Méfiez-vous de la fille aux cheveux courts (Kurt Wagner)

Ce soir, il n'y avait que de beau monde dans la salle de réception du dernier étage de l'Akropolis Tower. Il se déroulait aujourd'hui une fête plutôt uppée, un gala de bienfaisance, en fait. Les dons amassés grâce à cette soirée seraient reversés au profit des victime du séisme en Haïti. C'était un vieux milliardaire excentrique, Mr Fergusson, qui organisait l'évènement. Il organisait beaucoup de fêtes, pas toujours au nom de la charité, et cette fois il avait choisi comme thème les années 20. Dans la grande salle au carrelage étincelant, c'était donc costumes croisés de gangsters et robes à franges. Et tout ce beau monde se trémoussait sur des airs de jazz. Par contre, il y en avait une qui ne semblait pas beaucoup s'amuser, c'était le docteur Krauze. Gretchen était riche, grâce à l'infime partie du trésor de guerre nazi qu'elle avait récupéré, mais officiellement elle était juste médecin et si elle avait un revenu supérieur à la moyenne, ce n'était pas suffisant pour faire partie de la caste des riches. Elle était là parce que son vieil ami, monsieur Fergusson l'avait invitée. Elle participait rarement à ces fêtes, se déhancher sur une piste de danse n'était pas sa tasse de thé. Elle avait pourtant accepté cette fois, à cause du thème. Les années 20, c'était sa jeunesse, son adolescence et son passage à l'âge adulte. Mais aujourd'hui le charleston ne l'amusait plus autant qu'autrefois. Elle avait dansé sur quelques airs avec un homme dont elle avait déjà oublié le nom, et à présent elle était assise sur une chaise, à côté d'une fontaine, jetant un regard distrait sur la piste de danse. Pour l'occasion, elle avait revêtu une robe mauve plus courte que celle qu'elle mettait pour aller à l'opéra (elle lui arrivait aux chevilles). Le violet faisait moins ressortir la pâleur de sa peau, Fergusson lui avait dit à quel point elle faisait plus vivante quand elle mettait une autre couleur que le rouge. Elle tenait toujours entre ses mains son petit sac à main avec le nécessaire indispensable : portefeuille, clés, mouchoir, coton, bouteille de chlorophorme, scalpel et Walther PPK.

-Et bien, Gretchen, vous ne dansez pas ? J'ai pourtant pensé spécialement à vous ! s'exclama Fergusson en arrivant auprès de Gretchen.
-Ne dites pas mon vrai nom !
-Oh ! Je vous prie de m'excuser, Liza. A mon âge, il arrive que ma mémoire flanche un peu.

Ce mois-ci le milliardaire Fergusson approchait de sa 97ème année.

-Vous avez l'air plutôt en forme pour quelqu'un de votre âge.
-Grâce à vous, ma chère. Par contre, aussi en forme que je puisse être, je ne vous battrais jamais sur ce point.
-Vous devriez être plus discret, Herr Gütterson, il y a toujours des gens qui pourraient avoir eu vent de vos exploit en Pologne, les fameux chasseurs de nazis.

Fergusson afficha un air gêné et se dandina un peu en s'appuyant sur sa canne.

-La fête ne vous plaît pas ?
-Ces rythmes trop rapides ne sont plus pour moi. J'ai beau avoir l'air d'une jeune femme, mes goûts ont évolué depuis les années 20. J'aime toujours le jazz, mais je préfère l'écouter que le danser. Si vous tenez vraiment à me voir sur votre piste de danse, mettez donc une danse de salon. Ce genre de choses se dansait aussi dans les années 20.
-Hum...ok. Cette danse vient de commencer, dès qu'elle est finie j'irais demander à l'orchestre de jouer une valse de Vienne.
-Je vous remercie.

Fergusson s'éloigna en se déhanchant au son de la musique, il se dirigea vers trois jeunes femmes aux poitrines opulentes qui discutaient dans un coin. Gretchen resta assise, jambes croisées.

Un gala de charité en faveur des sinistrés de Haïti, une soirée guindée pour laquelle les membres de l'institut s'était disputer, non pour y aller, mais pour ne pas y participer. Ce fut Kurt qui mis fin à la querelle quand il apprit que le thème serait les années 20. Bien que le diablotin ne soit pas un grand fan des soirées mondaines, principalement en raison de l'accueil qu'on lui réservait, la promesse de quelques danses de salon avait finit de le convaincre de se porter volontaire. Il avait longuement hésité à venir avec un inducteur d'image pour ne pas choquer le haut New-York, mais c'était finalement décidé à venir avec nulle autre apparence que la sienne. Vêtu d'un costume noir à rayure grise, ample comme ça se faisait à l'époque, et d'un chapeau en feutre blanc, orné d'une plume noir, il avait des air d'Al Capone. Kurt avait prit soin de dissimuler sa queue en l'enroulant autour de sa taille, considérant que son absence de chaussure et son nombre restreint de doigts et d'orteils choqueraient bien suffisamment les mondains qui seraient présent.

