Comme les soirs de grande première (PV Nicolas)

Le taxi repartit en trombe, après avoir bien entendu taxé 150$ au passage. Toussotant sous les gazs d'échappement âcres du vieux taco, Caroline posa son vieux sac de voyage au sol pour mieux se frotter les yeux. Décidément, quitter la géorgie relevait du parcours du combattant. Elle avait espéré être prise en charge au sortir de l'avion mais il n'en avait rien été. Probablement l'Institut estimait qu'à bientôt 18 ans révolus, on devait être capable de tirer son plan comme un bon boyscout. Carlonie qui n'avait pas l'habitude des voyages longue-distance version aventure inconnue ne s'était pas laisser démonté. Elle avait sorti une poignée de billets d'un distributeur, noté l'adresse de l'expéditeur de sa confirmation d'inscription, attrapé un taxi et lui avait donné l'adresse. Elle en serait quitte pour se faire rembourser par les parents.

Maintenant appuyée contre la grande grille de fer forgé, les mains accrochées aux barreaux, elle regardait l'immense propriété, le visage collé aux épais barreaux froids. L'Institut était en fait une immense bâtisse formée de trois pavillons de style moderno-clacissicant. Il était entouré d'un vaste parc à l'anglaise où pas un chat ne semblait avoir mis le pied. En levant la tête, Caroline vit une caméra de surveillance au sommet du pilier de pierre qui servait de montant à la grille. Elle en repéra plusieurs autres nichées sous les gouttières. Décidément, l'Institut ne semblait pas rigoler avec la sécurité... ou le règlement!

Alors qu'elle s'approchait du pilier qui supportait l'interphone dans le but de se faire ouvrir la grille, un bruit derrière elle attira son attention. Elle détourna la tête pour voir de quoi il retournait.

Un bruit de pas à la cadence rapide mais étouffé détourna l'attention de Caroline. Un joggeur qui devait avoir à peu près son âge, arrivait en trottant, le souffle sacadé au rythme de ses pas. Il portait sur son dos un sac rempli de provisions. Caroline songea qu'il devait être allé faire le marché pour la cuisinière de l'Institut. A moins qu'il n'y ait qu'une cuisine self-service dans laquelle chacun devait se débrouiller. Caroline eut un soupir intérieur en songeant que si c'était la cas, les soirées promettaient d'être longues. Elle savait à peine mettre une barquette dans un micro-ondes. C'était toujours sa mère qui cuisinait à la maison. Elle s'en voulut de ne pas s'être intéressé à la confection de petits plats quand elle en avait l'occasion. Mais bon, rien ne servait de paniquer, elle n'était encore sûre de rien.

Le jeune sportif s'adressa à elle d'une voix courtoise :

- Bonjour mademoiselle, puis je vous aider ?

A son habitude, Caroline baissa les yeux et piqua un fard.

- Peut-être bien. Ca dépend si vous faites partie de l'Institut Xavier. En fait, je suis une nouvelle pensionnaire et j'allais sonner pour me présenter.

Dieu que ce vouvoiement était étrange. En Géorgie, tout le monde se tutoie quand on a que 17 ans. Caroline se dit qu'il y avait décidément de sérieux clivages entre la capitale et son état sudiste.

- Oui, je fait partie de cet Institut. Et Je vous souhaite la bienvenue, mais pas la peine de sonner, j'ai le code.

- Ah... Merci, se contenta de répondre Caroline toujours timide.

Le jeune homme s'approcha du clavier, tappota une série de chiffres et se recula d'un pas. La grille vira lentement sur ses gonds dans un bruit de mécanique bien huilée. Le sportif revint vers Caroline. Il lui fit la conversation, le temps que la grille soit grande ouverte.

- A votre accent, je peux en déduire que vous n'êtes pas New Yorkaise. Je me trompe ? Ah oui, je suis Nicolas, ça fait bientôt trois ans que j'étudie à l'Institut.

Caroline eut un petit sourire polissé.

- Enchantée. Moi, je m'apelle Caroline. Je viens de Géorgie.

