Une petite partie ? [PV]

- Votre honneur, à la lumière de ces éléments donnés par le témoin, nous souhaitons que l'ensemble du contenu du placard soit retiré des preuves.
- Vous plaisantez ? Rugit alors l'attorney, ne semblant pas s'attendre à ça.
- Le contenu de ce placard a été fouillé de manière illégale, c'est un cas classique de violation du quatrième amendement. Répondit alors, très calme, l'avocate de la défense.
- "Supprimer le contenu du placard" ? On ne "supprime" pas trois cadavres mutilés comme si de rien n'était, c'est totalement immoral, vous pensez vraiment q...
- Cela suffit ! interrompit alors le juge. J'avoue maître Håtjärnen que cette idée ne me plaît que modérément, et ces méthodes ne m'enchantent pas...
- J'ai pourtant proposé à la cour d'assigner un autre avocat à cette affaire votre honneur, ma spécialité c'est le civil et vous avez personnellement décidé de me mettre sur l'affaire.
- En effet... Je commence peut-être déjà à le regretter, mais vous avez des bons éléments. La fouille a été faite de manière aussi grossière que douteuse. Je vais étudier vos arguments, nous reprendrons les débats demain à 14h30. La séance est levée. conclut finalement l'homme aux cheveux grisonnants, frappant de son marteau avant de quitter la salle.

On pourrait croire que c'était une victoire, mais pour Kjerstin, c'était une plaie. Elle s'était faite assigner d'office sur une affaire de meurtres multiples avec torture, alors qu'elle ne fait en général pas du tout de procès pénaux... Selon elle, un ou plusieurs juges voulant apprendre à Kjerstin une forme "d'humilité" ont voulu lui coller dans les pattes une affaire indéfendable et impossible à gagner histoire de la faire perdre, et la faire descendre de son piédestal ou dieu sait quoi. Mais en l'occurrence ils ne s'attendaient pas à ce qu'elle invoque ce genre d'arguments : elle allait peut-être réussir à enterrer l'affaire avant même le début du procès.

Ramassant ses affaires, elle soupira longuement de dépit. En gagnant elle allait probablement remettre un type plus que douteux en liberté... Le ou les juges qui ont décidé de coller Kya sur ce cas auraient du choisir un petit jeune sortant à peine de la fac de droit... Mais au fond, ce genre de considération morale -le fait de remettre un taré dehors- ne la concernait que peu. S'il tentait de l'agresser elle il aurait une surprise, et s'il agressait une autre personne... Ce serait justement une autre personne.

Une fois dehors, elle prit un instant pour réfléchir, finissant par grimacer... Clairement elle n'avait aucune envie de retourner au bureau surtout aussi tard, elle décida donc d'aller se manger quelque chose rapidement avant de rentrer. Et c'est alors qu'elle marchait, perdue dans ses pensées et calculs divers, que la nuit tombait petit à petit et obscurcissait les rues de la ville, qu'elle entendit un dialogue à quelques mètres de là.
Le coin était douteux, elle était donc méfiante... Mais cela valait la peine de croiser ces ruelles suspectes : il y avait dans ce quartier les meilleurs travers de porc de toute la ville, et de loin. La viande était fine, la sauce présente sans envahir le nez, la cuisson était au poil près, rendant la chair animale juste assez craquante sans être trop dure, bref un vrai succès. Selon l'avocate, ce type méritait un restaurant quatre étoiles près de Central Park.

Mais alors qu'elle s'était approchée des voix, elle entendit des bruits de plus en plus inquiétants... Un claquement métallique au sol, puis le déclic d'une arme qu'on tirait à vide... Et finalement :

- C'est quoi ce ... ?

Et ce bruit. Ce son qu'elle connaissait si bien, celui de la chair cédant sous le coup d'une lame. Accélérant le pas, elle aperçut alors au détour d'une allée un homme semblant assez âgé, en train d'embrocher un petit jeune qui tenait une arme en main... Arme qui chuta d'ailleurs rapidement au sol.
L'homme tenant la canne épée n'avait pas de chance en effet : voilà un beau témoin, expert en ficelles juridiques en plus, qui débarquait. Et dont le niveau de stress augmentait. Son cerveau allait à 200 à l'heure, pesant le pour et le contre de chaque décision possible. Intervenir physiquement ? Intervenir par la négociation ? Partir sans rien faire ? Appeler la police et rester ? Appeler la police et partir ? Appeler juste une ambulance pour le ou les futurs blessés ? Elle devait couvrir ses arrières. Elle attrapa son téléphone, le déverouillant... Erreur.

