fait dans "l'horrifique intelligent"...

Termina Jay en esquissant un petit sourire... Il lui avait fallu remonter loin pour se souvenir de ce dialogue entre eux! Après tout ce qu'ils avaient connu, cette rencontre semblait avoir lieu des années plus tard! Pourtant, malgré le fait qu'Icare ne ménageait pas l'enfant-rat, et que ce dernier ne semblait pas non plus souhaiter être gentil, l'ange semblait souhaiter renouer avec lui. Et ce malgré ses a priori du début, justifiés d'ailleurs vu la série de compliments balancés par Vermine. Pourquoi n'était-il pas plus touché que ça? Se souvenait-il que c'était simplement le style du rat ou s'attendait-il à des insultes bien plus graves que "pseudo-mannequin"? Sans doute oui... La torture l'avait forgé et peu de choses pouvaient lui paraître réellement graves maintenant, même si ce n'était qu'en apparence, car au fond, sans même en avoir conscience, l'ange était touché en profondeur. Bien évidemment.

Icare ou pas Icare ? Telle était la question. Ernest se laissa un instant de réflexion. Le jeune-homme s’était montré convainquant grâce à une argumentation bien fournie. Vermine se souvenait maintenant bien de cette journée et il était donc en mesure de confirmer les dires de l’ange. Cela faisait-il pour autant de ce dernier l’Icare qu’il prétendait être alors qu’il ne lui ressemblait pas du tout ? Il aurait très bien put voler les souvenirs du véritable Icare. En tout cas, que ce soit un usurpateur ou non, l’histoire semblait tout autant rocambolesque. L’enfant-rat haussa finalement les épaules.

-Ils arrivent à grandir les gens avec la chirurgie esthétique, maintenant ? fit-il d’un ton acide. J’pensais qu’un peu plus de virilité te serais profitable, j’me trompais.

Ernest avait conclut qu’il était réellement en plaisance d’Icare. Cela ne lui fit pas vraiment plaisir mais au moins cela ne le dérangea pas, ce qui était déjà bon signe. Cela ne l’avait également pas rendu plus aimable. Il frappait avec les mots, c’était une façon comme une autre de se défouler. En revanche, ce n’était pas une manière pour se défendre face à la pique du jeune homme qui insinuait que le garçon avait prit sa place de mauviette. Les agressions verbales glissaient sur Vermine sans même qu’il ne les remarque. Sans la moindre élégance, le jeune mutant se laissa tomber au sol pour s’y assoir. Il était à présent adossé à côté du tunnel et fixait l’ange avec curiosité.

-Alors donc c’est toi… et c’est qui la folle de la seringue ? Va falloir que tu lui demandes de faire du bon travail parce que ça laisse vraiment à désirer.

Il enfonçait le clou mais en profitait pour poser une vraie question. Il voulait savoir la cause de cette métamorphose… juste pour savoir.

-Bah... On ne peut pas toujours avoir raison-Fit-il en répondant par un trait d'humour. Beaucoup de gens s'étaient effectivement trompés en lui disant qu'un peu plus de virilité lui irait bien, et lui même en le pensant. N'était-il pas un monstre désormais? Mais bon, mieux valait en rire, le résultat aurait pu être pire, c'était ce qu'essayait de se dire Jay.- J'ai pas vraiment eu le choix faut dire...

Grogna Icare ne guise de réponse, ce n'était même pas de la chirurgie esthétique, c'était pire! On avait été piocher dans ses molécules pour modifier son génome quand même... L'intrusion était bien plus violente! Il en résultait que Jay était plus fragile qu'avant, non pas en ce qui concernait les coups, au contraire mais aux maladies. Un simple rhume le mettait parfois hors d'état de nuire pendant deux ou trois jours, avec des poussées de fièvre importantes ou tout du moins des mal de tête vraiment gênants. A jouer avec l'ADN on obtenait parfois des avantages, mais toujours des inconvénients. S'asseyant non loin de Vermine, avec bien plus d'élégance en revanche, le jeune homme regarda un moment le soleil avait de répondre à Ernest. Cela ne le dérangeait pas de dévoiler l'identité de la folle de la seringue... Pas du tout même! Plus son nom serait dévoilé, mieux ce serait! Bien que cela ne bloquerait sûrement pas cette sorcière qui avait déjà dû adopter une autre identité.

-Gretchen Kraüze, et toi, c'est qui qui t'as lobotomisé le cerveau avec sa chirurgie?

Icare lançait ça tout à fait au hasard, il ne parlait pas de travail scientifique en ce qui concernait Vermine... Vu que ce dernier n'avait pas un physique différent, le jeune homme pensait que c'était plus une chirurgie morale qui avait entamé l'enfant-rat, le rendant si... Si... Différent de lui-même! Certes les sarcasmes étaient toujours là mais depuis quand le rongeur ne répondait-il pas aux piques? Depuis quand était-il si négligé? Bon d'accord, depuis toujours en ce qui concernait le style vestimentaire-quoique le jour de leur première rencontre celui-ci avait un veston très élégant.- mais disons mentalement?! Icare sentait bien que quelque chose n'allait pas dans la mollesse, l'abandon puis la colère soudaine du gosse... Sans compter son apparence tantôt amorphe, tantôt agressive! Jay n'avait pas vu Vermine si souvent que ça mais ses caractéristiques étaient si particulières que le moindre changement était notable! L'ange pensait de plus en plus à un enlèvement pour demande de rançon, après tout Ernest avait un langage assez élevé, et son nom-que lui avait révélé Daniel Hopes qui haïssait les noms mutants. [HJ: joué en rp avec lui] indiquait qu'il venait d'une aristocratie certaine... Ou alors c'était simplement le fait qu'il soit particulièrement mûr pour un enfant de 12 ans?

En fait Icare n'en savait trop rien, et il était du coup "curieux" de savoir quelle avait été la fameuse expérience du garçon-rongeur qui avait tant remué Ghinzu. Ses yeux bleus azurés se posèrent sur Vermine puis sur le ciel aux couleurs semblables à son nouveau regard, nouveau regard qu'il haïssait pour ne plus être le sien... Mais qu'importe, pour le moment, se lamenter sur son sort était inutile, et Icare l'avait apprit après maintes et maintes leçons. L'enseignement avait été difficile, le mutant avait mit du temps à comprendre que paraître fragile et désarçonné était très dangereux. Désormais c'était acquis et il ne ménageait pas l'enfant-rat, ni ne lui offrait d'occasions trop nombreuse pour se gausser de sa personne. En fait, on pourrait presque penser que Vermine lui avait donné des cours et que le jeune homme l'avait bien écouté, mais il y avait toutefois une certaine différence: Jay avait un meilleur fond que celui de l'enfant-rat, dans le sens où il agissait ainsi pour se protéger, pas parce qu'il s'en fichait ou s'en amusait. Selon lui Vermine n'avait pas à être chouchouté, il fallait agir comme si de rien ou presque n'était, c'était "ainsi" que son ancien ami lui paraissait se sentir mieux. Encore que ça, c'était difficile à définir vu le caractère si particulier du garçon-rongeur qui ne semblait pas très stable dans sa tête.

-Quelqu'un te trouvais trop aimable, c'est ça?

Acheva l'ange avec un petit sourire en coin. Étrange conversation... Mi animale, mi amicale en ce qui concernait Icare qui, plus endurci qu'avant, commençait enfin à prendre en compte, les plaisirs de s'envoyer des petites piques, et ce n'était pas pour autant que le garçon détestait Vermine. Non c'était juste un moyen de communiquer différent, divergent, décalé. Plaindre Vermine ne le prenant dans les bras pour le consoler, non seulement c'était un coup à attraper des puces [HJ: désolé pas pu résister XD ] mais aussi une morsure. Ce n'était pas ce genre d'attentions qui allaient le rendre plus heureux... Bizarrement, ces échanges d'apparence assez "violents" semblaient bien mieux lui correspondre... Et pour une fois, Icare aussi s'y plaisait, sans doute parce que cela minimisait la gravité de son vécu... En était-ce ainsi pour Ernest?

-Ben, si tu veux tout savoir… commença Vermine.

Il allait répondre. Pourquoi ne l’aurait-il pas fait ? Il n’avait rien à cacher. Et l’indifférence à son propre égard qu’il manifestait désormais ne pouvait que le pousser en cette voie. Il allait pondre un récit plat, banal, comme s’il n’avait plus à se sentir concerné. Après tout, il aurait très bien put s’agir de l’histoire d’un autre. Et puis, Icare, lui, avait évoqué sa propre mésaventure sans certes donner de détail mais tout de même, on pouvait deviner qu’il avait vécu l’enfer. Ernest n’avait qu’à faire pareil. « …c’est Phobos qui voulait faire mumuse avec l’Altérium. » Voilà, ça irait très bien. L’affaire expédiée en une seule phrase ! L’ex-cobaye formula cette phrase mentalement. Oui, il allait répondre… ou plutôt… il aurait voulu avoir la force de le faire…

Alors que la phrase prenait corps en son esprit, elle prit des dimensions effrayantes. Elle fut une fenêtre vert un passé bien trop proche, bien trop douloureux. La mémoire d’Ernest était peu commune. L’enfant était un surdoué. Mais ici, cette qualité se retournait contre lui. Il n’avait rien oublié, strictement rien. A chaque fois qu’il y repensait, c’était toujours aussi net, aussi poignant. Il revoyait, il réentendait, il avait même l’impression de ressentir… Le parc de l’Institut vola en éclats. Vermine était de retour dans le laboratoire, dans sa prison de verre. Il était nu, il avait froid, il avait mal. Derrière la vitre blindé, Richard Carval le toisait de son regard d’aigle. Le docteur fanatique avait marqué l’enfant-rat bien plus que Phobos, commanditaire de l’enlèvement. Les bras mécaniques avaient immobilisé le cobaye pour pratiquer de nouvelles injections. Les substances chimiques employées auraient tuer n’importe qui… sauf le pauvre Ernest que l’Altérium protégeait. Mais le rat n’en ressentait pas moins des d’atroces effets heureusement très limités dans le temps.