Bien évidement, c'est en retard qu'il arriva à la soirée, non par négligence, mais pour profiter que les gens dansent et s'amusent pour passer un peu plus inaperçu. Bien évidement ça ne fonctionna que trop peu, car à peine retira-t-il son chapeau, révélant sa face bleue et ses oreilles pointues, que les murmures commencèrent. Mais l'elfe ne s'en offusquait guère, adressant un sourire à chaque regard peu discret lancé en sa direction. Il avait l'habitude de faire cet effet, et savait magnifiquement bien en jouer. Ainsi, alors que le jazz emplissait la pièce, laissant la java dehors, il se saisit d'une cavalière surprise et à la limite de la contrariété l'entraînant sur la piste. Il lui murmura à l'oreille quelque chose qui fit rougir la bourgeoise, avant de commencer à danser avec elle. Les regards se tournèrent vers l'étrange couple, les murmures s'élevant dans la pièce, puis le silence se fit. Car si la peau bleue du mutant, et son apparence digne d'un personnage de Tolkien, choquaient, sa grâce lorsqu'il se laissait emporter par la musique, avait cet étrange tendance à émerveiller les gens.

Enfin la musique s'arrêta, avant de reprendre, toujours du jazz. Kurt abandonna sa partenaire qui semblait regretter de le voir s'éloigner. Il alla prendre un verre avant d'aller saluer son hôte, en pleine conversation avec trois jeune femme aux poitrines bien trop hautes pour être vraies. L'institut avait donné beaucoup d'argent pour cette cause, et il était des plus normal que son représentant se manifeste auprès de l'organisateur. Mais ce ne fut que distraitement qu'il échangea quelques banalités avec le vieil homme, son regard étant captivé par tout autre chose. Cette jeune femme assise dans près de la fontaine. Elle avait l'air de s'ennuyer autant que sa beauté était singulière. Ce teint trop pâle, ces traits trop fins, elle semblait hors du temps. Abandonnant monsieur Fergusson à ces invitées, Kurt s'avança vers la femme à la robe mauve. Le timing était parfait, la musique changeait, et le diablotin reconnut l'air d'une valse Viennoise.

-M'accorderiez vous cette danse fraulein ?

Il avait parlé de sa voix la plus suave, son accent allemand accentuant encore un peu plus son charme naturel. Sa main à trois doigts tendue vers la belle inconnue, il la regardait de ses yeux jaunes, un sourire enjôleur sur les lèvres.

Gretchen venait de reconnaître la valse promise. Elle aurait aimé la danser, mais comme elle l'avait prévu les autres danseurs désertèrent la piste tous en même temps. De nos jours, les gens de la haute n'avaient aucun goût. Elle toisa avec mépris ces gens trop jeunes. Avaient-ils les oreilles bouchées, ou bien avaient-ils emprunté ces oreilles à des ânes ? Elle prit sa sacoche et se leva pour partir quand elle tomba nez à nez avec l'homme. Il était vêtu d'un élégant costume croisé noir à rayures, et était couvert d'un fin duvet bleu. Ses cheveux avaient la même teinte et ses yeux étaient jaune. Voilà un mutant qui n'avait pas froid aux yeux, à se pavaner ainsi devant tout le gratin sans gêne apparente. Les autres convives le regardaient avec ce qui ressemblait à du dégoût. Pourtant, des deux mutants, Gretchen était celle qui aurait le plus de raisons de finir sur un bûcher, et on l'avait traitée avec la plus exquise des politesses (surtout de la part des hommes). Voilà qui relançait la question sur l'hypocrisie de la vie en société.
Le diable bleu sourit en tendant sa main à trois doigts vers le docteur. En baissant les yeux, elle put voir que ses pieds étaient pareillement agencés.

-M'accorderiez vous cette danse fraulein ? demanda-t-il d'une voix suave.

Son accent rappelait à l'ex-nazie son pays natal. Elle-même s'était suffisamment entraînée pour ne plus laisser subsister la moindre trace d'accent dans sa voix. Selon la fausse identité qu'elle avait prise, elle était née aux Etats-Unis, et sa langue maternelle avait toujours été l'anglais. Mais le charme de la langue germanique ne la laissait jamais de marbre.
Difficile de savoir si ce fut sa franchise, son accent allemand ou tout simplement le fait qu'il l'invitait à danser une valse, mais Gretchen ne sut refuser. Le coin gauche de sa bouche se souleva en un sourire (un vrai, pas ceux qu'elle avait l'habitude de revêtir pour faire plaisir aux gens).

-Ce serait un réel plaisir. répondit-elle en allemand

Elle prit sa main et se laissa entraîner.

Avant toute chose, faisant une sorte de petite révérence, Kurt déposa un baiser sur la main qu'il tenait, son regard indéchiffrable dans celui de la demoiselle qui lui faisait l'honneur de partager cette danse. L'entrainant donc sur la piste de danse qui s'offrait à eux, et qui semblait n'appeler qu'eux, Kurt jeta un regard amusé aux personnes autour d'eux, semblant presque narguer tout les hommes qui le regardaient à la fois révulsés par son apparence et, certainement, envieux de son cran. Il se retenait tout juste de sortir sa queue pour finir de semer le trouble à tout ces curieux. Mais n'en faisant rien, il prit place au centre de la piste, prenant de sa main gauche la droite de sa cavalière et posant la sienne délicatement dans le dos de la belle. Puis vint le premier pas qui marquait le début de la danse, son regard plongé dans celui de la jeune femme. C'était une valse à trois temps et l'elfe guidait sa partenaire dans une danse gracieuse, les faisant paraître tout deux comme un prolongement de la musique, tournant autour de la piste autant que sur eux-même. C'était un don que la vie lui avait offert, la danse, cette capacité à ne faire qu'un avec la musique qu'il entendait. Et la valse, comme d'autres danses que sa génération délaissait, lui donnait cette sensation de grâce que nul autre activités lui avait apportée.