Le téléphone sortit de veille alors qu'elle le manipulait, produisant un petit "bipbipbip, bipbip" tout à fait accueillant, mais parfaitement bruyant et absolument pas discret du tout. Clairement, ce genre de smartphone était le pire ennemi des ninjas... Et clairement, les insultes particulièrement obscènes que la brune adressa alors à son téléphone n'étaient pas discrètes non plus...

Clac. La main qui sautait.
La brune grimaça, alors que clairement le stress montait... Cette histoire ne sentait pas bon d'autant que le type étrange à la canne-épée venait de la repérer... Et se dirigeait vers elle, mais l'épée au fourreau. Le danger augmentait malgré tout pour elle, et elle sentait déjà son métabolisme se préparer, le coeur accélérant au dessus des 160 pulsations minute, les sourcils froncés.

"Bien le bonsoir mademoiselle, vous ne devriez pas traîner si tard dans un quartier aussi défavorisé."

Il était cordial. Bizarre... Cela ne la rassurait pas pour autant mais faisait pourtant quelque peu diminuer la sensation de danger imminent. Il semblait plutôt bonhomme, avec sa canne rentrée... Et on pourrait presque le croire cordial, d'ailleurs, si l'on ignorait bien sûr le fait qu'il découpait des gens dans les ruelles de New York. C'est à ce moment-là que son téléphone fit un bip, mais un autre genre de bip que plus tôt.

"Ne vous fatiguez pas, ils ne répondront pas."

En effet. Plus de batterie. Le téléphone fit un autre bip, avant d'afficher un petit bonhomme souriant qui disait "Au revoir !". Dans le genre irritant, je demande le téléphone mesquin qui se paie votre tête. La brune pensait l'avoir rechargé récemment pourtant... Elle mit cela sur le compte du fait que ces saletés de smartphones consomment de l'énergie à n'en plus finir.

"Et comme on dit dans la littérature, le combat cessa faute de combattant."

Dans la littérature ? Kya haussa un sourcil, la tension retombant presque instantanément. Le type ne semblait certes rien ressentir par rapport à ce qu'il venait de faire : aucun conflit, ou doute, ou autres. Ce n'était pas une agression qui a mal tourné. Quelqu'un qui se fait agresser et tue pour se défendre, elle en avait vus un paquet dans les affaires pénales qu'on lui assignait parfois... Ils sont souvent déstabilisés, n'arrivent pas à croire que c'est arrivé, sont aussi soulagés d'en être sortis. Non, lui, il parle de littérature. Et étrangement, ce comportement était rassurant pour la brune : quelqu'un de moralement douteux mais stable est pour elle moins dangereux que quelqu'un dont les actes sont dictés par la peur ou la panique.

- J'imagine qu'ils n'en avaient pas spécialement après votre sens de la philosophie. Vous avez de la chance que l'un d'eux ait eu un flingue, dans le cas contraire légalement parlant c'était considéré comme une défense démesurée par rapport à la menace et vous vous retrouviez instantanément à vivre dans un monde pourri. Dans le sens, encore plus que maintenant... lança-t-elle alors d'un ton relativement calme, la tension étant pour le coup véritablement retombée. Son cerveau avait pour le moment repris le contrôle, et était repassé dans une logique purement terre-à-terre.

- Si dieu il y a, ce que je ne saurais confirmer ou contredire, je pense qu'il a nettement mieux à faire. répondit simplement Kya, de sa voix grave teintée de ce léger accent étranger.

Le fait que le juste soit toujours récompensé, Kjerstin en doutait fortement : la majeure partie du temps ce sont les gentils qui finissent par perdre au final. Elle ne se considérait pas comme étant mauvaise ou maléfique, mais clairement en tout cas, elle n'agissait pas de façon gentille. Hors de question pour elle d'être le "dindon de la farce" comme le sont pour le coup très (trop ?) souvent les gens gentils. Ou justes, d'ailleurs.

Mais alors qu'il tendait son bras, la brune l'intercepta immédiatement, pour lui serrer la main et l'empêcher au passage de le tendre plus. Soit, elle tolérait cette scène pourtant écoeurante pour la plupart des gens, mais il y avait certaines limites malgré tout : elle ne comptait pas, s'il y avait un témoin, se faire apercevoir en train de marcher au bras d'un type qui venait de tuer une personne et en mutiler une autre, le tout en discutant de façon cordiale.

- Kjerstin Håtjärnen. Pour se servir elle-même et personne d'autre, si je puis dire. Quant à ma sécurité je vous remercie de vous en préoccuper, mais je ne pense pas être dans la moindre situation dangereuse... A moins bien entendu que je ne vole une bicyclette, ou des bonbons à l'épicerie, auquel cas vous seriez plus dangereux que la plupart des malfrats. conclut-elle avec un sourire en coin, et un ton quelque peu sarcastique.