Icare remarqua toute de suite que quelque chose allait de travers. Vermine n’avait même pas terminé sa phrase. Son regard s’était exorbité, son corps était parcourut de tremblement quasi-frénétique. Sa respiration, devenue laborieuse, esquissa un gémissement.

L’un des bras mécaniques s’approchait, l’aiguille à son extrémité dégageait une fine vapeur. On avait forcé le cobaye à garder la gueule ouverte, il fallait le piquer sur la langue, le muscle le plus accessible et le plus simple à observer.

Tout d’un coup, Vermine se leva. Une part de son esprit savait encore qu’il était dans le parc et que juste à sa gauche se trouvait le tunnel. Il se jeta à l’intérieur de se dernier et y disparut. Il alla tout au fond, là où il faisait le plus sombre. Puis il fondit en larmes. Ses pleurs emplis de souffrance arrivèrent jusqu’aux oreilles de l’ange.

Icare ne sut comment réagir au premier abord. Il resta scotché comme un abruti sur son tronc d'arbre avant de comprendre que Vermine avait détalé. De là où le garçon était, il entendait les pleurs de l'enfant rat. Ainsi le garçon rongeur avait vraiment changé! Jay croyait que tout prendre à la légère aiderait son ami... Quel imbécile! Si intelligent soit ce gosse, il avait 12 ans!!! Et tout le monde ne réagissait pas de la même façon! L'ange se redressa, se traitant intérieurement de débile mentale et de bien d'autres choses bien moins jolies. Il avait pourtant vu le désarroi de Vermine se peindre sur son visage petit à petit! D'abord Ernest n'avait pas fini sa phrase, ensuite les yeux de celui-ci s'étaient exorbités! Seulement le jeune homme n'avait pas voulu prendre le garçon dans ses bras, ce n'était pas le genre de Vermine, et puis il pensait que ce dernier avait besoin de temps pour se lancer et finir sa phrase, qu'il ne fallait pas l'obliger à parler mais pas non plus le lui dire pour ne pas le couper dans son élan. Jay se releva doucement, de toutes façons, là où était caché Vermine, en se dépêchant comme en trainant, jamais l'ange ne pourrait le récupérer. D'une il était trop grand-surtout maintenant- pour entrer là-dedans et de deux, son pouvoir l'avait rendu claustrophobe, depuis sa mutation, le garçon peinait à tenir dans des endroits enfermés ou trop noirs, déjà dès tout petit mais lorsque ses ailes étaient apparues, c'était encore pire... Donc inutile de faire paniquer Vermine visiblement en pleine crise de Flash en courant au risque de faire trop de bruit. Icare aussi connaissait ces séances retour particulièrement désagréables, lui-même vivait ça en plein jour parfois, juste pour avoir parlé à quelqu'un, ou entendu un son qui lui rappelait les pas de Gretchen, le bruit de sa peau déchiquetée par les fils barbelés ou l'odeur du désinfectant... Mais il avait réagit autrement, s'endurcissant considérablement tandis que Vermine essayait mais n'y parvenait pas. Ce n'était pas une différence de courage, seulement de personne. Et de toutes façons, l'ange aussi avait des moments de chagrin inconsolables et sans raison d'être d'un point de vue extérieur... Pour ne pas citer ce moment où, dans la salle de bains d'Ace, s'étant découvert pour la première fois dans le miroir depuis sa transformation il avait hurlé et s'était cogné contre la douche, s'ouvrant le bras et la jambe puis restant prostré comme un idiot.

S'approchant doucement, l'ange s'assit à l'entrée du tunnel. Il resta un long moment silencieux, par respect tout simplement. Par respect pour ces pleurs incontrôlables, ces souvenirs que lui aussi partageaient plus ou moins avec l'enfant rat. La durée de l'enlèvement était moindre pour lui mais peut-on juger la souffrance avec le temps d'enfermement? Non pas spécialement, certaines choses avaient été pires pour Vermine, d'autre pour Icare... Et encore, si tenté que l'on puisse admettre un degré pour ce genre de choses. Visiblement le garçon rat avait été atteint dans son mental, Icare ne savait toujours pas si c'était à cause d'un scientifique fou ou d'une bande d'anti-mutants voir des ennemis de la famille Lenoir mais qu'importe? Les sanglots de l'enfant en disaient long sur son calvaire. Au bout d'un très long moment, alors que le temps passait, l'ange laissa sa voix s'élever tout simplement, usant de son pouvoir pour la rendre plus profonde, plus douce... Et tenter de réconforter Ernest.

-Je suis là... C'est peut-être peu de choses, mais je suis là...

Fit-il d'un ton amical, ni trop compatissant ni envahissant, attendant à l'extérieur de la grotte. Puis se souvenant d'un détail, l'ange sourit d'un air entendu. Il se souvenait bien de la peur que lui avait causé Vermine en lui contant son histoire... Celle d'un enfant rat particulièrement sauvage...

-De doux murmures s'élevaient de la nuit, et des éclats carmins s'échappaient des ombres. Le vent ne pénétrait pas dans cette caverne, bien au contraire, il semblait en sortir, naître au fond de ces entrailles profondes. La présence qui se faisait ressentir n'était pas humaine, mais elle avait du coeur à son ouvrage, toujours, creusant dans les ténèbres. Quoiqu'elle fasse, elle y mettait toute son âme. Pour effrayer ses amis et s'en amuser, autant que pour paralyser ceux dont la noirceur n'était égal qu'aux entrailles de cette grotte. Celui qui disait être son ami croyait en lui, malgré ses yeux carmins, et ses griffes sanglantes, l'enfant n'était pas une bête, il le considérait comme quelqu'un qui avait beaucoup de force intérieure et qui pourrait surmonter ce qu'on lui avait fait subir... Un jour, il jaillirait de cette grotte pour se venger de ceux qui l'avaient fait souffrir.

A partir de là, il reprenait les dires de Vermine, plus ou moins...

-Ce n'était pas le physique qui faisait tout, mais l'apparence que l'on offrait à celui-ci... En jouant de sa double-identité dont il était fier, de ses paroles de conteur savamment dosées... Il saurait y faire. Jaillissant au bon moment, au bon endroit. Tout, oui tout... Sauf les laisser gagner en s'abandonnant, en abandonnant tout simplement...

Icare se tu, attendant la suite de l'histoire qui viendrait peut-être? Qui sait Vermine allait-il décrire à partir de là la manière dont il bondirait sur son ennemi? Le pousser à se venger n'était sans doute pas très "Ghandiesque" mais Jay n'était pas en position pour philosopher... Lui-même rêvait de se venger de Gretchen, il serait le dernier à proposer à Ernest de tendre l'autre jour, peut-être que de s'impliquer dans cette affaire en ayant vécu à peu près la même chose était une erreur... Mais qu'en avait-il à faire? Josh savait que pour l'instant, le désir de vengeance envers son ennemie lui offrait parfois la possibilité d'arrêter le flot de larmes pour lui donner une envie de combattre et surtout la force d'effacer les images affreuses qui se baladaient dans son esprit. Oh certes Icare était loin d'être Howard Wedness mais il avait essayé de donner à son récit, sa courte histoire, un goût de leur première rencontre mais aussi... Son propre désir de vengeance, la manière dont on avait envie de croire que cela se passerait! Que son impuissance face au matériel, l'expérience et la félonie de Gretchen ne soit qu'un handicap... Et que l'imagination, la ruse fasse le reste! Le physique et les moyens ne devaient pas compter, Vermine avait eut raison lors de leur première rencontre. On pouvait toujours renverser la situation, il fallait y croire! C'était l'unique moyen de tenir... Au moins pour le moment.

Les pleurs, les gémissement, lentement cessèrent. Quand ils se furent totalement évanouit, il n’y eu plus rien si ce n’était le silence… l’attente… Vermine allait-il poursuivre l’histoire ou mieux, la jouer ? Allait-il faire comme au premier jour où il avait rencontré Icare ? Non. L’idée ne lui traversa même pas l’esprit. Sapés par les douloureux souvenirs, sa volonté s’en était allé. Le voilà abattu, brisé. Il resta là, prostré contre la paroi de terre dans l’ombre et la relative solitude du tunnel. Pourtant, il avait cessé de verser ses larmes. Difficile de savoir, vu son état, si cela était un bon signe. Il avait entendu le récit de l’ange. Il n’en pensait rien. Il était… comme une machine à l’arrêt. Sa réminiscence avait fait office de coupe circuit.

Une minute passa… puis deux… puis cinq…

Sans doute le jeune homme aux blanches ailes se questionnait, se méfiait ou bien s’impatientait. L’attente aurait put être plus longue. Vermine aurait put rester inerte plusieurs heures durant. Mais le hasard, à moins que ce ne soit la voix de l’ange, fit en sorte que le garçon sorte de sa maladive passivité. Le voilà redevenu lucide, enfin à peu près. Le cœur lourd, il était maintenant accablé par sa condition. Une fois de plus, il réalisait à quel point sa raison vacillait facilement. Elle était comme une bougie menacée par le vent. Elle s’était rallumée, c’était déjà ça. L’hybride rat se dirigea à quatre pattes vers la sortie du tunnel. Il ne fit pas spécialement preuve de discrétion. Une fois à l’ouverture, il ne fit passer guère plus que sa tête qu’il tourna vers le séraphin. Son visage de rongeur portait encore les marques de la terreur. Il en était devenu plus laid… plus vieux. L’enfant prit la parole d’un ton morne.