Il restait silencieux, uniquement concentré sur sa partenaire, ne se souciant ni des regards ni des quelques murmures qui se mêlaient à la musique. Une chance décidément que cette étrangère, qui avait l'air de n'avoir que l'envie de partir, ait accepté cette valse, apportant ainsi quelque intérêt à cette soirée. Et le fait qu'elle est fait l'effort de lui parler en allemand et qu'elle n'ai nullement eut l'air choquée en le voyant, ne la rendait que plus attrayante aux yeux du mutant bleu. La soirée commençait mieux qu'il ne l'avait espéré, et il se surprenait à prier pour que la demoiselle soit aussi intéressante qu'elle le laissait présager. Une chose était sûre c'est qu'il voulait le découvrir et qu'il ferait tout pour.

L'inconnu aux allures d'elfe était d'une exquise galanterie. En plus de cela, c'était un bon danseur. Il exécuta à la perfection certains passages où un valseur amateur aurait écrasé les orteils du docteur. Et puis, Gretchen avait elle aussi un très bon niveau pour les danses de salon, la valse de Vienne étant sa danse préférée. Elle songea qu'ils devaient former un drôle de couple. Les gens présents devaient se dire qu'ils avaient devant eux un remake de "La belle et la bête". Même la pâleur de sa peau tranchait fort sur le bleu foncé de la fourrure du mutant. Mais, loin de le trouver laid, elle lui trouvait un certain charme. Il fallait dire aussi qu'il était plus civilisé que la plupart des humains qu'elle connaissait. Quelqu'un qui savait valser comme ça de nos jours n'avait rien d'une bête immonde, contrairement à ce que racontait la propagande anti-mutante.
La valse dura, trop peu au goût de Gretchen. Une fois la danse terminée, l'orchestre enchaîna sur quelque chose de plus bougeant. Le docteur Krauze s'éloigna un peu de la piste pour laisser passer les jeunes gens qui préféraient se déhancher sur du Benny Goodman. Elle préféra tout de même ne pas trop s'éloigner de l'inconnu.

-Vous êtes un incroyable danseur, monsieur. Accepteriez-vous de m'en dire plus sur vous ? Votre nom, par exemple.

Elle avait parlé en allemand. Puisqu'il semblait parler allemand et elle aussi, autant en profiter pour être entre eux.

A la fin de la danse, Kurt pris la suite de sa partenaire, ne faisant plus attention à rien ni personne d'autre qu'elle. Cette envie de connaître ce personnage si particulier le tenaillait, et il fut plus que ravis de constater que ce sentiment semblait partagé, du moins un peu. La suivant donc, il se permit même de l'entraîner un peu plus à l'écart, ne tenant pas plus que cela à supporter la présence de ces bourgeois avide de préjugés et de critiques. Une main délicatement posée dans le dos de la jeune femme, il l'entraina donc sur une des terrasses de la salle de réception. Le temps était plus que frais, et soucieux du confort de la demoiselle, il retira naturellement sa veste pour la déposer sur les épaules nues de Gretchen.

-Merci pour le compliment, vous êtes une exquise cavalière, je ne crois pas avoir jamais danser la valse avec quelqu'un de votre niveau auparavant.

Il répondit en allemand, bien trop heureux de parler sa langue natale pour ne pas saisir cette occasion. En effet, ce n'était pas à l'institut qu'il pouvait parler cette langue qu'il appréciait tant. Les yeux plongés dans le regard de cette femme qui le dépassait de quelques centimètres, il lui souriait avec toute la douceur et le charme dont il était pourvut, et à croire certains dire il n'en manquait pas. Lui prenant la main délicatement, il répondit enfin à la question qui lui était posée.

-Kurt Wagner, pour vous servir mademoiselle.

Et déposant de nouveau un baiser sur la main délicate de la femme, il lui sourit de plus belle en se redressant.

-Mais puis-je savoir à qui j'offre ainsi mon nom et mes services ?

Il s'amusait à parler ainsi, donnant une tournure un peu guindée à ses phrases par amusement, mais leur sens était au moins à moitié sérieux, et son ravissement face à cette rencontre tout à fait sincère.

-Kurt Wagner, pour vous servir mademoiselle.

Voilà qui confirmait l'hypothèse d'une origine allemande. Gretchen n'était pas vraiment patriote, mais se sentait mieux avec d'autres ressortissants germaniques. Les américains manquaient tellement de finesse.

-Et galant, avec ça. Vous ne semblez pas très éloigné de la perfection.

Non, pas la perfection dans le sens où elle en parlait quand il s'agissait de ses recherches. Elle ne savait pas si ce monsieur Wagner s'approchait vraiment de la perfection d'un point de vue génétique, mais il avait d'excellentes manières.

-Mais puis-je savoir à qui j'offre ainsi mon nom et mes services ?

Gretchen hésita à lui dire son vrai nom, mais finit par se raviser. Elle n'avait pas survécu si longtemps en étant imprudente.

-Doktor Liza Krüger. Ravie de faire votre connaissance. Cela fait plaisir, de voir qu'il reste quelques gentlemen de nos jours, surtout sur ce continent.

Elle ouvrit sa pochette et en sortit son fume-cigarette en bois laqué, sur lequel elle posa une cigarette Est-allemande.

-Oh, pardonnez-moi, je suis bien impolie. Peut-être la fumée de cigarette vous incommode-t-elle ?

