Une semaine a passé depuis que je suis arrivée dans cet endroit. Je crois que je me souviendrai toute ma vie du jour où mes parents m’ont laissée partir avec cet étranger. Ils n’avaient même pas pu m’accompagner, ils ne voulaient sans doute pas. Trop honteux d’avoir un monstre pour fille.
Je leur en ai voulu, mais à présent ils commencent à me manquer.
Je ne sais pas si le pire dans tout ça fut le fait que j’étais en pleine possession de mes facultés intellectuelles. Mes maux de tête avaient miraculeusement disparus et pour cause.
Mon père me pardonnera-t-il vraiment un jour de lui avoir infligé ça ?
Les deux premiers jours furent assez étranges. On m’a regardé d’un drôle d’œil et j’aime pas ça. Peut être que je me fais des idées mais je les ai sentis peser ses regards sur moi, dans les couloirs ou en classe. Je n’ai même pas mis les pieds au réfectoire, trop bruyant pour moi. Les couverts, les discutions même à voix basse me font mal aux oreilles.
Hier matin je me suis réveillée avec un étau autour du front. J’avais presque oublié combien c’est douloureux. Ça c’est vite amplifié me poussant dans mes retranchements. J’ai eu tôt fait de me cloîtrer dans ma chambre. Les rideaux tirés dans un silence presque total j’arrive à supporter et au moins je ne risque pas de me décharger sur le premier venu sans le faire exprès. J’ai réussit à éviter l’infirmerie, de toute façon je suis persuadée que cela ne servirait à rien.
La journée passa et la nuit fut assez difficile.
Aujourd’hui la migraine est bien installée. Je la sens comme si un anneau brûlant enserrait mon crane. Je ne sais pas combien de temps je peux rester comme ça à présent. Je sais qu’il me serait facile d’atténuer ma souffrance. J’ai peur que la tentation soit trop forte et que je cède à l’envie de transférer cette douleur pour enfin pouvoir dormir sereinement.
Je fixe la fenêtre, les yeux grands ouverts. Je balaye la pièce du regard. Elle est plongée dans une quasi obscurité, les lames des volets laissant filtrer les rayons lunaires et la lumière des lampadaires du parc.
J’essaie de me détendre, j’attends un sommeil qui ne vient pas. Je tourne ma tête vers ma table de nuit. Le réveil marque 3 h 37.
Je soupire et j’ai faim. Autant profiter de la tranquillité nocturne pour aller à la cuisine voir s’il n’y a pas quelque chose à manger.
Je me lève, et ouvre lentement ma porte pour jeter un coup d’œil dans le couloir. C’est calme et silencieux. Et même s’il y a des caméras de surveillance ou des rondes je n’y réfléchis pas. En pyjama et pieds nus je m’engage dans le couloir.
J’arrive sans trop de peine jusqu’à la pièce en question. Je trouve l’interrupteur et une lumière crue envahi l’endroit. Je serre les paupières en étouffant un embryon de plainte. Progressivement mes yeux s’habituent à la clarté soudaine et je peux m’aventurer à explorer. Je repère en premier le réfrigérateur que j’ouvre non sans que quelques bouteilles de jus de fruits ne s’entre-choquent causant un tintement cristallin.
Je suspends mon geste en regardant autour de moi, le cœur battant. Je n’ai pas trop envie d’attirer quelqu’un . Non seulement pour me faire engueuler mais plus parce que j’ai peur de ce qui pourrait arriver …
Le contenu du frigo dépasse mes espérances. Il y a de quoi faire un vrai festin. Du fromage, de la charcuterie, des tomates, du jus de fruit… miam !
Il ne me manque plus que le pain.
Je commence à ouvrir un placard, puis un autre et encore une autre porte à la recherche de ce qui me permettrait de me préparer un bon sandwich.
Je poursuis mes investigations en oubliant que je pouvais être découverte.