-Faut se méfier des histoires. Parfois, elles se réalisent et alors, on le regrette.

Ernest soupira puis poursuivit.

-Pour moi, c’était pas assez d’être mutant. J’voulais plus. Ben le « plus », il est venu à moi et il m’a défoncé la gueule. Tu sais Icare, honnêtement, je ne t’apprécie pas. Tu me fais penser à moi… ou en tout cas, tu me faisais. Ton aspect fragile m’insupportait ; j’avais peur d’être comme toi mais de le cacher. Je m’étais pas trompé.

Vermine se recula légèrement. Il s’avachit dans le tunnel et renifla bruyamment. Son nez était obstrué à cause de son chagrin. Il se moucha dans ses mains puis poursuivit.

-Si tu veux savoir ce qui m’est arrivé, ça me gêne pas. J’ai rien à cacher. Mais c’est pas à moi qu’il faut demander. J’ai pas la force de raconter. Demande à monsieur Hopes, il sait.

Voilà, il avait dit ce qu’il avait à dire. Au moins, sans donner la réponse, il avait répondu. Maintenant, il se mit à attendre. Il ne fallait pas lui demander d’entretenir la conversation. De toute façon, il commençait déjà à s’égarer dans ses pensées tout en malaxant entre ses doigts sa propre morve.

-Au moins les choses évoluent, je suis assez content de ne plus te "ressembler" si c'est pour faire preuve d'autant de mauvaise volonté que toi.

Répondit l'ange tranquillement; ses yeux bleus rivés sur l'entrée du trou. Il se méfiait tout de même, ne sachant pas quelles réactions pouvaient avoir l'enfant rongeur, lequel semblait avoir bien changé! Le jeune homme se redressa de moitié, désormais accroupi, il avait plus d'appuis pour réagir en conséquences en cas d'attaque physique. Icare savait qu'il ne devait pas sous estimer Vermine, il avait déjà vu le garçon surgir de ce trou et sa vitesse était assez impressionnante même lors d'une joute amicale, alors en combat, ce devait être quelque chose! Ne sachant pas pourquoi il restait assis là, Jay demeura un moment silencieux, puis il cueillit un brin d'herbe, jouant avec, semblant attendre que l'orage silencieux cesse.

-Je ne demanderai rien à Hopes, je ne suis pas un voyeur. Que tu me racontes ou non ne m'importe pas. Je sais que nous aimons tous avoir nos secrets, et que même si nous n'aimons pas cela, nous en avons besoin. N'oublie seulement pas que tu as des gens pour t'aider, pour te parler. Qu'il ne s'agit pas de pitié mais simplement d'amitié, ou de solidarité, vois ça comme tu veux mais ne dédaigne pas les mains tendues, tu n'en seras que plus malheureux.

S'il n'avait pas osé demander de l'aide à Ace, lui-même serait dans un état déplorable maintenant. Déjà qu'il ressentait parfois de la haine, de la peur ou d'autres sentiments tous aussi violents émaner de son coeur sans raison apparente! Il fallait alors penser aux siens, à ses proches pour voir sa tension baisser. Depuis que le jeune homme avait accepté le soutien de Vortex, les choses allaient mieux, mieux qu'avant où il restait enfermé dans sa chambre, dans son monde, entouré de 9 frères et soeurs mutants. Souriant finalement d'un air pensif, puisant de la patience dans le souvenir de sa douce mère si tolérante, le mutant décidé à casser la gravité du moment proposa d'un ton à fait anodin.

-T'as déjà volé? ça te dirais d'essayer?

Icare avait rendu de nombreuses personnes heureuses en acceptant de les emmener là-haut, dont lui qui refusait tout d'abord cette capacité avec une haine étonnante. Maintenant il voyait ça comme une thérapie magique! Et puis le faire en compagnie n'était que plus agréable! Malgré son ressentit Jay tâchait de ne pas en vouloir à Vermine. Il parlait ainsi à cause de la douleur, lui aussi avait été odieux parfois avec sa famille, alors que celle-ci le soutenait! Enfin dans un état moindre que l'enfant-rat certes mais quand même! Et puis mince à la fin, le garçon était un enfant de 12 ans, qu'il soit surdoué ou non, ça restait un gosse! Le jeune homme avait l'impression que lâcher Vermine malgré ses dires qui en prouvaient l'envie serait l'abandonner lâchement. L'ange se promis donc d'essayer quelques tours avant de laisser tranquille l'enfant-rat. Il savait très bien que parfois, un "dégage" hurlé à haute voix était en fait un "ne pars pas" silencieux, hurlé avec le coeur pour l'avoir vécu lui même. On verrait bien songea-t-il, calme et psychologue, toujours accroupi dans l'herbe.

Sur l’instant, Vermine ne répondit rien. Il continuait de triturer sa morve alors que son regard restait vague, plus passif que pensif. Avait-il des amis ? Oui et non. Cela dépendait du sens qu’on prêtait au mot « ami ». Il avait des gents qui s’occupaient de lui et qui tenaient à lui. Parmi eux : le bon professeur Hopes qui était presque devenu un guide pour lui et la gentille Ennora qui avait risqué sa vie pour le protéger des sbires de Phobos. Et puis, peut-être y avait-il Icare aussi. Le jeune homme n’était-il pas entrain de s’efforcer de l’aider ? Ernest n’était pas seul. Il avait des gens vers qui se tourner. Mais il n’avait pas d’ami, pas de personne de son âge avec qui jouer. Ici, à l’Institut, ce n’était évidement pas sa mutation qui le laissait à l’écart, c’était son état de surdoué. Il était un enfant sans vraiment en être un. Il était à la fois trop mature et pas assez pour s’entendre avec ceux de son âge. A ceci s’ajoutait sa folie, évidement. Il n’était pas seul mais il se sentait seul. Il s’était toujours senti seul, même avant, même quand il était humain. Et maintenant que la dépression le guettait, maintenant que son esprit meurtrit le tourmentait, il rejetait ce qu’il avait et ne pensait qu’à ce qui lui manquait. Quelque part, il était seul parce qu’il voulait l’être. De l’aide, il en avait besoin, mais il ne la demandait pas. Pire encore, si on lui proposait assistance, il risquait fort de refuser comme il le faisait actuellement face à Icare. L’enfant-rat s’enfermait dans son malheur. Richard Carval, ce scientifique aussi génial que terrible, avait réussit à briser le jeune mutant, peut-être pas totalement, mais une bonne partie. Peut-être qu’au fond il aurait mieux valut que Vermine devienne amnésique. Son passé trop lourd le noyait. Mais voilà, encore une fois, il était surdoué, il se souvenait de tout.

-J’ai déjà volé, finit-il par dire d’une voix presque monocorde. Des livres, de l’alcool, de la bouffe... c’est sans doute plus amusant que de voler au sens où tu l’entends toi.

Il mentait. Il avait envie de voler. Il en avait même rêvé. Il jalousait Icare, il voulait ses ailes. D’ailleurs, est-ce qu’il ne pourrait pas les avoir ? Ça pouvait s’arracher ! Peut-être même qu’avec un peu de chance ça s’enlevait, comme un vêtement. Une lueur peu rassurante passa dans le regard du garçon qui, tout d’un coup, se braqua sur l’ange. En un clin d’œil, l’idée s’était muée en obsession. L’hybride renifla puis reprit.

-Quoi qu’en y réfléchissant…

Il éternua. Ses narines bouchées expulsèrent un peu plus de cette substance verdâtre répugnante. Elle s’étendait en minces filets au bout du museau et maculait assez abondamment les mains du garçon. Peu importait. Vermine n’eut même pas le réflexe de s’essuyer sur quoi que ce soit.

-…je veux bien essayer ! finit-il avec un semblant d’enthousiasme.

Ceci dit, il quitta le terrier. Le plan, sournois, était en place. Et cette question d’amis, d’aide, était désormais bien loin de ses préoccupations.

Au moins chacun avait expérimenté un sens du vol. Le jeune homme ne put s'empêcher de sourire, l'allusion était amusante! Il n'allait de toutes manières pas juger Vermine; son petit ami était un tueur notoire, de ce côté là Icare n'avait rien à dire, mais bon mieux valait ne pas trop se la ramener avec ça. Il fut surpris, alors qu'il projetait de laisser l'enfant rat tranquille, de le voir sortir de son tunnel pour se présenter devant lui. Une voix assez peu enthousiaste mais ayant le mérite de donner une réponse positive s'éleva d'en bas, le mutant ailé qui avait prit 15 cm-atteignant désormais les 1m85- depuis sa "rencontre" avec Gretchen trouva Ernest plus minuscule que jamais mais ça, hors de question de lui le dire. L'ange fouilla simplement ses poches puis en sortit un mouchoir. Que le garçon-rongeur ne soit pas des plus propres ok mais le coup de la morve, fallait pas exagérer. Utilisant un trait d'humour, le jeune homme tendit le bout de papier à Vermine et répliqua...

-A tes souhaits! Essuie, ça va te voler dans les yeux avec la vitesse et gâcher ton aérodynamisme!