Cette nuit légèrement frisquette sur une terrasse, à l'écart d'une fête, elle avait déjà vécu ça. En 1938, avec cet homme, ce français qui (elle ne l'avait découvert que récemment en le croisant par hasard) était lui aussi un mutant. Ce soir-là ils avaient longuement discuté. Ce Daniel Hopes avait lui aussi d'exquises manières, et avait fait preuve d'une grande intelligence. Mais que lui avait-il dit le jour où ils s'étaient revus dans New York ? "Vous êtes toujours ce rubis...mais..l'éclat s'est éteint. J'en suis douloureusement désolé pour vous...sincèrement." Qu'avait-il voulu dire par-là ? Avait-elle vraiment perdu de vue quelque chose d'important durant toutes ces années ?

-Et à quelle opportunité dois-je le plaisir de cette rencontre ? Oh, je ne doute pas que vous ayez reçu une invitation en bonne et due forme, je ne vous accuse pas de vous être introduit dans cette soirée sans y être convié. Mais je ne pense pas que vous fassiez partie des "relations publiques", j'aurais déjà entendu parler de vous. Alors quel bon vent vous a amené ici ?

Kurt profitait un peu de la vue offerte par cette terrasse, n'ayant pas souvent l'occasion de passer une soirée au sommet d'un building new-yorkais et qui plus est en charmante compagnie. Lorsque le docteur se présenta enfin, le mutant eut un léger sourire, Krüger, voilà qui expliquait l'allemand parfait, bien qu'il déduisait qu'elle était fille d'immigrant, ce nom étant la plupart du temps une réduction du nom d'origine des familles d'allemands ayant migré vers l'Afrique du sud ou les USA. Il ne pouvait pas plus se tromper mais ça il n'en avait aucunes idées. Si il avait s'était douté ne serait-ce qu'une seconde de la vrai nature de la demoiselle, il aurait certainement eut énormément de mal à lutter pour ne pas la faire passer par dessus la rambarde. Mais il n'en avait aucune idée, il était donc heureux de cette rencontre presque chaleureuse dans cette ambiance trop pleine de faux semblants.

-Non, la fumée ne me dérange en rien ne vous en faites pas.

Il s'amusa de cette question autant que de sa réponse, sachant qu'il respirait une fumée pleine de soufre à chaque fois qu'il usait de son pouvoir.
Enfin vint la question sur la raison de sa présence dans cette soirée dans laquelle il n'avait que trop peu sa place. Il jugeait ce moment un peu délicat, car si la "jeune" femme semblait tout à fait à l'aise avec son apparence, et donc sa condition de mutant, peut-être avait elle plus de préjugés sur les différents "camps" qui séparaient les semblables de Kurt.

-Et bien pour tout vous dire je suis, au moins pour ce soir, la face publique de l'institut Xavier. Nous avons fait une grosse donation pour les sinistrés d'Haïti, et certains pensaient qu'il serait bon de faire acte de présence à cette soirée, pour que la haute société new-yorkaise puisse constater que l'institut est peuplé d'être civilisés et non uniquement de super-héros costumés.

Certes il faisait partit de ces super-héros mais, avec Angel et Emma Frost, il était un des rares x-men à savoir se conduire en société. Son amour de la danse et sa trop grande gentillesse avaient finis de le désigner pour cette occasion.

-Même si il aurait tout à fait été possible que je me sois invité à cette soirée uniquement pour avoir le plaisir de partager une valse avec une charmante demoiselle.

-Et bien pour tout vous dire je suis, au moins pour ce soir, la face publique de l'institut Xavier. Nous avons fait une grosse donation pour les sinistrés d'Haïti, et certains pensaient qu'il serait bon de faire acte de présence à cette soirée, pour que la haute société new-yorkaise puisse constater que l'institut est peuplé d'être civilisés et non uniquement de super-héros costumés.

L'institut Xavier ? Ça expliquait sa présence ici. En général, les mutants étaient curieusement exclus des soirées de la Jet-set. Mais Fergusson n'était pas anti-mutants (comment pourrait-il l'être, puisque sa meilleure amie en était une ?), et ça valait mieux. On aurait pu penser que Gretchen, par contre, aurait été en froid avec un représentant de l'institut Xavier puirsque récemment intégrée dans la Confrérie. Mais cette guerre que se menaient les deux factions la laissaient de marbre, et puis cette soirée était la sienne, pas question de la gâcher.

-En effet, je suis ravie de constater que l'Institut comporte aussi des gentlemen. Vous êtes tout à fait charmant. Et...si ce n'est pas trop indiscret de ma part, quel est votre pouvoir ? J'imagine qu'il doit être surprenant. Mmh...à mon avis vous ne pouvez pas voler...je dirais plutôt que vous avez des pouvoirs psychiques.

En tant que scientifique, Gretchen était d'une grande curiosité. Mais elle préférait quant à elle continuer à se faire passer pour une simple humaine sans réellement mentir mais en en disant le moins possible sur la question.

Si il avait put cacher sa nature mutante, il est probable que Kurt serait également resté très discret sur cet aspect de sa personne, ne serait-ce que l'espace d'un soir. Mais il n'avait pas ce luxe, et s'en était accommodé depuis un certain temps. Si il venait donc à apprendre que Liza, puisque c'était le seul nom qu'il connaissait à sa compagne de la soirée, était en réalité une mutante, il ne s'en offusquerait guère.

-C'est une question très intime que vous me posez là. D'habitude il faut m'inviter à diner avant d'aborder ce genre de sujet.

