Un, deux, trois...
Un, deux, trois...
Un, deux, trois...
Les boucles violâtres dansaient au gré de ses pas de monstre: des semelles de dix centimètres donnaient une grandeur normale à la jouvencelle. D'ailleurs, sa chevelure bouclée se édmarquait par une longueur terrifiante, car elle atteignait ses mollets ornés de noeuds en rubans saphir. Cette fois-ci, ses jupons noirs en forme de cloche se plissaient à ses genoux maigrichons. Des bas collants noirs nuisaient définitivement à la moindre perception de ses jambes ou de sa peau. Il en était ainsi pour le restant de ses habits luxueux. Une robe taille empire était constituée d'un satin très sombre, ainsi que de manches bouffantes en velours. Un énorme noeud papillon ceinturait sa taille, brodée d'arabesques argentés. Une pénombre à la silhouette humaine marchait sur un sentier de pierres blanches, contrastant par la même occasion ses habits à la pureté du sol. La jeune fille arborait un foulard sur le bas de son visage et le capuchon d'une collerette sur le haut, empêchant les regards impurs de l'affronter.
De ses manières élégantes, le tout paraissait d'un superflu absolu. Elle avançait toutefois sur le chemin, tenant une pelle dans sa main droite et un pot d'orchidées pourpres dans l'autre. Niana fixait les talus d'herbes rayonnants sous ses iris maudits, ensorcelés. Le profil à la fois soigné de grâce et d'une taille osseuse, l'ombre brodée de dentelles obscures de la jouvencelle dansait sur la terre. Bref, elle ressemblait à une poupée antique tombée dans un encrier noir. Elle cherchait un bout de terre convenable, tout en supportant un sac à main en forme de chauve-souris. Donc, la jouvencelle aperçut un arbre à sa droite - sans y voir le jeune homme installé. Néanmoins, une roche pleine de mousse émeraude avait décidé de surgir sous une de ses semelles à cet instant précis. Décidant de ramasser les racines rouges des fleurs, Niana ne sais plus quoi faire pour les orchidées. Ses doigts fins prirent le verre cassé pour l'empêcher de traîner au sol. Ses boucles soyeusement noires cascadèrent immédiatement sur la terre, auréolant son dos de flammes sauvages. Dans un soupir, elle se murmura:
- Le sol est rouge, les racines sont rouges... Comment...
Elle s'étouffa volontairement en se mordant puissamment la langue. La jouvencelle se mit à tâter le sol de ses gants noirs afin de retrouver les racines. Sa daltonie augmentait de jour en jour, rendant toute la nature verte du monde en une couleur sang opaque et impénétrable.