Fit-il sur le ton d'un aviateur confirmé, faisant mine de mettre ses lunettes de pilote. Finalement il existait encore l'ancien Jay derrière ce sourire, ce ton amusé, cette envie de rire malgré la souffrance. Toujours cette notion avait été présente en lui quoique faible; maintenant il était plus enjoué que jamais, s'acceptant petit à petit, ses pouvoirs tout du moins, son physique modifié c'était encore autre choses. Ne sachant pas trop s'il devait prendre le mutant ou le laisser lui grimper dessus, le jeune homme se dit que Vermine serait mieux sur son épaule et que s'il avait besoin d'aide, ce dernier lui en demanderait. Habituellement il portait les gens dans ses bras mais pour ses ailes puissantes, l'enfant-rat n'était qu'une plume de plus sur son ossature. Il était qui plus est, très certainement agile vu sa mutation, il faudrait juste veiller à ne pas aller trop haut car l'altitude devait exercer encore plus de pression sur un petit être comme lui.

En prenant toutes ces considérations en compte, le jeune homme s'apercevait combien il s'était amélioré depuis son vol catastrophique pour entrainer le géant à l'autre bout de la courrette et le laisser tomber avant de chuter lamentablement à son tour; ou encore ce jour où; voulant sortir de l'institut il avait tout juste passé le portail en voletant avant d'aller se noyer dans le fleuve proche de l'école. Les choses avaient changé et si Jay ne s'assumait pas à 100%, il allait tout de même mieux, suffisamment bien pour vivre en harmonie avec sa mutation originelle, supportant moins bien celle engendrée par Gretchen mais sachant se retenir de s'arracher comme avant, les plumes unes à unes. Icare avait grandi et savait utiliser les avantages de ses dons désormais, se plaisant même à séduire Ace avec son petit air angélique, jouant allègrement dessus parfois pour plaire aux autres ou jouer sur la présomption d'innocence.

-Tu es prêt?

Lança-t-il, tout enthousiaste, loin d'imaginer les idées cruelles et illogiques-admettons le- de Vermine, n'ayant pas su décrypter son regard peu rassurant braqué sur sa personne, tout heureux de voler avec celui qu'il considérait comme un ami, malgré ses paroles blessantes, son jeune âge, son attitude étrange ainsi que son caractère différent. La limite avait failli être rompue car le seuil de tolérance quoiqu'élevé d'Icare avait pratiquement été franchi, mais apparemment ils repartaient sur de bonnes bases donc tout allait bien. Comprenant ce que Warren-avant que ce dernier ne perde sa mémoire ponctuelle, oubliant quelques jours de sa vie, donc ceux où il l'avait connu- disait en parlant de ses "précieuses ailes", ces dernières lui avaient apporté bien des ennuis, lui-même les avaient fait terriblement souffrir mais maintenant, elles lui apportaient plus de joie que de malheur, bouffées d'air frais lors de ses chagrins ou bonheur tout simple pour un vol de nuit parmi les étoiles. Les étendant sur leurs 5 mètres d'envergure et de blancheur pour se dérouiller les muscles et en attendant Vermine aussi bien que pour prendre le soleil, le mutant ailé offrit un sourire à son co-pilote, n'attendant que le "go" de ce dernier.

-L’aérodynamisme… reprit tout bas Vermine avec un petit rire empli de sarcasme.

Il se dit qu’Icare était un ignare, qu’il employait des mots dont il ignorait la définition. Comment la morve pouvait-elle influencer l’aérodynamisme d’une quelconque façon ? Evidement, il s’agissait là d’un trait d’humour mais le garçon, trop buté, ne l’avait pas remarqué. Il était surdoué, donc les autres étaient des imbéciles, c’était ce qu’il se disait de plus en plus souvent, preuve certaine de son immaturité. Toujours fut-il qu’il ne commenta pas d’avantage et qu’il s’essuya sans trop d’application. Ceci fait, il abandonna le mouchoir dans l’herbe et s’approcha du jeune homme. Son regard sanglant dévorait littéralement les blanches ailes. Il s’imaginait déjà les avoir dans le dos et se demanda si cela n’allait pas trop l’encombrer. Pfff… au pire, si ça ne lui allait pas, il les jetterait et on n’en parlerait plus.

-Je suis prêt, répondit simplement Ernest.

Ne sachant pas comment il devait « embarquer », il attendit qu’Icare le lui dise ou qu’il le prenne. Le garçon planifiait de voler les ails pendant le vol sans se rendre compte que cela pouvait être dangereux pour lui. Il s’imaginait pouvoir les « enfiler » rapidement et, grâce à elles, il pourrait atterrir sans dommage. L’absurde avait-il des limites ? Chez Vermine, on pouvait en douter. Sa raison s’inclinait trop souvent face à sa démence. En tout cas, il était prêt pour son baptême de l’air, un événement qui pour l’instant ne suscitait chez lui aucun véritable enthousiasme. Une fois de plus, il jouait la comédie.

HRP : un post court. Navré. Tu peux faire agir mon personnage pour « l’embarquement ». Il est très agile, il n’aura aucune difficulté à s’agripper.

[HJ: ah oui ^^ il est grave Vermine là quand même^^ XD ]

-Ouep... Enfin, façon de parler

Répliqua le mutant en plaisantant, il était très rapide certes mais de là à valoir les ailes d'un avion, certainement pas. Enfin, sa méthode à lui était préférable, il avait essayé la machine mais c'était fort ennuyeux de se retrouver sans les sensations, coincé derrière une vitre sale. Laissant Vermine grimper-heureusement ce dernier s'était un peu nettoyé, laissant le mouchoir dans l'herbe certes mais bon.- agilement sur son épaule, accroché dans son dos, le jeune homme se mit à courir rapidement, sprintant à vive allure. Si Jay ne tenait pas la distance, il allait en revanche très vite tant que c'était ponctuel, habitué à cela pour prendre son élan, bien que depuis qu'il volait honorablement, il n'ait plus besoin de cet artifice. Bientôt ses pieds ne touchèrent plus le sol et le mutant ailé lança un joyeux "youhou" enthousiaste, grimpant dans les airs en battant des ailes de façon irrégulière, profitant des courants porteurs. Vermine n'était pas lourd mais lui donnait une drôle de sensation dans son dos, par prudence il préférait donc éviter d'aller trop vite, stabilisant son vol à l'horizontale et montant assez haut tout de même pour que ce soit impressionnant et qu'un crash signifie la mort pour l'enfant-rongeur. Néanmoins Icare se savait assez vif pour le rattraper en cas de chute, de même qu'il faisait tout pour que cela n'arrive point en volant de manière régulière.

-ça va là-haut?! T'as vu? On voit tout l'institut, c'est marrant... On dirait des fourmis.

L'ange désigna les élèves tout en bas. Son vol gracieux faisait penser au poème de l'albatros qui déplorait la maladresse du pauvre oiseau sur terre mais louait sa beauté dans les airs. Mais si Jay était tellement en harmonie avec ce monde, c'est parce qu'il savait apprécier chaque brise, donnant tout son coeur à son action. N'importe qui pouvait espérer incarner la grâce elle-même en mettant son âme au service de l'acte effectué, enfin tant que celui-ci demeurait louable bien entendu. Le mutant tendit la main et "attrapa" un minuscule nuage, frissonnant de froid quand celui-ci se dissolve dans sa main. Cette matière n'était pas douce contrairement à ce que chantaient maints poèmes, plutôt glacé en réalité, mais c'était toujours amusant. Attendant la réponse de Vermine pour savoir si ce dernier se sentait à l'aise et s'il pouvait lui proposer quelques folies ensuite, l'ange fit demi-tour pour survoler le parc de l'institut, si grand, si majestueux et encore plus beau vu d'en haut.

-Tu veux voir un endroit en particulier?

Enfin... Pas New-York non plus! Ou alors, si Vermine se révélait être un véritable cavalier des airs pourquoi pas! Mais pour l'instant, l'ange y allait prudemment, conscient que ses capacités innées n'étaient pas présentes chez Vermine, l'être des abysses. Pour lui, aller dans un tunnel ou sous la terre était impensable, il en deviendrait claustrophobe! Il fallait respecter les spécificités de chacun, surtout si l'on emmenait l'autre dans son monde. La chose pouvait s'avérer très risqué sans une certaine prise de conscience. Songeant que ce vol là serait tranquille, Icare avoisinait les 80 km/h, ce qui était déjà pas mal remarque; ses yeux mi-clos faisaient de lui une "monture" tranquille et docile, prenant le temps d'admirer le paysage et de prendre soin de son passager. Vraiment, Josh avait hâte de connaître les réactions de Vermine qu'il ne pouvait voir vu que ce dernier était perché sur son dos entre ses deux ailes pour ne pas déranger leurs amples mouvements.

[HJ: pareil c'est court! Mais je ne voulais pas jouer ton perso et Icare reste assez prudent, procédant par étapes. ]

Ho, quelle impression fantastique que de voler ! Ernest s’était trompé, ce baptême de l’air ne le laissait pas de marbre, bien au contraire. Il avait l’impression d’être dans un rêve. Lui qui aimait la liberté goûtait à une forme de liberté encore inconnue, celle de s’affranchir de la gravité. Le voila émerveillé, le voilà absorbé en ce spectacle d’exception. Ses soucis et ses sombres ambitions s’envolèrent pour laisser place à une troublante sérénité. Il était loin d’être habitué à ne plus avoir de chagrin pesant sur les épaules. Paradoxalement, il en fut perturbé, désorienté. Quelque chose lui manquait. Il perdait pied.