Concluant sa phrase sur un sourire bienveillant, il prit quelques instants de réflexion. D'après ce qu'il savait, il n'avait aucunes raisons de ce méfier de la femme aux cheveux courts. Pourquoi, alors, ne pas lui révéler la nature de ses pouvoirs.

-Je vais vous montrer, ce sera plus... parlant.

Et sans attendre, il sauta par dessus la rambarde de la terrasse, se laissant chuter alors de quelques mètres...

BAMF

...avant de disparaître dans un nuage de fumée violette. Il était assez loin, alors, pour que le docteur ne soit pas incommodée par l'odeur de soufre.

BAMF

Il réapparut debout sur le bord de la rambarde, se tenant avec une gracieuse droiture en équilibre sur la fine barre métallique. Faisant un pas en avant, il se laissa de nouveau tomber, mais sur la terrasse cette fois, rejoignant la "jeune" femme.

En voyant Kurt sauter par dessus la rambarde, Gretchen pensa d'abord qu'il savait voler, ou qu'il avait des pouvoirs télékinésiques assez puissants pour stopper sa chute. Elle fut surprise de le voir "exploser" en plein vol, et encore plus surprise de le voir réapparaître devant elle en équilibre sur la rambarde dans un nuage de souffre. Bien sûr, elle ne se laissa pas aller à réagir comme une vulgaire pécore, après tout, elle était habituée aux surprises bonnes ou mauvaises. Elle se contenta donc d'un léger sursaut, suivi par un sourire rassuré.

-Téléportation, mmh ? Ce doit être bien pratique, n'est-il pas ? Je trouve les pouvoirs mutants si fascinants.

Elle s'approcha de Mr Wagner et, doucement, caressa du bout des doigts sa joue bleue.

-Les ignorants vous traitent de monstres, mais moi je vois plus loin qu'eux. Vous n'êtes pas un monstre, Herr Wagner, vous êtes...l'avenir.

Kurt regardait le docteur dans les yeux, légèrement troublé par cette proximité. Certes, lui et Liza avaient partagés une sorte d'intimité en dansant ensemble, mais la danse était une chose particulière. En dansant on pouvait se permettre une certaine proximité avec une inconnue qui serait inconvenante dans toute autre situation. Mais là ils ne dansaient plus, et ce moment, si particulier, basculait de l'échange presque banal à la conversation intime. Le mutant bleu eut un petit frisson en sentant les doigts de la belle sur sa joue, lui souriant avec douceur, malgré ses canines qui appuyaient légèrement sur sa lèvre inférieure.

-Tenteriez vous de me séduire fraulein ?

Le ton se voulait taquin, mais le trouble de Diablo était palpable dans sa voix. Doucement il posa sa main trop bleue sur celle trop pale de Gretchen. Ce n'était pas tout les jours qu'on rencontrait une humaine normale qui acceptait à ce point la différence qu'il pouvait y avoir entre elle et le mutant indigo, et pourtant. Un instant, Kurt douta de la réalité de la situation. Lui, sur une terrasse, en charmante compagnie, la ville s'offrant à leurs regards. En fond résonnait le son de la musique, étouffé par la porte vitrée qui les séparaient des mondanités.

Il y avait quelque chose de surréaliste dans ce moment, autant que dans cette sensation d'être parfaitement isolé du reste du monde, alors qu'ils n'étaient qu'a quelque pas d'un brouhaha insipide. Doucement le Diablotin approcha ses lèvres de celle de la femme au cheveux courts, et alors qu'il allait lui voler un baiser, il s'arrêta à quelques millimètres seulement de la volupté. Son souffle se mêlait à celui de Liza, et il ferma les yeux, se reculant alors d'un pas.

-Pardonnez moi... Je ne sais pas ce qui m'a pris.

Il avait dit ces quelques mots d'un murmure à peine audible alors qu'il rouvrait les yeux. Et puis il esquissa un nouveau sourire, presque timide cette fois. Il était si rare qu'un rencontre lui fasse cet effet là, et il fallut que ça arrive dans une soirée de ce type-là, l'assurant ainsi d'un nombre impressionnant de différence entre lui et la belle, que ce soit de par leur natures, humaine et mutant, jusqu'à leur rang social, riche médecin et pauvre professeur. A une autre époque il se serait fait pendre pour avoir osé ne serait-ce que la regarder, alors imaginez ce qu'il aurait subit pour l'avoir presque embrassée. Kurt risqua un regard vers l'intérieur, puis baissa légèrement la tête en voyant presque une douzaine de regard qui les épiaient. De toute évidence l'étrange couple était devenu l'attraction de la soirée, et il n'aurait pas été surpris de voir soudain débarquer, soit un mari jaloux, soit un activiste anti-mutant, près à le tuer pour un tel affront.

-Tenteriez vous de me séduire fraulein ?
-Mmh...c'est une possibilité.

Lorsque le mutant essaya de l'embrasser, Gretchen ne fit pas mine de le repousser. Mais malgré cela ce fut lui-même qui s'en chargea, reculant d'un air confus.

-Pardonnez moi... Je ne sais pas ce qui m'a pris.

Il semblait soudain bien timide pour un mutant qui n'avait pas eu peur de s'afficher en public. S'il n'était pas bleu de la tête aux pieds, Gretchen aurait juré qu'il rougissait comme un collégien. Elle avait toujours eu un grand pouvoir pour les hommes. Sa beauté ne laissait déjà pas de marbre. Et puis pour se venger du pouvoir que les hommes avaient toujours eu sur elle autrefois elle avait appris à feindre, à séduire par ses paroles. Et visiblement, Kurt n'y était pas non plus insensible.