Elle n'avait rien de spécial contre les justiciers, bien entendu, mais leur philosophie générale la... gênait. Car encore une fois, ils ne gagnaient rien à faire ce qu'ils faisaient, pour des risques pris immenses. Le risque de se faire attraper et juger, le risque de se faire des ennemis, de voir son image manipulée par la presse, le risque d'une vengeance, le tout pour avoir gagné... Rien de matériel en tout cas. Pas d'influence, pas d'argent, pas de pouvoir, pas de contrôle : rien. Et ça, clairement, Kya n'arrivait pas à le concevoir.

"Je ne tiens pas à ce qu'un si fabuleux mutant termine derrière les verrous, donc vous n'aurez pas mon téléphone."

Kjerstin haussa un sourcil, semblant pour le coup assez surprise par la réponse. Elle se doutait bien que son interlocuteur était loin d'être "clair" mais de là à penser qu'il défendrait un mutant tueur, c'était une autre histoire. La situation devenait de plus en plus incontrôlable, ce qui était pour le moins énervant pour quelqu'un qui avait l'habitude de contrôler un peu tout le monde selon ses caprices, besoins éventuels, et envies du jour. Si quiconque les avait vus, elle risquait complicité de meurtre, non-assistance à personne en danger, rien que ça. Plus, et c'était le plus problématique, une enquête à son sujet de la part des services de l'état spécialisés dans le domaine des mutants...

"Bon il suffit, vous m'avez suffisamment importunée, en plus de m'avoir fait raté une de mes cibles. Il est temps pour vous de connaître ma colère"

Il refusait donc de lui passer son téléphone, et clairement, il devenait hostile, même dangereux, ce qui quelque part commençait à être "contagieux" et énerver Kya à son tour, qui lança à l'homme face à elle, avant qu'il ne l'attaque :

- Mais qu'est-ce-qui vous prend, vous êtes ding...

Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase, surprise par un coup de la canne-épée en plein torse. L'arme n'avait pas été dégainée, mais ce type de choc, surtout à cette endroit, avant tendance à choquer et empêcher de respirer. La brune se retrouva donc jetée en arrière, vacillante... Du moins pour quelques secondes, car lorsqu'elle releva la tête, clairement quelque chose était différent. Sans l'être, pour autant...

Son regard semblait meurtrier, pourtant ses yeux étaient bien les mêmes. L'expression de son visage laissait voir ses dents, on aurait cru voir des crocs d'un animal carnivore, alors que pourtant elles n'avaient pas changé non plus. Ses mains étaient crispées, et on aurait pu croire voir des griffes, mais concrètement ses ongles étaient bien les mêmes qu'auparavant. En réalité, ce qui avait été nettement modifié, c'était son attitude, qui hurlait "Prédateur / Danger". D'une voix rauque étouffée par le choc au plexus, elle fixa le Poissard :

- C'est une voie sur laquelle vous ne voulez pas vous engager... Monsieur John, Patrick, Talbert... répondit-elle finalement, détachant chaque mot comme s'ils étaient des menaces.

Les changements imperceptibles de son interlocutrice avait échappé à John qui ne tarderait pas à le regretter.

"Ah oui et pourquoi pas, stupide créature ?"

John révélait enfin son vrai visage, il était venu pour tuer de l'humain et voilà que l'opportunité lui était donnée de faire passer ses crimes pour une attaque de voyou. Il restait néanmoins civiliser et laissa la jeune femme se relever et reprendre son souffle. Pour le moment il ignorait encore qu'il avait à faire à une mutante. Si elle le lui avait dit ou même si elle était à l'évidence une mutante, les choses auraient sans doute été différentes, mais John croyait toujours avoir à faire à une humaine qui de plus pouvait témoigner contre lui.

"Alors mademoiselle, une dernière volonté avant de rejoindre le créateur ?"

demanda t-il du même ton que l'on propose une tasse de thé.

*Une fois débarrassé de cette intruse il faudra que j'aille discuter avec l'hybride. Avoir un type comme ça à la Confrérie ne serait pas du luxe.*

Aux derniers mots de John, la brune afficha un air à la fois vicieux et méchant, fronçant les sourcils tout en affichant un sourire en coin, comme si visiblement l'éventualité qu'un cable lui tombe dessus ne l'effrayait pas spécialement. Était-ce du bluff ? Pour le coup, elle l'ignorait elle-même. La rage était déjà redescendue, en même temps que sa force exceptionnelle, quant à ses capacités de régénération elles commençaient déjà à diminuer progressivement.

- Le seul effet sera d'accentuer encore plus ma force et mes capacités de régénération, ni plus ni moins. La seule manière de me vaincre est de ne pas me provoquer ou de me chercher des problèmes...