Le ciel d’azure où trônait l’astre du jour, où voguait les nuages cotonneux, où sillonnaient les oiseaux aux chants joyeux, lui ouvrait les bras. C’était comme un appel, une promesse chaleureuse de ne plus être ce qu’il était, une voie salvatrice pour fuir… toujours fuir. Oui, c’était un rêve. De ce que dit Icare, Vermine n’entendit rien. Il était ailleurs. Il restait là, les yeux grands ouverts, bouché bée face à ce qu’il peinait à concevoir. S’il ressentait un soupçon de crainte, c’était parce qu’il nageait dans l’inconnu. Sinon, il n’avait pas le vertige, il n’avait pas peur. La « créature du bas » était, il ne fallait pas l’oublier, un acrobate chevronné ayant déjà vu New-York du haut d’un gratte-ciel. Mais c’était alors la nuit et il ne volait pas…

-C’est beau… fit-il avec une frappante spontanéité. C’est si beau…

Que de joie, que d’enivrement ! L’ange avait-il trouvé le remède inespéré pour délivrer l’enfant-rat de sa poignante souffrance ? Ou cette joie trop excessive n’était-elle pas la simple manifestation de l’état dépressif ? En tout cas, le contraste était terrible.

Toujours était-il qu’Ernest se sentait libre. Il était léger, plus léger que l’air. Lui aussi pouvait voler. Il n’avait qu’à sauter. N’était-ce pas ce que le ciel voulait ? Oui, le soleil l’appelant ! Il allait faire comme Icare, celui de la légende, sauf que lui, Vermine, il toucherait le phare du monde. Pas besoin d’aile pour cela, il suffisait d’y croire. Oui, il était dans un rêve. Son imaginaire exubérant l’aveuglait une fois de plus. Oubliant toute prudence, il se mit à genoux puis il se leva. Contre toute attente, il ne tomba pas du jeune homme. Vermine avait un sens aigu de l’équilibre. Un instant, il « surfa » dans le ciel et sa planche, c’était l’ange. Il riait, un rire à la fois simple, joyeux mais également si insouciant. Puis, l’inévitable arriva.

-Oui, je vole !

Comme s’il avait été sur un plongeoir, le petit hybride bondit. Le voilà en chute libre, promis à une mort certaine sans l’intervention d’Icare. Mais il continuait de rire alors que le vent lui sifflait aux oreilles et que parc de l’Institut sous lui grossissait sans cesse plus vite.

Si l’ange avait encore des doutes sur la folie d’Ernest, maintenant il ne devait plus en avoir.

Au début tout se passait bien, Icare fut ravi d'entendre Vermine rire. Il sentit quelque chose se déplacer dans son dos et en conclu, vu la position des petits membres griffus que l'enfant-rongeur s'amusait à surfer plus ou moins. L'image le fit rire à son tour, aussi bien que les éclats de joie d'Ernest. Jamais auparavant le mutant n'avait entendu une telle pureté dans la voix de Vermine, le garçon avait un très beau rire en réalité, et il pouvait se sentir flatté d'avoir suffit à le faire jaillir des entrailles où ce dernier était auparavant prisonnier. Virant de bord, confiant en sa monture très agile, Icare se permit une petite acrobatie, gagnant aussi en vitesse et descendant en piqué avant de remonter. Hélas, la folie des grandeurs sembla atteindre le cerveau de l'enfant-rat que Jay soupçonnait déjà un peu décalé dirons nous. Lorsqu'il sentit l'impulsion sur ses épaules, l'ange devina aussitôt que quelque chose de malheureux allait se produire... L'enfant rat était tombé! Mais cette pensée ne l'effleura qu'une seconde, dans la suivante, il devina que Vermine avait sauté de son plein gré vu qu'il continuait à rire, s'offrant au vent et n'en descendant que plus rapidement. Le sang d'Icare ne fit qu'un tour dans son organisme! Heureusement il était bien plus entrainé que précédemment, l'instinct reprit le dessus et le mutant ailé replia ses ailes, descendant lui aussi à une vitesse vertigineuse et heureusement d'une façon plus rapide mais aussi plus contrôlée que Vermine. Toute sa génétique servait à cet effort monumental, son squelette modifié, ses muscles, ses ailes, et même chacune de ses plumes... Sa vue excellente lui servait à ne pas perdre de vue le "paquet" à réceptionner! Son coeur néanmoins battait à cent à l'heure car évidemment, l'ange était loin d'être rassuré par ce qu'il faisait... L'adrénaline montait en lui, même si tout son corps était fait pour cela, qu'il se sentait capable, il y avait la vie de quelqu'un en jeu.

-Vermineeeee !!!

Le jeune homme perdait son temps mais ce cri devait jaillir de sa poitrine, cela le soulagea au moins d'un poids! L'herbe arrivait à très grande vitesse et l'ange eut presque envie de fermer les yeux, même pour lui, l'action devenait franchement périlleuse à une si basse altitude, pourtant sa décision était prise! Quitte à se briser la nuque -et là son pouvoir régénérant n'agirait peut-être pas.- Icare devait attraper Vermine qui ne survivrait jamais à une telle chute; déjà c'était étonnant que son coeur ait tenu le choc! Peut-être parce que son cerveau ne s'embarrassait pas de l'analyse de la situation, laquelle était vraiment critique. Au dernier instant, soulevant des mottes de terre, le mutant ailé attrapa Vermine par la peau du dos et le remonta contre son coeur pour que son museau n'aille pas se ficher dans la terre, remontant précipitamment, emporté par son élan, l'ange se retrouva de nouveau parmi les nuages peu de temps après. Voler rendait certaines personnes complètement folles comme Tyler! Heureusement que l'enfant-rat ne faisait pas le même poids, il serait mort en cet instant; ne lâchant pas le garçon de peur qu'il ne fasse une bêtise, le jeune homme commença à se diriger vers le toit de l'institut; il n'avait pas la force d'entamer une descente pour l'instant et voulait calmer son coeur complètement emballé.

-Tu es fou! Un centimètre de plus et tu mourrais écrabouillé sur le sol comme une galette

*Moi aussi d'ailleurs...*

Grogna Icare en espérant que l'enfant-rat ne ferait plus de bêtises désormais. Mais s'apercevait-il au moins de celle commise précédemment? Une chose était sûre! Icare déposait Vermine sur le toit, demandait qu'on aille le chercher mais ne faisait plus un mètre avec lui en vol... Attendant les réactions de ce dernier, craignant qu'il ne se débatte, Jay essaya de le maintenir bien serré contre sa poitrine, tout en tentant de ne pas lui faire de mal. Ce qui était très difficile à contrôler vu comme ses bras tremblaient encore après pareille aventure.

Il aurait put mourir ? Bah, oui, c’était logique en tout cas. Une chute de plusieurs centaines de mètres, c’était mortel. Le surdoué n’allait pas prétendre le contraire. Mais où était le problème ? Vermine ne voyait pas très bien. Qu’on lui reproche d’avoir fait du mal à quelqu’un, c’était une chose, mais qu’on le gronde parce qu’il risquait de se faire du mal, à lui, c’en était une autre. Sa vie lui appartenait, il en faisait ce qu’il voulait ! C’était son droit d’aller s’exploser parterre ! En tout cas, le fabuleux vol était terminé. Quel dommage. Pourquoi toutes les bonnes choses sont toujours aussi courtes ? Il fallait recommencer, et vite, et tout de suite même !

-Ho, c’est fini ? Encore ! Encore ! ENCORE !!! ENCORE !!!

Ernest s’était mit à brailler et à se débattre. Il voulait retourner dans le dos de l’ange et que l’ange décolle. Il voulait retrouver cette sensation de liberté auquel il avait gouté et qui, maintenant, n’était déjà plus qu’un souvenir. Il voulait sentir le vent, voir les nuages d’aussi près ! Il voulait toucher le soleil, décrocher les étoiles, jouer au football avec la terre !

-ENCORE !!! C’était si bien ! ENCORE !!! ENCORE !!!

Il ne fallait plus attendre du pauvre petit mutant une réaction intelligible. Il sombrait dans la démence et s’il n’obtenait pas très vite satisfaction, il allait entrer dans une colère sanguinaire qui risquait de faire mal. A chaque fois, c’était toujours comme ça. Pauvre Icare… dans quelle situation calamiteuse s’était-il encore fourré ? Ces ennuis ne faisaient que commencer s’il persistait à vouloir côtoyer un fou furieux.

HRP : désolé, c’est court, mais en même temps, mon personnage se contente de brailler. Smile

Josh avait atterri en urgence sur le toit, il avait lâché l'enfant rat qui malgré tout avait une certaine poigne mais lui glissait surtout entre les doigts en se tortillant. Le jeune homme avait l'intention de se reposer, il s'était adossé à une cheminée, surveillant Ernest d'un oeil. Ce dernier ne reprenait pas son souffle quant à lui; ce qui étonna fortement Icare qui pensait que ce dernier avait vécu une expérience assez traumatisante pour se calmer. Mais le fait est que ce n'était pas le cas... Il continuait de vociférer, voulant encore voler. Jay laissa passer la première slave de cris, et puisqu'il se débattait trop, l'avait lâché pour fermer les yeux deux secondes appuyé contre sa cheminée. La seconde rafale de braillements l'inquiéta plus cependant car le garçon-rongeur s'énervait de plus en plus. Il avait l'air totalement fou et le coeur de Josh qui s'était un peu calmé reprit des pulsations rapides, trop rapides à vrai dire. Le mutant redressa la tête puis se leva afin de dominer l'enfant-rat de toute sa hauteur, "fier" de ses nouveau 1m80. Il ne savait cependant pas comment réagir, possédant assez d'éthique pour ne pas tenter de fracasser Ernest contre la cheminée, ou tout du moins de ne pas s'y essayer car vu la vivacité du gamin et sa ruse, pas sûr qu'il y arrive.