-Pourquoi vous être arrêté en si bon chemin ?

Elle vit les curieux qui les épiaient à travers la baie vitrée, à peine discrets. En effet, difficile de se sentir à l'aise avec ces regards idiots dans le dos.

-Suivez-moi.

Elle entraîna son ami à l'intérieur, où il repassèrent devant les invités à l'esprit trop étroit. Ils prirent un ascenseur que Gretchen fit monter jusqu'au toit grâce à une carte magnétique que lui avait confiée Fergusson. Ils arrivèrent à la terrasse, surplombant la ville. Il y avait des hamacs, un bar en acajou, des jardinières remplies de fleurs exotiques, et surtout, une piscine. La seule source d'éclairage étant les lampes qui éclairaient l'intérieur du bassin, la lumière tamisée donnait une ambiance reposante aux lieux. Il suffisait d'y ajouter la voûte céleste qui s'étendait au dessus d'eux pour que l'atmosphère soit vraiment intime. Et bien sûr, il n'y avait pas un chat.

-Nous serons mieux ici. Seuls moi et Fergusson avons la clé, nous ne serons pas dérangés. Cet endroit est un peu son sanctuaire secret.

Mieux valait ne pas trop chercher à s'imaginer le vieux milliardaire emmener ses conquêtes sur cette même terrasse.

-Alors, Herr Wagner, êtes-vous un homme sincère ?

Effectivement, ce soudain accès de timidité n'était pas chose courante chez Kurt. Lui qui, d'habitude, était d'une assurance à toute épreuve, et un charmeur hors paire, il devait être bien troublé pour être dans cet état. Il esquissa un sourire lorsque sa nouvelle amie l'entraina à l'intérieur. Il n'eut pas besoin de porter le regard sur eux pour savoir que les invités s'écartaient de leur chemin. Du coin de l'œil il aperçut l'hôte de cette soirée esquisser un petit sourire amusé. Bien que le trajet soit court jusqu'au toit du building, il sembla durer une éternité à Diablo, toujours dans cet état de confusion qui lui était étranger. Ce qui l'en sortit, ce fut la vision de cette terrasse presque surréaliste. On aurait dit l'endroit sortit tout droit d'un magazine de Hugh Hefner. Et il est vrai que le mutant préféra ne pas imaginer le vieux Fergusson entouré de ses, certainement, trop jeunes conquêtes dans ce lieu. Lorsque Liza lui parla, l'effet de surprise se dissipa, et toute son attention se reporta sur la jolie docteur. Était-il un homme sincère ? La réponse était aussi simple que lourde de conséquence. Ce fut donc avec un sourire triste, son regard plongé de nouveau dans celui de la belle créature qui l'accompagnait, qu'il répondit.

-J'ai toujours été un homme sincère, que ce soit dans mes joies ou mes colères. Il en est de même pour le trouble que vous provoquez, je vous l'avoue en toute honnêteté. Et c'est le même amour pour la vérité, que me fait à vous me confesser. Car si il est vrai que vous animez en moi, un profond et sincère émoi, je ne suis pas de ceux dont la vie peut être partagée, car je ne peux promettre qu'un jour vous me reverrez. Je suis de ceux qui risquent de ne jamais revenir, qui n'ont pas le droit d'espérer un avenir. C'est un choix que j'ai fait, et que jamais, hormis ce soir, je ne regretterais, que de me battre pour de meilleurs lendemains, sans me soucier de mon propre bien.

Tout en parlant, Kurt avait pris dans les siennes, les mains de Gretchen, et, marquant une pause, il y déposa un tendre baiser.

-J'espère que vous pourrez me pardonner, de vous avoir malgré tout courtisée. J'oserais tout de même une dernière demande, et je sais Ô combien elle est grande, c'est celle de devenir mon amie, ou du moins essayer, je vous en prie.

Enfin le diablotin relâcha les mains de la demoiselle, se reculant d'un pas. Il se voulait honnête et bien il l'était. Avouant peut-être pas très clairement, son attirance pour la belle, et son trop grand respect pour elle, qui l'empêchait de l'impliquer dans une vie qui pourrait la blesser.


[HJ : Je me suis un peu laissé emporté sur le dialogue lol, désolé si c'est désagréable à lire.]

C'était vraiment un gentleman, artiste de la prose. Gretchen était ravie de voir que l'espèce n'était pas totalement éteinte.

-J'espère que vous pourrez me pardonner, de vous avoir malgré tout courtisée. J'oserais tout de même une dernière demande, et je sais Ô combien elle est grande, c'est celle de devenir mon amie, ou du moins essayer, je vous en prie.

Ce fut très subtil, et pas très voyant à cause de la faible lumière, mais si Kurt avait le sens de l'observation, il pourrait remarquer une légère rougeur qui empourprait les joues ivoirines de la "jeune" femme.

-C'est une demande osée, mais je pense pouvoir la satisfaire. Vous êtes d'agréable compagnie, vous êtes galant.

Elle s'avança jusqu'au bord de la piscine, regardant la surface lisse de l'eau.

-Vous savez, moi non plus je ne suis pas celle que je semble être.