Nicolas lui décocha un chaud sourire.

- Puis je vous proposer mon aide pour vos bagages ?

Caroline répondit précipitemment :

- Oh non non. Ce n'est pas la peine. Je n'ai que ce sac avec moi et il n'est pas bien lourd. Le reste de mes affaires devrait arrivé de l'aéroport dans la journée. Mais c'est très gentil de me l'avoir proposé.

Caroline prit son grand sac façon militaire qu'elle avait chippé à son père et le carra tant bien que mal sur son épaule.

- Et puis, vous portez déjà vos commissions, enchaina-t-elle avec un sourire qui tentait de répondre à celui de Nicolas. Ils marchèrent un instant chacun portant son sac. Caroline leva un oeil sur son compagnon mais le rabaissa aussitôt quand son regard croisa le sien.

Pour dissiper son malaise, elle ajouta en s'empourprant de plus belle :

- Je n'avais pas conscience d'avoir un accent. Ca se remarque beaucoup?

Nicolas semblait vraiment tout faire pour mettre Caroline plus à son aise. Touchée par les attentions du jeune homme, elle sentit son malaise disparaître un peu. Ses joues reprirent une teinte plus pâle, elle releva un peu la tête et se risqua à regarder Nicolas un peu plus souvent. Après un petite minute de silence, chacun marchant de son côté de l'allée, Caroline vit le visage de Nicolas s'illuminer, comme s'il venait de trouver une solution à tous ses problèmes. Il fourra sa main dans son sac de provisions, en tira un sandwich enveloppé de cellophane et le lui tendit sous le nez.

- As tu mangé pendant ton voyage?

Un violent fou-rire aussi gênant qu'inattendu secoua tout le corps de Caroline. Lachant son sac de voyage pour plaquer ses mains contre sa bouche, elle pouffa de rire. Au bout d'un moment, elle n'y tint plus. Elle éclata d'un rire clair et frais, soulageant après toute cette gêne. La larme à l'oeil, elle se reprit petit à petit pour s'excuser d'une voix hoquetante.

- Oh... Je suis vraiment... désolée. C'est nerveux. Je suis un peu fatiguée.

Et après un soupir qui lui redonna l'emprise d'elle même, elle ramassa son sac, le jeta sur son épaule et répondit très gentiement.

- C'est très gentil à toi de ma proposer ton sandwich mais je n'ai pas vraiment faim. Et puis, je ne voudrais pas te priver.

Avec un petit regard inquiet, elle vérifia que Nicolas ne se vexait pas qu'elle lui ait ri au nez.

- Je te prie de m'excuser, mais moi je meurs de faim.

Et avec un coup de dent vorace, Nicolas mordit dans son sandwich.

- Oh, il n'y a pas de mal. Je peux comprendre qu'on aie petit creux après une séance de jogging.

Comme si elle lui avait demandé des explications, Nicolas précisea entre deux bouchées :

- C'est le désavantage de ma mutation. J'ai parait il un estomac dimensionnel. Je n'ai pas très bien compris, mais apparemment mon estomac donne sur une autre dimension ce qui fait que je peux manger tout et n'importe quoi.

Caroline regarda Nicolas avec de grands yeux étonnés, comme si elle s'attendait à voir un trou noir à la place de son ventre. Décidément la mutation est quelque chose de sensationnel. Ne sachant pas trop quoi dire, elle balbutia :

- Et bien ... euh ... au moins tu ne risques pas de prendre du poids, c'est déjà ça.

La dernière observation ne semblait pas souffrir de réponse. Caroline et Nicolas continuèrent de marcher en silence. Caroline se traita mentalement d'idiote. En lâchant cette niaiserie, elle venait de tuer la conversation. Heureusement, la large allée de tarmac noir déboucha sur une petite esplanade décorée d'une fontaine en forme d'ange. Quatre marches menaient à la grande porte d'entrée vitrée. Caroline se tourna alors vers Nicolas.

- Je te remercie beaucoup de m'avoir ouvert la grille. Est-ce que tu sais par hasard où je dois me présenter pour faire savoir que je suis arrivée?