-Calme-toi, ça ne sert à rien de... Non mais... Arrête!

Le chanteur avait utilisé un ton doux au départ, un timbre de voix qui se voulait, en désespoir de cause, assez rassurant pour ramener Ernest sur terre. Le jeune homme ne pouvait pas imaginer combien les colères de Vermine étaient dangereuses et il pensait à un gosse dérangé mais pas dangereux pour les autres pourvu que l'on fasse attention. Ou tout du moins pas assez pour craindre une mort inéluctable ou des blessures fatales. N'en restait pas moins que la crise de Vermine était assez impressionnante en soi. Bien entendu, là encore Icare peinait à imaginer que ce puisse être bien pire en réalité.

-Non... Je n'y retournerai pas avec toi, tu es... Je vais chercher quelqu'un...

Inutile de préciser à Vermine de ne pas bouger de là, il tenterait justement le contraire. Cependant Jay même en le sachant extrêmement adroit se demandait s'il pouvait redescendre du toit seul. Quelque part ce serait mieux, ainsi il n'aurait pas à entreprendre un autre vol pour l'amener en bas ou à le laisser seul pour chercher quelqu'un. Se rappelant soudain que Vermine avait eu l'air si fier lors de leur première rencontre en lui expliquant comment effrayer les autres, le jeune homme, en désespoir de cause tenta un sourire.

-Je parie que tu peux descendre du toit tout seul! Avec tes griffes et ton agilité, ce doit être impressionnant.

Bon si il ne pouvait pas ils étaient mals... Mais pour le moment, il fallait essayer d'orienter le rat sur quelque chose d'autre que le vol. Il avait eut assez de Tyler qui s'était jeté dans le vide parce que Jay lui avait refusé un retour en jet privé. Le jeune homme espérait que sa technique fonctionnerait en tout cas. Même en étant surdoué, Ernest restait un gamin non? Qui plus est, très orgueilleux, en mettant ses capacités en valeur, peut-être que ça le calmerait... En tout cas Josh l'espérait, et vite car ce masque de sérénité qu'il abordait allait céder d'une seconde à l'autre.

-N'est-ce pas?

Ajouta l'ange en se rasseyant, tentant de donner une impression de calme pour éviter d'énerver le mutant rongeur encore plus. Il espérait vraiment pouvoir le sortir de son obsession par ce biais, tricher avec le désir inaccessible du garçon pour qu'il soit oublié, détourner sa nature. Après quoi Icare se promit de l'éviter... Ce gosse était taré, il avait besoin d'aide! Malheureusement Jay ne pouvait rien pour lui, il n'était ni psychologue, ni assez stable lui-même pour le faire et devait en ce moment, puiser sur ses réserves pour donner cette impression de force tranquille; ce qui bien sûr, n'aurait jamais émané auparavant vu sa silhouette androgyne. Au moins en apparence, il assurait plus avec le physique donné par la scientifique, un point positif.

Etait-il possible de résonner un fou ? Icare semblait le croire. Sa ruse était habile. Elle s’appuyait sur la logique. Vermine cessa de crier. Un instant, il détourna la tête pour fixer le bord du toit. Etait-il capable de descendre de là sans aide ? Evidement, quelle question ! A ses griffes et son agilité, il fallait ajouter son poids plume. Un rien pouvait lui servir de prise. Oui, il pouvait descendre, mais en avait-il envie ? Non. Il voulait monter, monter haut dans le ciel. S’il en avait été capable seul, il l’aurait fait. Mais ce n’était pas le cas, ce qui ne l’empêcha pas pour autant d’essayer. A trois reprises, il sauta sur place et battant des bras. Sa folie ne cessait plus de s’illustrer, sa raison ne cessait plus de fuir face à ses obsessions. Quelle tristesse de le voir ainsi, de voir son regard devenir triste, désespéré. Le ciel lui échappait, la liberté n’était plus à sa portée.

-Je VEUX voler !!! rugit une ultime fois l’enfant, après son troisième échec.

Il baissa la tête. Maintenant, il n’avait plus d’illusion. Le rêve était achevé. Et, parce qu’il avait été beau, son souvenir était cruel.

-…mais je peux pas… reprit-il d’une voix plaine de sanglots.

Le monde était injuste. Icare était injuste ! Il lui avait fait goûter à quelque chose d’extraordinaire et maintenant, il ne voulait plus l’aider à être un oiseau ! C’était un monstre ! Tout était de SA faute ! D’ailleurs, Ernest, à voix basse, la mine toujours piteuse, le dit.

-C’est ta faute…

La rage, venin furibond, engloutit le garçon. Le corps de ce dernier se crispa, ses mains se firent poings, sa respiration se fit plus forte. Quand il releva la tête, ses yeux paraissaient encore plus rouges qu’ils ne l’étaient habituellement.

-C’EST TA FAUTE !!! vociféra-t-il en se jetant sur l’ange, toutes griffes dehors.

Non, on ne résonne pas un fou. Icare avait tenté l’impossible et maintenant il pouvait constater à quel point le pauvre Ernest avait été détruit par ce qu’il avait vécu. De surdoué malicieux, il n’était plus qu’une bête sauvage poussée par ses obsessions et sa peine. L’enfant allait griffer, mordre, cogner, tant qu’il le pouvait. Peu importe s’il taillait en pièces le jeune homme, peu importe ce qu’on lui disait. Rien, absolument rien ne le ferait arrêter. Maintenant, il n’avait plus que de la haine en lui.

HRP : mon personnage attaque le tiens comme un animal. Il est impossible de le raisonner. Vu la situation, tu peux le faire agir et t’occuper de tout l’affrontement (si tu te bats). La seule façon de mettre fin au combat est, soit de fuir, soit de neutraliser Ernest en l’attachant, par exemple, ou en le mettant KO. Pour ce dernier cas, ce n’est pas très dur. Un bon coup bien placé peu suffire. Vermine n’est qu’un enfant et il ne s’occupe absolument pas de sa propre sécurité. Attention toute fois, il peut faire très mal. De plus, s’il y a morsure, il y a contamination par l’Altérium. Bonne chance ! Smile

[HJ: ne t'inquiète pas^^ je ne suis pas un grosbill j'ai conscience que Verminou n'est pas nul^^ loin de là! Il va lui donner du fil à retordre Si quelque chose te déplais, dis le moi ]

Par chance Vermine sembla se calmer, l'ange se permit une petite pause, détendant ses muscles et soufflant un bon coup. Il redevint méfiant toutefois lorsque le garçon-rat se mit à battre des bras frénétiquement. C'était terriblement inquiétant et triste à regarder mais Jay ne pouvait pas s'appesantir trop longtemps sur ce cas. Le jeune homme allait réagir en essayant de retenir Ernest en l'attrapant lorsque ce dernier se mit à hurler. Josh aurait très bien pu essayer de lui dire qu'il l'aurait encore emmené si seulement il n'avait pas été aussi dangereux pour lui-même dans les airs mais comment raisonner un fou? Car c'était bien ce que semblait être devenu l'enfant! De ses 7 jours passés comme cobaye, Icare avait retiré beaucoup de force et d'applomb, il y avait aussi une brisure mais elle s'exprimait moins que chez Vermine; souvent à l'abri des regards dans sa chambre. Mais l'enfant-rat n'avait que 12 ans et Jay pouvait lui au moins, oublier un peu son chagrin en volant parmi les nuages. Il avait de plus déjà connu de très lourds traumatismes avec Julia morte dans ses bras et le décès de Samuel Paares, la folie de Tyle, la dangerosité d'Exodus; et pour finir, Icare avait un soutien inestimable. Ace, son petit ami était là pour lui, étant sa raison principale de continuer encore mais Ghinzu n'était plus vraiment disponible pour Ernest, et puis étaient-ils vraiment assez proches? Jay ignorait tout de leur relation à vrai dire. De plus Vermine semblait, et c'était bien triste à dire, avoir un fond méchant depuis le début, une dangerosité animale, incontrôlable qui demandait à jaillir, stimulée par un traumatisme. Maintenant que celui-ci avait eu lieu Vermine perdait les pédales.

Josh fut surprit par l'attaque, il faut avouer que l'enfant-rat était extrêmement agile et que dans sa folie, ne se préoccupant pas de sa défense, il portait toute son énergie dans une charge offensive des plus "suicidaires". Mais Icare ne pouvait se résoudre à blesser impunément un enfant, si fou, si horrible soit-il. Se raccrochant tant bien que mal au souvenir des éclats de joie de Vermine ainsi qu'à son regard triste d'il y a quelques instants pour ne pas en venir à le considérer comme une simple bête nuisible, Jay tenta de contrôler le garçon de son mieux. Il sentit les griffes aiguisées traverser le duvet de ses plumes pour aller chercher la peau puis s'accrocher sur l'articulation qui heureusement ne lâcherait pas comme ça, bien trop puissante-il lui fallait supporter le poids d'un homme.- pour se briser d'un coup de griffes. Avisant un cable, le jeune homme essaya tant bien que mal de l'attraper et d'aviser la cheminée. Il grogna de douleur quand une griffure atteignit son visage. La plaie se referma aussitôt. Cependant une morsure dans l'épaule le fit crier de douleur avant qu'il ne repousse l'enfant rat. Curieusement la prochaine griffure lacérant sa joue ne se referma pas elle. Etonné, l'ange resta quelques secondes pantelant, attendant bêtement la régénération qui ne venait pas avant de hausser les épaules et de se jeter sur Ernest pour l'entourer du câble et faire le tour de la cheminée et volant bas mais assez haut toutefois pour éviter les griffes de son adversaire.