Qu'il était doux de voir les joues de du docteur Liza Krüger rosirent, même si c'était bien peu, sous l'effet des mots de Kurt. Peu importait qu'il ait l'habitude de plaire au dames, ou de les toucher avec ses mots, cette fois-ci la chose était bien plus flatteuse que lorsqu'il produisait cet effet sur une femme insipide. Celle ci valait le détour, de toute évidence, et pourtant il se résignait à ne jamais demander plus que son amitié. Ainsi, lorsque Gretchen la lui accorda, son amitié bien entendu, le sourire du diablotin s'élargit, et si ses yeux avaient étés normaux, on aurait pu y voir un éclat de joie. Alors lorsqu'elle lui avoua ne pas être celle qu'elle semblait, il fit une petite moue, mi boudeuse mi moqueuse.

-Ainsi donc vous n'êtes pas celle que j'imagine. Ainsi vous n'êtes ni belle ni intelligente, pas plus drôle qu'intelligente. Et votre regard que je trouvais un peu froid ne brille pas depuis qu'il est posé sûr moi. Quel vilain tour vous m'avez joué là, je ne m'en remettrais certainement pas.

Restant à sa place, regardant la belle demoiselle avec un sourire retrouvé, Kurt plaisantait à n'en point douter. Loin d'imaginer les secrets que Liza pouvait dissimuler, à commencer par son véritable nom, il s'attendait, au pire, qu'elle lui annonce qu'elle était également une mutante. Après tout ça aurait expliqué qu'elle ai accepté si vite l'apparence si particulière de notre petit mutant bleu.

-Sachez Fraulein, que si vous ne voulez pas me révéler votre vraie nature je ne m'en offenserai pas. Si j'avais pu le faire également, du moins fut un temps, je n'aurais pas hésité un instant. Rappelez vous que nous venons de nous rencontrés, et que, Ô combien agréable soit ce moment partagé, vous ne souhaitez peut-être pas pour autant qu'un presque inconnu en sache plus que les autres sur vous.

Il ne parlait plus vraiment de la même manière, laissant tomber les jolies formulations. Il espérait s'être montré prévenant sans pour autant sous entendre qu'elle était mutante, car pour lui ce n'était qu'une pensée en l'air, qui n'avait fait qu'effleurer son esprit.

Kurt était d'une grande franchise, Gretchen se sentait coupable de lui cacher des choses. Et pourtant, elle avait fait bien plus horrible dans sa vie sans s'en émouvoir. Se faisait-elle plus faible avec l'âge ? Pourtant elle savait que son cerveau n'avait pas été plus affecté que son visage par le poids des années. Et pour elle, seules les affections physiques valaient la peine d'être prises en compte. Pourtant, il y avait autre chose avec Kurt.

-Il paraît qu'il est plus facile de se confier à des inconnus. Mais alors on ne sait pas ce qu'il advient des informations qu'on donne, à qui elles seront répétées, et quelles en seront les compétences. Cependant, je sens que vous n'êtes pas une commère qui ira répéter tout ce qu'elle a entendu à ses voisins. Alors soit, si vous voulez être mon confident je serais heureuse de me confesser à vous.

Elle se promena sur le rebord de la piscine, évoluant avec un équilibre inattendu sur ses chaussures à talons. Son reflet dans l'eau accrocha son regard. Gretchen était une scientifique intelligente, mais elle était aussi une femme et avait ses défauts. Elle était fière, imbue, et même un peu coquette. Son reflet la captivait, et on pouvait difficilement lui en vouloir. Avec sa peau pâle et ses yeux gris, elle ressemblait à une ancienne poupée en porcelaine. Une beauté surnaturelle. A ce propos, les vieilles légendes sur les vampires l'amusaient, en particulier celle prétendant que les chasseurs nocturnes n'avaient pas de reflet. Voilà qui aurait été très malcommode à une époque où on croisait à longueur de journée des objets réfléchissants.

-Oui, je suis une mutante, de classe Alpha. Mais ce n'est que la plus petite et la plus avouable partie de mes vices cachés. J'ai du sang sur les mains. (elle faillit sourire de cette affirmation, qu'on pouvait prendre au sens propre à cause de la nature de son pouvoir) J'ai eu...une autre vie, avant d'être un médecin respecté. J'ai tué, directement et par inactivité. Je ne suis pas fière de cette vie passée, et je passe chaque jour à essayer de réparer ce que j'ai détruit.

Bien sûr, elle se garda bien de parler de son passé dans la SS. Inutile de donner à Mr Wagner l'envie de la passer par dessus bord.

-Je serais heureuse de vous offrir mon amitié, mais pensez-vous vraiment que je mérite la votre ?

Kurt, toujours en retrait par rapport à Liza, suivait ses mouvements des yeux et marchait de sorte à toujours rester bien derrière elle. De l'extérieur, cette scène donnait l'air d'une sorte de ballet silencieux, une danse étrange a travers laquelle les deux protagonistes échangeaient autant que par les mots. Mais les mots étaient là, rendant plus clair le message du corps, aidant le spectateur imaginaire, ainsi que les deux mutants, à mieux comprendre ce dialogue. Car si la belle maintenait un fragile équilibre au bord de cette piscine, ajouté à ces aveux, car il y avait bien là plusieurs confessions, alors on comprenait sa lutte pour ne pas franchir la ligne qui la séparait de la noyade. Mais alors ? Que pouvait bien dire le diablotin bleu, suivant chacun de ses pas, mimant presque les mouvements de la femme médecin ?

-La vie est tortueuse, elle nous façonne de mille manière différente en un laps de temps si court que parfois l'on se perd. Vous avez du sang sur les mains, moi aussi. Je ne sais pas si vous avez tué par accident ou volontairement, je ne veux pas le savoir.