Le fait qu'il parle d'une alliance était toutefois étonnant... Et le fait qu'il parle d'un don magnifique, et autres ? S'agissait-il d'un mutant, lui aussi ? Pour le coup, cela éveilla la curiosité de la brune, pas qu'un peu d'ailleurs. C'est ainsi qu'elle répondit avec un air particulièrement méfiant :

- Une alliance, avec qui, vous ? Vous seriez qui dans l'histoire, Laurel ? Vous voulez jouer au duo de super-mutants qui aident les créatures grotesques comme ce pitoyable hybride minable à commettre des agressions aussi stupides qu'aléatoires ? On est à l'ère de l'information, mon petit vieux... Carrément. Mon petit vieux. Ceux qui prendront le dessus ne seront pas les plus forts ou ceux avec les pouvoirs les plus destructeurs : ce sont ceux qui seront les plus malins et les plus aptes à saisir les opportunités. Votre tendance à tuer au hasard fait de vous un specimen qui ne survivra pas à l'évolution et sera jeté sur le côté de la route par le Darwinisme le plus élémentaire, chance ou non.

La grande brune finit par arrêter de se rapprocher, fixant le Poissard du regard, ne semblant même pas cligner des yeux, de son regard turquoise. Le but était plus de l'intimider qu'autre chose, car si elle pouvait repasser en "mode berserk", cela risquait de lui causer divers problèmes. Le faire était épuisant, en règle générale, après quelques heures, la régénération accentuée repassait à un stade normal, et elle se retrouvait totalement vidée, et affamée, par l'accélération de son métabolisme. Par conséquent, le faire deux fois de suite risquait d'avoir des effets plus que sérieux et la vider totalement de ses forces pendant une durée prolongée, ce qu'elle ne voulait pas voir arriver. Elle devrait clairement régler ça sans échange violent, et en l'occurrence, en bluffant quelque peu.

- Vous exécuter me garantit de ne pas avoir de problèmes. Qu'auriez-vous à offrir qui vale plus que ma petite tranquillité personnelle ?

Kya ne retint rien de ce que dit John, à vrai dire. Lorsqu'il évoqua le fait qu'il y avait une organisation, elle se focalisa dessus immédiatement. Elle y voyait une opportunité, de taille d'ailleurs, une énorme, immense opportunité. Vu le sens moral douteux (au mieux) du Poissard il semblait évident que ses amis aussi avaient un code moral plus que léger, et par conséquent, c'était peut-être une occasion de trouver un moyen de déclencher son pouvoir à volonté... Quelques recherches médicales, et une solution pourrait très certainement être trouvée d'une façon ou d'une autre, ou au moins une piste.

La brune VOULAIT cette information, et elle sortait trop récemment d'une crise de rage pour pouvoir demander des informations avec diplomatie. La pression au fond d'elle se remit à augmenter alors que l'énervement la regagnait, et alors qu'elle parlait, elle semblait de nouveau irradier de cette aura de prédateur :

- Quelle organisation ! Qui sont-ils, et où les trouve-t-on ? Parlez !

Elle se remit à s'approcher, visiblement sans intention d'avoir recours à la force pour l'instant, mais encore d'intimider.

- Votre nouveau ticket de sortie ce n'est pas un pouvoir qui casse les téléphones, c'est l'information... Je veux savoir ce que c'est que cette organisation !

Clairement, elle n'avait pas vraiment la moindre idée de ce que pouvait être vraiment le pouvoir de John !

Quinze heures demain chez elle... Son pouvoir se désactivait progressivement, et son air de prédateur, cette sorte d'aura explosive qui hurlait "danger", disparaissait, petit à petit, s'amenuisant. De fait, la douleur arrivait aussi. La blessure infligée par l'épée était cicatrisée totalement, les dégâts à ses mains aussi, en revanche l'épaule démise, un peu moins. Elle était revenue en place mais le fait qu'elle utilise son bras directement après pour fracasser l'hybride au sol avait créé un beau bleu et lui laisserait des courbatures pendant au moins 24 heures. C'était certes deux ou trois fois moins que la plupart des gens... Mais cela restait plus que désagréable.

Mais le fait que son pouvoir se désactive lui permettait de nouveau de réfléchir. Chez elle ? Jamais de la vie, hors de question qu'il sache où elle vit, d'autant qu'il avait bien l'air d'un de ces suprématistes mutants que Kya méprisait complètement. Ses amis pourraient lui être utile, mais elle ne se sentait pas vraiment "d'affinité" pour leur "cause".

- 15 heures demain chez vous, lança-t-elle en attrapant la carte. S'il y a anguille sous roche je vous massacre vous, vos amis et je rase tout le quartier.