Une fois le dernier tour achevé, le jeune homme sentit qu'en plus de ses blessures toujours non guéries, ses ailes lui paraissaient très lourdes et la fièvre l'envahissait. Tombant à terre, juste devant Vermine désormais attaché, l'ange prit d'une très grosse fièvre ferma à demi les yeux, son regard bleu disparaissant de moitié sous ses paupières. Son corps ne se révulsait pas, comme s'il n'arrivait plus à réagir et que le jeune homme était simplement sur le point de s'endormir. A défaut il frissonnait et ses ailes habituellement plus ou moins maintenues par ses muscles même au repos tombèrent sur le sol, s'étendant sur le toit comme si Jay était en train de mourir tout simplement. La situation pour le moins affreuse cessa au moins d'augmenter, stagnant maintenant alors que sa régénération luttait pour trouver la solution et essayer d'annuler les effets du poison.

-Qu'est-ce... Que tu m'as fais?

Demanda doucement Icare, essayant de se relever mais retombant, semblant blessé de partout comme si on lui avait tiré des balles dans le corps tant il était épuisé et que chaque parcelle de peau le tiraillait. L'accalmie après le combat était de triste augure cependant. Maintenant Josh, silencieux, ses yeux s'entrouvrant doucement gisait aux pieds d'Ernest attaché, dans un tableau des plus sinistres et tristement beau. L'ange aux pattes de la créature des abysses? Un sujet en or pour n'importe quel poète. Mais Icare qui avait paniqué un long moment s'était aperçu que la douleur si elle ne diminuait pas n'augmentait pas au moins et il se concentra. ça passerait, il en était sûr, il fallait qu'il en soit certain! Ses griffures qui n'étaient pas parvenues à se refermer comme d'habitude après la morsure laissaient échapper des filets de sang léger qui s'écoulaient doucement, dirigés par les rigoles du toit, menaçant de toucher les pieds du garçon-rat.

-Qu'es-tu devenu Vermine? Qu'ont-ils fait de toi?

Acheva tristement l'ange qui avait toujours vu Ernest comme quelqu'un de potentiellement dérangé mais toutefois capable de sentiments humains. Il ne fallait pas penser que ce n'était plus le cas désormais, il le savait mais c'était si dur à faire devant cette boule de poils grise emplie de haine et de folie...

-As-tu déjà aimé? -Bien sûr, il parlait d'amitié, pour un garçon de l'âge de Vermine, pouvait-on parler d'amour de couple?- Pour me venger d'elle, j'aime encore plus ceux que j'ai aimé avant ça, et ceux qui m'ont aimé...

Ce n'était même pas fait pour le raisonner, juste comme ça, par pur réflexe rhétorique, pour comprendre peut-être? Ou tenter malgré la folie du garçon de lui parler? Ou simplement pour constater qu'il était toujours en vie lui-même, malgré le poison coulant dans ses veines en parvenant à esquisser quelques mots et pensées. Quoiqu'il en soit; ignorant lui même la réponse exacte, le jeune homme ferma à demi les yeux, se reposant et reprenant son souffle en attendant à la fois une réponse mais aussi que le poison se dilue enfin.

HRP : ça me va. Pas de souci.

Parler, toujours parler. Icare se refusait-il donc tant que ça à accepter l’affreuse vérité ? Vermine ne pouvait plus parler. Il pouvait grenier, gronder, crier, hurler, mais pas parler. Discuter, cela demandait un peu de raison, ou tout du moins, un zeste d’intelligence. La raison de l’enfant-rat était moribonde depuis des jours maintenant. Et en cette heure, elle avait prit des vacances, loin, très loin d’ici. L’intelligence d’Ernest, aussi grande soit-elle, ne pouvait que s’incliner face à joug de la toute puissante fureur. Impérieux était le caprice chez le dément. Bien sûr, cet état de fait n’était que temporaire. Mais ici, en cet instant, sur ce toit, seul comptait l’immédiat. Si l’ange n’en prenait pas conscience, alors c’était sa vie qu’il risquait de perdre. Déjà l’Altérium courrait dans ses veines, déjà son sang coulait. Vermine, bête furibonde, luttait contre la cheminé. Le câble le retenait mais pour combien de temps ? Du temps, justement, Icare en avait manqué pour attacher l’enfant-rat. L’absence de l’indispensable finition rendait aisé l’évasion. Le monstre au pelage couleur cendre mordait son lien à plaines dents tout en se débattant comme un démon. Il finit par comprendre que se débattre était plus utile que de mordre. Tirant profit de son corps aussi agile que chétif, il commença à se dégager. Dès qu’il eut une main libre, il essaya de griffer Icare. Il voulait le tuer, même s’il ne savait déjà plus pourquoi. C’était son seul but, sa seule raison d’être. Heureusement, il manquait de portée. Ses griffes ne fendirent que l’air. Alors il continua à se dégager. La partie supérieure de son corps glissa sous le câble. Maintenant, il était libre jusqu’à la taille. Maintenant il pouvait se baisser. Maintenant, il pouvait atteindre l’ange. Sans l’ombre d’une hésitation, son courroux aveugle s’abattit.

-CREVE !!! hurla le garçon.

HRP : tu peux faire intervenir des PNJs si tu veux. A toi de voir.

[HJ: peut-être après^^ Si tu en as envie toi aussi, n'hésite pas pour les PNJS ni à jouer un peu Icare pour certaines réactions réflexes ou logique dans la bagarre^^]

Ne trouvant rien d'autre à faire, Icare avait encore essayé de parler même si c'était peine perdue, lui voulait croire que ce n'était pas impossible de raisonner l'enfant rat. Ses dernières espérances s'éteignirent lorsqu'il vit Vermine se débattre comme un beau diable et lui lancer la sentence. C'était horrible à entendre dans la bouche de n'importe quel "être humain" mais encore pire dans celle d'un enfant. Les yeux rouges du garçon montraient qu'il ne faisait pas semblant cette fois, qu'il ne voulait pas juste l'effrayer. Avec bien du mal, le jeune homme s'éloigna des griffes de Vermine en ramenant son aile contre lui et en se déplaçant sur le côté. C'était difficile, chaque geste lui coûtait... Heureusement la régénération s'activait, commençant à éliminer petit à petit l'Altérium. Néanmoins Icare n'était pas du tout en état de combattre, même contre un gamin de 12 ans, surtout pas contre un enfant de cet âge totalement fou furieux à vrai dire. Il put se déplacer un peu et essayer d'attraper le câble pour resserrer sa prise sur le corps de Vermine, ou tout du moins essayer...

Se relevant tout doucement, en vacillant, l'ange ne put faire qu'un pas pour s'effondrer sur la cheminée, sur un côté voisin à celui où le garçon rat était à demi attaché. Lentement ses mains, dans des gestes désordonnés essayèrent de resserrer le lien pour que Ernest ne puisse pas retirer le reste de son corps de la prison de câbles. Il s'attela à sa tâche en gémissant de douleur, attaqué par la fièvre en se rejetant en arrière pour tendre le fil et éviter d'offrir du mou à Vermine. Il fallait tenir quelques minutes, juste quelques minutes pour se débarrasser de l'Altérieum, non pas entièrement mais assez au moins pour se dérober un peu plus agilement, un peu plus efficacement face aux coups portés par le garçon rat.

-Laisse-moi reprendre mon souffle et je t'emmène encore voler. Promis...

Après tout, mieux valait se servir des cartes qu'il avait en main, elles étaient déjà peu nombreuses alors il ne pouvait pas se refuser au mensonge. Ce n'était plus une question d'éthique mais de survie, car le gosse rongeur ne le laisserait certainement pas respirer si la décision n'en revenait qu'à lui. Ses yeux bleus plantés dans ceux de l'ennemi, il tentait de faire passer son message comme étant quelque chose de vrai. Vermine pouvait revoler s'il le laissait tranquille une fois que l'Altérium aurait cessé son effet. Ce n'était pas forcément un mensonge mais disons que si cela arrivait ce serait pour chopper Ernest par la peau du cou et le tenir loin de lui de la sorte pendant toute la durée du vol, direction l'administration de l'école. A vrai dire, Icare hésitait entre l'abandonner là au risque que Vermine ne se carapate en descendant du toit grâce à ses griffes agiles -mais après tout, lui aussi serait loin- ou à le mener dans un bureau. Pouvait-il vraiment encore s'inquiéter pour le rat après une telle confrontation? Malheureusement il faut croire que oui... Enfin bref, d'abord survivre puis aviser ensuite.

Voler ? Mais Vermine ne voulait plus voler ! Il voulait tuer. C’était pourtant simple à comprendre, néanmoins Icare se refusait à se rendre à l’évidence. Communiquer était impossible. Sa tentative désespérée de diversion ne freina en rien la bête enragée. Heureusement que les jambes de cette dernières étaient encore emprisonnées par le câble car, sans cela, il y aurait eut une véritable boucherie sur le toit de l’Institut. L’enfant-rat, encore plus irrité d’être à la fois entravé et de ne pas pouvoir atteindre sa proie, redoublait d’efforts. Il se débattait avec tant de force que l’ange en piteux état éprouva bien des difficultés à retenir le câble. Mais il tint bon et Ernest finit par comprendre : cette fois, il n’arriverait pas à se dégager. Alors, il recommença à attaque le câble à coup de dents. De sa gueule furibonde s’échappait un filet de bave plus que révélateur de l’état d’esprit du petit mutant. Le temps paraissait s’écouler avec une effroyable lenteur. Le jeune homme tendait le lien, sa dernière défense, souffrir, agoniser, sous la folie de l’hybride qui mordait jusqu’à s’en faire mal. D’ailleurs, à sa bave, bientôt se mêla son sang.