Le diable marqua une pause, levant la tête vers le ciel étoilé, ses yeux jaunes se perdants dans la profondeur de la nuit. Puis il sourit.

-Je ne vous ai pas tout dit non plus. Voyez-vous, je suis croyant, catholique pour être précis. Et ma religion, non pas celle pervertie par l'institution qu'es l'église, mais ma croyance profonde, comporte le principe de rédemption. C'est une voie difficile, la plus compliquée de toute, ne serait-ce que pour l'entrevoir il faut faire des efforts. Car lorsque l'on se perd sur la voie du péché, quelque soit les péchés commis, il est difficile de s'en écarter, car c'est une route bien souvent savoureuse, pleine de promesses, le plaisir, le pouvoir, la richesse. Mais certains, les plus forts d'entre nous, arrivent à faire un pas sur le sentier de la rédemption, puis un autre. Et si sombrer dans le péché est rapide et facile, les racheter est long et fastidieux. C'est pourquoi tout ceux qui font le choix du repentir, et qui essaie, aussi fort qu'ils le peuvent, même si ce n'est parfois pas assez, de racheter leurs erreurs passées, ces gens là méritent mon amitié et ce quoi qu'ils en pensent.

Dans la nuit, le diable esquissa un faible sourire. Il ne demanderai pas quelles étaient les circonstances de ces morts, ou leur nombre. Il ne demanderait pas non plus si elle avait payé pour ses actes, car si la réponse était non, alors il devrait tourner le dos, disparaitre de ce toit et enquêter sur la femme qui lui plaisait tant, pour finalement l'arrêter, et ça, au moins ce soir, il n'en avait pas envie.

Kurt parla de religion. Gretchen ne croyait pas en Dieu. Elle était très cartésienne, et l'idée qu'une puissance mystique dirige le monde du haut des nuages lui semblait moins réaliste que l'idée que les extraterrestres existent (ce qui ne lui paraissait pas improbable). Pour elle, la vie se limitait à des molécules, et l'âme humaine n'était qu'une série d'échanges chimiques dans le cerveau.

-Le bien et le mal sont des notions bien abstraites. De mauvaises actions peuvent servir le "bien", et des actions partant d'un bon sentiment peuvent faire beaucoup de tort. Tous les pêchés que j'ai commis, je ne les ai pas fait pour le plaisir, ni pour le pouvoir, et encore moins pour la richesse. Ce que j'ai fait, il y a une grande part que j'aurais préféré ne jamais devoir faire, mais je l'ai fait pour quelque chose que je pense être juste.

Elle alla s'installer lascivement sur un transat. Maintenant, elle considérait Mr Wagner avec une pointe de gourmandise. Elle avait bu un peu de sang pendant la soirée. Fergusson réservait pour elle un peu de sang acheté clandestinement à une banque locale. Ce sang prélevé à l'aiguille, stocké dans des récipients de verre et conservés au frais était certes nourrissant, elle-même en conservait pour les moment où elle n'avait pas le temps de chercher une proie, mais rien ne valait le sang bien chaud prélevé directement à la nuque. Elle se demanda secrètement si Kurt avait le sang bleu.

-Vous êtes un homme rare, Mr Wagner, très ouvert d'esprit.

Kurt avait écouté presque religieusement sa compagne d'un soir, le regard porté sur le ciel sombre de la nuit new-yorkaise. Plus elle parlait, et plus elle semblait coupable des pires horreurs. Un moindre mal pour le plus grand bien, ce n'était pas vraiment le genre de philosophie auxquelles adhérait le Diablotin. Comme c'était dommage, elle qui s'était montrée pleine de promesses venait de tout briser. Bien sûr la délicatesse du mutant lui empêchait de le faire remarquer clairement. Mais déjà son attitude changeait. Dans son regard et ses sourires, il n'y avait plus vraiment d'envie de séduire. Son ouverture d'esprit était grande, mais il était des points de morale sur lesquels il était inflexible, du moins à ce moment de sa vie. Il allait répondre, et ce fut presque avec soulagement qu'il sentit dans sa poche un appareil vibrer. Ce n'était pas un téléphone, ou un appareil de communication quelconque. Il s'agissait simplement de l'alarme le prévenant qu'il était grand tant pour lui de rentrer. Sa nature de super héros à temps plein lui imposant une hygiène de vie très stricte, parfois trop. Ce fut à l'acteur qu'il était de prendre le relais.

-Un homme rare je ne sais pas, mais qui se raréfie certainement. Il m'est pénible de le vous le dire. Mais il est temps pour moi de vous quitter.

S'approchant d'elle, il prit une de ses mains dans les siennes et y déposa un baiser. Sans que ses yeux pourtant ne lâchent ceux de la mutante.

-Comme je vous l'ai déjà dit, je ne puis vous promettre de vous revoir un jour. Mais je l'espère pourtant. Votre rencontre fut l'une des plus agréables que j'ai connu depuis bien des années maintenant.

Puis la lâchant, il se dirigea non pas vers la porte, mais vers le borde de cette terrasse particulière. Lorsqu'elle lui aurait dit au revoir, il sauterait dans le vide, pour se téléporter, à plusieurs reprises, jusqu'au bas de l'immeuble, pour y retrouver la voiture qui déjà l'attendait. Pour lui, ainsi s'achevait cette soirée un peu particulière, où il rencontra pour la première fois la dame aux cheveux courts.

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