L’inévitable arriva. Dans un claquement, le câble se rompit. Icare fut jeté en arrière et Vermine, lui, roula en avant. L’instant d’après, l’enfant-rat s’était mis à quatre pattes et avait pivoté face à sa proie. Il ne perdit pas une seconde. Il chargea, il bondit, toutes griffes dehors, la gueule grande ouverte. Une sorte de rugissement aigu, presque un sifflement, accompagna sa tentative de meurtre.

Josh n'essayait plus de comprendre, il n'avait plus la force pour cela et une part de lucidité lui avait aussi fait comprendre qu'il était inutile de le tenter. L'enfant-rat avait définitivement sombré. Lorsque son sang se mêla à la bave Icare devina que le câble allait céder, c'était d'une logique incommensurable, la seule parmi toute cette folie. Le jeune homme sentait que le poison diminuait petit à petit maintenant, sa régénération cellulaire travaillait rageusement à cela, lui volant toute son énergie; mais c'était pour une bonne cause. Se redressant légèrement le jeune homme força encore sur le câble mais celui-ci se cassa et Jay parti en arrière, emporté par l'élan. Ses pieds butèrent contre le bord du toit et il se rattrapa in extremis à une antenne. Ce qui n'était pas forcément une bonne chose car Ernest fonçait désormais sur lui, bondissant en émettant une sorte de sifflement aigu rappelant celui des serpents venimeux ou des chats furieux... Il n'aurait jamais pensé qu'un rat puisse faire ce bruit.

Icare se croyait acteur dans un mauvais film d'action, l'enfant était devenu fou comme en proie à un ensorceleur de rongeurs qui jouerait de sa flûte dans sa tête. En une fraction de seconde l'ange analysa la situation et vit les crocs du garçon s'approcher de son épaule, le bougre avait bien visé, sautant avec une agilité surprenante après avoir roulé en boule puis s'être remis sur pattes instantanément. Jay déploya ses ailes par automatisme et sauta à la verticale, esquissant un ou deux battement, restant comme accroché dans les airs quelques secondes avant de retomber. Le poison faisait toujours effet et lui causait des douleurs lancinantes dans les ailes et le reste de son corps en général, de plus il était un peu moins leste qu'avant, mais juste un peu face à une créature aussi souple qu'Ernest c'était beaucoup trop. Face au garçon rat de nouveau, l'ange se prépara à une autre attaque, ouvrant la bouche cette fois et se mettant à hurler.

Au tout début on pourrait penser que ce geste anodin était inutile, servant à épuiser son peu de ressources mais bien vite les décibels montèrent d'un cran au-dessus de la normale permise puis de deux, enchaînant, le jeune homme entreprit de chanter car cela poussait encore plus son don, il pouvait facilement fissurer les vitraux voir les murs d'une église grâce à ce don, et chanter lui permettait de canaliser son souffle bien mieux qu'avec un cri jaillit de ses entrailles, ainsi son pouvoir serait moins pesant-car Ernest avec son ouïe plus fine y était peut-être plus sensible et que Jay ne voulait quand même pas le tuer, qui irait croire après que c'est un gamin de 12 ans qui l'avait agressé le premier sur un toit qu'il pouvait lui, atteindre sans difficultés en volant?-

"I'am sing under the rain" était le premier titre qui lui était venu à l'esprit et sa magnifique voix avait commencé à faire monter le son en flèche, désormais c'était un bruit plus élevé que ce qui était supportable pour l'oreille humaine qui raisonnait, histoire de maintenir Vermine à l'écart-enfin il espérait.- cela ne durerait que quelques 5 minutes maximum, le temps de deux chansons quand il faisait encore des concerts de cette manière. Icare aurait aussi pu démultiplier sa voix, la faire intervenir de toutes parts en écho mais il ne fallait pas oublier l'Altérium qui le rongeait encore; il ne faisait ça que pour essayer de gagner du temps, de donner à son corps les grappes de 60 secondes éparpillées nécessaires à sa guérison... Ernest ne devait pas le mordre une seconde fois, il n'était pas sûr d'y survivre cette fois.

La chanson raisonnait toujours de partout, se perdant cependant à cause de la hauteur et du vent, du coup seuls eux deux pouvaient l'entendre. L'appareil auditif d'Icare adapté à l'utilisation de son pouvoir supportait sans mal les décibels mais qu'en serait-il de Vermine? Tant que ce dernier n'approchait pas c'était juste très désagréable mais s'il venait plus près... Ses tympans résisteraient-ils?

Il voulait du sang, il voulait SON sang, à lui, cet ange qui attisait sa rage par sa seule présence. Il devait le tuer pour qu’enfin il puisse penser à autre chose. C’était son but, le seul, l’unique du moment. Et pour l’accomplir, il était prêt à tout… enfin le pensait-il. Vermine s’approchait, bave aux lèvres, griffes menaçantes. Il ne remarqua la voix du jeune homme que quand celle-ci commença à inonder sa tête, faisant vibrer ses oreilles. Quel bruit atroce ! Peut-importait, il devait continuer. Mais le pouvait-il ? Le son devenait douleur à mesure que l’enfant-rat progressait. Le voilà contraint de porter ses mains à ses oreilles pour les boucher. Même ainsi, il continuait à entendre le bruit furibond. L’exposition sonore le désorientait. Il s’agenouilla, se roula presque en boule. Puis il attendit que passe l’orage qu’était cette chanson amplifiée.

Icare allait sans doute s’épuiser et le monstre, cette fois, aurait put assouvir sa haine aussi violente qu’injustifiée. Mais voilà, les choses ne se passèrent pas ainsi. La mémoire d’Ernest, stimulé par le bruit, fit remonter un douloureux souvenir. Voilà le petit hybride de retour dans sa cage de verre au laboratoire de Phobos. Tout était noir, c’était la nuit. L’alarme hurlait. Elle n’avait pour objectif que de réveiller le cobaye indocile. Telle était l’une des sanctions réservées au malheureux pour le briser. Irrité, désespéré, il se mit à hurler, autant dans cette réminiscence que dans la réalité. Sa rage disparue, tout comme l’avait fait son envie de voler. Maintenant, il voulait fuir, fuir ce bruit horrible, fuir l’alarme, fuir le chant.

Le garçon, sans se déboucher les oreilles, se retourna et partit en courant. En quelques secondes à peine, il fut au bord du toi. Encore un instant et il basculait dans le vide. Le voilà en chute libre. Il heurta le mur. Par réflexe, il agrippa ce dernier. Ses griffes raclèrent la pierre et trouvèrent vite une prise. Le voilà suspendu et perdu. Que faisait-il là, déjà ? Que c’était-il passé ? Il se le demandait. Il resta encore un petit moment immobile à reprendre ses esprits. Quand il commença à sentir son poids peser sur ses bras, il se dit qu’il était sans doute préférable de descendre. Alors il se mit à l’œuvre. Il n’avait pas mentit tout à l’heure, il y arriva très bien tout seul. Une fois à terre, il s’éloigna comme si rien ne s’était passé. Maintenant, il pensait à autre chose…

HRP : j’ai l’impression que ton post marquera la conclusion du sujet. Ce dernier fut sympathique. Au plaisir de se revoir plus tard dans le RP. Smile

[HJ: pareillement ]

Heureusement que son pouvoir de la voix fonctionna, souvent oublié par le jeune homme ce dernier l'avait pourtant déjà sorti de situations affreuses comme celle-ci. Vermine s'échappa, basculant apparemment dans le vide. Icare tétanisé avait cessé de chanter parce que le poison faisant encore effet il était épuisé et que la surprise paralysait aussi ses muscles... Il tendit juste la main en avant et se traina jusqu'au bord de l'immeuble, pas sûr de vraiment souhaiter voir ce qu'il s'apprêtait à contempler. Mais Vermine ne s'écrasait pas, non il descendait souplement le long du mur à l'aide de ses griffes. L'étonnement passé, l'ange conçu une grande colère à l'égard de l'enfant-rat mais aussi de ce foutu institut qui ne lui avait apporté que des malheurs! Le mutant avait comme l'impression que son dernier ami Daniel Hopes allait bientôt s'évaporer comme par magie, il avait déjà égaré Warren en route, victime d'une perte de la mémoire ponctuelle comprenant évidemment sa rencontre avec lui, Vermine complètement fou et Enora qui sans doute elle aussi allait partir ou perdre la raison... Comment pouvait-il en être autrement? Les preuves étaient faites, Icare ne gardait jamais quelqu'un bien longtemps.

Le poison finit par disparaître rapidement, après que son don de régénération eut localisé les composants et que le temps soit passé, son pouvoir n'eut pas trop de peine à diluer le tout. Sautant par dessus le toit malgré quelques douleurs encore présentes-mais largement supportable en comparaison à ce qui lui avait semblé être ne agonie.- l'angelot battit des ailes, il eut l'inquiétude de s'écraser pendant un millième de secondes mais non, tout tenait parfaitement, rasant presque la paroi du mur comme pour défier Vermine une dernière fois ou se venger, l'ange se posta prudemment un peu plus loin, se tournant vers lui pour évaluer la progression du rat. Pareil à un aigle il se rapprocha de lui en piquée une dernière fois comme pour signer et affirmer sa victoire-un peu misérable avouons le vu son état.- puis s'éloigna avec légèreté dans le ciel bleu, quittant l'institut maudit le plus rapidement possible même s'il savait qu'il lui faudrait y retourner... Au moins pour voir Daniel Hopes et récupérer ses affaires.

» La transformation de Vermine en Pestillence (Vermine)